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Mazarinade n° C_4_3

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Laffemas, abbé Laurent de [?] [1649], L’ENFER BVRLESQVE, OV LE SIXIESME DE L’ENEIDE TRAVESTIE, ET DEDIÉE A MADAMOISELLE DE CHEVREVSE. Le tout accommodé à l’Histoire du Temps. , françaisRéférence RIM : M0_1216. Cote locale : C_4_3.



Que les Dieux, belles inhumaines,
Ne leurs dõnẽt point d’autres peines,
Ces Dieux connoissant le tourment
Que l’on endure en vous aimant.
* Là depuis que vous estes née,
Tousiours quelque ombre infortunée,
Déplorable effet de vos coups,
Phylis y vient parler de vous :
Là de vos vertus la legende
Sert d’entretien à cette bande,
Et ie ne m’en estonne plus,
Vous les auez tellement crus,
Qu’entre ces mal-heureux, les vostres
Sont desia plus forts que les autres.
Là Virgille, ce grand esprit,
Asseure, mais ie croy qu’il rit,
Qu’il se rencontre aussi des femmes,
Que l’amour brusle de ses flammes :
Il falloit que ce fut iadis,
Car à present si ie le dis,
Ce sera contre ma pensée,
Qu’on monstre vne femme blessée,
Bien loin d’estre morte d’amour,
Ie les tiens rares en ce iour ;
Ah ! que n’en ay ie recontrées,
I’en aurois peuplé ces contrées.
Phœdre s’y tient auec Procris,
Eriphile y fait de grands cris,
Auec Euadné la pudique,
Et Pasiphaé la lubrique :
Cadamic est de leur troupeau ;
Enée y monstre son museau,
Qui fut Monsieur, qui fut Madame,
Et termina ses iours en femme.
On y void la ruine Didon,
(Dieu veüille luy faire pardon)
Qui s’estoit fraischement occise,
Pour les beaux yeux du fils d’Anchise :
Elle sortit d’vne forest,
Où d’entrer Enée estoit prest,
Qui d’abord qu’il l’eust apperceuë,
Ou qu’il crût pouuoir l’auoir veuë,
Ainsi qu’vn premier iour du mois
On regardera quelquefois
Si l’on verra leuer la Lune,
(La comparaison est commune)
Et c’est pour prouuer seulement,
Qu’il ne le sçauroit bonnement :
Mais sa larmoyante prunelle,
Me fait croire que ce fut elle :
Dés aussi-tost qu’il l’auisa,
Le Troyen la galantisa.
Faut il Reine trop mal heureuse,
Que la Gazette la menteuse,
Et l’ignorant Courier François,
Ait dit vray la premiere fois ?
Vous vous estes assassinée,
Pour moy chetif & pauure Enée ?
Vous estes morte bel object,
Et pour vn si maigre suject ?
Helas ! quittant vostre riuage,
Les pleurs couloient sur mon visage :
Par tous les diables & les Dieux,
Nous coucherions encor tous deux.
Sans leur souueraine puissance,
Force majeure, & violence,
Qui me traisne encor à present,
Dans vn pays si mal plaisant.
Qui l’eut dit ? plus ie me regarde,
Moins ie m’en serois mis en garde,
Que pour vn Nicolas le Drû,
Vous eussiez le cœur si feru,
Ny que Reine fut forcenée,
Pour vn estranger tel qu’Enée.
Belle fugitiue alte-là,
Ne me refusez pas cela ;
Qui fuyez-vous belle farouche ?
Estes vous borgne, aueugle, ou louche ?
D’vn mot seulemẽt & c’est tout,
De vos regards d’vn petit bout,
Obligez moy belle maligne,
C’est pour iamais que ie vous guigne.
Auec ces termes de parler,
Mon galland croit la cajoler :
Mais ses yeux semblent sans paroles,
Ne promettre pas poires molles ;
Ne luy presentant que le dos,
Pour respondre à ces doux propos,
Elle tient en bas son optique,
D’vne façon melancholique,
Monstrant que tel croit estre bien,
Chez Madame, qui ne tient rien,