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Mazarinade n° A_5_12

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Provence, Pierre de [signé] [1649], LETTRE DE PIERRE DE PROVENCE A LA REYNE. En forme d’auis, sur ce qui s’est passé en son Pays. , françaisRéférence RIM : M0_2043. Cote locale : A_5_12.


l’esprit de son Maistre, il traça le Plan de sa tyrannie, & forma cét
inique dessein de le déthrôner, pour prendre sa place.
 
Pour cét effet il entreprit de faire tomber la Couronne de dessus
la teste de Vostre Majesté, que la naissance y a mise par tant de
droicts ; & vouloit faire vne persõne priuée de celle qui regit le plus
iustement le premier Sceptre de l’Vniuers. Il eust accomply son
dessein, si Vostre Majesté delaissée en ce temps-là de tout le monde,
par les artifices de ce captieux, n’eust esté secouruë du Ciel,
qui fit ce miracle visible, de nous donner des Princes de vostre
Sang, lors que nous n’en esperions plus.
Il auoit esloigné tous les Princes du Sang, par la prison, par
l’exil, ou par la mort ; & abbatoit toutes les grandes testes qui luy
faisoient de l’ombrage : cependant que ses harpyes tiroient iusques
à la derniere goutte, le sang de vos Peuples, par des moyens
si cruels, & si estonnans, que ces mal-heureux ne pouuoient trouuer
d’asyle pour se mettre à couuert, ny des voyes pour faire entendre
leurs iustes plaintes à leur Prince : d’autant que cét inhumain
l’ayant rendu inaccessible, il ne pouuoit receuoir aucune parole
qu’elle ne passast par son organe.
Et comme l’ambition n’a point de limites, ce n’estoit pas assez
pour luy, d’estre le Maistre des affaires : il falloit estre celuy du
Royaume, & se rendre redoutable à son Roy. Pour ce sujet, il
falloit auoir les Places fortes, les Charges importantes, & les
Gouuernemens considerables : Il ne faillit pas d’acquerir toutes
ces choses, ou par addresse, ou par l’argent qu’il auoit en abondance,
puis qu’il disposoit absolument des Finances.
Il osta tyranniquement la charge de Grand Maistre de l’Artillerie
à celuy qui la possedoit, pour la donner à vn des siens : Et
voulut reünir celle de Grand Admiral en sa seule personne ; comme
la plus importante, & la plus considerable de l’Estat, bien qu’elle
fut exercée par deux des plus grands Hommes du Royaume :
du costé du Leuant, par Monsieur le Duc de Guise, & du costé
du Ponant, par Monsieur de Montmorency.
Comme ses desseins estoient cognus de tout le monde, & qu’il
falloit estre infidele à son Prince, & ennemy de l’Estat, pour suiure
les sentimens déreglez de cét ambitieux, ces deux Seigneurs,
de qui la fidelité auoit tousiours parû auec tant d’éclat en toutes
les actions de leurs vies, s’opposerent genereusement à tous les
auantages qu’on leur proposoit pour les déposseder : Mais celuy