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Mazarinade n° A_3_72

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D. B. [signé] / Cyrano de Bergerac, Savinien de [?] [1649], LE GAZETTIER DES-INTERRESSÉ. , françaisRéférence RIM : M0_1466. Cote locale : A_3_72.


croire que la cruauté fasse vne des conditions desoints & des
Images de Dieu ? Que peut donc estre deuenuë cette vnion, ou
plustost cette vnité de la clemence des Souuerains, & de l’amour
des sujets ; Par quel exemple le Cardinal Mazarin a-t’il diuisé
deux choses qui n’en font qu’vne en telle rencontre ? Et par quel
secret a t’il entrepris de rendre des Roys glorieux par le malheur
de leurs peuples qui n’ont iamais eu pour eux que des obeïssances
& des benedictions publiques. Est-il tombé dans la maxime
furieuse de cet Empereur ; Qu’on me haïsse pourueu qu’on
me craigne ? A-t’il iugé qu’il estoit de nous, comme de ces bestes
farouches, qu’il est plus aise de combattre que d’appriuoiser ? Et
s’est-il persuadé qu’vn throsne ne pouuoit mieux estre affermy
que sur des sepulchres : Certes la bonté des Princes & l’amour
des peuples font deux choses inseparables ; ce sont ces deux caracteres
des Hebreux, dont l’vn est nommé par eux la gauche, ou
l’obeyssance par qui le Prince est redouté des estrangers, & la
nomment le glaiue de Dieu, & l’autre la droitte qui le fit aimer
à qui ces Hebreux mesmes ont donné le nom de Clemence, &
qu’ils appellent le Sceptre de Dieu.
 
Le Cardinal Mazarin a tout confondu, cependant sous le
nom du Prince ; il a prostitué son caractere & sa volonté absoluë
dans tous ses ouurages propres ; & comme s’il eut eu dessein de
rendre son regne odieux à tous les hommes, il l’a fait le tyran &
le meurtrier de ceux qui le demandent, comme leur Roy legitime,
& qui le reconnoissent comme leur veritable Pere.
Mais apres auoir manqué dés long-temps à ce que la Religion
à de plus sainct & de plus sacré, il n’a pas eu beaucoup de peine
à manquer à la Politique ; apres auoir mesprisé les commandemens
de Dieu, il luy a esté facile de violer les loix humaines, &
de rendre son ambition plus grande & plus forte que la coustume
& le droit des gens. Il n’a regardé l’Estat que de costé qu’il luy
pouuoit estre vtile, il n’a consideré la Iustice que par son bandeau,
& sans reflechir sur cette peinture Morale ; il s’est persuadé
qu’elle estoit aueugle comme la fortune. Dans cette opinion
criminelle, il n’a laissé au Roy que le titre ; & n’a laissé que l’ombre
de la Regence à la Reyne ; & pour des honorer les premieres
années du Fils & les dernieres années de la Mere ; il a voulu