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Mazarinade n° C_10_6

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B.,? [1649], LES SENTIMENS DV VRAY CITOYEN, SVR LA PAIX & vnion de la Ville. Par le Sieur B. , françaisRéférence RIM : M0_3657. Cote locale : C_10_6.


LES SENTIMENS DV VRAY CITOYEN,
sur la Paix & vnion de la Ville.

AMY Lecteur, qui que tu sois, ie suis Citoyen comme toy, & ne suis
pasmoins zelé au bien public, n’y moins interessé en la fortune particuliere
de cette auguste ville de Paris. C’est ce que ie te prie de croire,
afin que mon discours ne tesoit point suspect, & que nos volontez
puissent demeurer vnies comme nos interests.
Dans les desordres d’vn Estat ainsi que dans les maladies aiguës il y a des iours de
crise funestes ou salutaires, qui decident la cheute ou la restauration du sujet ; ces
iours quelques bons pronostics & quelque heureuse suite qu’ils puissent apporter,
ne laissent pas d’auoir de perilleux accez, & nous l’auons esprouué ces derniers
iours : Car alors que le Parlement & les Princes estoient occupez à ces importantes
deliberations, où il s’agissoit de resoudre la Paix ou la Guerre, & de diuiser le Royaume
en deux partis, qui peuuent le reduire en poudre. Il s’est veu grand nombre de seditieux
& de turbulents qui sans attendre l’issuë des Assemblées, & sans prendre
d’autre conseil que de leur aueugle fureur, ont commis mille indignitez à l’endroit
des Senateurs, sans respecter la personne des Princes, & des Generaux du Peuple ;
les vns, sans sçauoir ce qu’ils veulent, ny se qui leur est bon, demandent confusément
la Guerre, & crient aux armes ; les autres portent leurs mains insolentes sur
ces mesmes Senateurs, & tous ensemble n’ont pour but qu’vne horrible sedition ;
dont ils font vne dangereuse ouuerture ; en sorte qu’il s’en est peu fallu que cette
premiere ville du monde ne soit arriuée à son terme, & qu’elle n’ait trouué ses funerailles
dans les limites de sa propre grandeur.
Il ne seroit pas besoin de refuter les sentimens de ces mutins, ils portent leur propre
condamnation, puis qu’ils sont assez farouches & assez barbares pour resister à
la Paix, que tous les honnestes gens desirent & regardent auiourd’huy, comme le
souuerain bien de l’Estat, & le soulagement vniuersel de tous les Peuples ; Mais d’autant
que parmy les esprits, il y en a plus grand nombre de credules & de susceptibles
de toutes formes, qu’il n’y en a de veritablement sages. Il est tres à propos de preuenir
les dangers qui peuuent en arriuer, & de forcer en peu de mots ces mesmes mutins
à recognoistre & confesser leur tort.
Alors que la Guerre est estrangere, & que le Prince porte ses armes & les fait
subsister hors l’étenduë de son Empire. Que ses desseins soient iustes, ou qu’ils
soient ambitieux vne Guerre de cette nature est facile à porter les peuples par son
éloignement ne la ressentent pas. On ne leur parle que de victoires & de trophées ;
Et de mesme, que les Anciens Citoyens de Rome, ils ne voyent Bellonne cette farouche
& superbe diuinité, que sur vn Char de triomphe qui leur amene des captifs
& du butin, & qui leur promet des felicitez perdurables.
Mais quand il s’agist d’vne Guerre intestine dans vn Royaume desia consommé
par des persecutions de trente années, & dont tous les habitans aigris de leur