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Mazarinade n° A_2_3

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Anonyme [1649], APOLOGIE POVR MONSEIGNEVR LE CARDINAL MAZARIN, TIREE D'VNE CONFERENCE ENTRE SON EMINENCE ET Monsieur ****** homme de probité & excellent Casuiste. , françaisRéférence RIM : M0_127. Cote locale : A_2_3.


est le temperament ; & la misere generale, qui est l’estat de la maladie.
 
Le Card. Mais cette comparaison n’est pas parfaite, parce que le Prince a
des forces en main, par lesquelles il peut contraindre le corps politique, ce
que le Medecin ne peut pas faire au corps naturel.
Le Casuiste. Il est vray Monseigneur. Mais vous ne dites pas aussi que le
corps naturel tire par fois des secours non esperez de nature, qui repoussent
la maladie sans l’art & les remedes du Medecin, ce qui ne sçauroit arriuer
dans le corps Politique : parce que lors qu’vn peuple est pauure, il ne sçauroit
tirer de l’or de ses entrailles, & la force du Prince, comme vous disiez,
bien loing de soulager le mal, elle l’aggraue ?
Le Card. Comment se gouuernent le Turc & les Princes d’Italie, qui n’ont
que la force pour justice, & leur volonté pour raison.
Le Casuiste. Et croyez-vous Monseigneur, que Dieu n’ait pas plus de pitié
du peuple François qui l’adore, que des Mahometans & des Italiens, qui
attirent sa colere par leurs crimes contre nature ? Il supporte l’innocent &
chastie le coulpable.
Le Card. Mais vous auiez commencé vne comparaison que vous n’auez
pas poursuiuie.
Le Casuiste. Ie disois Monseigneur, que durant la minorité du Roy, vous
ne deuiez pas pousser l’authorité Royale plus loing que n’a iamais fait aucun
de nos Roys, qui n’ont pas creu regner en seureté, s’ils ne consultoient
les Loix & la Iustice : vous pouuiez bien demander tout ce qu’il vous plaisoit
au Parlement, mais non pas vous opiniastrer, & vser de violences dans
les refus qui estoient fondez sur la Iustice, & sur l’estat de la maladie & le
temperament du peuple, qui sont les deux autres parties de ma comparaison.
Le peuple estoit si malade, que c’estoit sa mort que de le saigner ; & pour
le temperament, vous sçauez que dés l’hyuer passé sa bile s’emeut vn peu,
& aux barricades, il n’est pas que vous ne vous souueniez, qu’il en ietta
beaucoup par vne crise de trois iours. Il me semble qu’vn bon Medecin n’eust
pas aigri cette humeur là, qu’il eust vn peu laissé faire nature, car les iours
estoient critiques aussi bien que les humeurs, ie diray mesme les esprits.
Le Card. Vous estes grand Medecin Monsieur. Mais vous auez cet aduantage
que la terre couure vos fautes & vos malades. Pleust à Dieu qu’il en
fust de mesme dans la Politique.
Le Casuiste. Il ne demeureroit gueres de monde en vie Monseigneur.
Mais c’est trop s’arrester sur vn point. Que diray-je à Messieurs du Parlement
pour les satisfaire sur l’affront qu’ils receurent lors qu’on leur refusa
audiance aux Gens du Roy, à leur premier voyage à saint Germain, qu’on les
fit demeurer exposez au sroid & au vent des heures entieres, & qu’on les renuoya
sans response fauorable & sans escorte ?
Le Card. Vous leur direz qu’alors i’estois trop en colere, & que pour ne
les point mal traitter, comme ie n’eusse pu m’empescher de faire, ie ne les
voulus pas voir.
Le Casuiste. Ils vous sont bien obligez Monseigneur, aussi vous en donnerent-ils
des effects de reconnoissance peu de temps apres, en vous declarant