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Mazarinade n° D_1_12

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Anonyme [1649], LE PROCEZ, L’ADIOVRNEMENT PERSONNEL, L’INTERROGATOIRE, ET L’ARREST DE MORT DV ROY D’ANGLETERRE. Auec ce qu’il dit & fit deux iours auant sa mort: Et la Harangue qu’il prononça sur l’échaffaut. Selon le rapport de plusieurs Gentils-hommes Anglois qui y assisterent, & meirent le tout sur des tabletes. Fidelement traduit de l’Anglois, par le sieur DE MARCYS, Interprete & Maistre pour la langue Françoise du Roy d’Angleterre regnant à present, & de son Altesse Royale Mgr le Duc d’York son Frere. , françaisRéférence RIM : M0_2888. Cote locale : D_1_12.


venus là pour receuoir ses dernieres commandements. Il passa par la Galerie
de Withehall pour aller à la chambre, où il auoit coustume de coucher
du temps de sa splendeur. On luy demanda s’il ne vouloit pas disner. Il repondit
que non ; parce dit-il, qu’il auoit receu la Communion vne heure
auparauant, & que cét antidote suffisoit pour repousser tout le venim de la
mort, qu’il auoit Dieu mercy le cœur fort bon. Ayant employé le temps
du disner à prier Dieu dans le Cabinet où il faisoit de tout temps ses prieres,
il passa auec sa garde ordinaire, & la Compagnie d’auparauant à trauers
la Cour de Withhall, qui estoit encore toute couuerte d’Infanterie. Ce
Prince, dont la constance triomphoit de tant d’ennemis, triomphoit encore
de la mort mesme, qui ne pouuoit effacer de son visage sacré l’image
viuante de Dieu pour y marquer la sienne ; il marchoit la teste leuée auec
vne Majesté pareille, que s’il eust esté dans quelque ceremonie importante.
Il estoit vestu d’vn satin noir & d’vne robbe de chambre de mesme
estoffe, & portoit le cordon bleu & l’Ordre de Saint Georges, autrement
dit de la lartiere. L’eschaffaut estoit tendu de noir, & il y auoit quatre
anneaus de fer aux quatre coins, vne hache d’vn costé & vn billot de
bois de l’autre. Le Prince y monta assez resolument, & ne donna iamais
aucune marque de douleur ou de despit. Il parut d’abord deux bourreaux
masquez, qu’on croit estre Fairfax & Cromm Well, parce qu’ils ne parurent
point de tout le iour, soit qu’ils se defiassent de toute autre personne,
ou qu’ils voulussent eux mesmes gouster ce detestable plaisir, de tremper
leurs mains sacrileges dans le sang Royal. Car vous sçaurez que les bourreaux
ordinaires, quoy qu’accoustumez au carnage, eurent horreur de
prester leurs mains à cet horrible parricide, & s’enfuirent ou se cacherent.
Toute l’armée Fairfaxienne estoit sous les armes, & les eschaffauts d’alentour
chargez de peuple, à qui l’on faisoit accroire que leur Roy n’en auroit
que la peur, & qu’il falloit vser de ces formalités pour satisfaire à la
Iustice. Le Roy iettant l’œil sur le billot, demanda au Colonel Haker
s’il n’estoit pas possible d’en auoir vn plus haut. Vous sçaurez qu’en Angleterre
on se sert d’vne hache pour couper la teste, en posant le col sur
vn billot de bois. En apres le Roy par la en ces termes, addressant particulierement
son discours au Colonel Thomlinson.
  HARANGVE DV ROY D’ANGLETERRE
sur l’eschaffaut.

IE me tairois, si ie ne craignois que mon silence ne fust reputé pour vn
adueu des crimes, dont i’ay esté perfidement accusé, Premierement
j’appelle Dieu à témoin, deuant le Tribunal duquel ie dois bien-tost
comparoistre, si i’ay iamais eu la pensée seulement de fouler mes peuples,