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Mazarinade n° C_6_59

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Anonyme [1649], LE POLITIQVE CHRESTIEN. DE S. GERMAIN. A LA REYNE. , françaisRéférence RIM : M0_2811. Cote locale : C_6_59.


les Apostres, pensa faire naufrage, parce que Iudas estoit dedans. Si
Ionas mit en peril le vaisseau où il estoit ; quoy qu’il y eut peut-estre
plusieurs innocens en la compagnie, que doit on iuger d’vn Royaume,
où il y a tant de criminels, & si peu d’innocens, où mesme la
Vertu a passé pour crime, & le crime pour Vertu ; où l’innocence
a esté en peril, cependant que le vice triomphoit ? Où les gens
de bien ont esté oprimez, cependant que les impies viuoient dans
l’éclat ? Où ceux qui ont voulu prendre le party de Dieu & de la Iustice,
comme les Presidens Barillon, De la Berchere & tant d’autres,
ont esté traittez comme coupables, & ennemis de l’Estat : Parce
qu’ils vouloient par principe de conscience accorder les interests
d’vn Roy Tres-Chrestien, auec ceux de Iesus-Christ, le salut du
Royaume auec celuy du Peuple, & la Religion auec la Police.
 
Il ne faut point dire, MADAME, que les crimes ont peut-estre
esté plus grands dans la France, qu’ils ne sont à present, & que
neantmoins elle s’est maintenuë. Les Amorheens estoient aussi
grands pecheurs du temps d’Abraham, que de celuy de Iosué ; Et
toutesfois ils ne perirent que sous Iosué, & non pas sous Abraham,
parce que leur iniquité n’arriua à son periode, que sous le temps de
ce grand Capitaine. Dieu considere vne Republique comme vn
corps cõposé de plusieurs parties : Il suffit que le peché des particuliers
continuë pour la faire perir, parce que le crime est aussi considerable
en sa quantité qu’en son espece. Le S. Esprit declara à ceux
de Gaza & de Damas, que leur suplice estoit attaché à vn certain
nõbre de pechez ; & que l’vn & l’autre se suiuroiẽt inseparablement.
Quand donc nos fautes seroient moindres que celles de nos ancestres,
ce qu’il ne faut pas entreprendre de iuger, c’est assez d’auoir
rẽply la quantité, que la Iustice de Dieu auoit marquée pour nostre
chastimẽt. Iesus-Christ menaça les Iuifs, qu’ils porteroiẽt la peine
de tous les homicides qu’auoient commis leurs Peres, depuis Abel
iusqu’à Zacharie, d’autant qu’ils les auoient continuez, & qu’imitans
leurs desordres, ils s’estoient rendus complices de leurs fautes.
Il ne faut point dire encore, qu’il y a des Estats plus coulpables
que celuy de France : Car s’ils ne sont punis presentement, ils le seront
en leur temps, quand la mesure sera comble. L’Angleterre l’a
esté, le Portugal, la Catalongne, Naples, la Candie, & tant d’autres
éprouuent maintenant, aussi bien que nous, qu’ils sont aussi loin de
leur guerison, que de leur amendement. En fin la France a comblé
ses iniquitez, & Dieu comble ses suplices. Si nous eussions entendu
la Politique du Ciel, nous aurions bien reconneu que ses verges