[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Rechercher dans les Mazarinades

Rechercher dans le corpus des Mazarinades
(829 occurrences trouvées)

Résultat de votre recherche de l'expression "thrône" dans le corpus des Mazarinades :


Occurrence 201. Anonyme. LA VERITÉ, PARLANTE AVEC liberté, sur... (1652) chez [s. n.] à Paris , 30 pages. Langue : français. Référence RIM : M0_3997 ; cote locale : B_17_27. le 2013-01-07 07:32:18.

& reduisit les affaires
du Roi Charles septiéme seul appellé par la Loy,
pour successeur à la Couronne, en si mauuais
estat, que si Dieu protecteur de nos Lys, n’eust
de sa propre main suscité Ieanne la Pucelle, conduit
ce vaillant & genereux Roi sur son thrône,
chassé ses ennemis, il estoit en termes de le perdre
entierement.   Doncques pour remedier à semblables accidens,
& qui succedent toutes les fois que nos
Rois sont mineurs, il est necessaire de faire la Loy
de la Regence. Cette Loy de la Regence sera donc la volonté
du Roi & la puissance du Roi, pendant le tẽps
de la Regence : lors qu’on l’establira, le Roi, les
Princes de son Sang, les Ducs & Pairs de sa Couronne,
son Conseil, ses parlemens, les Estats
assemblez auront toute puissance de dire contre
la Loy tout ce qu’ils voudront : Mais quand vne
fois elle sera bien establie, reduite en Edict, veriffiée
par les Parlements, approuuée & receuë
par les trois Ordres de l’Estat, il ne sera plus loisible
de rien dire à l’encontre, il n’y faudra plus
que de l’obeїssance. C’est ce que dit S. Augustin ;
Le Magistrat faisant la Loy, peut iuger de la Loy,
mais la Loy faite, il doit iuger selon la Loy. Par l’establissement de cette Loy de la Regence,
qui ne sera plus mise entre les mains des femmes Estrangeres, la France durant la Minorité
& le bas-aage de ses Rois, ne sera plus troublée
au sujet du Gouuernement, puis que la
Regence seroit entre les mains des Oncles des
Rois, ou en celle d’vn Prince du Sang le plus
proche. Les Grands du Royaume n’auront
plus sujet d’estre mescontent, ny de party à suiure
comme ils ont eu depuis l’année mil six cens
douze, durant la Minorité du deffunct Roy
Louis XIII. & celle du Roy d’apresent, durant
laquelle vn Italien Estranger a fait le Roy, disposé
du Gouuernement de l’Estat & manié les affaires
de la paix & de la guerre, il a mis le trouble
dans la Maison Royale par l’emprisonnement
des Princes du Sang qui s’est fait par ses Conseils,
& lesquels depuis leur deliurance, il a toûjours
poursuiuis auec des armées & les a faits
declarer criminels de leze-Majesté pour s’estre
mis en estat de se deffendre contre sa tyrannie.   Instruction que la France doit suiure, de ne
plus souffrir à l’aduenir aucun Estranger estre
admis aux charges publiques du Royaume contre
les Loix fondamentales & les Arrests des
Cours Souueraines, pour preuenir les accidens
sinistres qui s’en sont ensuiuis, & qui ont coûté
à la France la perte de tant de milliers d’hommes
& la consommation de ses finances, outre la misere & la ruine de tant de peuples : se mirant en
cela sur les Estats voisins plus Polytiques & aduisez
que nous : qui n’admettent point les
Estrangers aux charges publiques de leurs
Estats, trop ialoux de les faire occuper par les
naturels nés & nourris auec eux, & qui ont interest
à la conseruation de leur Republique & à
maintenir la paix parmy eux, qui est tousiours
troublée par les Estrangers, qui estans admis aux
Gouuernement & aux Charges, tout leur plus
grand soin n’est qu’à s’enrichir & faire leur maison,
auancer leur parenté aux despens du public,
comme nous l’auons assez recognu en
France.   Il faut donc conclurre que les Oncles des
Rois, les Princes du Sang, les Parlements & les
Estats Generaux, sont ceux qui doiuent auoir
le plus grand interest au Gouuernement de l’Estat,
puis que les Loix fondamentales du Royaume
l’ont ainsi ordonné, & qu’estans bien obseruées,
la France fleurira en paix, en grandeur
& en prosperité : ce qu’elle ne peut faire estant
gouuernée par des femmes Estrangeres & par
des Ministres Estrangers, qui ne pensent qu’à
faire leurs affaires pendant qu’ils demeurent
dans les Charges : ioint que par ce gouuernement
d’Estat estably par les Loix, on ne peut
pas apprehender le mescontentemẽt des Grands ny la guerre Ciuile, pour n’oser se prendre aux
Oncles de nos Rois ny aux Princes du Sang, qui
sont les veritables colonnes de l’Estat, & ausquels
il faut que toute la Noblesse & tout le peuple
obeїssent & portent respect, lors principalement
qu’ils gouuernent dans le bas-aage des
Rois.   Il n’est pas moins perilleux d’admettre vn
Estranger dans le Ministere des affaires d’vn grãd
Royaume ou d’vne Republique, que de permettre
& souffrir que le Sceptre Royal soit traduict
de la main d’vn Successeur legitime en celle d’vn
Estranger : nos Loix fondamentales deffendent
l’vn & l’autre : & si quelqu’vn de nos Rois préoccupé
de passion contre l’heritier presomptif
de la Couronne, venoit à porter son choix sur
quelque Grand, qui ne fust point destiné à cét
honneur par le droict de sa naissance, il n’y a
point de doute qu’il en seroit blasmé, & que ce
qu’il auroit fait seroit rebutté & condamné par
les Estats. Car il est tres-constant que si l’infraction des
Loix fondamentales est vn attentat dans les personnes
des Rois, il ne faut point douter que la
Souueraineté degenere en tyrannie, lors qu’elle
veut entreprendre d’ébranler vn de ces fondement
au dessous desquels son authorité n’est pas
moins rangée que celle de ses plus petits suiets. Tyran, dans sa veritable signification, veut
dire Monarque & Souuerain : C’est ainsi qu’Homere
nomme tous les Rois de son Illiade : c’est
ainsi que Virgile appelle son Enée dans son
Eneїde, & si la vraye signification de tyran
n’eust point esté corrompuë par la conduite brutale
de plusieurs Souuerains, nous appellerions
auiourd’huy les Rois tyrans, sans les offenser, &
par mesme raison, on donneroit à la Monarchie
le tiltre de tyrannie. Il n’y a que les Republiques qui ont ce mot
de tyran contre le sens de son explication naturelle,
dans la haine publique & comme l’auersion
qu’elles auoient pour le commandement
tyrannique (c’est à dire pour le commandement
Monarchique dans son vray sens) leur estoit plus
insupportable, elles nous ont fait épouser leurs
passions contre ce nom, quoi que dans vne autre
interpretation, qui nous fait croire par vne apprehension
panique, fondée sur la seule apparence
du mot de tyran, que les seuls mauuais
Souuerains sont les tyrans de leurs Estats. Dieu mercy nos Rois ne sont point tyrans ny
insupportables à leurs peuples : si la tyrannie a
produit des effets prodigieux en France, cela est
venu de la trop grande authorité qu’ils ont donnée
à leurs Ministres, & singulierement aux
Estrangers, qui ont tesmoigné leur tyrannie dans l’oppression des peuples, tel qu’a esté le
Cardinal Mazarin veritable tyran.   Il faut tenir pour chose stable, que la Regence
ou le Gouuernement de l’Estat, estant entre
les mains des Oncles de nos Rois, ou à leur deffaut
aux Princes du Sang, cela empeschera qu’aucuns
Estrangers, quoy que naturalisez, n’y
pourront paruenir : & n’apprehendera-t’on le
trouble dans le mescontentement des Grands,
qui ne prendront point les armes à moins que
d’auoir les Oncles de nos Rois ou les Princes du
Sang pour partie, & d’estre chastiez pour leurs
folles entreprises : ce qui feroit jouїr la France
d’vn profond repos & les peuples exempts d’estre
ruinez par les Guerres Ciuiles tousiours pernicieuses
à l’Estat. L’establissement d’vne Loy de la Regence ne
se peut faire que par vne Assemblée generale des
trois Ordres du Royaume, qu’on espere estre
conuoquée dans quelques mois, dans lesquels
son Altesse Royale & messieurs les Princes du
Sang y peuuent faire la proposition, la resoudre,
la conclurre, & establir cette Loy, qui sera comme
fondamentale, inébranlable & perpetuelle.

FIN.

=> Afficher la page
=> Afficher la notice


Occurrence 203. Ailly-Annery, Charles d'... . HARANGVE FAITE AV ROY, Par Messieurs les... (1652) chez Guillemot (veuve de Jean) à Paris , 8 pages. Langue : français. Signature au colophon. Voir aussi B_19_1. Référence RIM : M0_1593 ; cote locale : B_1_29. le 2012-10-29 06:26:54.

HARANGVE
FAITE AV ROY,
Par Messieurs les Deputez du Corps
de la Noblesse. Monsieur de Nossey portant la parole.

A PARIS,
De l’Imprimerie de la Vefue I. GVILLEMOT,
Imprimeuse ordinaire de son Altesse Royale, & de
la Ville, ruë des Marmouzets, proche
l’Eglise de la Magdelaine.

M. DC. LII. HARANGVE
FAITE AV ROY,
Par Messieurs les Deputez du Corps
de la Noblesse. Monsieur de Nossey portant la parole. SIRE, Novs exposerons à Vostre Majesté en peu de mots le
sujet de nostre deputation, les longs discours ne sont ny de saison ny bien
seans en la bouche d’vn Corps, dont le zele & la fidelité à vostre seruice, doit
se faire paroistre par des effets. C’est le dessein de tous ceux qui le composent, qui attendent auec impatience
esgale à leur deuoir les ordres de Vostre Majesté pour se rendre aupres
d’Elle. Ils auoient tousiours esperé que l’honneur qu’ils ont seuls dans l’Estat
de vous auoir pour Chef les garantiroit d’opression, & l’on peut dire qu’ils
sont accablez. Cette verité paroistra à Vostre Majesté, par le Cahier duquel ils la supplient
tres-humblement que lecture soit persentement faite, & de leur faire
justice. Ensuit le Cahier. SIRE, Il n’y a point de deuoir plus legitime & plus naturel que nostre fidelité
pour Vostre Majesté, non seulement parce que vous estes nostre Roy, mais
aussi parce que nous auons seuls des trois Ordres l’honneur de vous auoir
pour Chef. Cette verité nous persuadoit, qu’ayant iugé necessaire pour le remede
à nos besoins de nous assembler, nos intentions ne pouuoient estre renduës suspectes à Vostre Majesté, bien que nous n en eussions pas eu vne
expresse permission, & neantmoins ce malheur nous est arriué apres en auoir
successiuement obtenu plusieurs de bouche & par escrit.   La premiere de nos Assemblées tenuë à Paris en 1649. en fait foy, le projet
s’en fit dans le Cabinet de la Reyne lors Regente, apres son consentement,
& fut sollicitée par les personnes qui auoient l’honneur de l’approcher de
plus pres, Vostre Majesté l’approuua de l’aduis de la Reyne vostre Mere, ce
que nous sceusmes de la bouche de Messieurs les Mareschaux Destrée,
de Chombert, de l’Hospital & de Villeroy, qui furent enuoyez d’Elle vers
nous, auec pouuoir de nous en asseurer. La susdite Assemblée ne se separa qu’apres auoir obtenu Breuet de Vostre
Majesté signé de sa main & des quatre Secretaires d’Estat, portant seureté de
la promesse qui nous estoit faite, que nulle maison de Gentilhomme n’auroit
le rang de Prince, ny n’en pourroit prendre la qualité; & qu’apres auoir deputé
vers Vostre Majesté, en laquelle deputation Monsieur le Mareschal
Destrée portant la parole exposa nos plaintes, ausquelles & particulierement
aux excez des gens de guerre, la Reyne promit au nom de vostre Majesté vn
remede present, comme aussi à l’vsurpation injuste de la qualité de Gentil-homme,
& promit de rassembler en cas d’inexecution desdites promesses
données par escrit & de bouche. En vertu de quoy les mesmes oppressions ayant multiplié les souffrances
ausquelles le soulagement nous auoit esté promis, nous fusmes contraints de
nous assembler à Paris en 1651. où pour remedier à tant de desordres pressans,
il fut resolu de demander l’Vnion à Messieurs du Clergé, nous l’obtinmes
facilement de leur pieté pour la solicitation d’vn si juste dessein de concert
entre nos deux Ordres. Il fut arresté de demander à vostre Majesté par
l’entremise de monsieur le Duc d’Orleans, lors Lieutenant General de
l’Estat, & de Messieurs les Princes du Sang, la tenuë des Estats generaux que
Vostre Majesté eut la bonté de leur accorder par escrit signé de sa main, de
celle de la Reyne Regente, & des quatre Secretaires d’Estat, & de leur donner
aussi pouuoir de s’engager à nous de vostre part à ladite tenuë; ce qu’ils
firent par d’autres escrits signez de leurs mains, & qui portoient pouuoir de
nous donner en Vostre Nom permission expresse de nous rassembler, si l’ouuerture
ne s’en faisoit dans ce temps promis en ces termes. Et ce pour nous
joindre à Monsieur le Duc d’Orleans, & à Messieurs les Princes du Sang,
pour aduiser ensemblement à tout ce qui sera necessaire pour le bien & seruice
de Vostre Majesté, & à la tenuë desdits Estats, sans que nous en puissions
estre blasmez ny estre imputez à aucune faute ou manquement de ce que
nous deuons à Vostre Majesté, quelques ordres ou commandement mesme
que nous puissions lors en receuoir au contraire. Les temps de tenir les Estats ayans passe sans que l’ouuerture en aye esté
faite, le pillage, violences, & actions execrables des gens de guerre estant
arriué au point qu’vn chacun les sçait & les sent, nous aurions deu estre coupable des maux aduenir, si en ayant obtenu la promesse par la voye de nos
Assemblées. Nous le continuons pour en demander à vostre Majesté l’execution
auec tout le respect & la submission que nous luy deuons dans le besoin
que nous auons de restablir Vostre Authorité, & de la maintenir contre
les entreprises de vos Ennemis, ne connoissant que ce seul moyen efficace
pour y paruenir, tirer vos peuples de l’opression, & particulierement nous
qui ne pouuons estre affoiblis, ayans l’honneur d’estre vos membres, que
vous ne vous en ressentiez.   Le fondement de nos Assemblées ainsi establysans nous seruir de celuy que
nous fournissent les Ordonnances sur les reglemens des gens de guerre qui y
sont expresses. N’auons nous pas vn extréme sujet de douleur de voir que
les Lettres escrites par Vostre Majesté à Messieurs du Clergé & à Monsieur de
Liancourt, nous traitent comme si nous n’auions ny permission ny cause de
nous assembler, & de voir que nos Calomniateurs ont fait de tres-fortes impressions
sur Vostre Esprit; nous le connoissons par leurs tenues pleins; de
soupçons sur les particuliers de nostre Assemblée, de doute que les resolutions
ne soient contraires à vostre seruice, comme si la lascheté de l’abandonner
n’estoit pas nostre ruine. Nos franchises & nos immunitez y sont nommez
priuileges; & faisant l’honneur d’escrire à tous les Ordres du Royaume, au
Clergé presentement qui nous est vny, à celuy qui nous est inferieur, lors
que vous desirerez de luy quelque obeissance. Vous vous seruez à nestre seui
esgard de moyens pour nous informer de vostre volonté, & declarez dans les
susdites Lettre,que la bien-seance empesche que nous ne receuons de Vous
ce mesme honneur. Vostre Majesté y nomme nostre conduite vne faction,
vne cabale, vne entreprise directement contraire aux loix de Vostre Royau
me, laquelle blesse Vostre Authorité, renuerse l’ancien ordre de Vostre
Estat, & est preiudiciable à nostre Corps, qui seul ne peut subsister sans vous
estre vny Nos Assemblées, SIRE, ne peuuent estre condamnées; la resolution de
nos dernieres les iustifie suffisamment par l’Arresté de demander la Paix, &
d’employer nos soins & nos vies pour la faire conclurre à la satisfaction de
Vostre Majesté, & au bien du Public. Qui dans l’Estat, SIRE, a plus de droict que nous à faire cette demande,
puisque la guerre ne peut continuer qu’au prix de nostre sang, & que dans la
Paix nous deurions exercer les Charges, & faire les fonctions les plus releuées
Ce seroit Vostre seureté. SIRE, & Vostre grandeur, d’employer des
sujets Nobles incapables d’actions indignes de leur naissance. Vostre Majesté
s’en souuiendra, s’il luy plaist, pour remedier au déplaisir de Vostre Noblesse,
de n’estre pas employez dans Vostre seruice Elle vous demande encor cette
Paix tant desirée, s’offre d’y trauailler, & supplie tres-humblement Vostre
Majesté de luy vouloir donner part à la consommation d’vn bien si necessaire. Tous ces bons mouuemens, SIRE, ne nous ont pû empescher d’estre blasmez de Vostre Majesté, comme nous amusans à dresser des escrits & des
projets d’vnion nullement necessaire, au lieu d’estre en ce temps proche de
nostre Roy pour chasser les estrangers de son Estat, sans qu’aucun vous aye
fait entendre qu’il y eust autre moyen pour produire le seruice que Vostre
Majesté a tesmoigné desirer de nous dans les Assemblées generales; l’esprit
du Corps tout Noble, & partant tout Royal, y preside & se communique
à tous les particuliers, desquels en detail il y en peut auoir qui n’ont pas le
mesme sentiment. Ainsi jamais Vostre Majesté ne peut tirer de secours si
puissant, laissant agir chacun seul à seul, que lors qu’ils seront assemblez, la
preuue en est éuidente par la suite de nostre conduite; laquelle ayaut inspiré
nos resolutions dans toutes vos Prouinces, par la communication de nos Arrestez
& par nostre lettre Circulaire, Ils se sont trouuées en estat pour la
pluspart de monter à cheual, ou en volonté de trauailler pour s’y mettre
auec toute la promptitude possible. Ils nous en ont donné des asseurances en
la derniere tenuë à la Rocheguyon: mesme nous en auons esté sollicité par les
Deputez presens de diuers Bailliages selon leur sentiment, & pour obeïr aux
termes de vostre Lettre escrite à Monsieur de Liancourt; Nous resolûmes de
monter incessanmment à cheual pour courir sus à vos Ennemis, esloigner de
vostre Estat selon vos Ordres ce qui en trouble le repos, mourir plustost que
de souffrir qu’il demeure interrompu, & effacer de vostre Esprit par nos seruices,
les impressions que nos Calomniateurs y ont portées,   Si l’effet de ce mouuement genereux de nostre Corps a esté differé iusques
icy, ceux qui n’auoient pas nostre mesme dessein, & qu s’y sont opposez en
sont sans doute les coupables, & sont les veritables factieux & cabalistes;
qui ayant trauaillé parmy nous à ruiner la fin de nos bonnes intentions, auec
autant de malice, que vos vrays seruiteurs auoient de chaleur pour en solliciter
l’accomplissement, Ont semé de mesme temps par leurs Emissaires aupres
de Vostre Majesté tout ce qui l’a pû preuenir de soupçon contre nostre
fidelité, parce que ne voulant concourir auec nous au maintien de Vostre
Authorité, ils nous en vouloient empescher la gloire. La deference, SIRE, que nous auons eüe au sentiment de Monsieur de
Liancourt d en surseoir l’execution, qu’il n’a pas creu estre suiuant l’intention
presente de Vostre Majesté n’a rien diminué de l’impatience que nous auons
de marcher au premier Ordre que nous en receurons d’Elle; & par cette
marque de nostre obeïssance, nous esperons en obtenir le commandement. Alors l’on connoistra l’vtilité des Assemblées de Vostre Noblesse, & l’on
jugera qu’au lieu d’estre seules condamnées dans Vostre Royaume, elles deuroient
estre seules establies, parce que ce Corps estant vostre bras droit, il
ne peut manquer à la Royauté, & ne doit iamais aussi estre diuisé pour la
soustenir plus fortement, & que ceux qui les ont sollicitées, ont l’auantage
de nous auoir ouuert vn chemin que nous deuons tousiours suiure, puis que
rien ne peut plus solidement affermir Vostre Couronne. Ce qui nous donne la liberté de supplier tres-humblement Vostre Majesté de nous en continuer
la permission, & trouuer bon qu’elles s’establissent par des deputez de chaque
Bailliage.   L’vnion inseparable de nos interests auec les vostres, SIRE, nous donne
lieu de faire sçauoir à Vostre Majesté quelques-vns des points les plus pressans,
& qui vont à l’entiere ruine de nostre Ordre que vous estes obligez de
soustenir pour en estre soustenu seurement; Pour vous faire connoistre que
ce n’est pas sans sujet, que nous cherchons quelque soulagement à nos maux.
Et d’autant que les autres Ordres y sont interessez, nous desirons ardemment
que la distribution des graces que nous vous demandons & vostre protection,
ne soit pas bornée à nostre seule vtilité, & qu’elle coule abondamment
sur tous vos sujet. La reformation des excez que commettent les gens
de guerre des concussions de quelques Gouuerneurs des Ordres en blanc, est
vne des plus grande. A ces plaintes, SIRE, Nous demandons à Vostre Majesté vn remede
pressant, par la deffence expresse à tous gens de guerre & Gouuerneurs, de
commettre à l’auenir rien de semblable, & le permettre par escrit en forme
donné à toute la Noblesse de Vostre Royaume, de s’assembler en cas d’inexecution
de ce present Commandement, & se seruir des Communes pour y
faire obeïr. Nous faisons particuliere instance à Vostre Majesté de faire justice à toute
Vostre Noblesse, de l’outrage qu’elle a receuë à Chartres, dont l’impunité
depuis neuf mois passe aux Ennemis pour vn mespris de vostre part, & pour
vne insensibilité de la nostre, qui augmente de iour en iour leur insolence,
dont la consequence n’est pas moindre pour vostre authorité, que pour nostre
seureté. Les Commissions données pour les Tailles, dans lesquelles les Gentils-hommes
sont compris, & celle par lesquelles nostre seureté a esté abandonnée
aux Preuosts des Mareschaux sont encores tres-essentielles. Il ne nous est
pas moins necessaire de supplier tres-humblement Vostre Majesté, de reuoquer
toutes lettres de Noblesse accordées sans connoissance de cause, & par
argent, Et declarer nulle toutes possessions vsurpées ou achetées par plusieurs
particuliers, en vertu dequelles ils joüissent de nos franchises & immunitez,
au deshonneur de nostre Corps, & à la foule de Vostre Peuple. Ces dernieres
lezions moins violentes & toutesfois tres-importantes, peuuent attendre
leur remede dans les Estats Generaux qu’il vous a pleu nous indiquer à
Tours le premier Nouembre prochain: dont nous rendons nos tres-humbles
remerciemens à Vostre Majesté, & la supplions, que puis qu’elle a eu
la bonté de nous les accorder comme necessaires à la reformation des abus,
le pouuoir de nous assembler soit confirmé en forme, si l’ouuerture desdits
Estats n’est pas faite au jour indiqué, & de nommer dés à present six de chaque
Bailliage pour les solliciter par tous les moyens qu’ils jugeront à propos,
Afin que par la negligence de les requerir, plusieurs mal-intentionnes, ou qui en craignent les decisions n’essayent lors à persuader à Vostre Majesté
qu’ils ne sont pas desirez, & qu’à l’exemple present l’on ne noircisse dans
vostre estime ceux, qui sans autre interest que vostre seruice & du bien general
de la Monarchie le voudroient entreprendre.   Apres quoy, ayant tres-humblement supplié vostre Majesté de receuoir
fauorablement ce Discours, que nostre zele à vostre seruice a produit pour
nous justifier aupres d’Elle, luy rendre quelques-vnes de nos plaintes, luy
faire nos demandes, & pour luy prouuer tout ensemble nostre obeissance &
nostre soûmission, Nous la supplions encore tres-humblement de nous informer
de ses volontez par sa bouche, auant que de nous retirer de sa Cour;
afin de les communiquer à ceux qui nous ont deputé, & qui la desirent impatiemment. Il nous reste, SIRE, d’adjouster l’offre de nos personnes, de nos vies, &
de celles des Gentils-hommes de nos Bailliages, qui attendent les Ordres
de Vostre Majesté; afin qu’ils se puissent montrer dignes successeurs de ceux,
qui par la force de leurs armes ont mis la Couronne que vous portez, sur
la teste des Roys vos predecesseurs, & qui la conseruant au prix de leur sang
& de leur vie, ont merité le titre glorieux de bras droit de leur auhorité. Signé de l’ordre exprés de l’Assemblée. CHARLES D’AILLY-ANNERY.

=> Afficher la page
=> Afficher la notice


Occurrence 205. Anonyme. LA VOIX DE PEVPLE AV ROY, Pour la Paix... (1652) chez [s. n.] à Paris , 44 pages. Langue : français. Référence RIM : M0_4058 ; cote locale : B_16_4. le 2013-01-20 16:03:38.

heureux, & comme nous
n’esperons que malheurs, que miseres, & que gemissemens
quand vn autre fera vostre charge & commandera
en maistre, de mesme nous ne nous promettons que felicitez,
que plaisirs, & que satisfactions quand vous serez
seul assis dans le Thrône, & que la puissance Royale ne
sera point partagée : Non, SIRE, il ne faut point de
Compagnon ; Ce n’est pas estre Roy que d’auoir des Ministres
qui gouuernent vos Estats, leurs charges ne vont
qu’à prendre garde aux affaires ; vous les monstrer, s’ils
sont de consequence, prendre vostre volonté dessus, &
la faire executer : Non pas de commander de haute lutte,
de faire executer des Arrests sous le nom de vostre Majesté
sans vostre consentement, & de faire la Guerre à vos despens sans qu’il y aille de vostre querelle ; il ne leur reste
plus que de dire, CAR TEL EST MON BON PLAISIR,
pour estre Roy tout à fait, voyez s’il y a encor bien du
chemin à faire : il ne faut pas souffrir cette familiarité, la
dignité de Roy ne veut point estre partagée.   SIRE, vous voyez l’exemple d’vn de vos ancestres,
LOVIS XIII. vostre Pere, d’heureuse memoire, lequel
apres l’assassinat du Mareschal d’Ancre, fut tout ioyeux
d’auoir fait faire ce coup, & declara hautemẽt qu’il estoit
maintenant Roy, sans compagnon, & que personne ne
partageoit plus son authorité, & qu’il possedoit seul ce
que deux ne peuuent auoir. A quoy tient-il que vous
n’en disiez autant, il ne tient pas à vos Sujets, ils sont tous
prests d’executer ce commandement, pareil à celuy de
vostre deffunct Pere, pour faire trébucher ce Superbe, il
ne faut qu’vn coup hardy, & vne genereuse resolution
pour vous faire dire auec verité, Ie suis Roy, sans compagnon,
le Cardinal Mazarin est par terre, & cét indiscret
Ancelade s’est escrasé sous la ruine de ses pensées orgueilleuses. Louys XIII. Alors, SIRE, nous verrions vne tranquillité publique
s’espandre par tout vostre Royaume, tous les Princes
feront comme ils firent apres la mort du Mareschal
d’Ancre, tous se vinrent jetter entre les bras de vostre
deffunct Pere, & ceux-cy sont tous prests d’en faire le
semblable, puis qu’ils ne font rien que pour conseruer
vostre Estat, & pour vous retirer de la tyrannie d’vn
Estranger, & de tous ceux qui sont de son party, pour
venir faire vostre sejour dans vostre ville de Paris, qui est
la demeure des Roys, en suite les Peuples se conjouyront
ensemble à faire des feux de joyes & des réjouyssances
inouyes, parce qu’ils ne desirent que la Paix. Ouy, SIRE, c’est ce Ministre auaritieusement ambitieux qui se dit vostre Compagnon : C’est luy qui cache
& qui couure d’vn Chappeau rouge tant de vices, l’auarice,
l’ambition, la perfidie : Ah ! Dieux, i’ay honte de
dire les autres, il suffit que plusieurs Escriuains en ayent
souïllé leurs escrits & leurs pensées : pour moy i’ayme
mieux qu’il profite de ma honte, que son accusation tache
& profane ma plume, non ie ne veux pas faire vn dénombrement
de toutes ses fourberies & ses auarices, l’humilité
& la charité de plusieurs de la Cour qui ont esté
frustrez des recompenses qu’on leur auoit promis, & que
leur valeur & leur bonne conduite dans les occasions
auoient merité, m’en sçauroient mauuais gré. Il s’imagine
que sa teste peut bien porter vn Diadesme, puis qu’elle
soustient vn Chappeau : mais il ne voit pas que s’il a vn
Chappeau de Cardinal sur la teste, il en a des cordons plus
prés du col. Il se figure que sa pourpre plus teinte de sang
de vos Sujets & de honte de tous ces crimes que de la couleur
des autres, peut bien passer pour celle de vostre Majesté,
& qu’il luy est aysé de supporter vne fourrure d’hermines.
Vn Sceptre, à ce qu’il dit, n’est pas plus lourd que
la Crosse de plusieurs Eueschez & Abbayes qu’il a vsurpées.
Ses vertus certainement meritent bien d’estre assises
sur vn Thrône, & l’on a grand tort de déchirer la reputation
d’vn homme qui consacre son bien pour leuer des
trouppes qui s’expose à mille hazards pour secourir vostre
Majesté, & qui a pris tant de peine à mettre la France
dans vn estat où elle n’a plus rien à craindre, parce qu’elle
n’a plus rien à perdre.   Voila celuy, SIRE, qui a desolé toutes les Campagnes :
tant de Villages & de Bourgs remplis de bons seruiteurs
pour Vostre Majesté, ne sont plus que les departémens
des hyboux, des chathuans & des choüettes : ce
ne sont plus que des ruines de maisons, veufves, des logis sans maistres & à demy bruslez : & ce qui estoit vn lieu
fort frequenté, n’est plus qu’vne solitude & qu’vn desert.
Ce pauure Peuple s’en est fuit, non sans estre couru l’espée
dans les reins, comme vne beste sauuage, & poursuiuy
auec telle insolence, qu’il est contraint de quitter le matin
la demeure qu’il auoit choisy le soir, & comme si les
antres & les rochers eussent conspiré à sa ruine, il n’osoit
se fier vne seconde fois à la mesme retraitte : il craignoit
qu’vn vent par ses souspirs reïterez & amoureux ne témoigna
innocemment à ces persecuteurs qu’il y auoit
dans vne cauerne voisine des sujets de souspirer, il redoutoit
qu’vne fueille tombant de sa scituation naturelle, soit
par quelque mouuement violent, ou par sa vieillesse, ne
découurit à ces bourreaux par son murmure ignorant,
que c’est là la demeure de la misere & des malheurs, parce
que c’estoit l’hostellerie de ces infortunez, & ainsi estans
trahis, parce qui fut exempt du blasme de la trahison, il
ne se vit exposé aux cruautez & à la rage de ces furieux, &
de ces insolens : Et pour lors la faim enuieuse de ce que le
fer & la furie de ces demons en massacroit plus qu’elle,
faisoit comme les Chasseurs, qui vont voler les petits d’vne
Tygresse, & de peur qu’elle ne les suiuent, ils en laissent
vn en chemin, alors cette mere affligée suiuant à la
piste ces larrons, & voyant à sa rencontre vn de sa portée,
elle ce le charge pour lourd qu’il soit, & dans le temps
qu’elle le sauue, elle en perd trois ou quatre, & donne loisir
à ces rauisseurs de ce mettre à couuert de sa rage iustement
allumée : ainsi la faim voulant garantir quelques
pauures malheureux de la cruauté de vos Soldats qui les
poursuiuent, elle en laisse vn tout moribond en chemin
à demy estranglé, alors ces meurtriers se ruent sur ce miserable,
& pendant qu’ils le déchirent & le sacrifient à leur
rage, les autres se sauuent dans les spelonques, & dans les
antres des bestes sauuages, croyans trouuer plus d’humanité
auprés d’eux, qu’en la compagnie de ces furies d’Enfer :
Mais, helas ! que dis je, ils se sauuent, ie me trompe, &
s’ils prolongent leur vie de deux iours, ce n’est que pour
endurer d’auantage, & la perdre par la faim au milieu des
tourmens insupportables.   L’on ne vous dis pas, SIRE, toutes fois & quantes
l’on trouue les Campagnes jonchées de ces corps mourans,
& de ces squelettes, que le Card. Mazarin a descharné,
pour se faire gras, & se rendre potelu. Personne qui le
cognoisse ne me nira que son auarice n’ayt plus ruiné en
vn an de famille, depeuplé de Prouinces, desolé de Campagnes,
& remply les Villes de pauures & degueux, que
les Guerres ciuiles ne peuuent faire en deux lustres, & si
les tombeaux auoient quelque sentiment, ils crieroient
vengeance, & l’on verroit des ossemens tous décharnez,
des squelettes inanimées, & des corps moins rongez de
vers que de son auidité insatiable, courir par les ruës, &
demander iustice contre l’autheur de leur mort ? Ah,
combien verroit t’on de tombeaux vuides si Dieu commandoit
que tous ceux qui sont morts par ses intrigues
pernicieuses, & que son auarice a massacrez & iettez en
terre ressuscitassent : Ses coffres sont des tonneaux des Danaïdes,
où l’Ocean entier n’auroit pû les emplir : Vos Finances
ne sont pas capables d’assouuir cette passion enragée :
Les impots, les entrées, les tailles, & les subsides qu’on
arrache auec les larmes & la vie de vos Peuples, n’en occupent
qu’vne place fort mediocre. Tonneaux
des Danaides. Il faut aduoüer, SIRE, que son humeur est tellement
mecanique & auaritieuse, qu’il n’y en eut iamais, qu’elle
ne surpassa de beaucoup, quand ce seroit celle de Daire,
Roy des Perses, qui fit ouurir la tombe de Nitocris, Reine
de Babylone, parce qu’il y auoit cét escriteau : Si quelqu’vn a besoin d’argent, qu’il ouure ce tombeau, &
qu’il en prenne tant qu’il voudra, autrement qu’il s’en
donne de garde : mais il fut trompé, n’y trouuant qu’vne
carcasse, & ces mots : Si tu n’estoit insatiable & vilainement
auare, tu n’eusse pas ouuert le cercueil d’vn mort. Si
le Card. Mazarin n’eust esté vn vilain auaritieux, il n’eust
pas ouuert la Cabane de tant de Paysans, ou pour mieux
dire, la tombe, parce qu’ils estoient plus morts, que vifs,
afin d’arracher le morceau de la bouche, pour en tirer
quelque legere somme d’argent. Cette pensée me faict
dresser les cheueux à la teste, & ie crains qu’elle ne vous
fasse tressaillir d’horreur.   Daire Roy
des Perses.. Ie ne puis mieux attribuer à personne qu’à luy ce que
disoit autrefois Plutarque, qu’il y auoit des rats & de souris
dans des minieres d’où l’on tiroit l’or, qui ne mangeoient
que de ce métail, & l’on n’en pouuoit rien auoir,
sinon apres leur mort. L’on void que le Card. Mazarin
ressemble à ces animaux, qui ne viuent que de l’or, qu’ils
dérobent la nuict, & en cachette : Toutefois il leur est en
cela dont different, qu’il ne fait point de distinction entre
la nuict & le iour, & qu’il vole aussi-tost à la veuë de tout
le monde, qu’en cachette, & sans estre veu. Pendant sa
vie l’on ne peut rien auoir de luy, & mesme tant de vos
Soldats, à qui il est deub plusieurs monstres, qui n’en peuuent
receuoir aucune, que feront-ils, ils meurent de faim,
ils sont tous nuds, il faut bien se nourrir, il faut bien se couurir ;
allez piller le pauure Peuple, nourrissez vous à ses
despens, mais il en mourra beaucoup, il n’importe, pillez,
i’ayme bien mieux qu’il meure que de débourser de l’argent
Tels sont les idées du Card. Mazarin, ce chef-d’œuure
en liberalité. Plutarque. Ie m’imagine que Diogene voyoit dans sa pensée le
Card. Mazarin, lors qu’il disoit, parlant d’vn auaricieux, qu’il auroit mieux aymé estre son cheual, que son seruiteur.
Certes il auoit raison, l’on voit ses cheuaux gras, potelez,
& en bon poinct, pendant que ceux qui seruent à
le nourrir par leurs contributions, meurent de faim, & ne
sont que des squelettes viuantes. SIRE, la plus part de
vos Sujets meurent faute de nourriture, & par vn manquement
de toutes choses, pour auoir nourrir, & pour
engraisser vn Estranger, vn auare, & vne personne d’angereuse
à l’Estat.   Diogene. Quoy, le Cardinal Mazarin ne sçait il pas la cause de
l’emprisonnement de Caliphe, Roy de Perse, par Allau,
Roy des Tartares, dans la Tour mesme qu’il auoit rem
plie d’or, de joyaux, & de pierres precieuses, ne sçait il pas
que c’est pour n’auoir pas payé ses Soldats, lesquels se
voyans sans recompense & salaire de leurs trauaux passez,
le quitterent & l’abandonnerent entre les mains de son
ennemy. SIRE, nous pourions reuoir aujourd’huy cét
exemple representée par les troupes du Card. Mazarin,
si vostre authorité & le bonheur de paroistre vous rendre
seruice ne les retenoit, nous les verrions quitter le party
de cét auaricieux, & prendre celuy qui est veritablement
le vostre, parce qu’il est authorisé de la Iustice, & parce
qu’il est pour vous maintenir dans la dignité Royale, d’où
ce mecanique veut vous débusquer & deposseder. Caliphe
Roy de Perse,
emprisonné
par
Allau Roy
des Tartares. L’on condamnoit autrefois Caligula Empereur, de
ce qu’il auoit mis dace sur l’vrine ; mais celuy cy, pour
nourrir ses Soldats, met des imposts & des rançons sur la
vie des hommes. C’est vne chose estrange, que ce que
Dieu nous a donné, & sans qui nous ne pouuons pas estre,
qu’il faille que nous soyons contrains de le rachepter plusieurs
fois, & que l’on fasse payer l’entrée de l’air que nous
respirons. L’on sçait fort bien qu’il y a eu de ses gens qui
ont pris des hommes, lesquels n’ayant pas le moyen de rachepter leur vie, ils les ont tant chargez de coups, qu’ils
ont esté pris pour morts, tant leur insolence est cruelle &
outrageuse. Ils en ont matyrisé quelques vns, leur faisant
brusler & grisler la plante des pieds, pour arracher quelque
piece d’argent : Cela ce fait, SIRE, dans vostre Royaume,
le plus souuent à deux cens pas de Vostre Majesté :
L’on se massacre les vns les autres pour vne bouchée de
pain, & l’on s’arrache la vie, pour se la conseruer, n’est-ce
pas vn grand desordre : & qui peut voir toutes ces miseres
d’vn œil sec, d’vn visage gay, & d’vn cœur entre coupé
d’aucuns sanglots : les rochers s’ils auoient quelques
sentimens, en témoigneroient de la douleur, & ie crois
qu’il n’y a point de beste pour inhumaine soit elle, qui à
l’aspect de tout se tintamarre, ne se sente émeuë par vn instinct
naturel, & par vn ie ne sçay quoy, qu’on ne sçauroit
exprimer.   Caligula. Il faut aduoüer que c’est vn terrible & dangereux tyran
que l’auarice, que n’a point fait cette passion aueugle,
n’a t’elle pas fait trancher la teste à l’Empereur Maurice,
n’a t’elle pas excité toutes les seditions dans la Suisse du
temps de sainct Louys, n’a t’elle pas fait passer par le fil de
l’espée plusieurs Seigneurs de ce pays là, lesquels estoient
ébloüis de cette enragée. Ah ! que la France seroit heureuse
si l’auarice du Card. Mazarin le pouuoit traiter de
la sorte, il ne s’ourdiroit pas tant de meurtres, l’on ne trameroit
pas tant d’emprisonnemens, les pilleries n’inquieteroient
plus vostre. Peuple, les larcins ne le dépouïlleroient
point de tous ses biens, les saccagemens ne luy feroient
point d’horreur, & les Guerres ne troubleroient
pas la Paix de leurs familles, & la tranquillité de leurs ménages ?
N’est-ce pas elle qui forme les assassinats que l’on
met à prix entre nous, ne fait-t’elle pas corrompre &
rompre la foy, violer toute amitié, & trahir sa patrie ? Elle fait naistre les rebellions des Sujets contre leurs Princes,
Gouuerneurs & Magistrats ? Elle les pousse à faire des
seditions où l’authorité Royale se perd, où les Loix s’alterent,
où la Iustice se corrompt, & où les Estats se brisent
& s’enseuelissent sous leurs propres ruines.   L’Empereur
Maurice
eut la
teste tranchée. Seditions
dans la
Suisse, &
la cause. Iouian Pontan raconte vne jouiale Histoire, il dit
qu’vn Cardinal nommé Angelot, estoit tellement auaritieux,
qu’apres que les pallefreniers auoient donné l’auoine
à ses cheuaux, il descendoit par vn faux degré dans
son escurie, & leur en escroquoit la moitié, pour la reporter
dans ses greniers, dont il auoit les clefs sur luy. SIRE,
c’est vn grossier crayon de celle du Card. Mazarin, lequel
apres auoir distribué quelque petit lambeau de ses richesses
immenses, il le va reprendre par quelque fausse espece
de Iustice, & en gonfle ses coffres : & son auarice passe à
tel poinct, qu’il n’y a point de fourbe qu’il ne pratique,
pourueu qu’elle soit dorée, & pire qu’vn Orassus & qu’vn
Hortensius, il vendra à beaux deniers comptans l’authorité
que vostre Majesté luy a gratuitement accordée,
quoy que ce soit dans des causes injustes, n’importe, l’on
l’achepte, il suffit. De l’auarice
du Cardinal
Angelot. Cét illustre Capitaine des Thebains Epaminonde,
nous represente vne exemple digne d’estre suiuie de tous
ceux qui le suiuent & de ses successeurs : il enuoya vn pauure
de sa part à vn homme fort riche, & qui possedoit de
grands biens, & luy manda qu’il eust promptement à donner
six cens escus à ce malheureux. Le Bourgeois de la ville
vint vers luy pour en sçauoir la cause, alors ce genereux
& liberal Capitaine leur dit : Celuy cy est pauure pour
estre trop homme de bien, & celuy là est riche pour auoir
pillé la Republique, & puisé impunément dans ses coffres.
Si l’on demandoit pourquoy le Card. Mazarin est
riche, dira t’on que c’est qu’il est trop homme de bien, ie n’en sçay rien ; mais ie sçay fort bien que beaucoup diront,
c’est qu’il a tiré à pleines mains & à bras perdus l’argent
de vos Finances. Ah ! pleust à Dieu pour son bien,
pour le vostre, & pour le nostre, qu’il s’y fust aussi perdu
luy-mesme, la France en jetteroit moins de souspirs, elle
en pousseroit moins de sanglots, & les larmes de tristesse
qu’on voit couler aux yeux de tous les François, seroient
changées en celles d’allegresses ; la Guerre n’exerceroit
pas ses cruautez sur vos Prouinces, la faim & la disette ne
prendroient pas tant de personnes à la gorge, vostre pauure
Peuple ne languiroit pas tant, & toutes les miseres &
les calamitez n’accableroient pas tant de familles, & n’abbateroient
pas vne si grande quantité de ménages : nous
ne verrions pas des troubles s’espandre & couurir vostre
Royaume de nuages obscurs, & qui nous menacent d’vn
foudre qu’ils renferment, & qu’ils sont prés d’auorter :
nous voyons les Loix sans force & sans vigueur, la Religion
n’a pas ses venerations ordinaires, & l’authorité mesme
de vostre Majesté s’y affoiblit beaucoup ? quelle confusion ?
quel tintamarre ? & quel desordre : Si la Loy
des Romains estoit aussi inuiolablement gardée à Paris,
qu’elle estoit estroitement obseruée dans Rome, l’Estat
ne seroit pas dans ces conuulsions : s’il n’estoit pas permis
de faire des despences sans auoir pourueu aux necessitez
des pauures de son quartier, l’on n’entendroit pas tant de
cris, de gemissemens, & de plaintes : tant d’affamez ne
criroient plus apres la faim, laquelle les a condamnez à
perdre la vie, s’ils ne rappelloient deuant la charité des
bons, & la compassion de ceux qui ne sont pas tout à fait
inhumains. La faim ne feroit pas sortir tant de Soldats de
leurs postes, comme des loups rauissans, pour s’aller jetter
sur le tiers & sur le quart, dépouïller l’vn & piller l’autre ;
sortez pauures miserables de la maison du Cardinal, vous
ny trouuerez pas ce qu’on rencontroit dans le Palais de
Simon Athenien ; les pauures ny seront pas si bien receus,
les liberalitez ny sont point en vogue, & vn malheureux
y trouuera plustost la fin de sa vie, que dequoy ce la maintenir
& conseruer : A qui doit-on auoir recours, si ce n’est
à ceux qui peuuent faire du bien, & sont ceux là aujourd’huy
qui se moquent des miserables, il les font chasser
outrageusement hors de leurs Palais, & commandent aux
Gardes qui sont à leurs portes de donner cent coups d’halbarde
à ceux qui voudroient entrer pour leur demander
quelque charité, & pour leur faire souuenir qu’il y a des
miseres au monde : cela n’est t’il pas rude. Voila de vostre
Royaume, SIRE ; voila les calamitez de vostre Peuple,
ce sont là les malheurs lesquels arrachent des plaintes de la
bouche de vos infortunez Sujets, qui font couler les larmes
des yeux de tous les François, & qui tirent des sanglots
& des souspirs du cœur de tout le monde. Que tous
ceux qui sont à sa pension ne me parlent point auec passion,
& ne me rebattẽt point les oreilles de ses biens, qu’ils
veulent faire pour bien acquis, mais qui sont veritablement
mal vsurpez, personne n’ignore qu’il n’auoit pas
grande chose quand il est venu en France, il n’est pas si
impudent que de le nier, il ayme trop la verité, il l’aduoüera
luy mesme, & nous voyons toutefois qu’il possede
des thresors immenses, que dis je, nous le voyons, ie me
trompe, mais nous le sentons fort bien ? N’a-t’il pas presque
tous les reuenus de vostre Couronne, les Finances s’éuanouïssent
dans ses mains, & n’a t’il pas leué six à sept mil
hommes dans des pays estrangers, ne les a t’il pas amenez
dans la France à ses despens, cela ne se fait pas sans argent ;
d’où viennent donc ses richesses, de vostre pauure Peuple,
SIRE, qu’on a tondu & dépouïllé de tout son bien, ô la
cruauté, ô l’auarice insatiable & pernicieuse.   Liberalité
d’Epaminonde. Loy des
Romains. Liberalité
de Simon
Athenien. Platon auoit raison de dire, que lors qu’il y auoit des
gueux & des pauures dans vne Ville, c’estoient autant de
larrons, de boutefeux, & de sacrileges. Ne sont ce pas eux
qui soustiennent & renforcent les seditions, qui forment
les broüilleries, qui donnent fin aux mauuaises entreprises,
& qui font les assassinats & les meurtres. Mais qui les
a fait gueux, & qui peut estre la cause de tous les maux ;
c’est asseurément vn barbare, vn scyte, vne furie d’enfer,
l’on se trompe ; c’est vne European, quelle inhumanité ;
c’est vn Chrestien, quelle impieté ; c’est vn Cardinal, ô le
sacrilege ; celuy qui deuroit faire fleurir & renaistre la vertu,
c’est luy mesme qui l’abbat & la fanne ; & cét impie
Typhon, insupportable par ses ambitions déreglées, veut
assieger & bloquer l’vniuers de ses crimes & de ces imperfections. Platon. Son ambition, SIRE, n’est pas moins grande que
son auarice & sa temerité l’emporte à tel poinct, qu’elle le
pousse à se faire vostre Collegue & vostre Compagnon ;
il faut couper l’herbe sous le pied à cét insolent, & chastier
cette passion pas moins aueugle, que dangereuse, puis
qu’elle esteint aussi facilement les lumieres de la raison,
qu’elle est aisée à se laisser emporter à vn torrent de cruautez
& susceptible de trahisons, nous en voyons vne exemple
dans ce malheureux Felician, qu’Elizabeth Reine de
Hongrie auoit auance, & fait sa fortune, apres auoir esté
quelque temps de pair auec le Roy Charles, il ne peu supporter
sa presence, & sa compagnie luy estoit a charge. Il
fut dans sa chambre, & l’ayant rencontré seul auec la Reine,
il luy voulut descharger vn coup d’espée sur la teste.
Ah ! ce Parricide me fait horreur, mais la Reine le parant
de son bras, il coupa la main qui luy auoit distribué tant
de faueurs. C’est là, SIRE, où peut conduire cette passion
aueugle & enragée, voila de son fruict, voila ce qu’elle peut engrendrer ; pas vn de vos Sujets ne doute que l’esprit
du Card. Mazarin ne soit possedé de cette insolente & tyranique
ambition, l’on sçait ce qu’il dit quand il fit emprisonner
Monsieur le Prince de Condé, son ambition
luy fit tenir ce discours : Ie m’éleueray si haut, que ce sera
grand honneur à M. le Prince de me seruir vne autrefois.
Voyez dans quel transport cette passion l’auoit poussé : Il
n’y a point de condition si haute fust elle apres celle de vostre
Maison Royale, qui ne tint à grande gloire d’estre aymé,
ie ne dis pas mesme seruy de M. le Prince de Condé.
En quel lieu pourroit il donc monter, si ce n’est sur vostre
Thrône, pour estre si haut que M. le Prince reçoiue de
l’honneur en le seruant. Cét ambitieux n’a il pas tellement
partagé vostre authorité, que si par hazard vous cõmandiez
quelque chose à ses creatures contre son consentement,
ie doute s’ils vous obeiroient : n’est ce pas vne grande
ambition, que d’entreprendre vne guerre pour sa querelle
particuliere au milieu du Royaume : n’est ce pas vne
grande insolence d’entrer dans vos terres auec main armée,
& auec des Estrangers : ne s’est-il pas vanté cent fois
que sans luy toute la Monarchie Françoise seroit écroulée :
n’a il pas dit hautement qu’il se mettroit dans vn lieu
au dessus de la portée de Messieurs du Parlement, & d’où
il pourroit punir les Parisiens pour luy auoir esté contraire,
& trop fidelles à leur Roy. Que sçauons nous si son
ambitiõ n’en veut point à vostre Personne sacrée, n’ayant
prés de soy que des Estrangers, & des gens incognus. Vn
ancien Pere dit fort judicieusement, qu’il vaut mieux
estre à la compagnie d’vn chien connu, qu’en celle d’vn
homme que nous ne connoissons point. Ne rencontrons
nous pas en luy toutes les conditions de l’ambition, elle
veut tout sçauoir sans ne rien apprendre d’autruy ; luy ne
veut pas sçauoir les affaires du Royaume, sans les vouloir
apprendre des personnes experimentées : elle veut gouuerner
les hommes, n’estant que sujette. A present le C.
Mazarin ne le desire pas, car il le fait à nostre malheur : elle
veut auoir l’honneur de toutes choses, sans rien executer.
Ne veut il pas qu’on dise que c’est le Card. Mazarin
qui a pris Angers, qui a forcé Tours, Poitiers, Blois &
d’autres, & que c’est la crainte de son nom & sa valeur
qui l’a fait passer au milieu du Royaume auec quelques
troupes : elle veut comme ce Menetho, faire tout, tout
seul, mais vn Grec luy voyant tant faire de charges, prédit
apres auoir employé long temps à les compter, qu’il
auoit trouué autant de moyens pour chercher le repentir.
Ne voyons nous pas que le Card. Mazarin veut tout
faire, qu’il ne prend point d’autre conseil que celuy de sa
teste, il ne veut que son imagination pour inuenter, sa raison
pour le confirmer, & son iugement pour executer
auec conduite, c’est là le Triumuirat qui gouuerne la
France, voila ce qui tourne le gouuernail de ce Royaume,
il faudroit faire vn Semestre dans la Royauté, & vous
commanderez l’vn apres l’autre, encore ne sçay je si l’ambition
du Cardinal Mazarin pourroit souffrir de compagnon.
Hazardez, SIRE, faites-en la proposition, c’est
bien le moins que vous deuiez à tant d’obligations, & de
faueurs que vous luy auez, vous ne le pouuez recompenser
plus dignement, & selon ses merites, satisfaites encore
vne fois à son humeur ambitieuse. Il croit que c’est de
l’essence du Cardinalat d’estre ambitieux, parce que Ximenes
l’estoit sous Ferdinand, & si Leosthene & Demosthene
n’ont point hesité pour allumer & souffler le feu
de diuision sans se mettre en peine, qu’elle issuë pouuoit
auoir leur damnable entreprise, pourueu qu’il fissent voye
à leurs pernicieux desseins, & que leurs dangereuses resolutions
eussent leur effet & leur accomplissement, pourquoy
voulez-vous que le Cardinal Mazarin qui n’est pas
moins ambitieux que pouuoient estre ces Grecs, chanselle
& balance d’vn iugement humble, cõme doit auoir
vn Chrestien deuot, ces entreprises pas moins redoutables
au Peuple, que dommageables à vostre Majesté.   Ambition
de Felician. Menetho. Ximenes
Card. ambitieux. N’est-ce pas cette passion déreglée, qui bouleuerse &
enseuelit dans ses propres ruines les Republiques des Lacedemoniens
& des Atheniens, n’est ce pas elle qui a fait
haster le retour du Roy Agesilaus en Grece, lors qu’il
estoit empesché en Asie à cueillir des lauriers & des palmes
arrosées du sang des Barbares, & qui luy arracha les paroles
de la bouche : Grecs, vos ambitions vous ont plus procuré
de maux, que les Barbares n’ont eu dessein de vous en
faire. L’on en peut dire de mesme, SIRE, de celle du C.
Mazarin, laquelle nous a causé plus de maux, & remply la
France de miseres, que les armées du Païs Bas, que l’Aigle,
que les Leopards, ny que ne fera iamais le Lyon. Pour se
confirmer dans cette verité, il ne faut qu’ouurir les yeux,
faire quatre pas dans la Campagne, où vous ne verrez que
miserables, & que de vos Sujets qui meurent, n’ayant pas
de quoy se nourrir. L’ambition
renuerse la
Republique
des Lacedemoniens
& des Atheniens. Les trois parties du Monde ne peurent autrefois suffir
à l’ambition de Cesar & de Pompée, ny apres leur mort à
celle du Triumuirat d’Octauian, d’Anthoine & de Zepide.
Et comment ce Royaume qui n’est à comparaison de
l’Empire Romain qu’vne petite Prouince, pourroit embrasser
celle du Card. Mazarin, qui n’est pas moins grande
que celle de ces illustres esclaues de cette passion, puis
que toute deux ne tendoient qu’à regner. Ambition
de regner. Cela touche de prés vostre personne, SIRE, il y va
de son interest, & vostre Couronne en pourroit receuoir
quelque incommodité. Vn ancien Escriuain nous a prédit
que cette Monarchie ne tõberoit iamais qu’elle n’eust esté sappée & ébranlée par ce desir déreglé d’honneurs, de
richesses, & de ce qui passe sa portée. O que les Princes,
(dit il) chasseroient loin d’eux toutes les personnes ambitieuses,
s’ils estoient bien instruits du mal dont telles gens
sont capable & sont cause, estant impossible que leurs
conseils ne tendent qu’à leur auancement particulier aux
despens du public, & à la ruine de tout l’Estat. Ne cherchons
point autre part l’origine des guerres ciuilles, c’est-elle
qui engendre les querelles des Potentats, qui fait naistre
les dissentions entre les Princes, & qui donnent pied
aux reuoltes des Sujets contre leurs Gouuerneurs & leurs
Roys ; c’est-elle qui donne deux sens aux paroles du Card.
Mazarin, qui fait de ses sermens vn Ianus à double face, &
qui couure sa foy d’vne serge à deux enuers : Point de seureté
dans ses promesses, nulle franchise dans ses discours,
ses propos sont tousiours équiuoques, ses iuremens sont
menteurs, & il est tellement accoustumé à tromper, qu’il
se trompe quelquefois luy-mesme, se promettant plus
qu’il ne peut posseder.   SIRE, c’est vn Hydre bien dangereux que l’ambition,
il faut vn Hercule pour l’abbatre ; c’est vn Lyon redoutable,
mais il ne se trouue pas en tous lieux des Lysimachus
pour le terrasser : c’est vn Geant furieux, mais il faut
vn Dauid, & vn coup de fronde seul est capable de le faire
tomber, & mordre la poussiere. Il est besoin d’vne resolution
Romaine pour massacrer Spurius Melius, & pour
precipiter Marcus Manlius ? Quoy, celle des François, la
Nation la plus genereuse de tout le monde, ne pourra supplanter
l’ambition temeraire d’vn Ministre audacieux. SIRE, il y vade vostre interest, puis qu’vn préoccupé
de cette passion a pour sa deuise : L’on peut violer tout
droit pour regner. Il n’y a point de Thrône qu’il n’ébranle,
point de Sceptre qu’il ne brise, point de Couronne qu’il ne foule aux pieds, & point de Royaume qui soit exempt
de sa tyrannie & de son vsurpation. L’on peut mettre vn
frein à toutes les autres passions, mais à l’ambition, il n’y a
point de bride qui puisse l’arrester, il n’y a point de borne
qui puisse terminer son cours, & lors que vous la croyez
esteinte, elle se rallume & brusle plus que iamais : c’est vn
feu qui s’enseuelit & se cache sous les cendres, mais qui n’y
meurt pas, & il est d’autant plus à craindre, qu’il est couuert,
& qu’on ne le voit point. Il faut que le sujet perisse
pour effacer cette qualité dangereuse, & la mort seule peut
mettre le mot à l’insolence de cette aueugle ? Qu’elles
cruautez n’a-elle point mis en vsage dans vostre Royaume,
n’a-elle pas ruiné vos Prouinces, n’a-elle pas teint du
sang de vos Sujets les Campagnes, n’a elle pas fait de tout
vostre Royaume vn Theatre, où elle represente les Tragedies,
& n’a elle pas pris la teste du Card. Mazarin pour
la Salle où elle exerce & repete les pieces qu’elle doit joüer
à la veuë & au dommage de tous les François.   Deuise
d’un Ambitieux. Le Card. Mazarin a raison de projecter tels desseins ;
c’est vne belle charge que celle de Roy, elle merite bien
d’estre briguée, & ce n’est pas vn petit honneur de commander
dans vn Royaume si florissant, comme peut estre
celuy de France, il vaut bien la peine qu’on pourroit prendre
pour l’acquerir, & nous voyons qu’il n’a pas perdu
son temps depuis qu’il est en France, d’auoir desja obtenu
que rien ne s’agisse dans cét Estat, qu’il ne soit auparauant
authorisé de son nom. Il est à craindre, SIRE, qu’il n’imite
cét excellent peintre Apelles, lequel tirant le tableau
de la belle Compaspé, & à force de considerer ses attraits
& les charmes de ses yeux, en deuint si passionnément
amoureux, qu’il ne peut si bien cacher son amour, qu’Alexandre
ne découurit sa passion par l’esclat de sa flamme,
alors ce genereux Prince la luy donna, quoy qu’il la cherit beaucoup. Le Card. Mazarin à force d’auoir tiré le portrait
d’vn Roy, il trouue cette condition si charmante,
il ne se contente pas de ses copies, mais en veut auoir l’original.
Ce ne luy est pas assez de commander en Roy, il faut
n’auoir point de cõpagnon, le Ciel ne peut souffrir qu’vn
Soleil, ny vn Royaume qu’vn Roy, & veut vous faire
passer le Sceptre par deuant le nez, & vous supplanter, en
affoiblissant vos forces, en diminuant vostre authorité,
& en vsurpant tous les droicts & les priuileges d’vn Roy.
N’est-ce pas vous faire tort, que de vous donner vn Ministre
qui gouuerne de son plein pouuoir vos Estats, il semble
que vous soyez indigne de commander, & que vous
soyez dans l’incapacité, où peut croupir vne minorité
puerile & defectueuse, l’on sçait que dés vostre bas aage
vous estiez intelligent sans peine, iudicieux sans hesiter,
secret sans contrainte, discret sans ceremonie, que vostre
parole estoit nette & ferme, vostre silence parlant & animé,
que vous n’auiez point d’autre passion que pour la
gloire, ny de courage que pour la vertu, & pour maintenir
vos Estats ? Quoy toutes ces belles qualitez Royales
cederont-elles aux imperfections & déreglemens d’vn
particulier ambitieux ? quoy les vertus Françoises se sousmetteront
aux vices estrangers, & l’on verroit vostre Majesté
faire la Cour a vn de ses Sujets ; qui pourroit voir
l’ambition & les fourberies du Card. Mazarin appuyées
& soustenües de l’humilité & de la fidelité de vos bons
François, qui pourroit souffrir commander vn seruiteur,
obeïr vn Maistre, & voir sur vn Thrône celuy qui deuroit
estre sur vn eschaffaut.   Apelles. Belles qualitez. C’est le mesme, SIRE, de commander dans vn
Royaume à plein pouuoir, & d’en auoir la Couronne sur
la reste, & nous voyons qu’Edoüard Roy d’Angleterre ne
croyoit pas auoir remporté vne victoire, à moins qu’il ne fust en personne au combat, bien moins d’estre Roy, s’il
ne gouuernoit luy mesme son Royaume ; Ne permettez
pas qu’vn autre l’occupe, empiete sur vostre authorité,
regne pour vous, & diminuë vostre pouuoir en le partageant :
Encore si c’estoit quelque grand homme, dont la
valeur fut à redouter, dont la conduite fut à craindre, &
dont les belles qualitez fussent aymables : Mais au contraire,
ce n’est qu’vn auaritieux, vous le sçauez, son esprit
n’est gonflé que du vent d’ambition, & ses fourberies ont
plus abbatu de maisons de familles, & d’illustres personnes,
que ses promesses n’en auoient éleuez. Combien de
fois auoit il promis à V. Majesté d’arborer les oliuiers de la
Paix dans la France, ne s’estoit il pas venté d’y faire triompher
le bon ordre & la tranquillité, ne voyons nous pas le
contraire, au lieu de tous les plaisirs, & les delices qui deuoient
accompagner son ministere, nous n’entendons
que pleurs, que gemissemens, & au lieu d’apporter la corne
d’abondance, il n’a que celle d’vn paon & d’vn satyre,
& lors qu’elle deuroit seruir pour nostre entretien, elle ne
sert qu’à nous d’estruire, & à nous persecuter.   Fourberice. De qu’elles fourbes ne s’est il pas seruy enuers Monsieur
le Prince de Condé, apres luy auoir promis de faire
reconnoistre à vostre Majesté les bons seruices qu’il luy
auoit rendus aux guerres, & au siege de Paris, il luy a fait
mettre la main sur le colet, comme l’on feroit à vn scelerat,
ou à quelque criminel de leze Majesté. Il ne s’est pas
contenté de le prendre, & de luy faire cette affront, il la
fait conduire au Bois de Vincennes, & ainsi abusant de
vostre authorité Royale, il a osté le bras droit à la France,
il a priué vostre Thrône de son appuy, & il a perdu le
plus illustre fleuron de vostre Couronne afin de l’vsurper
auec moins d’éclat : Il faut passer outre, & son esprit pas
moins préoccupé d’ingratitude de s’asseurer d’vne personne laquelle auoit aueuglement pris son party, malgré les
peines & les trauaux de la guerre, & qui auoit cent fois
exposé sa vie pour conseruer la sienne, qu’enrichy de fourberies
ayant faussé sa foy, & trahy la parole qu’il auoit
donnée à Monsieur le Prince de l’asseurance de ses seruices,
& du pouuoir que vostre Majesté luy accorde ; son
esprit, dis je, esbouyt de toutes ses passions aueugles & dereglées
l’atraité en faquin, luy faisant saisir l’espée qu’il
auoit tirée tant de fois à sa consideration, il l’a fait enleuer
par des gens qui en ont fait leur risée par le chemin, & qui
ont agy comme auec vn particulier de mediocre condition,
& d’vne famille obscure & sans nom : Il n’a pas
voulu permettre qu’il fut seruy par ses officiers, croyant
pendant le temps les corrompres par l’esperance de quelques
promesses, par l’esclat de quelques dignitez, & par
le faux iour de l’or & de l’argent ! ô l’ingratitude inouye ?
mais que dis je ingratitude, ie me trompe, c’est vne marque
de la reconnoissance du Card. Mazarin, & puis que
Monsieur le Prince auoit asseuré sa vie, c’est bien le moins
qu’il s’asseure de la sienne. Courage Cardinal, continuez
vos fourberies, poussez vostre bidet, allez tousiours sur
le mesme pied, acheuez vos perfidies, vous les auez si bien
commencées, vous n’estes pas de meilleure condition que
le Cardinal d’Amiens, qui trompa bien Charles V. sur la
fin de son regne, ny que l’Euesque de Laon, dont les perfidies
l’ont contraint sous le mesme regne d’auoir recours
aux ennemis de l’Estat, & de confier son crime à vne fuitte
& à vne retraite encore plus criminelle.   Chanson. Fourbes. SIRE, si le Cardinal Mazarin est vn peu fourbe, ce
n’est pas grand chose, puis qu’il fait ce que disoit autrefois
Lysander Admiral des Lacedemoniẽs, qu’il falloit tromper
les enfans auec des osselets, & les hommes par des sermens.
Combien de fois n’auroit il pas promis que dans peu de temps il apporteroit la Paix generale, ce seroit plustost
la guerre generale ; qu’il ne puiseroit plus tant d’argent
dans vos Finances, il est en danger de n’en puiser
plus gueres, parce qu’il n’y en a presque plus ; & qu’il ne
pilleroit point vostre pauure Peuple, lequel est maintenant
contraint de gueuser, & de brouter l’herbe desprez
comme les bestes, ou de mourir de faim.   Iysander
fourbe. Ie crois que Penetus Lacedemonien auoit vn esprit
Prophetique, lors qu’il disoit, que les fourbes troubleroient
beaucoup de Prouinces, & seroient cause de plusieurs
meurtres & massacres. Il faut aduoüer, SIRE, que
c’est vn des vents qui forment la tempeste dont vostre
Thrône est esbranlé ; c’est vn esclair qui traisne apres soy
la foudre & les carreaux, lesquels ne tombent d’ordinaire
que sur les lieux les plus éminens & les plus éleuez ; ses
coups sont d’autant plus à craindre, qu’ils sont traistres, &
qu’ils frappent lors que l’on y songe le moins. Penetus. Il me souuient d’auoir veu l’effigie du Card. Mazarin
dans vn certain Moine nommé Sandabarenus, lequel
apres auoir gaigné l’oreille de l’Empereur Basile, & se
voyant paisible possesseur des bonnes graces de son maistre,
jetta son esprit enflé de vanité & bouffy d’orgueil,
dans la deffiance de la fidelité des principaux Officiers, &
les fit bannir ou emprisonner ; ayant commencé par la
ruine des seruiteurs, il voulut finir par celle de Leon fils de
Basile, il persuade à son pere de l’emprisonner sous couleur
qu’il vouloit attenter à sa personne, & qu’il auoit dessein
de luy oster sa Couronne par vn parricide, alors le
pere pas moins credule, que jaloux de son authorité, commande
qu’on l’encoffre entre quatre muraille. Que faire,
si quelqu’vn de ses amis parle au Roy en sa faueur, il est
disgracié ou banny, & son nom mesme n’oseroit estre
prononcé dans la Cour sans encourir l’indignation de Basile, & son innocence sera elle inconnuë à son pere, Dieu
la connoist, il suffit, & le Protecteur de l’innocence destruira
par de foibles moyens les desseins que les malicieux
croient auoir bien affermis, ne fit il pas changer de ramage
à vn oyseau que l’Empereur nourrissoit dans son cabinet,
& luy fit former ces paroles bien distinctement.
Ah ! pauure Leon, & les dit si souuent qu’il fit reconnoistre
à Bazile l’innocence de son fils, qu’il declara son successeur,
& les fourberies du Moine, qu’il fit chastier fort
rigoureusement.   Sandabarenus
fourbe. SIRE, vos principaux Officiers n’ont-ils pas esté
emprisonnez, Monsieur le Prince de Condé, M. de Conty,
M. de Longueville, M. de Beaufort, M. le Mareschal
de la Motthe, & M. le President Barillon. Il ne s’est pas
contẽté de ces illustres Personnes, il en veut au successeur
de Louys XIII. lequel il tient comme prisonnier, & par
ses pernicieux conseils il le veut chasser de son Thrône,
l’ayant, pour ainsi dire, des-ja bannit de la plus part de ses
Villes ; permettez à ma plume de prendre la place de cét
oyseau, & qu’elle forme les paroles, quoy qu’elle n’ayt
pas esté nourrie dans vostre cabinet, où elle pourroit auoir
esté témoin des dangereux aduis que le Card. Mazarin a
voulu donner, permettez qu’elle dise, Ah ! pauure Louys,
elle le peut dire en effet, & vos Finances sont reduites en
vn tel poinct, que l’on peut vous appeller pauure, mais ie
me trompe, vous estes riche, puis que vous auez le Card.
Mazarin ; seulement ie crains qu’il ne vous possede plus
que vous ne le possedez. SIRE, l’on ignore souuent, ou du moins l’on ne
veut pas songer où peut aller l’esprit d’vn Ministre auare,
ambitieux, & fourbe, elle ne s’imagine pas que sa perfidie
puisse égaler celle de Iean Gouuerneur de Croace, qui fit
emprisonner la Reine de Hongrie, se seroit vne grande ingratitude apres auoir receu tant de faueurs de la Reine
de racourcir sa liberté : mais Bardas n’a-il pas fait chasser
de la Cour Theodora mere de l’Empereur ; Michel fils
de Theophile, ne l’a-il pas dépouïllé de tous ses biens, &
ne l’a il pas fait mettre en prison auec ses filles, il en peut
arriuer autant à la Reine, & si le Card. Mazarin a esté ingrat
enuers beaucoup d’autres, il ne le sera pas moins enuers
elle. Certainement ie m’imagine que si le Card. Mazarin
se regardoit dans vn miroir, qu’il y verroit la vraye
figure d’vn Alexis Sabastocrator, l’vn des plus cruels &
des plus fourbes qui ayent iamais abusé du nom & de
l’authorité d’vn grand & bon Prince, lequel poursuiuit
auec tant de rage & de furie la pauure Marie, sœur d’A
lexis Comnenus, qu’il la contraignit pour mettre à couuert
sa vie, de se retirer dans le Temple de Sainte Sophie,
& d’en embrasser l’Autel ; ce n’est l’insolence que d’vn
ambitieux & dvn fourbe, & nous voyons que ce moderne
Sabastocrator abuse de vostre authorité, & que sa
faueur le rendra si importun, & enflera tellement son
esprit d’orgueil & d’ambition, qu’il n’y aura ny Temple,
ny Autel, ny les lieux les plus Saints & Sacrez

=> Afficher la page
=> Afficher la notice


Occurrence 207. Anonyme. CONTRE LES ENNEMIS DE LA CONFERENCE ET DE LA... (1649) chez [s. n.] à Paris , 10 pages. Langue : français. Référence RIM : M0_785 ; cote locale : C_7_75. le 2012-05-20 15:23:29.

CONTRE
LES
ENNEMIS
DE LA
CONFERENCE
ET
DE LA PAIX.

ALIDOR A ARISTE.

A PARIS,

M. DC. XLIX. CHER LECTEVR, Ayant remarqué que la faction
esloignoit tes sentimens de la Conference &
de la Paix, & que ses supposts animoient le
peuple à demander la guerre, qu’il deteste en
son cœur, agrée que ie te conduise à la verité,
en te détournant d’vne croyance trop legere : ces
articles faux & malicieux qui t’ont fait soupçonner
de la corruption dans tes Senateurs, ou
de l’infidelité dans tes ennemis, sont les truchemens
de ma discretion, Adieu, & sçache que
le vaisseau n’arriue que trop tost au port, pour
le criminel qu’il ameine. CONTRE LES ENNEMIS
de la Conference & de la Paix.

ALIDOR A ARISTE. Vous vous estonnez, cher Ariste,
que la paix desirée des peuples auec
ardeur, en ait esté receuë auec mespris,
ses mediateurs auec outrage,
& qu’on ait veu le rameau d’oliue,
que les necessitez de l’Estat deuoient ioindre à ses
Astres de bon-heur, foulé aux pieds indignement
comme vn instrument de mort, ou la marque d’vne
vengeance continuée. Quelle bizarrerie, dites-vous,
ces sages & pures Colombes que nous auions
laschées pour chercher vn port dans les menaces
d’vn naufrage, ne sont pas si tost de retour,
glorieuses de leur innocente conqueste, qu’on
prend la route qu’elles enseignent pour vn égarement
qui va conduire au precipice, & sans l’authorité
d’vn de nos braues Generaux, leur Palais
alloit deuenir leur tombeau, & leurs adorateurs
enseuelir ces Dieux au milieu de l’autel & dans l’appareil de leur triomphe : Desabusez-vous, Ariste,
de l’opinion que vous auez conceuë de la
legereté du peuple, n’esloignez pas la volonté de
ses bien-faicteurs, en le noircissant d’ingratitude :
n’adioustez point à sa misere des soupçons qui le
deshonorent, & sans imiter ces imprudens vindicatifs
qui mordent le traict, & laissent impunie
la main qui l’a lancé, recherchez la cause de cette
inconstance publique, dans l’opiniastreté d’vne
intelligence cachée.   Ne vous souuient il plus, Ariste, de ce que vos
yeux ne pûrent souffrir sans horreur, ce Samedy
qui vrayement precedoit vn iour de repos, puisque
le Senat y conclud vne Conference, qui ramenera
l’abondance dans nos ports, la tranquillité
dans nos familles, l’asseurance dans nos Campagnes,
le commerce dans le Royaume, & nostre
inuincible Monarque dans le Thrône de ses peres ;
Il me semble vous voir encore, & du geste & de
la voix, repousser auec vn zele merueilleux le discours
importun de ce seditieux Orateur, qui mal
persuadé de la qualité de vostre esprit, par la ieunesse
de vostre aage, pensoit entrainer vos sentimens
à son party, auec la mesme facilité que les
volontez de la canaille qu’il auoit amassée, comme
vn infame animal toutes les ordures d’vn
egoust, pour porter ses saletez dans le sein de la
Iustice, la diuision dans le Palais de la concorde,
& demander la guerre par ses truchemens desraisonnables, tandis que la raison dans son siege alloit
conclure pour la paix, par la bouche de nos
augustes Senateurs. Vous souhaittiez estre le
bourreau de cet Imposteur, & bien loin d’estimer
malicieux ce peuple abusé, vous plaigniez son aueuglement :
vous employastes mesme à la guerison
de ces volontaires mal-heureux cette eloquence
naturelle qui charme ceux qui vous écoutent ;
vous criastes hautement, que c’estoit les derniers
efforts d’vne faction mourante, qui redoubloit
ses forces dans les accez de sa foiblesse.   Le Samedy
iour auquel
on deuoit
conclure
vne Conference,
il y
auoit dans
les ruës des
harãgueurs
qui entrainoient
le
peuple au
Palais ; pour
rompre la
Conference
& demander
la guerre. Croyez, Ariste, que la paix estant yssuë de cette
sage Conference, elle n’a point d’autres ennemis
que ceux de sa mere ; que les obstacles de celle-cy
trauersent celle-là, & que le peuple n’y contribuë
qu’vne simplicité credule, qui reçoit les premieres
impressions qui flattent sa haine ou son amour. Vous m’aduouërez, que Paris n’a point d’habitant
qui ne fasse des vœux en son cœur pour terminer
vne guerre, où la deffaite est innocente & le
triomphe criminel ; où le fils se void en danger
d’estre le meurtrier ou la victime de son pere, &
qu’vn malade qui veut sa santé ne conuertit iamais
sa medecine en vn poison ; Ce n’est donc pas
le peuple, qui a supposé vne idole trompeuse à vne
veritable diuinité ; ie veux dire des conditions imaginaires,
pires que les actes de la guerre, aux
vrais articles de la paix, ny qui a semé ces bruits malicieux que nos Deputez auoient souffert de la
violence dans le Traité de nos libertez. Ah, Ariste,
que ces suppositions sont grossieres ! ce
grand corps, qui est la plus ferme colomne de l’Estat,
auroit-il de si foibles testes, & ces venerables
Senateurs qui ont mesprisé les promesses & les
menaces d’vn Tyran, sans autre secours que du
Ciel, seroient-ils capables de lascheté, quand ils
voyent la terre fremir sous le nombre des soldats
qui entreprennent leur querele : & puis ceux qui
ont auec eux traitté, ignorent-ils qu’vn accord
forcé, n’a de durée que le temps de sa violence, &
qu’vn captif qui promet tout à son corsaire parmy
les fers & les supplices, acquitte sa parole en quittant
ses chaisnes ? Aussi estoit-il de la prudence de
nos Sages, d’opposer au triomphe du mensonge,
la presence de la verité, & de ietter ces articles médisans
dãs les tenebres d’où ils sõt sortis, en mettãt
au iour les veritables, où le plus critique treuuera
peu de matiere à sa censure, beaucoup d’auantage
au Senat, & de honte à ses ennemis qui n’ont contenté
leur vengeance, que de la ruine de l’artisan
& de l’incendie de la cabane, semblables à ces
foibles impies, qui se vangent sur vn autel inanimé,
de la diuinité qui y preside. Quel dessein à
iamais eu le Parlement, que de reduire sa Majesté
à sa premiere Declaration, vingt mille hommes
armez de rage, de fer & de feu n’ont pû l’exempter
de cette loy : elle sousmet apres de vains efforts
sa teste couronnée à ce ioug iuste & honorable ;
le Tarif demeure entier parmy l’embrasement
& le carnage, & seruira de regle eternelle à nos
Monarques, de ce qu’ils doiuent esperer du consentement
des Parlements & de la pauureté des
peuples.   Les poincts qui semblent suspendre l’accomplissement
de nos desirs, ont plus d’ombre que de
corps, & ne grossissent que de l’orgueil de la cabale
& de la rage du factieux ; Examinons ce qui
peut empescher nostre Nauire de voguer malgré
l’addresse des Pilotes, & nous verrons que ce terrestre
& superbe vaisseau, qui porte vn monde sans
se mouuoir, n’est arresté que par des remores qui
exercent des forces de geant, dans des petitesses
d’auortons. Qui ne void d’abord la foiblesse du premier
obstacle, qui deffend l’assemblée des Chambres
pendant l’année 1649. Les Medecins consultent-ils
sur vn corps qui se porte bien, la reforme ne
suit-elle pas la deprauation, les Assemblées du
Parlement sont donc inutiles, tant que le gouuernement
de l’Estat sera conforme à la conduitte établie
par leur reglement ; de mesme qu’vne monstre
ne demande la main de son ouurier, que dans
la decadence de ses iustesses : que si la Reine altere
par vne infidelle contrauention, ce fameux
ouurage de la prudence, le Parlement n’aura plus
de foy pour le pariure, & reprendra dans ses Assemblées cette premiere fermeté, qui a regardé
les menaces sans effroy, & les recompenses sans
enuie.   Ces scrupuleux qui condamnent le prest, de
crainte d’approuuer l’vsure, n’ont de charité que
dans la bouche, ce beau feu purifie leurs levres
& ne penetre pas iusques à leur cœur. Les prests
ne sont odieux au peuple, que pour estre la source
des nouueaux subsides qui l’accablent, & des
fortunes precipitées que les Traitans éleuent sur
son debris ; ceux que le Parlement authorise dans
les articles de son Traité, sont dépoüillez de ces
deux dangereux effets : le Partisan y perd, ne retirant
que le denier douze des aduances qu’il emprunte
au denier dix, ou à vn plus grand interest,
& le peuple n’en reçoit point de nouuelles charges,
le Roy assuietissant par sa Declaration les
Impositions sur ses sujets, à la verification du Parlement
qui les reglera plutost aux necessitez de
son Estat, qu’à l’ambition de ses Ministres. Mais, Dieu ! quelle patience pourroit souffrir
vn nom execrable à la France, mis au rang des objets
de sa veneration, & la cause de ses mouuemens
parmy les autheurs de son repos, Mazarin
ce fameux criminel, signe la grace de ses Iuges,
ceux qui luy dressoient vn tombeau, sont les artisans
de son Thrône, & le barbare dont la seule
mort est ciuile, compose de nos vies à la veuë d’vn
million d’ennemis, qui reçoiuent la liberté de cette main qu’ils meditoient de charger d’opprobres,
& de chaisnes ; aussi chaque particulier
feroit de son foyer vn buscher public, pour executer
sur son nom ce qu’il ne peut sur sa personne, s’il
ne craignoit d’ennoblir ses cendres, par le mélange
d’vne matiere venerable : C’est sans doute,
dans cette preuoyance que le Cardinal a imité l’adresse
de ce Peintre, qui graua son nom sur son
ouurage, en vn endroit où on ne pouuoit l’effacer,
sans défigurer la Deesse que son tableau representoit :
Ie souhaitterois, Ariste, que son seing ne
deshonnora point le Traité, & que ce Comete
n’eust point paru parmy les Astres qui y brillent ;
mais quand vous considererez, que ce n’est pas
vne Capitulation, mais vn Accord, & qu’on traite
autrement auec vn ennemy deuant le combat
qu’apres la victoire ; Vous m’aduouërez qu’il est
hors de raison de vouloir obtenir ce qu’on ne
pourroit qu’arracher, & que le Cardinal estant
la derniere conqueste de nos armes, ne peut estre
le present fait à nos prieres : & puis son seing est
aussi foible sur le papier, qu’vn Lyon mort dans
sa cauerne, & est plutost l’ornement de son départ,
que l’augure de sa demeure. Laissons fuyr
auec ses guirlandes & ses couronnes, la victime
qui renuerseroit le lieu destiné à son sacrifice :
n’hazardons point nos Generaux pour la dépoüille
d’vn serpent, qui feroit luy-mesme ses obseques
de la desolation de nos Prouinces : qu’il aille en
des Isles écartées augmenter le nombre des barbares,
trainer son venin auec vn pompeux débris ;
le départ de ce disgracié est le retour de la
Fortune du Royaume ; Embrassons donc vne
Paix qui étouffera nostre ennemy, & nous obtiendra
de nostre Reine, ce que nos armes ne nous
venderoient que cherement : Voila mes sentimens,
cher Ariste, sur les Libelles qui rauissent
l’effet du Traitté, & la reputation des Deputez,
i’en estimeray tousiours la censure honorable,
si i’empesche la Pourpre de nos illustres Senateurs
de rougir autrement que de son éclat.   ALIDOR.

=> Afficher la page
=> Afficher la notice


1 2 3 4 5 6 7 8 9