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Mazarinade n° A_9_2

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Fortin, Pierre (sieur de La Hoguette) [1650], CATECHISME ROYAL. , françaisRéférence RIM : M0_653. Cote locale : A_9_2.



L. R. Pour éuiter cét inconuenient, n’ayons point plûtost de
Fauory.
L. G. Ie pense que c’est le meilleur. En effect, vn Fauory de peu
de merite fait honte à son Maistre ; vn Fauory d’vn merite éminent
luy fait ombrage ; l’esprit de l’homme estant si naturellement progressif,
qu’il ne s’en est iamais veu de si moderé qu’il n’ait fait de
son superieur son inferieur quand il a peu. Ie pense mesme que cét
Ange de lumiere qui ne demandoit que d’estre semblable, au Treshaut,
vouloit monter au dessus par ce degré, & que c’a esté la cause
de son precipice. Neantmoins parce que l’esprit se peut ennuyer de
la solitude de soy-mesme, au lieu d’vn Fauory ie serois d’auis que
V. M. fist quelques amis particuliers ; L’ame a quelquesfois ses obstructions
& ses defaillances ; il n’y a rien qui la soulage dauantage
ny qui luy donne vn plus grand calme, que la confiance d’vn amy
fidele, à qui nous pouuons en toute seureté faire part, de nos douleurs,
de nos ioyes, de nos craintes, de nos esperances, de nos
soings, de nos conseils, & generalement de tout ce qui nous blesse le
cœur. Choisissez-les de vótre aage, ou vn peu plus vieux. Car quoy
qu’vne grande difference d’aage ne rompe pas la societé, elle oste
neantmoins la priuauté, & parce qu’il y a des natures bien gluantes,
prenez-garde sur tout, qu’ils s’attachent plus à vous que vous à eux,
afin que la qualité de Maistre vous demeure auec celle d’amy. Vn
de vos predecesseurs qui a esté tres sage en vsoit ainsi.
L. R. Ie l’ay oüy dire, & qu’il ne se contentoit pas d’auoir des
amis, il auoit encor des amies. Estes-vous pas d’aduis aussi que ie
l’imite en cela ?
L. G. Quel conseil puis-je donner à V. M. touchant vne passion
où toute la nature est sujette ? & l’homme particulierement qui a
toujours quatre conduits ouuerts, à sçauoir, les deux yeux & les
deux aureilles, par où elle ne s’insinuë pas seulement dans le cœur,
mais elle y entre en triomphe, pour si peu de complaisance qu’on
puisse auoir pour elle. Neantmoins cette passion nous doit estre suspecte,
parce qu’elle est toujours vn sujet de Teatre, & qu’elle n’y
monte iamais que comme l’vne des Syrennes, ou comme l’vne des
Furies. Elle est toute hyperbolique, & ne peut mesme s’exprimer
qu’auec excez, pour monstrer qu’il n’y a rien en elle de moderé.
Enfin, SIRE, Le Sage nous apprend, qu’il est impossible d’aymer,
& d’estre sage.