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Mazarinade n° A_2_60

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Anonyme [1649], TROISIESME DIALOGVE ENTRE LE ROY DE BRONZE ET LA SAMARITAINE. Sur les affaires du temps present. , françaisRéférence RIM : M0_1090. Cote locale : A_2_60.


que moy s’empescher de rire de ce galimatias de nouuelles.
 
La Samaritaine.
C’en est vn en effet ; & des plus grotesques : car enfin à qui croyoit ce
bon Courier vendre ses coquilles ? Encore s’il fust venu de quelqu’vn de
ces lieux d’où ceux de Renaudot viennent ordinairement, il en auroit
pû d’autant plus raisonnablement esperer le debit, qu’il est aisé de mentir
à qui vient de loin : Mais ie suis bien trõpée, s’il n’est de ceux dont les
murailles de leur maison, ou tout au plus celles de leur Patrie, bornent
les plus longs voyages, & qui ne peuuent pas se vanter de venir de si loin,
que celuy qu’auoit aposté de vostre temps, grand Monarque, vne Dame
de la ligue, qui le faisoit sortir par vne porte de la Ville, pour y rentrer
par vne autre, & dont les courses ordinaires estoient de Paris d’où
il estoit party, à Paris mesme, où bien-tost apres on le voyoit arriuer.
Mais ie veux que celles du nostre soient plus longues, & qu’il vienne,
comme il dit, de S. Germain : qu’elle est la moitié des nouuelles qu’il
nous fait sçauoir ? Ce qui se passe à nos portes. Et l’autre ? Ce qui se fait
& ce qui se dit chez nous mesmes, dont il nous déguise la verité auec
autant d’impudence, que s’il ne pouuoit craindre vn démenty que de
nos Antipodes.
Henry.
C’est où l’on deuroit l’enuoyer porter les nouuelles de ce monde.
Mais laissons-là l’Extraordinaire, & ne parlons que de ce que nous pouuons
apprendre de nostre Ordinaire mesme. Dy-moy ; Qu’apprens-tu
de nouueau ?
Samaritaine.
Que puis ie apprendre icy, moy qui suis tousiours sedentaire plus
que vous, grand Monarque, qui passez les iours entiers & les nuicts
à cheual ?
Henry.
Quoy, ta Seruante fait-elle tant de tours en Ville, sans en rapporter
de quoy te diuertir ?
La Samaritaine.
Si Vostre Majesté veut prendre pour argent comptant tout ce que
ma seruante me debite, il n’est ny Courier François, ny Courier Estranger
qui reuienne plus chargé de nouuelles des voyages qu’il fait hors
de Paris, que ma coureuse de ceux qu’elle fait en Ville. On n’apprend
iamais rien des cent bouches de la renommée, qu’on ne puisse apprendre
aussi de la sienne : & si de tant de langues que la Fable donne à ce
monstre, vne seule auoit le caquet de celle de ma Gazette viuante, toutes
les autres luy seroient bien superfluës. Il n’est rien de si sot, rien de
si impertinent, rien de si difficile à croire, qu’elle ne reçoiue & ne donne
pour nouuelles triées sur le volet, & qui ne s’enfile aisément : Comme
elle croit tout, elle pretend aussi m’obliger à tout croire, comme texte