[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Affichage d'une occurrence en contexte

Mazarinade n° C_9_61

Image de la page

Anonyme [1649], LA RENCONTRE D’VN GASCON ET D’VN POITEVIN, LES FANFARONADES DE L’VN, ET LES CONTINVELLES RAILLERIES DE L’AVTRE. DIALOGVE. , françaisRéférence RIM : M0_3346. Cote locale : C_9_61.


de Roche-vlanche, adieu bostre charge.
 
Le Preuost. Miserable fourbe, me menaces-tu du Roy,
& tu es vn deserteur de ses armes, tu te nommes la Breche,
qui as vollé trente pistolles à vn Capitaine, & auant ce la
cinquante autres à vn Seigneur, dont tu estois palfrenier,
auile si tu es le Marquis de Roche-blanche ; i’ay ta conuiction
dans ma pochette.
Le Gas. O quelle imposture, s’écrie le Gascon, apres
qu’on l’eut desarmé & lié sans faire resistance. Ciel bangez
moy de cette iniure cependant retenez mon courage,
& faites que mon humilité soit plus forte que ma resistance ;
autrement i’enboyerois de mon regard seulement
ces gens au Royaume des omures. Ce qui m’afflige le plus
est que l’on donne vne mauuaise opinion de moy à vn
Gentil-homme à qui iou l’abois donné vonne.
Le Poit. Detrompes-toy la Bresche, i’ay dissimulé auec
toy, comme ie t’ay desia dit ; ie t’ay tousiours bien pris
pour ce que tu es, garde que tu n’ailles estre forçat de galere ;
c’est le moindre mal qu’on te puisse faire.
Le Gas. Ainsi la calomnie outrage mon innocence ! &
l’infamie obscuroist ma gloire ; Puis que le monde me tyranise
soyez mon Protecteur Dieu Venin, & amy des velles
ames comme la mienne, tandis mon vraue, s’addtessa-t’il
au Poiteuin, informez bous de ma prison pour iou
m’y bisiter. Ie bous donneray charge de receboir les deux
mille pistolles qui me sont deuës dans quatre iours par
lettre de change ; ce sera lors que bous sçaurez qui iou suis,
& ce que re baux ; de cét argent ie feray pendre lou Prebost,
& du reste ie m’en équiperay en homme de ma condition,
pour me reboutter en gloire, & triompher de mes
ennemis.
Cela fut cause que le Poiteuin, le Preuost, & les archers
se mirent à rire à gorge déployée. Tandis on laissa Alcidon
à la porte de la ville, & l’on emmena le miserable
fourbe la Bresche, qui se laissa conduire en prison aussi
doucement qu’vn agneau se laisse aller à la mort.

FIN.