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Mazarinade n° D_1_32

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Anonyme [1650], AVIS AV MARESCHAL DE TVRENNE, SVR SON TRAITÉ AVEC les Ennemis de l’Etat. , françaisRéférence RIM : M0_478. Cote locale : D_1_32.


& par la douleur, par la perte méme de quelque partie
qu’on donne volontiers pour sauuer le tout. »
 
Toutes ces paroles judicieuses font assez connoistre la repuguance
qui s’est trouuée quand il a falu resoudre l’emprisonnement
d’vn Prince du Sang, le plus auantagé qui soit
iamais sorty peut-estre des graces du Ciel & de la Nature, &
deuenu le plus agreable par ses peines & par ses victoires. On
peut dire qu’il en estoit de luy, comme du lyseron ou lys
champestre, que la Nature, dit Pline, esbauchoit dans les
premieres leçons de son enfance, & comme des dispositions
à se conduire à ces hauts ouurages de perfection, qu’elle nous
découure comme vn riche spectacle dans son sein : Tout ce
qu’elle traçoit en la personne des Guesclins, des Clissons, des
Gastons de Foix, des Bayards, & des Ducs d’Anjou, n’estoit
que les premieres couches, & le premier appareil de cette
jeune gloire du Prince de Condé, plus vigoureux & plus
ardant dans son Poinct du iour, que les autres dans leur Midy ;
plus plein & plus majestueux dans sa source, que les autres
dans leur cours. En quoy il faut certainement croire que
de si parfaites obligations n’auoient pas produit des ressentimens
vulgaires dans l’ame d’vn Roy, qui, selon Cassiodore,
ne peut iamais rendre ses gratifications suspectes, ny loüer
que sur des solides fondemens ; estant vray-semblable qu’vn
Souuerain ne voudroit pas s’humilier deuant sa creature, ny
gagner par des seruiles complaisances celuy sur lequel il a
dailleurs toute sorte de droict & d’authorité.
Rudimenta
naturæ Iiliũ
facere addiscentis.
Plin.
Nous nous souuenons tous de celuy qui fut autrefois appellé,
Les Passageres & infortunées amours du Peuple : c’estoit
le jeune Marcellus, qui ne montroit encor que des signes
& des presages d’vne future grandeur, & fut esteint
comme il commençoit à luire. Mais si Rome pleura si amerement
cette fois-là vne attente toute encore dans son bouton,
& estima auoir perdu ce qu’elle n’auoit pas ; ne seroit-ce
point vne honte à nous, que des bienfaits receus trouuassent
moins de reconnoissance que des bienfaits attendus ; que
nous fissions moins de cas d’vne vraye & réelle possession,
qu’on n’a estimé des imaginations & des desirs ; que Rome
eut admiré les semences & les fleurs d’vne inclination portée
au bien, & que la France fut sans ressentiment du fruict qu’elle