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Mazarinade n° C_4_3

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Laffemas, abbé Laurent de [?] [1649], L’ENFER BVRLESQVE, OV LE SIXIESME DE L’ENEIDE TRAVESTIE, ET DEDIÉE A MADAMOISELLE DE CHEVREVSE. Le tout accommodé à l’Histoire du Temps. , françaisRéférence RIM : M0_1216. Cote locale : C_4_3.



Vous autez de rudes secousses,
Tousiours le malheur à vos trousses,
Harò sur vous, & tout de bon,
Esperez-vous fléchir Iunon ?
Ie vous vois gueux en cette guerre,
Prest de donner du nez en terre,
Mandier auiourd’huy du pain,
Et du secours le lendemain,
Que conduira la Bas......
Vos gens tourneront le derriere.
Faim, peste, soif, fer, pluye & feu,
Vous sont acquis, quel ieu Mathieu ?
Et le pis est que vostre peine
Naistra d’vne seconde Heleine,
Ne vous amusez pas pourtant,
Messire Enée à pleurer tant,
En tout cas faites bonne mine,
Que vostre grand cœur se raffine,
A mesure que le danger
S’efforcera de le changer.
Quelques trouppes viendrõt en lesse,
Et mesme vn Parlement de Grece.
Qui destruisit vostre Ilion,
Demandera la ionction :
Cette vnion inopinée,
Vous sauuera Monsieur Enée.
 
 
Ainsi l’Oracle ce dit-on,
Aux Troyens parloit bas Breton,
Et meslant au vray quelque doute,
Faisoit que nul n’y voyoit goutte.
La Diablesse dans son caucau,
Recommençoit tout de plus beau,
Et sans Apollon qui l’arreste,
Elle alloit faire encore la beste ;
Enfin son courroux appaisé,
Et son visage composé,
Inuitent le bon fils d’Anchise,
A luy declarer sans feintise,
Ce qu’il roulloit en son esprit,
Voicy ie croy comme il s’y prit.
Il ne manque plus à mes peines,
Que d’auoir les fiévres quartaines,
Mais si ce sont là tous mes coups,
I’en ay plus deuiné que vous.
Ie ne desire qu’vne chose,
Que dés long-temps ie me propose
Et que ie demande à genoux,
C’est que puis qu’õ va par chez vous,
Ou si par routtes effroyables,
On peut aller à tous les Diables,
Que i’aille embrasser mes parents,
Qui tiennent là les premiers rangs :
Rendre visite au pere Anchise,
Et luy donner neufue chemise,
Car i’ay peur en ces Pays bas.
Que les morts ne sauonnent pas.
Ie l’ay porté sur cette espaule,
Le bon Anchise, comme vn drolle,
Malgré les traits & les traits & les cailloux,
Qui pleuuoient à verse sur nous,
Et c’estoit bien autre incendie,
Que du tripot à comedie.
Il vous dira le bon vieillard,
Qu’il fut tousiours plus gras que lard,
(Dieux il estoit de bonne paste)
Car nous allions tant à la haste,
Qu’il n’auoit œufs frais en chemin,
Ny boüillon, ny parfois du pain.
C’est luy qui m’a dit Chose, Enée,
Va voir la Sybille Cumée :
Or douter de vostre pouuoir,
Vrayment il me feroit beau voir,
Ne sçait on pas que Dame Hecate,
De qui le nom par tout éclatte,
Vous a donné les clefs du bois,
Dont les morts se chauffẽt les doigts,
Et son bureau mis au passage,
De l’Enfer où d’aller i’enrage,
Orphée au dernier carnaual,
Aux damnez a donné le bal,
Il en a pû tirer sa femme,
Et son corps tenant à son ame,
A malgré Charon le chenu,
Passé la barque & reuenu.
Pensez-vous qu’à faux ie le die,
I’estois à cette Comedie,
Où i’entré par vn grand bon-heur,
Car sans estre de la faueur,
On ne laissoit passer personne,
Et moy-mesme ie m’en estonne,

* Sinon qu’on sceut que les Troyens,
Seroient vn iour Italiens.