[retour à un affichage normal]

Accueil > recherche > Affichage d'une occurrence en contexte

Mazarinade n° B_12_45

Image de la page

N. [signé] [1652], ADVIS IMPORTANT D’VN ABBÉ AV CARDINAL MAZARIN, SVR LE SVIET DE SA SORTIE hors du Royaume de France. , françaisRéférence RIM : M0_516. Cote locale : B_12_45.


à son esprit, les trauaux à son corps, les Villes
& les Prouinces à son Estat, l’or & l’argent à son épargne,
& le sang à ses subiets. Les Medecins auoient ordonné à
vn grand Empereur, qui depuis fut le premier Chrestien
des Empereurs, vn bain de sang humain, qui estoit l’vnique
remede d’vne maladie dont il estoit trauaillé ? A Dieu
ne plaise, respondit ce grand Empereur, que i’achepte ma
santé si cherement, & au prix du sang de tant d’innocens
& des larmes de tant de meres. Lors que vous cherchez,
MONSEIGNEVR, vostre conseruation dans la guerre,
c’est la vouloir achepter bien cherement, puis qu’elle doit
couster le sang de tant d’hommes, les larmes de tant de
veufues & orphelins, & la desolation de tout le Royaume.
Ces raisons naturelles me donnent vn facile passage
aux Politiques, que ie vous supplie MONSEIGNEVR de
peser.
 
Vous estes entré dans le Ministere de cét Estat en vn
temps auquel il estoit tres-florissant ; & vous-vous exposez
tous les iours au danger & à la honte de le faire perir
par vne constance affectée & hors de saison.
Cette Ville sans égale qui fait le plus beau fleuron de la
Couronne du Roy, perd tous les iours cette splendeur
qui la rend admirable à toute l’Europe, & au lieu qu’elle
enuoyoit la guerre bien loin sur les terres estrangeres, elle
est deuenuë le theatre de la guerre & frontiere à ses habitans.
Entrez, MONSEIGNEVR, dans cette pensée, & ne
doutez pas que vous ne fassiez à vostre vie vne honteuse
tache, & ne donniez à l’Histoire sujet de vous reprocher
que la continuation de vostre sejour en France, luy a
produit vn tout autre effet que celuy que vous deuiez
pretendre, & que pretendoit la Sagesse de Dieu qui vous
y auoit placé pour vn temps. Il semble que l’Estat de la
France soit de la nature de cette riuiere des Indes, en laquelle
s’il vient à tomber vne paille, son cours auparauant