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Mazarinade n° A_5_24

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Griveau, Martin [signé] [1649], LETTRE D’VN DOCTEVR DE L’VNIVERSITÉ DE PARIS, A la Reyne Regente à S. Germain en Laye. SVR LE SVIET DE LA PAIX. , françaisRéférence RIM : M0_1862. Cote locale : A_5_24.


Paris sous l’authorité de vostre nom, par l’esperance d’vn prõpt
succez, & par vn sentiment de vengeance, dont on, ose vous
entretenir, ils iurent que la ville est au pillage ; ils soustiennent
que la populace fait violence aux plus puissans, & que les plus
accommodez manquent de pain. A cela, Madame, on ne vous
peut dire autre chose, sinon que la ville ne fut iamais plus calme ;
que les peuples y sont obeyssans & soumis, & que si nous
ne sommes pas dans vne extresme abondance, nous sommes
pour le moins bien éloignez de la disette.
 
On dit bien plus. On nous assure icy, que vostre Maiesté,
selon sa bonté & sa pieté ordinaire, regrette quelquefois le
Donjon des Peres Iesuites qu’on luy a iuré estre abattu par le
Canon de la Bastille, & cependant on n’en a pas tiré vn seul
coup, & il n’y a rien de si entiere que le Donjon de cette Eglise
dont vous auez daigné plaindre la ruine. Quoy qu’il en soit
Madame, ces Temples que l’on auroit abattus, vous appartiennent,
ioint qu’ils sont dediés a la gloire de Dieu ; ces peuples
qui sont tous les iours massacrez a vos portes & presques a
vostre veüe sont a vous, & ce sang qui ce répand mesme a
present, & qui fume encor dãs nos campagnes est le sang de
vos suiets. Pouuez vous sans fremir, ou du moins changer de
de couleur & de visage, voir demembrer vn corps dont vous
estes la teste ? Pouuez-vous laisser perir vn peuple, qu’il est en
vostre puissance de sauuer ? Ah ! Madame ; Que vous estes à
plaindre cette funeste & mal-heureuse conioncture ! Est il possible
que pas vn de vos directeurs ou Conseillers n’oze plus
estre en ce tẽps ny zele ny veritable au pres de vous ? & ne s’en
est il point trouué qui se soit hasardé de vous dire, qu’encor que
vous soyez la meilleure Princesse du monde & qu’il soit a presuposer
que vous n’authorisez point l’iniustice de cette guerre
intestine & domestique, il y va pourtant de vostre salut & de
vostre Paradis. Souuenez-vous, Madame, que vous estes appelee
à la conduitte d’vn grand Estat ; c’est à dire que vous soûtenez
vn faix bien perilleux, & que c’est à vous de respondre
deuant Dieu de toutes les testes de vostre Royaume. Les Prelats
& les Pasteurs ne sont pas, s’il faut ainsi dire, tant tenus