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Mazarinade n° C_3_62

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D. P., sieur de S. [signé] [1649], LETTRE D’VN VERITABLE FRANÇOIS A MONSEIGNEVR LE DVC D’ORLEANS. , françaisRéférence RIM : M0_1898. Cote locale : C_3_62.


On vous a dit que Paris estoit tombé dans le crime de
rebellion ; que le Parlement auoit dessein de marcher sur la
teste des Roys, & de se rendre Maistre de cette Monarchie, &
par consequent qu’il estoit necessaire de se seruir de l’aspreté
du remede, & d’arrester auec le fer cette dangereuse guangreine,
auant qu’elle eust le temps d’infecter & de corrompre
tout le corps de cét Estat. C’est pour cette raison qu’on
vous a fait consentir à r’appeller tant de belles trouppes qui
estoient destinees pour la conqueste de la Catalogne â tirer les
garnisons des frontieres, & par ce moyen donner en proye tant
de riches Prouinces à nos ennemis. Et tout, pour dresser vne
puissante armee afin de reduire Paris à l’extremité, & faire remonter
glorieusemẽt le C. Mazarin sur le mesme trône dont il
a donné tant de loix de sang, & d’où la crainte des supplices
sembloit l’auoir fait descendre On assiege donc cette celebre
& fameuse Ville, le Theatre du Monde & le siege de l’Empire
Frãçois : on rauage la cãpagne : on despoüille les Tẽples de leurs
Plus sacrez ornemẽs ; on change les Villages les mieux peuplez
en d’effroyables solitudes ; on viole les filles aux yeux de leurs
parens, & par vne cruauté sans exẽple, on fait que le pere assiste
aux funerailles de l’honneur de sa fille, & que la fille est spectatrice
de la mort de son malheureux pere. Et ce qui me serre encore
le cœur de tristesse & de douleur ; c’est qu’on dit, MONSEIGNEVR,
que V. A. R. en qui les vertus sembloient combattre
pour triompher les vnes des autres, commande elle-mesme
les meurtres & les pillages & veut que l’on immole des
victimes innocentes à la fureur d’vn Ministre Estranger. Enfin
on a dessein d’exercer sur Paris tout ce que la plus detestable
vangeance pourra inspirer, afin d’intimider les peuples, & de
donner de l’espouuante aux autres Villes par l’exemple de sa
punition ; estant indubitable qu’on ne peut oster la vie au cœur
sans l’oster en mesme temps à tous les autres membres. Mais
nous esperons, MONSEIGNEVR, qu’encore que les portes
du Ciel soient fermees aux entreprises des hommes ; elles seront
ouuertes à nos gemissemens, & que Dieu qui ne protege pas
moins l’innocence qu’il punit le crime, attachera le bon-heur
aux armes du Parlement, & destournera les disgraces & les
mal-heurs qui le menacent : qui combat auec iustice combat
sans crainte, & qui recherche son salut ne paslit point à la veuë