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Mazarinade n° A_4_3

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Anonyme [1649 [?]], FACTVM, SERVANT AV PROCEZ CRIMINEL FAIT AV CARDINAL MAZARIN, touchant ses intelligences auec les Estrangers ennemis de l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_1368. Cote locale : A_4_3.


auec cette resolution, de voir plustost perir son Armée par le fer de l’ennemy, que
par la rage de la faim. Le Prince de Condé cherche l’occasion d’vne Bataille, le
Cardinal Mazarin l’approuue, puisque ce Prince auoit à y courir autant de peril
qu’aucun Officier ny Soldat de son Armée. La Bataille se donne pres de Lens, &
se gaigne par le Prince de Condé, sans y auoir esté graces à Dieu ny tué ny pris,
comme les ennemis en auoient des promesses ou des propositions par escrit, dequoy
le Cardinal Mazarin eut beaucoup de confusion & de desplaisir, qu’il dissimula
judicieusement, pour faire semblant d’en rendre graces à Dieu, & dans l’action
mesme, ou à la sortie, faire enleuer les Senateurs qui y auoient esté inuitez.
 
Dieu qui auoit patiamment souffert tant de trahisons faites à la France, ne
voulut pas souffrir celle-là, en laquelle on auoit resolu de violer le S. Temple dedié
à sa sacrée Mere : publia soudain par la voix de son peuple, la violance & l’injustice
que le Cardinal Mazarin faisoit faire, & fit reclamer hautement les personnes
emprisonnées. Le Cardinal Mazarin les fit genereusement relâcher pour
l’amour du trouble, non pour la crainte de sa personne ny de ses tresors, puisque
pour l’vn il auoit cent cheuaux dans son escurie, qui sellez & bridez, attendirent
24. heures durant sa fuite ? Et pour l’autre les balots estoient faits, & les mulets
chargez. Tout fut calmé graces au bon Dieu, sauf le cœur & l’esprit, du Cardinal
Mazarin, lequel sçachant la consternation des ennemis, par la grand perte qu’ils
auoient faite en la bataille de Lens, pour ne leur manquer en leur besoin, voulut
manquer à celuy de l’Armée du Roy : & hors la prise de Furne, ne voulut que le
Prince de Condé en fit d’autre, bien qu’il n’y eust Place dans le Païs bas, qui ne
creut tomber és mains du vainqueur, s’il l’a vouloit attaquer.
Pour monstrer l’affection qu’il portoit au Prince de Condé, ou aux interests
des Espagnols, il le r’appella à la Cour, afin que cettuy-cy ne fit plus de gain, ny
les autres de perte, & que les fleurs & les fruicts d’vne si grande & si auantageuse
victoire, se trouuassent cueillis dans le mesme jour de la Bataille.
Le Prince de Condé reuenu à la Cour, le Cardinal Mazarin tasche de le broüiller
& mettre mal auec le Duc d’Orleans, & s’offroit separément à l’vn & à l’autre,
pour apparamment les perdre tous deux s’il eust pû. Mais ce sang Royal qui
boust dans leurs vaines, se calma plustost & plus facilement qu’il n’esperoit & ne
desiroit.
Depuis il a débauché ce genereux Prince pour le faire mal-heureusement perir ;
mais Dieu le preseruera comme il a fait de toutes les embusches qu’il luy a
tenduës, & luy fera connoistre ses fourbes & malices pour le laisser chastier au
Royaume qu’il a infamement pillé & proditoirement vendu.
Cela estant réserué au temps & à la iustice diuine & humaine. Reste à cotter
d’autres apparences ou probalitez, de l’intelligence du Cardinal Mazarin auec
les Espagnols.
Au commencement de la Campagne de l’année 1646. il enuoya assieger Orbitello
en Toscane, place forte du Roy d’Espagne, auec deux armées de terre &
de mer, desquelles le commandement fust donné au Prince Thomas de Sauoye,
alternatiuement vaillant & heureux, lequel s’estant comporté auec la premiere
qualité seulement, il ne reüssit pas en ce siege selon la derniere, & apres grand
perte le leua honorablement, & se retira seurement, le Cardinal Mazarin s’en
picque, comme si Orbitello eut esté pour luy, & en la place du Prince Thomas
[1 mot ill.] sur la coste de Toscane le Mareschal de la Melleraye, auec de tres-bons