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Mazarinade n° A_2_3

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Anonyme [1649], APOLOGIE POVR MONSEIGNEVR LE CARDINAL MAZARIN, TIREE D'VNE CONFERENCE ENTRE SON EMINENCE ET Monsieur ****** homme de probité & excellent Casuiste. , françaisRéférence RIM : M0_127. Cote locale : A_2_3.


pas empesché le Roy de tomber tout à fait ?
 
Le Card. Ne vous ay-je pas desia dit, que nous n’auions excité leurs troubles
que par vengeance, & puis que me fust-il reuenu de tout cela ? Les Parlementaires
de Londres m’ont plus donné d’argent, que leur Maistre n’en
maniera de long-temps.
Le Casuiste. Mais ne trouuiez vous pas, Monseigneur, que la cheute du
Roy d’Angleterre fust de mauuais exemple aux autres peuples ?
Le Card. Tout au contraire, j’estois bien-aise, que les Monarques de
l’Europe connussent, que les clous de diamant qui soustiennent leurs Throsnes,
ne sont pas à l’espreuue des coups de la fortune, que ie m’en jouë comme
du verre, que mes alliances valent bien des Couronnes, que les Sceptres
tombent si ie ne les soustiens. Et enfin qu’ayant osté la Couronne au Roy
d’Angleterre, & laissé au Roy d’Espagne, celle que ie luy pouuois oster, ie
fisse connoistre à la France la necessité de mes conseils, pour defendre la
sienne de semblables iniures.
Le Casuiste. Mais il me semble, Monseigneur, que vous auez estendu cét
absolu pouuoir, que vous auez sur les Sceptres, dessus la France, où vous
vous joüez à present de la Couronne de nos Roys, comme vous auez fait de
celle d’Angleterre, non pas par vne jalousie de Religion, qui n’est qu’vn
mal de teste, mais par vn mal qui donne la mort & qui tient au cœur, ie veux
dire par la plus cruelle oppression qui fut iamais. Si les effects ont de la proportion
auec leurs causes, nostre mal doit estre bien plus furieux que celuy
d’Angleterre, & si les François n’estoient pas affectionnez comme ils sont,
à l’innocence de leur Roy, vous exposeriez beaucoup plus sa Couronne, que
celle d’Angleterre ne l’a esté, qui a pû le restablir en consentant à l’establissement
de Caluin sur les ruïnes de Luther. Le mal de la France tient aux entrailles,
& si vous n’y remediez en sa naissance, il deuiendra incurable.
Le Card. C’est dans la tempeste que mon esprit se joüe, c’est là où il trouue
son repos, & qu’il trouue vne estenduë proportionnée à son actiuité. La
mer vient humblement baiser le sable du riuage mais elle paroist forte contre
vn vaisseau agité de vents contraires, comme est à present la France.
Le Casuiste. Monseigneur, il me semble que nous entrons trop tost dans
la iustification de cette belle action, qui est le couronnement de toutes les autres.
Nous en estions ce me semble à la ruïne des affaires du Roy de la grand
Bretagne.
Le Card. La seconde consideration qui m’a obligé à laisser tomber ce Prince
là, a esté le dessein que j’auois de venger les interests de l’Eglise par la ruïne
de sa personne, & celle de son party qui suiuoit cette Religion, qui a braué si
desauantageusement l’Italie, & a diminué les reuenus, dont j’espere joüir
vn iour quand ie gouuerneray les ames de tout le monde, comme ie fais les
corps & les fortunes maintenant.
Le Card. Messieurs du Parlement qui sont si religieux, & à qui l’Eglise
s’est associée, gousteront bien cette raison ; & cette saincte action eust esté capable
de vous sauuer, si vous n’eussiez pas eu moyen de vous venger plus
sainctement de l’Angleterre, en y restablissant la veritable Religion. Mais