FACTVM Pour M. Bernard de Bautru Aduocat au Conseil Priué du Roy, intimé & appellant de la procedure extraordinaire, & sentence du 4. iour du present mois de Iuin, & demandeur. Contre le Substitut de Monsieur le Procureur general au Chastelet, appellant, intimé & defendeur.

Auteur
Anonyme
Éditeur
[s. n.]
Date d'édition
1649 [?]
Lieu d'édtion
[s. l.]
Langue
français, latin
Nombre de pages
12
Référence Moreau
M0_1366
Cote locale
C_5_2
Note
Sans page de titre.
Dernière modification
2012-10-21 03:18:16
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Commentaires

Commentaire de : Patrick Rebollar, créé le 2012-10-21 03:18:16.
Notice Moreau : Bautru est accusé d'avoir fait imprimer le libelle intitulé : "Discours fait contre la députation du Parlement à M. le prince de Condé". Il a été arrêté, interrogé, confronté le même jour, et jeté dans un cachot. Il réclame d'abord contre son incarcération qui a eu lieu "sur ordonnance verbale". C'est, selon lui, une violation de la loi et de la déclaration d'octobre. Le procureur du roi produit contre lui deux témoins. L'un, Vaudran, facteur du messager, déclare qu'il a été chargé par Bautru de lui trouver un imprimeur, qu'il lui a amené Desdin, et qu'enfin Bautru a donné le manuscrit à Boucher ; l'autre, qui est Desdin, reconnaît avoir vu l'accusé, et même avoir consenti à l'impression du libelle ; mais il dit qu'il avait remis la livraison du manuscrit à un autre jour. Bautru répond que Vaudran s'accuse lui-même de complicité, et qu'ainsi on ne peut admettre son témoignage. Il affirme que la pièce a circulé manuscrite plus d'un mois avant d'être imprimée. Il demande si les imprimeurs, qui sont si friands de pareils morceaux, avaient besoin qu'on les priât de mettre le "Discours" sous la presse. Il se plaint de ce qu'on suscite des gens pour faire le métier de dénonciateurs à la fois et de témoins. Il signale ce procédé comme contraire à "notre liberté françoise". Deux caractères principaux sont relevés dans le libelle : la sédition et la diffamation. Voici les passages que cite le procureur du roi : le Parlement est accusé "d'avoir commis des lâchetés et d'avoir fait une injure très-sensible au duc d'Orléans" ; les députés de la compagnie, de "corruption dans la négociation de la paix" ; le prince de Condé, "d'impiété et de sacrilège", "de porter avec impatience la qualité de sujet". « C'est un fléau que Dieu prépare pour affliger le royaume, et un monstre pour la ruine et la désolation de son pays. » L'auteur menace de "gouvernement violent", de "rétablissement de la tyrannie", de "persécution et d'oppression publique". J'ai dit que Bautru est accusé d'avoir fait imprimer le "Discours". On ne le soupçonne pas même de l'avoir écrit ; et cependant la peine, c'est la mort par la loi "de famosis libellis", par l'édit de Charles IX, Mantes, 10 septembre 1563, par l'ordonnance de Moulins, art. 77, et par l'édit de pacification de Henri III (1577), art. 14 : « Défenses, à toutes sortes de personnes, de faire imprimer ou imprimer, mettre en lumière aucun livre, placard ou libelle diffamatoire, à peine de confiscation de corps et de biens. » Il paraît que Bautru, s'il ne composait pas de libelles, aimait au moins à en recueillir ; car son clerc a avoué dans la procédure qu'il avait transcrit la "Requête des provinces et villes désolées de France à nos seigneurs du Parlement de Paris". Boucher, averti par l'arrestation de Bautru, s'était caché, en sorte qu'il ne fut pas compris dans les poursuites. Une circonstance singulière, c'est que l'accusé se plaint de ce que le procureur du roi au Châtelet a fait imprimer ses causes et moyens d'appel. Cette affaire fit un bruit immense. La cour sollicita pour le prince de Condé, et la Fronde, pour Bautru qui fut élargi par le Châtelet et par le Parlement. Guy Joly, page 21 de ses "Mémoires", coll. Michaud, se donne le mérite d'avoir seul, par son activité et par sa hardiesse arraché l'accusé aux juges du Châtelet, dont la pluralité, dit Guy Patin, allait à l'envoyer aux galères : « Ce conseiller (au Châtelet), par un pur esprit de générosité, dit-il, entreprit la défense de l'accusé avec tant de chaleur qu'il alla plusieurs fois dans le cachot instruire le prisonnier de ce qu'il avoit à faire et à dire ; mais ce malheureux étoit si troublé qu'au lieu de profiter des conseils qui lui avoient été donnés, il pensa à se perdre lui-même par ses réponses. » Guy Patin, dans la lettre du 7 juin 1649, à Charles Spon, confirme cette dernière partie du récit de Joly : « Enfin, dit-il, l'avocat est délivré, qui a eu belle peur, et qui est fort accusé par ses amis mêmes de ne s'être pas bien défendu, comme il devoit et pouvoit faire en une affaire et pour un crime dont il ne pouvoit être convaincu, vu qu'il n'en est pas l'auteur. » Mais dans la lettre du 5 juin 1649 à Belin, fils, médecin à Troyes, il nous apprend que « plusieurs frondeurs se mêlèrent d'intercéder pour Bautru, et même M. le duc de Beaufort. » On peut penser que leurs démarches n'eurent pas moins d'influence que les paroles de Joly. Si nous en croyons Guy Patin, Bautru ne pouvait pas être l'auteur du "Discours", « n'étant pas assez habile homme pour cela ; » mais il s'agissait de publication, et non de composition. C'est dans la lettre à Spon (p. 134 du Ier vol.) qu'il faut chercher les détails les plus précis et les plus complets sur ce procès. Le Châtelet ordonna qu'il serait plus amplement informé, et que cependant Bautru serait élargi à sa caution juratoire ; mais le procureur du roi en appela aussitôt "à minimâ" ; et le prisonnier fut conduit à la Conciergerie du palais. C'est là qu'il rédigea son "Factum". A la Tournelle, le président de Nesmond, grand frondeur, ne mit pas moins de passion que Joly dans la défense de Bautru ; et il obtint que la sentence du Châtelet fût confirmée ; ce qui équivalait à un acquittement. Bautru, mis en liberté, n'eut plus en effet affaire avec la justice. Talon ne dit qu'un mot du procès, page 359 de ses "Mémoires", coll. Michaud ; encore ne donne-t-il ni le titre du libelle, ni le nom de l'accusé. Mailly le raconte assez longuement, page 513 de son deuxième volume. A mon tour j'en ai parlé avec étendue, parce que c'est le seul procès de presse dont il nous reste une pièce de procédure, et sur lequel les écrivains contemporains nous fournissent d'assez amples renseignements. Guy Patin dit que Bautru était natif de Sens.

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