M. L. [signé] [1650], LETTRE OV EXHORTATION d’vn Particulier A MONSIEVR LE MARESCHAL DE TVRENNE, Pour l’obliger à mettre bas les armes. , françaisRéférence RIM : M0_2249. Cote locale : D_2_38.
Page précédent(e)

Page suivant(e)

-- 17 --

vous ayez mesprisé sa puissance sacrée : considerez le desordre
qui se prepare, & qui mesme desia regne tout autour de
vous. Les Payens qui ont formé des religions au gré de leur
melancholie, quelques ignorans qu’ils fussent en beaucoup
de choses, & quelques tenebres qui regnassent dedans leurs
erreurs ; ont recognu la puissance de cette Iustice, si necessaire
à la perfection & à l’ordre des choses les plus sublimes,
qu’ils n’ont pas creu que le Ciel mesmes où ils auoient logé
toutes leurs ridicules diuinitez, peut estre digne de leur
Majesté, si elle n’y regnoit. Iupiter en estoit le chef souuerain,
& dans l’assemblée de ces faux Dieux, quand il faloit
decider quelques differens, c’est luy qui prononçoit les Arrests.
Nous-mesmes qui viuons dedans les lumieres du Christianisme,
n’establissons nous pas la Iustice dedans l’essence
du vray Dieu ; & ne le disons nous pas infiniment iuste ? si
doncques elle regne par tout, & s’il faut qu’elle soit dans le
Ciel aussi bien que dessus la terre. Pourquoy voudriez vous
ne pas recognoistre son necessaire & son grand pouuoir.

 

Ie veux que cette puissance que l’on nomme iuste, pour
vous faire iniustice, eust cessé de l’estre, encores ne deuiez
vous pas si visiblement vous en deffier. Alors au moins vos
desseins auroient eu quelque excuse, vous auriez esté criminel
auec plus de raison, & vostre droit se seroit peu poursuiure
auec plus d’apparence de vertu. En tout cas vn bon politique
en auroit vsé de la sorte, & par le refus qu’on luy auroit
fait de luy rendre ce qu’il luy est deub, il auroit esmeu la compassion
de ceux desquels il auroit pretendu la defense : &
comme Brute & Collatin animerent les Romains à leur vengeance
en leur montrant Lucresse violée, il auroit esmeu
ses deffenseurs en leur faisant voir son droit violé.

Mais, enfin, les suiets quoy que puissent tous ces artifices
de viosence, arrachent bien moins par force de leurs Souuerains
qu’ils n’en obtiennent par douceur. Si le refus & l’iniustice
est à craindre d’vn costé, la rebellion & la perfidie l’est
bien dauantage de l’autre. Dieu fauorise tousiours la cause
des Roys, & confond la temerité des felons. Ils sont dedans

Page précédent(e)

Page suivant(e)


M. L. [signé] [1650], LETTRE OV EXHORTATION d’vn Particulier A MONSIEVR LE MARESCHAL DE TVRENNE, Pour l’obliger à mettre bas les armes. , françaisRéférence RIM : M0_2249. Cote locale : D_2_38.