Loret, Jean [?] [1652], LA CINQVIESME GAZETTE DV TEMPS. EN VERS BVRLESQVES. , françaisRéférence RIM : M0_1471. Cote locale : B_18_27.
LA CINQVIESME GAZETTE DV TEMPS. EN VERS BVRLESQVES. A PARIS, M. DC. LII.
A SON ALTESSE MADEMOISELLE De Longueuille.
Mvse qui gouuerne la mire Approche toy, viens, & m’inspire, Mais sans aucun retardement Despeche toy donc victement
Le temps extresmement me presse De trauailler pour ma Princesse O Dieux ; que i’en ay mal vsé Ou diable me suis-ie amusé ? I’ay ioüé durant deux nuictée Iusqu’a deux heures comptée Ha ! i’aduouë que i’ay tort Et certes i’apprehende fort Non sans faire laide grimasse Que les vers qu’il faut que ie fasse Dans deux, ou trois heures au plus Ne vaillent pas vn carrolus,
Dimanche I’oubliay descrire Vne histoire qu’on me vient dire Sçauoir que neuf ou dix pandards C’est a dire de ces gaillards, Qui vollent de nuict par la ville Rencontrans Monsieur de Rouuille Il faillit d’en estre tué Pres la fontaine maubué, Et la cause & raison, fut pource Qu’il n’auoit montré, anneau, n’y bource,
Mais c’est qu’il est tres diligent Ne disperser son bel argent Cellon Seigneur ne connoist mie Mademoiselle Economie Oüy bien dame profussion Aymant mieux par complection (Vertu ce me semble assez rarre) Estre incommodé qu’estre auare Certes, les escus sont bons, mais Les genereux n’en ont iamais Or est il qu’il est de ce nombre Et qu’il met peu dargent a lombre Mais reuenons a nos filoux Ces gens affamez comme loups Ne trouuant rien dans ses pochettes Luy prirent ses belles manchettes Ses gans, son rabat, son chappeau, Mais ils respecterent sa peau, Croyant qu’en quelqu’autre rencontre Il auroit, or, argent, ou montre,
Mardy dernier deux ou trois cens Hommes dit on d’assez bon sens Qui pourtant ailleurs on appelle Gens sans esprit & sans ceruelle
Quand on auroit le cœur d’airain Que l’on doit a son souuerain En suitte toutte cette bande Tesmoignant vne ferueur grande Et portant des brins de papiers Allerent en plusieurs quartiers [1 mot ill.], veufues, femmes, filles Bourgeois, caualliers & soudrilles d’imiter leur zele, & leur soy Et de crier vine le Roy Ce que fit lors mainte personne Mais quand il fut l’heure de nonne Cent trouppe se separa Chacun chez soy se retira Pour aller manger du potage Ie n’en sçay pas dauantage,
Dans Paris, grand & vaste corps Si remply d’infames discords La fievre ardante & continuë Aucunement ne diminuë Elle regne quasi par tout Et pousse plusieurs gens a bout
Les medecins font bien leur orges Car les maux de teste & de gorges
Qu’on ne sçauroit aymer assez Pensa mourir ces iours passez Monsieur le Marquis de [1 lettre ill.]osseuse Qu’ne infermité perilleuse A cruellement rudoyé Faillit destre aussi fossoyé C’est a dire mes dans la fosse Tant sa fievre estoit grande & grosse Mais a present graces aux Dieux L’vn & lautre se portent mieux,
Ieudy dernier dicy sortirent Dont plusieurs gens se resiouirent Deux Echeuins, mais deux des vieux Dont l’vn estoit Monsieur le vieux Pour aller au Roy se soumettre Et dit on aussi luy remettre De la part du Duc de Beaufort (A qui Paris est vn beau fort) Le gouuernement de la Ville Dont grace a la guerre ciuile Il estoit pourueu bien ou mal A la place de l’Hospital Ce senateur a barbe claire Broussel le Septuagenaire Remettant a sa Maiesté, Pareillement sa preuosté Quantité dautres personnages Bien Intentionnez & sages
Le mesme iour aux Iacobins Des chantres pres de quatre vingts Composant trois corps de musique Firent vn concert angelique Qui fit de tous les auditeurs De tres profonds admirateurs Violons, violes, vielles, Bassecontres & chanterelle [1 mot ill.], harpeurs, guyterriens Th[2 lettres ill.]rbions, d’huteriens Des l’huteriens cest a dire Ioueurs de l’huts & non de lyre Clauessins trompettes hauts bois Et bref tant instrument que voix Ayant en ce lieu reünies Mile charmantes harmonies Mile & mille accens delicats Dont mesme orphée eut faict grand cas Anchanterent de leurs merueilles Plus de douze cens oreilles En fin cet amas d’orions Damphions, de psalterions
Condé, dont le nom iour & nuict Malade ou sain faict tant de bruict N’est plus si vif, si dru, si miéure Car a present il a la fiéure Et l’on a tiré quatre sois De son sang qui vient de nos Roys Mais il faut pourtant que ie die Que cette sienne maladie Dont l’on sentretient en tout lieu Ne sera rien s’il plaist a Dieu
La cour aucunement crottée S’est a Pontoise en fin postée Mais elle en part dit on demain Et vient camper a sainct Germain Poster & camper si ie nérre C’est parler en terme de guerre Mestier que pas, trop ie n’entends Mais faut s’accommoder au temps
Rare Princesse a qui ma rime Tesmoigne vne eternelle estime Et qui Iusques au point de ma mort I’honoreray touiours tres fort Cette lettre en haste brochée
Faict auec promptitu estrange A Paris le iour Sainct Michel lange
FIN.
ADVIS AV LECTEVR.
VN mal lequel a limprouiste A surpris Monsieurs mon copiste Ma faict en cette occasion Recourir a l’Impression Mais sçache Lecteur debonaire Encor que des mains du rimeur Cette Gazette epistolaire Passe en celle de l’Imprimeur Quelle n’en est pas plus commune Car sans abus ny fraude aucune Il doit obseruer cette loy De n’en tirer chaque sepmaine Qu’ne vnique & seule douzaine Tant pour mes amis que pour moy Apres cela point de copie Et deust on auoir la pepie.
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Loret, Jean [?] [1652], LA CINQVIESME GAZETTE DV TEMPS. EN VERS BVRLESQVES. , françaisRéférence RIM : M0_1471. Cote locale : B_18_27.