La Plante, E. de [signé] [1649], LA NOVVELLE VERITABLE DV FRANÇOIS ESTRANGER. SVR LE DEBRIS DE MAZARIN, presentée à Messieurs du Parlement de Paris. , français, latinRéférence RIM : M0_2554. Cote locale : C_6_36.
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LA
NOVVELLE
VERITABLE
DV
FRANÇOIS
ESTRANGER.

SVR LE DEBRIS DE MAZARIN,
presentée à Messieurs du Parlement de Paris.

A PARIS,
Chez CLAVDE MORLOT, ruë de la Bucherie,
aux Vieilles Estuues.

M. DC. XLIX.

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LA NOVVELLE VERITABLE
DV FRANÇOIS ESTRANGER.

Sur le debris de Mazarin, presentée à Messieurs
du Parlement de Paris.

Quidquid agas, id ages animo duce ; tramite cœco
ne te precipitem, deuius error agat.

IE ne puis que ie ne reclame les glorieux aduantages
que nostre France reçoit continuellement
de vostre bonté, la nature a beau contribuër
de toutes ces forces à l’empeschement de ma renommée ;
elle a beau estoupper les conduits de
l’ouye de tous nos mortels, que luy sert-il de consommer
sa composition, diuiser tous ces cartilages
& dissiper tous ces ligaments ; à quoy bon corrompre
tous ces vaisseaux, battre en ruine tous ces
corps musculeux ; & pour toute conclusion, que
luy sert-il de briser tous les fondemens des autres
parties qui la construisent, elle trauaille en vain
MESSIEVRS, malgré tout son employ, mon
echo resonnera à la faueur des amfractuositez de
cét organe symbole de la foy. Outre qu’il est tres-necessaire
de semer la paix ou le diuorce, auoit seruy
de parfum : vires agminis vnus habet, il ny a
rien qui resiste à mes efforts, fama volat, mon
dessein n’est que d’edifier la verité que vous nous

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faites paroistre dans vos prudents conseils. Certainement
la justice de vostre cause contraint auec
grande douceur, tous les combatans souz vostre
drapeau d’en cherir les effets : mais il me semble
à propos dire que trois choses sont grandement
necessaires, dans le procez que vous auez intenté
sur l’enleuement de nostre Monarque, lequel vous
recherchez auec vne extreme passion : La premiere
c’est celle qui commande, celle qui suit c’est la
commandée, & l’autre ce sera l’obeïssante ; à l’vne
il est besoin de considerer l’authorité & la iustice,
à l’autre la possibilité & la facilité, & a celle-cy
l’honneur qui s’ensuiura de l’obeïssance & la recompense
du seruice, celle-là s’adresse à vous, celle-cy
regarde nos Generaux, & la derniere nous
est doucement presente ; mais ie me trompe, cette
mesme cause renserre en soy toutes ces particularitez
dont i’en adore les pensées, auec vn million
de milliers d’ames qui viuent en esperance de leur
contribution en cette affaire ; Ils ont veu vostre
resolution inesbranlable, ils n’attendent desormais
que vous leur leuiez la main, tibi soli seruiunt
te perfecté diligunt & tibi adhærent : ce Mychrocosme
aduouë que vostre constance a tousiours
demeuré ferme, nonobstant la crainte des tourments
qui vous estoient preparez, non moriemini
inulti, de moy ie confesse que cette generosité surpasse
la malice de celuy qui auoit machiné vostre
ruine. vostre sage conduite amene tous les bons

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François au seruice de vostre auguste Senat, ou les
Roys autrefois n’auoient accoustumé d’entrer que
pour deliberer (auec l’honorable Compagnie de
ceux qui le composoient) de quelques affaires importantes
à leurs Estats, cõme de declarer la guerre
aux ennemis de la Couronne, & c’est ou ie m’arreste,
que si toutefois il arriuoit que leur decision
choquasse les Loix, il estoit permis de leur dire
auec toute liberté que cela n’estoit pas iuste ; neantmoins
aujourd’huy nous voyons qu’vn Cardinal
sans authorité que celle qu’il emprunte, veut se parangonner
à vostre puissance, ipse sibi somnia fingit,
qui pis est desire vous regir à sa poste. Non,
non, Mazarin quelque tyran que tu te montre,
quelque sangsuë du peuple que tu sois, ton arrogance
ne sçauroit auoir d’estenduë pour mettre au
iour le tableau de tes vanitez, nostre Parlement
s’y oppose, inuito funere viuet tu as beau faire,
le cresus de cét auguste Senat s’oppose aux richesses
que tu as conuoitées, tes forces cedent à nos
Sansons ; bref toutes les ruses que ton esprit te
forme ne sont forgées que pour te seruir de pierre
d’achoppement ; à quoy bon repaistre ton imagination
de tant de friuoles, tu aurois beau estre vestu
des armes de Saül, tu ne peux vaincre sans paroistre
au combat, si tu t’y trouues tu te perds. Que
te sert-il donc malheureux de croupir dans ton venin,
tu tes figuré dans ton imagination de perdre
ce florissant Royaume ? nous cognoissons bien que

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tous les exploits que tu dis auoir fait, n’ont esté fabriquez
à autre dessein, que de pouuoir paruenir à
la gloire que tu pretendois sur nostre petit monde,
decreiusti, iam comisisti. Mais ? que dis-je, ton entreprise
te portoit plus haut, puisque tu desirois
auec vne enuie Italienne & Sicilienne, monter à
vn degré de dignité trop releué pour ton courage,
tu pensois ternir nos lys, sola mihi redolent, &c.
Que te sert-il à cét effet, indigent auec ton thresor
de mettre tant de gens en campagne. Pour
combattre ta temerité, ne sçais tu pas que ce n’est
que pour colorer ton esperance, que tant de braues
Princes embrassent ton party ? ne iuges tu pas
que ce germe de nos Roys que tu as daigné engager
dans ce bourbier, a cõtracté auec nostre escarlate,
cedant arma togœ, le sieur de Chastillon (secõdé
d’vn nombre infiny) te le dõne à cognoistre.
Escoute, escoute, où plustost contemple, si tu en
és capable, ces choses dignes d’admiration. Cette
illustre race a tesmoigné ces affections si fortes à
nostre illustre Parlement, que la ruine n’en peut
estre sans vn excez de douleur ; cependant demon
que tu es tu t’imagines que, tradet fratrem frater
te suggerente, ne timbus pas de ces vaines pensées,
si tu esperes prophetiser comme Ionas sur la ville
de Niniues, sçache que les quarante iours sont escoulez
& que ta coüardise est desceuë : Possible
que tu te propose voir l’execution de la deuise de
cét Empereur. L’ennemy tué sent bon, mais le Citoyen

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encore mieux ? Pauure insensé tu ne fais que
viser la longueur de ton nez ; vois-tu pas que le predecesseur
de ton semblable, autant plein de bonté
que celuy-là d’impudence, n’a pour sa defensiue
autres armes que celles-cy. Il vaut mieux qu’vn
meure pour plusieurs, que plusieurs pour vn ; mal-heureux
songe à ta conscience, rumine cette proposition,
desrobe vn moment à ta vicissitude
pour trauestir ton interieur de ce passage, & contemplant
tous ces motifs resous-toy à repentance,
& te souuienne de la representation que te fait le
miroir de penitence. Amplius laua me ab iniquitate
mea, quoniam eam non cognosco : car t’imaginer
venir à bout de ton dessein, c’est comme on
dit, bastir des chasteaux en Espagne, mais couppe
court à tes conceptions, rase tes legeretez, range
toy souz le baston du Comitte de nos galeres, &
te loge comme forcé souz les aisles de celuy qui a
esté de tout temps ton fleau, & ta à iamais seruy
d’obstacle, & enfin pour effacer le principe de l’émotion
que tu as sousleuée dans cette bonne ville
de Paris, & de la guerre que tu as allumée dans
nostre contrée, prepare toy à receuoir les
coups des flesches que tu auois descoché contre
nous, ne resiste point à nostre Themis, le bandeau
qui couure l’innocence de ces nourrissons est
pour offusquer ton orgueil ; si tu parle de contrarieté,
le Damas qu’elle leur a mis en main seruira à
l’expiation de tes crimes, & de poison à ceux

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qui ont conspiré auec toy, & la balance dont ils
ont herité ne te sera presentée que lors que nous
iouyrons en Greue de ta presence, où tout nostre
peuple estranger souhaite te voir, pour n’estre pas
frustré de ta reddition de compte.

 

Nulli fas Italo tantam subuertere gentem.

E. DE LA PLANTE.

FIN.

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