I. A. D. [1649], IMPORTANTES VERITEZ POVR LES PARLEMENS. PROTECTEVRS DE L’ESTAT. CONSERVATEVRS DES LOIX. ET PERES DV PEVPLE. Tirées des anciennes Ordonnances, & des loix fondamentales du Royaume. DEDIEE AV ROY. Par I. A. D. , français, latinRéférence RIM : M0_1686. Cote locale : C_5_59.
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AV ROY.

SIRE,

Nous lisons du jeune Cresus, qu’ayant
à peine l’vsage de la parole, si tost qu’il
eust apperceu le meurtrier qui aduançoit

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le bras pour percer le sein de son
pere, se deslia la langue, & transporté
d’vne viue apprehension, commença à
s’escrier soudain, NE TOVCHEZ
PAS AV ROY MON PERE,
ainsi dans les mesmes sentimens de
crainte, accablé sous le faix de la douleur,
& ayant l’honneur de commencer
sous le Regne de Vostre Majesté sacrée,
de voüer au public mes premieres paroles,
dans le Barreau le plus eminent
de la Iustice du Royaume, ie sens que
ma langue s’est heureusement desliée si
tost qu’on a attenté directement à Vostre
Majesté, & qu’vn MEVRTRIER
insolent a paru armé au sac de vostre
ville, au massacre de vos Subjets, à la
ruine de vostre Parlement. Ce qui nous
cause & redouble encore vn plus sensible
& cuisant regret, est que les souspirs
& les larmes dont vostre peuple vous a

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fait naistre, n’ont pû vous obtenir pour
la seconde fois. Il souffre dans le cœur
les mesmes conuulsions & les frayeurs
horribles, que ressentit ce mal-heureux
pere quand il apperceut qu’vne beste feroce
s’estoit saisie de son enfant qu’elle
auoit tiré du berceau tout endormy, &
porté sur vn precipice ; On vous a enleué
de nuit des bras de vos Subjets, &
nous vous voyons, SIRE, entre les
mains d’vn Ministre cruel & merueilleusement
estourdy ; de prendre les armes
pour luy courir sus, ayant en sa disposition
vn si cher & si pretieux gage,
c’estoit commettre trop temerairement
vostre sacrée personne, & l’enuelopper
dans le peril. Le precipice où il vous a
porté auec tout vostre Estat, sa condition
d’estranger, & son imprudence naturelle,
rend vostre peuple excusable,
de n’auoir jetté en ce rencontre que des

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larmes, & attendu dans les tremblemens
continuels ce qui en pouuoit arriuer.
Tout nostre crime, SIRE, est d’auoir
souffert aupres de Vostre Majesté,
vn animal deguisé, qui a trouué dans
vostre Royaume ce qu’vn autre, aussi
adroitement que luy, rencontra chez les
Tyriens ; & s’est enfin saisi d’elle, lors
qu’elle reposoit sur les Palmes que son
Parlement luy auoit cueilly. Il importe
de leuer les sinistres impressions qu’on
luy donne de ses plus fideles seruiteurs,
dont on fait passer pour rebellion, le
zele & l’ardeur de respandre leur sang
pour le soustien de la Couronne ; Magistrats
vrayement dignes des charges
qu’ils exercent, si le gouuernement d’vn
ambitieux & trop violent Ministre, n’auoit
esté indigne d’eux. Mais il est temps,
SIRE, de rejetter d’vn regne si innocent,
ces marques funestes & ces images

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sanglantes qui s’offrent à nostre souuenir,
quand nous voyons des gens qui se
portent courageusement à deffendre vostre
Estat ; de dire celuy-là a esté banny,
& celuy-cy empoisonné. L’exil & les
supplices ne sçauroient plus ternir le vif
esclat de leur Pourpre. Et si c’est vn office
de pieté, de fermer les yeux à ses
amis, & les composer à la mort ; Venez,
SIRE, voir expirer vostre peuple, &
vous trouuerez leurs Magistrats, quand
ils ne pourront faire autre chose, luy
rendre encore ce dernier deuoir, & se
remettre entre vos bras. Mais d’esperer
qu’vn mauuais Conseil les fasse honteusement
fleschir, sous la main sacrilege
d’vn meschant Ministre, eux qui ne
peuuent perir qu’auec la Monarchie,
les Loix de vostre Estat ne le peuuent
souffrir ; non ces pensées sont trop funestes.
Reuenez IEVNE PRINCE,

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les Dieux & les Rois n’ont pas des peuples
pour les faire languir. Le Soleil
chasse la tristesse du Ciel, & resioüist toute
la terre, & la presence du Roy n’apporte
que de la joye & du soulagement
à ses Subjets ; C’est vne lumiere esclattante,
dit Salomon, qui dissipe & perce
tous les nuages, lumiere, marque de la
Royauté, d’où les Empereurs de Constantinople
faisoient tousiours porter deuant
eux vne lampe ardente, pour dire
que la lumiere n’esclairant iamais pour
soy, mais pour faire voir les autres, aussi
que la Royauté ne regarde que le bien
des Subjets. Vous verrez, SIRE, que
tous vos peuples jetteront plus que jamais
les yeux sur Vostre Majesté, vous
n’entendrez que des paroles de resioüissance,
& des acclamations publiques ; &
si autresfois en France les Rois, au retour
des batailles, estoient portez par les

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Princes sur leurs Boucliers, & ainsi exposez
à la veuë de leur peuple, à vostre
arriuée dans Paris, vous serez porté
sur les cœurs de vostre peuple, vray
bouclier des Rois, desquels enfin pour
marque de fidelité, il vous fera des victimes
& des sacrifices, comme je fais à
present du mien & de mes tres-humbles
seruices. Qui suis & seray à jamais,

 

Le chien
de Tyr
qui trouua
la
Pourpre.

De vostre Majesté,

Tres-humble, tres-obeïssant,
& tres-fidele seruiteur &
sujet, I. A. D.

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