La Mère de Dieu, Pierre de (dit Bertius, Abraham) [1647], LES VERTVS ROYALES D’VN IEVNE PRINCE. , français, latinRéférence RIM : Mx. Cote locale : B_1_1.
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De l’amour que les François ont naturellement
pour leur Monarque.

CHAPITRE XXV.

SI c’est vne gloire incomparable à vn ieune
Prince, de posseder les volontés de ses subiects,
c’est aussi vne marque infaillible, de la satisfaction
des peuples, qui ne souhaittent rien
tant que de viure sous vn regne d’amour, & de
douceur. La seule qualité de Souuerain, engage
toutes les nations à aymer leur Prince, & il n’est
point de subiect qui ne soit obligé, de cherir son
Monarque, comme la principale, & la plus importante
partie de l’Estat ; Neantmoins nous
voyons dans plusieurs endroits, que les peuples
n’ont pas beaucoup d’inclination pour leurs
Roys, & n’estoit la force qui les contraint, ils
seroient contens de secoüer le rude ioug de leur
seruitude.

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Il n’est rien au monde, à comparer à la Monarchie
Françoise, où les Roys sont tenus pour
les peres de la Patrie, les Protecteurs des peuples,
les defenseurs du repos public, & tous les François
contractent originairement de l’inclination
pour leurs Monarques : cela est si veritable, qu’il
n’est point de subiect en France, qui ne prodiguast
volontiers sa vie, ses biens, son honneur, &
tous ses interests, pour conseruer ceux de son
Prince : comme on a connu au rachapt de sainct
LOVIS, quand il fust pris des Turcs, & des Barbares,
tout le Royaume contribua volontiers à
payer sa rançon, & à le deliurer de la captiuité.
Le mesme arriua sous François I. que les malheurs
de la Guerre d’Italie, auoient fait tomber
entre les mains de ses ennemis, tous les Estats de
France épuiserent leurs finances, pour obtenir
promptement la liberté de leur Monarque.

L’Affectiõ
des peuples
François a
paru au rachapt
de leurs Roys.

N’est-ce pas l’affection des peuples, qui les fait
souffrir l’insolence des Officiers de la Couronne,
qu’on voit souuent abuier de l’authorité, que leur
donne sa Maiesté ? N’est-ce pas l’amour qui reduit
les subiects, à vne si parfaitte obeїssance, qu’vn
chacun reçoit volontiers les ordres du Roy ? n’est-ce
pas vn effect de l’amour du public, de voir que
le seul titre, ou le nom de Prince Souuerain, est
capable de faire plier tous les Estats au gré de Sa
Maiesté ? i’attribuë encore à l’affection des peuples,
le grand soin qu’ils apportent, à honorer

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les pourtraicts de leur Roy, quand il seroit en enfance :
chacun le fait tirer, pour auoir deuant ses
yeux celuy qui est graué profondément dans son
cœur, & dans ses pensées.

 

Les Empereurs Romains ne pouuoient manquer
de posseder les bonnes-graces des peuples,
puis qu’ils estoient éleués à cette charge, par la
voix commune de la Noblesse, de la Milice, &
du peuple ; il ne leur estoit pas beaucoup difficile,
de conseruer vne amitié si estroittement attachée
à leur personne. Et ie ne m’estonne pas de voir,
que dans les Monarchies, où les Roys sont électifs
(comme en Allemagne en Pologne, & en
Hongrie,) les peuples cherissent les Princes,
qu’ils ont choisis pour les gouuerner ; puis que la
raison veut qu’ils ne changent point facilement
d’inclination ; Mais en France ou la Couronne
est hereditaire, les peuples ayment les Princes,
tels qu’il plait à la Diuinité les donner ; quand
mesme ils ne seroient pas tant bien qualifiés : il
suffit qu’ils leur soient presentés des mains de la
tres-sage prouidence, pour leur estre grandement
aymables.

Ie me reprens, les peuples François ont bien
d’autres considerations pour échauffer leurs volontés,
en l’amour de leurs Monarques : & ie ne
crois pas que les nations estrangeres, leur puissent
disputer cet auantage. Si nous auons remarqué au
Chapitre 22. que l’affabilité, & la courtoisie des

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ieunes Princes exercent vn puissant Empire, sur les
affections des peuples ; où trouuera-t’on des Souuerains
affables, comme les Roys de France ? où
verra-t’on des Monarques se produire si familierement,
caresser si tendrement leurs subiects, cõme
en ce Royaume ? Et c’est à quoy i’attribuë l’ardent
amour, que les François nourrissent pour
leur Prince : amour tres-iuste, amour caractherizé
dans le cœur des veritables subiects de la Couronne.

 

Il n’y à
point de
Princes au
monde aimables
cõme nos
ieunes Monarques,

Les Seigneurs estrangers sont extasiés à la
veuë de la personne Sacrée de nos Roys, comme
la sage Reyne du Midy, fust rauie au premier regard
de Salomon, & demeura interditte en sa
presence ; ainsi les Princes qui ont le bon-heur
d’approcher de nos Souuerains, sont tout transportés
voyant le bel ordre de la Cour, la diuersité
des Officiers, l’intelligence de la Noblesse, &
la disposition merueilleuse de la maison Royale,
où sa Maiesté éclatte comme vn Soleil enuironné
d’estoilles, qui allume de sa clarté les Astres du firmament.
Si les Estrangers sont touchés d’amour
pour nos Monarques, quoy qu’ils n’exercent sur
eus aucun Empire, faut-il s’estonner que leurs
propre subiects les ayment si tendrement, ou
qu’ils prennent part en la gloire de leurs Souuerains ?
cela n’est pas seulement iuste, mais encore
naturel, & vn peuple ne peut démentir le panchant
de ses inclinations, qui le porte à aymer

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la premiere personne du Royaume.

 

Pour moy ie n’attribuë pas la Felicité de nos
Estats, ou la gloire de nostre Monarchie, à la
force de nos Armes, ny au grand nombre de nos
soldats, ny à la prudence de nos Capitaines, ny à
la redoutable puissance de nos villes ; Mais ie croy
que la France subsiste depuis tant de Siecles, par
l’estroitte vnion des peuples auec leur Prince, &
par l’affection sincere, qu’ont tous les bons François
pour leur Monarque : c’est ce qui nous rend
redoutables aux nations estrangeres, venerables
à nos alliés, inuincibles à nos ennemis. L’Amour
de nos Roys, fait que nos soldats combattent en
Capitaines, & qu’ils tiennent à honneur de mourir
pour leur Souuerain. Cependant que les peuples
conserueront ces bons sentimens, les affaires
publiques de l’Estat prospereront, la France sera
Triomphante, les Lis éleués iusques aux Astres ;
comme au contraire, quand les affections viendront
à se refroidir, ce ne seront que mal-heurs,
que disgraces, qu’infortunes, que miseres ; bref,
ce sera la ruine de la Monarchie. Les François
ont le cœur trop bien placé, pour commettre vne
telle lascheté, ou pour se refroidit dans vne affection
si saincte, si iuste, si ancienne, si loüable,
& si profitable à l’Estat.

La France
florissante
par l’affection
sincere
des
peuples à
leur Monarque.

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