Anonyme [1652], SVPPLICATION OV REQVESTE PRESENTEE A. S. A. R. SAMEDY DERNIER, Par les Bourgeois qui s’estoient assemblez le Vendredy 21. Iuin 1652. à la Place Royale, pour y resoudre ce qu’on auoit à faire sur le sujet des affaires du temps. , françaisRéférence RIM : M0_3733. Cote locale : B_5_28b.
SubSect précédent(e)

SVPPLICATION OV REQVESTE
presentée à S. A. R. Samedy dernier, par les
Bourgeois qui s’estoient assemblez le Vendredy
21. Iuin 1652. à la Place Royale, pour y resoudre
ce qu’on auoit à faire sur le sujet des
affaires du temps.

A Monseigneur le Duc d’Orleans.

SVPPLIENT tres-humblement
vostre Altesse Royale tous les Bourgeois
& Habitans de la Ville & Fauxbourgs
de Paris ; Disants, qu’ils esprouuent
depuis long-temps, auec beaucoup
de souffrance, & vne perte tres-sensible, que
les prodigieuses langueurs dont on vse, pour
mettre fin aux desordres que la presence du
Cardinal Mazarin cause par tout le Royaume,
& notamment dans cette Ville, ne tendent qu’à
nous conduire insensiblement dans le dernier
desespoir, par la subuersion entiere de toute la
campagne, qui s’en va estre entierement desolée
par la perte de la recolte, que les armées des
deux partis nous empescheront de faire, si l’on
ne termine bien-tost ces miseres par vn effort

-- 4 --

vniuersel qu’vn chacun se prepare de faire,
pour seconder les bõnes intentions de V. A. R.
de Nosseigneurs les Princes, & des autres personnes
bien zelées pour le repos public, touchant
l’expulsion du Card. Mazarin, sans esperance
de retour : Pour lequel sujet nous nous
sommes aujourd’huy tous assemblez à dessein
de vous asseurer, Monseigneur, que nous sommes
tous prests d’exposer nos biens & nos vies,
pour tesmoigner à V. A. R. le desir que nous
auons d’y contribuer de l’vn & de l’autre, la
suppliant d’accepter cette fois, pour la derniere
de toutes, les offres que nous luy faisons, d’vne
partie du peu de bien qui nous reste, pour faciliter
la perte de cét Estranger le plustost qu’il
nous sera possible ; n’estans point du tout en resolution
de souffrir qu’on nous meine plus par
le bec auec les longueurs, que les mal intentionnez
causent dans toutes les deliberations
qui se font sur ce sujet ; parce que s’il est question
de le chasser, il faut l’executer promptement,
puisque contribuants de tout ce qui dépendra
de nous pour l’accomplissement d’vn si bon
dessein ; nous ne demãdons qu’à marcher nous-mesmes
auec vos Troupes, de la maniere qu’il
sera iugé estre à propos, sous la conduite de
Monseigneur le Prince, par tout où nostre ennemy

-- 5 --

pourra se refugier, afin de le perdre auparauant
qu’il acheue le degast entier de toute
la campagne. Et n’ayants point voulu venir
tous en confusion en importuner V. A. R.
dans sa chambre, nous auons iugé à propos de
supplier Monseigneur le Duc de Beaufort d’auoir
la bonté de luy presenter nostre Requeste,
que nous eussions tous volontiers signée de
nostre sang, s’il eust esté besoin ; si l’on ne nous
eust fait esperer que V. A. R. prendroit la peine
de mettre la teste à la fenestre pour receuoir
nos protestations, luy offrans d’vne main nos
biens, & de l’autre nos espées pour executer
aueuglément ses ordres, pourueu que dans bref
l’on nous deliure des miseres que nous souffrons,
sur l’esperance que nous auons d’estre
défaits pour iamais de nostre ennemy commũ ;
estans dans l'impatiece d’en voir vne fin ou
autre, en y perissant, ou le vainquant ; puisque,
comme nous auons désja dit, nous esprouuons
auec tant de douleur que la longueur ne nous
fait que miner peu à peu, pour nous oster enfin
le moyen de pouuoir plus resister aux pernicieuses
entreprises de nostre Tyran. Et afin
de mieux reüssir dans ce dessein, nous suppplions
tres-humblement vostre Altesse Royale de representer
ce matin au Parlement nos miseres

-- 6 --

& nos resolutions, n’estans plus en estat d’en
attendre l’euenement que par vn bon Arrest
d’vnion, afin que les Partisants mesme du Cardinal
Mazarin ne puissent s’exempter de contribuer
aussi bien à la perte de leur Maistre,
qu’ils concourent tous secrettement auec luy à
la nostre ; protestants deuant Dieu, & V. A. R.
que si Messieurs du Parlement nous refusent
cette vnion, si necessaire pour paruenir au dessein
que nous auons, aprés qu’elle aura pris la
peine de leur raconter nos sentimens, nous
sommes tous resolus de fermer nos boutiques,
de prendre les armes, & de ne les point quitter
que nous n’ayons mis main basse sur tous ceux
qui s’y opposeront, n’y ayant rien qui nous ait
retenu iusques à present, que le seul respect que
nous auons tousiours eu pour V. A. R. à qui
nous auons estimé deuoir declarer nos sentiments
au parauant de rien entreprendre ; voulants
absolument en sortir ce matin par cette
voye, ou nous défaire de tout ce qui y seruira
d’obstacle sous quelque pretexte que ce soit,
dans la resolution que nous auons prise de sçauoir
quel party ils veulent tenir auant passer
outre. CE CONSIDERÉ, Monseigneur,
qu’il plaise à vostre Altesse Royale de ne nous
point refuser d’en parler aujourd’huy au Parlement,

-- 7 --

afin qu’on ne nous laisse pas tomber dans
le dernier desespoir par des delais si preiudiciables
au bien public, qui pourroient enfin faire
refroidir les plus eschauffez, affoiblir nostre party,
& renforcer celuy de nostre ennemy. Nous
attendons donc ce matin la resolution du Parlement
sur ce sujet, protestãs derechef à V. A. R.
que voyant les apparences euidentes d’vne
prompte execution, nous n’espargnerons ny
nos biens, ny nos vies pour l’accomplissement
de ce dessein ; ne tenant point à nous qu’on ne
fasse bien-tost dans Paris des forces & d’hommes
& d’argent, suffisantes pour nous deliurer
de nostre Tyran. Dans l’esperance que nous
auons, qu’acceptant nos prieres & nos offres,
l’on nous en donnera cejourd’huy vne bonne
issuë, nous nous allons disposer à tesmoigner à
V. A. R. que dans cette rencontre & dans toute
autre, nous sommes auec toute sorte de respect
& de soûmission,

 

Monseigneur, de V. A. R.

Les tres-humbles, tres-obeïssans, tres-fidels,
& respectueux Seruiteurs,
LES HABITANS DE LA VILLE ET
FAVX BOVRGS DE PARIS.

-- 8 --

SubSect précédent(e)


Anonyme [1652], SVPPLICATION OV REQVESTE PRESENTEE A. S. A. R. SAMEDY DERNIER, Par les Bourgeois qui s’estoient assemblez le Vendredy 21. Iuin 1652. à la Place Royale, pour y resoudre ce qu’on auoit à faire sur le sujet des affaires du temps. , françaisRéférence RIM : M0_3733. Cote locale : B_5_28b.