Anonyme [1649], SVPPLICATION FAITE AV ROY, POVR AVANCER LE PROCEZ DES PARTISANS ET FINANCIERS de son Royaume. , françaisRéférence RIM : M0_3732. Cote locale : C_10_23.
Section précédent(e)

SVPPLICATION FAITE
AV ROY,
POVR AVANCER
LE PROCEZ
DES
PARTISANS
ET
FINANCIERS
de son Royaume.

A PARIS,
Chez NICOLAS DE LA VIGNE,
prés Sainct Hilaire.

M. DC. XLIX.

AVEC PERMISSION.

-- 2 --

-- 3 --

SVPPLICATION FAICTE
AV ROY,
POVR AVANCER
LE PROCEZ
DES PANTISANS
ET FINANCIERS
de son Royaume.

SIRE,

Le titre de Roy tres Chrestiens
vous estant essentiel, & qui par les
vertueuses action que vous pratiquez

-- 4 --

dans vne âge qui semble n’auoir
aucun commerce auec la vertu promettez
à toute la France d’estre le
plus iuste de tous vos predecesseurs ;
C’est a vostre Majesté que s’adresse
cette supplication pour la prier de
ietter son œil de misericorde sur la
face de ce Royaume & de parcourir
toutes ses Prouinces, & s’arrester vn
peu de temps à contempler le deplorable
estat dans lequel sont reduits
tant de millions de vos pauures sujets
qui nuict, & iour gemissent accablez
sous le faix de tant de miseres & de
malheurs. Mais aussi qu’il luy plaise
de tourner d’vne autre part celuy de
sa colere & de son iuste courroux sur
ces infames Partisans, & sur tous les
fauteurs & adherans de ces inhumains
Financiers pour faire examiner,
leurs actions & mœurs desreglez.

 

N’est ce pas vne chose monstrueuse,
Sire, de voir des personnes de neãt

-- 5 --

& de vile condition d’auoir sait en si peu de
temps de si grandes acquisitions, de si merueilleuses
despenses, & de si superbes bastimens
qu’ils surpassent en magnificence, vos
Louures & vos Palais. N’est-ce pas dis ie vne
chose bien prodigieuse que ces mesmes personnes
se voyãs esleuees au plus hautes charges
& dignités de vostre Royaume foulent
aux pieds le respect qu’ils doiuent à vostre
Maiesté, saccagent & d’estruisent vos villes,
bouleuersent & ruinent vos Prouinces, desolent
tout vostre Royaume, volent vos tresors
& vos finances, & enfin taschent d’arrester
le cours heureux de vos armes & de renuerser
vostre couronne & vostre sceptre.

 

Courez donc Sire & ne vous arrestez point
à escouter la voix charmante de ces Sirenes
qui par leur chant trompeeu taschẽt de vous
surprendre si vostre prudence ne resistoit à
leur charmes & ne vous faisoit euiter leurs
pieges

Que vostre Maiesté, Sire, ne traite point
ce corps par compositions, ny de main-morte,
qu’elle n’esbranle point cét Arbre par abolitions,
mais qu’elle porte la coignee â la
racine qu’elle extirpe & foudroye cét infame
troupeau.

-- 6 --

Vostre Maiesté, Sire, n’ignore pas qu’il ne
soit tres-dangereux de mignarder de semblables
Monstres qui souuent apres estre appriuoisez
s’efforcent de perdre & de ruiner
ceux mesmes, ausquels ils sont redeuables
de leur vie & de leurs biens.

Cette maudite race doit estre comparee à
ces rats qui sont dans les minieres d’où l’on
tire l’or, lesquels deuorent la mine, & desquels
neantmoins on ne peut tirer aucun
seruice, sinon qu’estans morts on en fait des
anatomies. Et ie prie vostre Maiesté de cõsiderer
qu’vsant de sa clemence ordinaire à
l’endroit de ces sansuës du peuple, & que
leur conferant de nouuelles faueurs, ils ne
s’en seruiront que pour authoriser leurs mauuais
desseins & pour entretenir leur vices.
Car si vous pensez les obliger pour en auoir
du secours en quelque extreme necessité,
vous experimenterez bien-tost la verité du
dire de ce fameux & celebre Philosophe de
l’Antiquité Crates, qui asseure que l’argent
de telles gens ressemble aux figues qui croissent
dans les hautes mõtagnes & lieux inaccessibles,
ausquelles les hommes ne peuuent
atteindre, mais seulement les Corbeaux &
les Milans & les autres oiseaux de cette nature

-- 7 --

qui sont les viues Images de ces cruelles
Harpies.

 

Toutes ces veritez, Sire, sont si connuës
que personne n’en peut douter estans confirmees
par vne infinité d’exemples qui se rencontrent
dans les histoires, on remarque
qu’Henry le Grand vostre ayeul, quoy qu’il
eust reconneu les tours ordinaires de ces pestes
de royaume, esprouué au plus fort de
ses affaires leur infidelite, & receu les pleintes
de leurs abus, neantmoins par vn excez
de bonte leurs auoit octroyé le pardon &
l’abolition qu’ils luy auoient requise, mais
ils sçeurent si mal vser de la clemence de ce
grand Monarque que deuenans de iour en
iour plus insolens. Ils ne continuerent pas
seulement leur maluersations, mais s’estudierent
à les augmenter & à les fomenter auec
plus d’artifice qu’auparauant.

Tant il est vray, Sire, que telles personnes
n’ont point d’autres inclinations qu’au mal
qu’elles sont tout a fait incapables de faire
aucun bien, & bien qu’ils ayent espuisé toutes
les finances de vostre Royaume pour se
rendre riches & puissans, ils sont toutefois
si barbares qu’ils ne sont touchez d’aucunes
calamités, publiques, mais tout au contraire

-- 8 --

ne respirent que le sang & le carnage de vos
peuples, & la ruine entiere de vos Prouinces
pour accroistre leurs richesses establir leur
puissance, & affermir leur souuerainetez. Ie
diray de plus (fi vostre Maiesté me le permet)
que leurs insatiable auidite est si grande
que si vostre personne estoit sur le penchant
d’vn precipice de malheur (dont Dieu
la veille preseruer) tout vostre Royaume
bouleuersé ces traistres & perfides les laisseroient
miserablement perir plutost que de
vous donner aucun secours.

 

Nous ne doutons point, Sire, que vous
n’ayez assez de bonté pour prester l’oreille
aux iustes pleintes de vos pauures sujets, &
que bien tost ces malheureux & abominables
ne ressentent les effets de vostre Iustice,
commencess doc, Sire sans plus tarder à l’ancer
vos foudres sur ces testes criminelles, afin
que par leur aneantissement vous puissiez
rendre à vostre Royaume cette paix qui est
desiree depuis vn si long-temps.

FIN.

Section précédent(e)


Anonyme [1649], SVPPLICATION FAITE AV ROY, POVR AVANCER LE PROCEZ DES PARTISANS ET FINANCIERS de son Royaume. , françaisRéférence RIM : M0_3732. Cote locale : C_10_23.