Anonyme [1652], RESPONSE A LA PRETENDVE DECLARATION DV ROY, Sur le sujet de la Paix, nuitamment affichée. Auec les procedures criminelles faites contre les Autheurs, Afficheurs, & leurs complices. , françaisRéférence RIM : M0_3371. Cote locale : B_16_35.
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RESPONSE
A LA PRETENDVE
DECLARATION
DV ROY,
Sur le sujet de la Paix, nuitamment
affichée.

Auec les procedures criminelles faites contre les
Autheurs, Afficheurs, & leurs complices.

A. PARIS.
Chez IEAN BRVNET, ruë saincte Anne.

M. DC. LII.

Auec permission de Son Altesse Royale.

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Response à la pretenduë Declaration
du Roy, sur le sujet de la
paix, nuictamment affichée,
Auec les procedures criminelles
faites contre les Autheurs,
Afficheurs, & leurs
complices.

CE n’est point aucun interest qui m’a poussé
à respondre à la pretenduë Declaration de
Sa Majesté du 26. Septembre, portant les
modifications de l’Amnistie generale, que l’on met
signé LOVIS, & plus bas, DE GVENEGAVD, mais
seulement le zele que ie dois auoir pour ma patrie,
estant Bourgeois desinteressé, sans auoir pris aucun
party, si ce n’est celuy de nostre commune seureté,
ny le Mazarin, ny le Frondeur, ne me doiuent point
auoir pour suspect, & partant ie diray icy franchement
mon sentiment. Premierement, ie soustiens
qu’elle peche dans ses formes, puis qu’on luy a donné
vn titre qu’elle ne merite point, qui est celuy de
Declaration du Roy, portant les modifications de
l’Amnistie generale, &c. Ioint qu’estant imprimée
sur vn simple placart, où il y a en teste, De par le

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Roy, & commençant par ces mots, Sa Majesté, &c.
Elle doit plustost estre appellée ordonnance, estant
semblable à celle qu’on a de coustume d’afficher à
la suite de Sa Majesté pour la police de la Cour, ou
pour la marche des troupes, ou Sauue-gardes, qui se
mettent au dessus des portes, signées d’vn Secretaire
d’Estat, & ainsi, quoy que l’intention du Roy
soit tres-innocente, ne souhaittant autre chose que
de donner la paix à ses peuples, nous voyons par là
que sa bonté a esté surprise par son Conseil.

 

Dailleurs, puis qu’il plaist à Sa Majesté tesmoigner
sa bienueillance enuers ses peuples, & qu’elle
veut rendre le repos à ses sujets, que le retour du
C. M. au preiudice de la Declaration du sixiesme
Septembre luy auoit osté, il est absolument necessaire
qu’elle donne vne Amnistie generale en
bonne forme & sans reseruation, cu plustost vn
Edict general de pacification, ainsi qu’il s’est pratiqué
sous ses predecesseurs Roys, & entr’autres sous
le feu Roy Henry le Grand, d’heureuse memoire,
lors des troubles de la Ligue, & de ceux de la Religion
Pretenduë Reformée, & mesme du temps du
feu Roy Louys XIII. que Dieu absolue, lors des
troubles de feu Monsieur le Prince pour le Mariage
de Sa Majesté, & autres mouuemens qui sont
suruenus depuis, & que l’Edict soit ample & clairement
exprimé, & non en termes obscurs &
equiuoques, & comprenne toutes sortes de personnes
indifferemment, de quelques qualitez ou

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conditions qu’elles puissent estre, & sellé en cire
verte, en forme de Chartre, ainsi qu’il est accoustumé,
& non pas faire des exceptions tacites,
d’autant que c’est donner sujet de deffiance aux
Princes & autres Seigneurs & Officiers de la
Cour, qui n’y sont point desnommez, & mesmes
aux Bourgeois les mieux sensez, quoy qu’ils
y soient precisément compris : car quelle apparence
y auroit-il de croire que le Roy voulut pardonner
aux Bourgeois & Habitans de Paris, &
à ceux mesmes qui ont excité l’incendie de l’Hostel
de Ville, puis que nous voyons par ladite pretenduë
Declaration, qu’il ne pardonne pas mesme
aux Princes, qui sont ses plus proches. Vous
auez veu comme ces mots y sont particulierement
exprimez & repetez à l’égard des Bourgeois
& Habitans de ladite ville de Paris : Et d’autres
qui portent, que le Roy a reconnu qu’ils y
auoient esté entraisnez par force, par certains mal
intentionnez. Pour faire donc vne Amnistie parfaite,
il faudroit pardonner aussi à ces certains
mal-intentionnez. Mais posons le cas qu’elle sortist
son entier effet, quand le Roy auroit pardonne
à tous les Bourgeois & Habitans de Paris,
aurions nous pour cela la paix ? Les Princes n’ontils
pas tousiours leur armée à la campagne, ne
pourroient-ils pas ruiner nos enuirons, & mesmes
tous les pays où ils iugeront à propos d’aller,
& puis si tant estoit qu’ils eussent des intelligences

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secrettes auec les Estrangers, ne pourroient-il
pas tousiours les introduire dans le
Royaume, cherchant leur seureté au peril de l’Estat,
retournerions-nous pour cela dans nostre
premiere felicité, comme dit ladite pretenduë
Declaration, ayant encore deux armées à nos
portes qui se grossiroient tous les jours : Mais si
plustost Sa Majesté estoit bien conseillée selon sa
bonne inclination, elle comprendroit lesdits
Princes & Officiers, dans vne Amnistie en bonne
forme, & si lesdits Princes faisoient en quelque
façon refus d’y satisfaire, ou qu’ils prissent quelque
nouueau pretexte, pour ne pas mettre bas les
armes, ce seroit alors que non seulement tous les
Bourgeois & Habitans de Paris, mais mesme
tous les sujets du Royaume prendroient les armes
pour faire obeyr Sa Majesté, & luy feroient
voir qu’ils respandroient volontiers leur sang,
pour maintenir son autorité & sa Iustice.

 

Au regard des termes portez par ladite pretenduë
Declaration ou placart, qui font voir que
Sa Majesté a enuoyé ses Lettres de Iussion, pour
faire leuer les modifications portées par Arrest de
verification de l’Amnistie, elles ne peuuent estre
valables, puis que dans les articles de la Paix, que
l’on propose, l’on approuue le pretendu Parlement,
composé seulement de quinze ou seize Iuges
mal intentionnez pour le bien public, & qui
n’y sont allez que pour leur interest, comme quelques-vns,

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pour estre premiers Presidents, & qui
neantmoins prononcent les Chambres assemblées,
quoy que chacune Chambre doiue estre
composée au moins de douze Iuges, selon les termes
de l’Ordonnance, joint que ce ne pourroit
estre proprement vne Amnistie Generale, puis
que le mot Grec d’Amnistie est vn oubly general
des choses qui se sont passées de part & d’autre
durant la guerre, sans reseruation d’aucune peine
ny chastiment. Or ce seroit vne punition assez
grande à la Ville de Paris, que de transferer, contre
les loix de l’Estat, le Parlement ailleurs, & par
consequent ladite Amnistie n’est pas dans sa perfection,
ny telle qu’il la faut pour la seureté publique.
Il faut donc de necessité qu’elle soit verifiée
à Paris, & que les choses soient remises au
mesme estat qu’elles estoient auparauant la guerre.
Le public ayant interest qu’elle soient verifiées
au mesme Parlement, où tous les Edits de
pacification ont tousiours esté verifiez, qui est
proprement le Parlement de France, & le Parlement
des Pairs, & où Sa Majesté à son lict du Iustice,
afin d’oster toute sorte de deffiance au peuple.
D’auantage si l’on auoit accordé cette verification,
se seroit approuuer ledit pretendu Parlement
de Pontoise, ou au moins la subsistance de
deux Parlemens, à six lieuës l’vn de l’autre, par le
destachement de celuy de Paris, ce qui est contre
le sens commun mais plustost que par l’Amnistie,

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qu’il plaira à Sa Majesté de faire expedier, tous
les Officiers qui sont à Pontoise, reuiennent dans
le Parlement à Paris, pour y faire leur fonction
comme auparauant, ainsi que le feu Roy Henry
le Grand, (sans neantmoins faire aucune comparaison
des troubles de la Ligue à ceux-cy)
apres auoir donné la Paix à tous ses Sujets, reunit
les Officiers qui estoient à Chaalons & à
Tours, à ceux qui estoient demeurez à Paris.
Il est donc maintenant facile à connoistre, qu’il
n’y a point lieu de s’asseurer sur cette pretenduë
Declaration, joint que le procedé de ses Auteurs,
contre lesquels l’on informe, la rend fort suspecte,
l’ayant fait afficher de nuit, pour surprendre
les simples, & qu’il est tres-iuste, d’en demander
vne en la forme que dessus, ce que nous prions
Dieu qu’il veuille inspirer à Sa Majesté, & qu’elle
bouche les oreilles aux conseils de ceux qui
craignent qu’vn accommodement leur fit perdre
le rang & le credit qu’ils se sont acquis, par le
moyen du C. M. pour en suitte reuenir dans son
trosne, jouïr des respects, & des obeïssances que
tous les peuples se preparent de luy rendre auec
vne inuiolable fidelité.

 

FIN.

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