Anonyme [1652], RELATION VERITABLE, CONTENANT TOVT CE QVI S’EST PASSÉ EN PARLEMENT, Le Samedy 19 Octobre 1652. en presence de Son A. Royale. Sur le retour de Sa Majesté en sa bonne Ville de Paris. , françaisRéférence RIM : M0_3196. Cote locale : B_5_6.
Section précédent(e)

RELATION
VERITABLE,
CONTENANT
TOVT CE QVI S’EST PASSÉ
EN PARLEMENT,
Le Samedy 19 Octobre 1652. en
presence de Son A. Royale.

Sur le retour de Sa Majesté en sa bonne Ville
de Paris.

A PARIS,
Chez IEAN BRVNET, ruë Sainte Anne.

M. DC. LII.

Auec permission.

-- 2 --

-- 3 --

Relation veritable, contenant
tout ce qui s’est fait & passé
en Parlement, le Samedy 19.
Octobre, en presence de Son
Altesse Royale.

SVR la Lettre que Sa Majesté a escrit à
Son Altesse Royale, Messieurs du Parlement
se sont assemblez cejourd’huy dix-neufiesme
Octobre, où Monsieur le Duc
d’Orleans s’est trouué, assisté de Monsieur le Duc
de Guise & de Monsieur le Duc de Beaufort, &
lecture faite d’icelle Lettre, & sur les points qui
regardent le retour du Roy à Paris, l’esloignement
des troupes de Messieurs les Princes sur la
Frontiere, & l’Amnistie Generale. Il a esté resolu
que Monsieur le Duc d’Orleans, seroit tres-humblement
supplié d’enuoyer Monsieur d’Aligre
à Sa Majesté, pour la supplier tres-humblement
de sa part, d’enuoyer vne Amnistie Generale,
en façon que tout le monde fut contant &
asseuré, ce qui accroistroit la ioye publique à son
retour tant desiré de tous les Bourgeois & Habitans,

-- 4 --

& rendroit l’entrée de Sa Majesté dans sa
bonne ville de Paris plus glorieuse, en y establissant
vn calme vniuersel.

 

De plus, Messieurs du Parlement ont supplié
Son Altesse Royale de ne point partir de Paris
qu’elle n’eut veu toutes les affaires pacifiées, & de
continuer tousiours à leur Compagnie sa bienueillance
& bonne volonté, ce que Son Altesse
leur a promis & asseuré.

Il y a bien de l’apparence que les affaires se pacifieront
bien-tost, & le retour de nostre Soleil
nous doit faire esperer qu’il dissipera par sa presence,
non seulement les nuages de la guerre &
la dissention, mais encor ceux de la crainte & de
l’apprehension, que quelques mauuais esprits
pourroient glisser dãs la simplicité du peuple : car
comme dit le Sage, Rex sedens in solo distipat omne
malum, & tout ainsi que ce n’est pas assez à vne
Ame saincte de s’abstenir du peché, mais encore
elle est obligée d’éuiter le scandale, selon S. Paul.
Ainsi ce n’est pas assez à vn bon Roy d’oublier
toutes les choses que ses peuples auroient pû faire
pendant les dissentions ciuiles, mais encore
il doit leur oster par toute sorte de moyens, la
crainte & la deffiance d’vn chastiment à venir, &
c’est ce que pratiquoit fort bien Auguste Cesar, à
l’endroit mesme de ceux qui conspiroient tous les
jours contre luy, comme il fit enuers Cinna &

-- 5 --

Maxime, puis que non seulement il leur pardonna
l’attentat qu’ils auoient fait contre sa personne,
mais encore leur donna, que dis-je, prodiga
de grands biens & de grandes largesses, ce qui
rendit ces deux grands hommes, les deux colomnes
mébranlables de ses Estats, & eurent tout depuis
part dans ses conseils & dans ses entreprises,
quoy qu’il n’y ait point de comparaison de nos
mouuemens à leurs factions detestables. Neantmoins
nostre Monarque ne cedant en rien à la
vertu d’Auguste, nous pouuons bien à plus forte
raison esperer toutes sortes de marques de sa
bonté & protection : aussi sur cette confiance
il n’y a point de Bourgeois dans Paris qui ne saute
de ioye à la nouuelle du retour de Sa Majesté,
& Messieurs les Colonels y sont allez en personne
pour luy en rendre des tesmoignages assurez,
de la part de toute la Ville. Nous ne doutons pas
que Sa Majeste de sa part ne leue tous les sujets
de deffiance, qui pourroient naistre des mouuemens
passez, dans beaucoup d’esprits. Ce n’est
pas qu’on puisse objecter que les Bourgeois
de Paris ayent iamais rien commis directement
contre l’intention de Sa Majesté, leur dessein
ayant tousiours esté de luy obeïr & conseruer
son autorité, mais si l’on venoit à des recherches
scrupuleuses, on pourroit y enseuelir
beaucoup d’innocens ; & des gens de bien qui

-- 6 --

auroient des ennemis en Cour, ne pourroient
viure en asseurance dans le restablissement des affaires.

 

Ainsi afin que le calme soit vniuersel & la seureté
publique, nous supplions tres-humblement
Sa Majesté, que l’Amnistie soit generalle & sans
reseruation, afin que dans l’estenduë de sa clemence,
tout le monde soit à l’abry de l’oppression.
C’est ce qu’elle desire faire voir à son retour,
que nous attendons auec des impatiences
extraordinaires, puis que d’iceluy doit naistre nostre
premiere felicité, & la gloire de Sa Majesté,
qui n’est pas moins grande à triompher des
cœurs de ses sujets, comme des places de ses ennemis.

Surquoy on nous asseure que S. M. fera reuenir
quelques Officiers du Parlement qui estoient à
Pontoise, afin de les reunir ensemble, comme ils
estoient auparauant, & que pour rendre son retour
plus glorieux, elle enuoyera l’Amnistie Generale
pour estre verifiée au Parlement de Paris.
Si cela est ainsi comme nous esperons, iugez
qu’elle sera la ioye de tous les Parisiens, quelles
acclamations publiques, & quels ressentimens
d’obligations nous deuons tesmoigner à la bonté
de Sa Majesté, qui comme vn bon pere de
famille, court le premier au col de ses enfans
pour leur donner sa benediction, apres

-- 7 --

auoir esloigné celuy qui jettoit le trouble dans
la maison Royalle. C’est maintenant Messieurs
les Predicateurs de Paris, que vous deuez crier,
Parate vias Domini. Ouy, puis que Dieu nous
commande d’honorer nos Roys, & qu’il a dit
par l’Escriture, Dii estis in terra secuti ego sunt in cælis.
Nous leurs deuons preparer des voyes, nous
les deuons receuoir auec des réjouïssances publiques,
& toutes sortes de tesmoignages de fidelité,
particulierement aussi lors qu’à l’imitation
du Roy des Roys, ils viennent auec ces mots de
Pax vobis.

 

Messieurs les Colonels, ont esté regallez par
Sa Majesté splendidement, & leur a donné Audiance
fauorable, ils doiuent retourner au deuant
de Sa Majesté à son entrée à Paris, c’est ce qui
nous fait iuger, que Sa Majesté malgré tous les
enuieux, n’a pas oublié l’ancienne affection que
ses predecesseurs Roys ont tousiours eu pour Paris,
aussi Paris n’eut iamais plus de tendresse qu’il
en a pour son Roy, qui porte le titre de Dieudonné,
ayant tant fait de vœux au Ciel, pour sa
Naissance, & donnant à son peuple tous les tesmoignages
d’vn grand Roy. Il ne luy reste plus
qu’à faire les mesmes vœux pour vn Conseil digne
de luy : car vn grand Roy en France & vn
bon Conseil, est pour rendre tous ses sujets heureux,
& porter son Empire iusqu’aux extremitez

-- 8 --

de l’Europe. C’est ce que nous pourons voir vn
iour, apres le restablissement de nostre repos, &
l’extinction des guerres Ciuilles, qui donnent
lieu à nos ennemis de respirer, & de reprendre les
pays que la valeur de nos Chefs auoient conquis
sur eux durant nostre bonne intelligence. C’est
pourquoy nous deuons prier Dieu, qu’il conserue
tousiours l’Vnion dans la maison Royalle, &
qu’il veuille chasser les bouttefeux de la discorde,
qui souuent font mine de seruir le Roy, & ne
seruent qu’a leur propre interest, pour la conseruation
duquel ils ne se soucient pas d’hazarder
l’Estat de leur Maistre, & de respandre le sang de
ses meilleurs sujets.

 

FIN.

Section précédent(e)


Anonyme [1652], RELATION VERITABLE, CONTENANT TOVT CE QVI S’EST PASSÉ EN PARLEMENT, Le Samedy 19 Octobre 1652. en presence de Son A. Royale. Sur le retour de Sa Majesté en sa bonne Ville de Paris. , françaisRéférence RIM : M0_3196. Cote locale : B_5_6.