Anonyme [1652], RELATION VERITABLE, CONTENANT Tout ce qui s’est fait & passé en l’Assemblée du Parlement, le 8. Iuillet, tant pour l’Vnion generale, que pour le soulagement de la Ville de Paris. Auec l’arriuée des troupes de l’Archiduc Leopold, sous la conduite du Duc de Vvittemberg. , françaisRéférence RIM : M0_3193. Cote locale : B_8_28.
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RELATION
VERITABLE,
CONTENANT Tout ce qui s’est fait & passé en
l’Assemblée du Parlement, le
8. Iuillet, tant pour l’Vnion generale,
que pour le soulagement
de la Ville de Paris.

Auec l’arriuée des troupes de l’Archiduc Leopold,
sous la conduite du Duc de Vvittemberg.

A PARIS,
Chez IEAN BRVNET, ruë saincte Anne.

M. DC. LII.

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Relation veritable de ce qui
s’est fait & passé en la derniere
Assemblée du Parlement,
tant pour l’Vnion
generale, que pour le soulagement
de la Ville.

IL y a long-temps que le Peuple
languit sans pouuoir appliquer
le remede à son mal, on luy fait
accroire qu’il n’est pas malade,
quand il est sur le point d’expirer
d’vne fievre lente, qui le meneroit
insensiblement dans le tombeau, sans le
secours de ceux qui le veulent desabuser de cét
enchantement, & qui luy donnent les veritables
medecines pour se garantir de cette maladie.
Les Mazarins faisoient croire au Roy que
les bons Bourgeois de Paris ne demandoient
pas mieux que de receuoir Sa Majesté auec l’Eminence,
& qu’il n’y auoit que la canaille pour
les Princes, qui estoit payée pour crier point de
Mazarin, & esmouuoir la sedition. Ils ont toutesfois
pû apprendre le contraire par ce qui s’est

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passé à l’Hostel de Ville, où l’on a veu les Bourgeois
si animez à la sortie des Princes, quand ils
apprirent de leur bouche, que l’on vouloit remettre
à huitaine la resolution de l’Vnion, qu’il
ne s’en trouua aucun qui ne hazardast genereusement
sa vie pour les contraindre de donner
vn acheminement infaillible à la Paix, qui est
l’Vnion generale de la Ville contre le Cardinal
Mazarin. Vous l’auez appris desia par quelque
recit qui s’en est fait, quoy que tres-confus &
sans ordre : toutesfois i’oseray bien encore vous
dire que la bonté de Son Altesse Royale leur
tesmoigna des graces dont ils estoient indignes,
puis qu’apres auoir fait vne longue descharge de
fusils & mousquetons sur les peuples, qui ne
leur demandoient qu’vne chose iuste : Elle eut
encore la generosité de passer la nuict auec Monsieur
le Duc de Beaufort pour les garantir de la
fureur du peuple ; & de fait ils employerent toutes
sortes de moyens pour les faire sortir de leur
aueuglement, & voyant qu’ils s’y plaisoient, &
que le peuple ne leur vouloit point donner de
quartier, ils firent appaiser le tumulte sur les
trois heures du matin, & les firent sortir dudit
Hostel de Ville auec seure garde, quoy que les
Bourgeois ne leur voulussent point donner de
quartier, parce qu’ils en auoient tué plusieurs
dés leurs. Estant ainsi sortis ils promirent de

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donner l’Vnion contre le Mazarin, si longtemps
demandée : mais les Bourgeois insisterent
que ce seroit à cette charge, que le Mareschal de
l’Hospital se demettroit du gouuernement de
la Ville entre les mains de Monsieur le Duc de
Beaufort, & Monsieur le Preuost des Marchands,
de sa Preuosté entre les mains de
Monsieur de Bruxelles, ils furent relaschez de
cette sorte. Neantmoins pour leur faire voir
que l’on ne vouloit point vser de la violence ny
de la force des Bourgeois, pour rendre vne Iustice
si necessaire au peuple. On remit l’affaire
à l’assemblée du Parlement, pour signer par cette
Vnion generale, le salut de tous les peuples
ainsi échapez par la seule bonté des Princes,
d’vn peril inéuitable. Vne partie s’en sont allez,
& l’autre s’est trouuée le Lundy huitiesme Iuillet
à l’assemblée, pour donner leur voix à cette
Vnion, dont le retardement a tant fait languir
de miserables.

 

Monsieur le Duc d’Orleans, Monsieur le
Prince, & Monsieur le Duc de Beaufort y ont
assisté, Messieurs les Presidens au Mortier s’estans
absentez. Monsieur Cheualier Doyen de
la Grand Chambre a presidé, & plusieurs autres
Presidens & Conseillers s’y sont trouuez.
Enfin toutes les Chambres assemblées à la maniere
accoustumée ; Les Gens du Roy appellez,

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cinq choses pour le soulagement du peuple ont
esté resoluës.

 

La premiere, que l’Vnion generale de la
Ville auec Messieurs les Princes, seroit enregistrée
és registres de ladite Cour.

La seconde, que les Arrests du Parlement
concernant la Police seroient executez, & enjoint
à tous Officiers d’y tenir la main, & pour
cet effet vne Chambre de Police establie.

La troisiesme, que tous les Presidens & Conseillers
de la Cour estant en cette Ville, seroient
conuiez de venir faire leur charge, auec deffenses
à eux de desemparer.

La quatriesme, qu’il sera mandé à Messieurs
le Deputez proche la personne du Roy, de faire
en sorte d’auoir response de leur Deputation,
dans trois iours, sinon de prendre congé de sa
Majesté & reuenir faire leurs charges.

La cinquiesme & derniere, qu’il seroit informé
de tout ce qui s’est fait & passé à l’Hostel
de Ville, & qu’à cet effet Monsieur Laisné &
Gilbert Conseillers seroient commis : deffenses
à toutes personnes de s’atroupper, pour quelque
cause & occasion que ce soit, enjoint à icelles
de porter honneur aux Magistrats, & aux Bourgeois
de tenir la main à l’execution de tout ce
dessus.

L’assembléé finie, Messieurs les Princes sortirent,

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& Messieurs de la Cour auec la plus grande
tranquillité du monde, on entendit point crier
à l’ordinaire, & ne se fit aucun tumulte, parce
que les Mazarins causes des desordres estoient
absens : Il semble desia que l’absence de ces gens
là pronostique quelque repos, C’est ce qui fait
bien voir que si leur Chef estoient absolument
esloigné, nous aurions infailliblement la Paix ;
& beaucoup de personnes mal intentionnees, ne
prendroient plus ce pretexte de Mazarin, pour
faire des desordres & seditions dans cette Ville,
où les plus honnestes gens ne sont pas en asseurance.

 

Mais c’est tout ce qu’ils souhaitent à la Cour,
que le desordre & la sedition dans Paris, pour
diuiser les esprits, afin que cela refroidisse cette
grande auersion des peuples contre Mazarin, &
qu’on ne puisse acheuer tout ce qu’on a desia
heureusement commencé pour son esloignement.

La Reyne ayant apris tout ce qui s’est passé à
Paris en esté malade, & neantmoins paroist plus
obstinée que iamais, pour la conseruation de ce
Perturbateur du repos public. On dit que le Conseil
a donné Arrest, par lequel il declare les Parisiens
criminels de leze Mnjesté, auec deffense d’y
rien apporter sur peine de la vie ; mais neantmoins
quelqu’vns se sont opposez à cette iniustice.

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Ils ne sçauent plus ou traisner le Roy, quelqu’vns
disent qu’ils vont à Pontoise, d’autres à
Cõpiegne. L’Archiduc Leopold enuoye le Duc
de V vittemberg, auec huit à neuf mille hommes,
& a passé Fismes, l’oncroit que le Mareschal
d’Hoquincourt n’est pas assez fort pour s’opposer
à son passage. C’est pourquoy on l’attend
icy bien tost Messieurs les Deputez, qui sont
balotez à la Cour à l’ordinaire, ils ont leur logis
deuant celuy du Cardinal Mazarin, & neantmoins
ne sçauroient auoir d’Audiance. Il faut
pourtãt qu’ils songẽt à leurs affaires, car le temps
les presse ; puisque voila Paris declaré contr’eux,
ce qu’ils apprechendoient sur toutes choses, ils
deuroient proffiter des des-auantages qu’ils ont
eus, & ne pas attendre l’extremité, puis qu’ils
ont ressenty la valeur & la dexterité de Messieurs
les Princes, auec vne poignée de gens : Ils
ne sçauroient pas en auoir bon marché, auec
toutes les troupes qui viennent ioindre son armée.

 

FIN.

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Anonyme [1652], RELATION VERITABLE, CONTENANT Tout ce qui s’est fait & passé en l’Assemblée du Parlement, le 8. Iuillet, tant pour l’Vnion generale, que pour le soulagement de la Ville de Paris. Auec l’arriuée des troupes de l’Archiduc Leopold, sous la conduite du Duc de Vvittemberg. , françaisRéférence RIM : M0_3193. Cote locale : B_8_28.