Anonyme [1652], RELATION DE CE QVI S’EST PASSÉ AV PARLEMENT LE IEVDY III. OCTOBRE, En presence de Son Altesse Royale & de Messieurs les Princes. Et la Response de la Cour au sieur de Ioyeuse. Auec la prise de trois seditieux Mazarins, & l’accusation de leurs complices & adherans. Et le retour du Duc de Guise. , françaisRéférence RIM : M0_3122. Cote locale : B_8_41.
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RELATION
DE CE QVI S’EST PASSÉ
AV PARLEMENT
LE IEVDY III. OCTOBRE,
En presence de Son Altesse Royale
& de Messieurs les Princes.

Et la Response de la Cour au sieur de Ioyeuse.

Auec la prise de trois seditieux Mazarins, & l’accusation
de leurs complices & adherans.

Et le retour du Duc de Guise.

A PARIS,
Chez IEAN BRVNET, ruë saincte Anne.

M. DC. LII.

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Relation de ce qui s’est passé
au Parlement, le 3. Octobre,
en presence de Son Altesse
Royale & de Messieurs les
Princes.

Vous auez desia reconnu par la response
du Roy aux Deputez des six
Corps, qu’elle pouuoit estre l’intention
de la Cour & du Conseil du
Roy, & comme ils ne desirent dans Paris qu’vne
sedition ou diuision vniuerselle pour prendre
leur temps & faire entrer le Roy dans paris, en
cas que leur party se rendit le plus fort, qui sont
de tres-mauuais acheminemens à la paix, que
tous les miserables peuples de France sollicitent
auec grande instance & necessité. Celle que le
sieur de Ioyeuse a rapportée de la Cour est peu
differente, sur laquelle on s’est assemblé au Parlement
ce iourd’huy Ieudy troisiesme Octobre,
où Son Altesse Royale, Monsieur le Duc de Beaufort,
Monsieur le Duc de Guise, & autres grands
Seigneurs se sont trouuez.

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Ayant donc fait sçauoir au Parlement la volonté
du Roy sur la longue negotiation du sieur
de Ioyeuse, qui a rapporté, Qu’apres que Son Altesse
Royale auroit enuoyé toutes ses intentions,
& celles de Messieurs les Princes pour la paix, &
qu’elle les auroit signées de sa main, qu’alors le
Roy auiseroit si elles seroient iustes pour les accorder,
& que l’intention de Sa Majesté n’estoit
autre que de donner la paix à tous ses peuples.
Cette affaire mise en deliberation, la Cour auroit
ordonné, que de la part de Son Altesse Royale,
de Messieurs les Princes & du parlement, Sa Majesté
seroit tres-humblement suppliée d’enuoyer
vne Amnistie generale en bonne forme, sans aucune
reseruation, où Messieurs les Princes, Messieurs
du Parlement, & tous les Officiers, tant de
Robe que de Guerre, Bourgeois & Marchands
fussent compris, qu’elle fust adressée au Parlement
de Paris, & Arrest de verification d’icelle au
mesme Parlement, auec la reunion du Parlement
de Pontoise à celuy de Paris, & que toutes
choses fussent remises au mesme estat qu’elles
estoient auparauant la guerre : Durant laquelle
deliberation, pour faire voir la mauuaise intention
des Mazarins, qui ne tend qu’à mettre tout
Paris en desordre & en combustion, il s’est émeu
vn grand bruit dans la grand salle du Palais, de
gens apostez, qui crioient hautement & insolemment,

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Viue le Roy & la Paix, point de Princes,
lequel bruit estant paruenu iusqu’aux oreilles de
la Cour, auroit enuoyé quelques Huissiers pour
se saisir desdits seditieux, lesquels, auec l’assistance
des Bourgeois & Gardes de S. A. R. qui se seroient
trouuez dans ladite Salle, en auroient
constitué trois prisonniers en la Conciergerie,
par la quatriesme Chambre, qui sont la pluspart
des Mariniers, Crocheteurs, & Deschargeurs de
dessus les Ports, ausquels ayans commis les Sieurs
le Meusnier & Festeau, pour les interroger,
auroient confessez que certain Colonel nommé
Mouchy, les auroit fait assembler & menez au
Cloistre Nostre-Dame, où la femme d’vn Aduocat
nommé Guerin, leur auoit donné chacun
vne piece de trente quatre sols, & asseuroient que
ladite Dame auoit encore douze cens liures en
pareilles pieces, pour distribuer en semblables
occasions, mesme on en a reconnu quelques-vns
qui ont assisté à l’esmotion de l’Hostel de Ville,
ce qui fera qu’on les interrogera plus particulierement,
pour tirer esclaircissement de beaucoup
d’esmotions qui sont arriuées dans paris,
que l’on croit auoir esté fomentées par les Mazarins,
pour jetter la diuision parmy les peuples.
On informe aussi contre ladite Dame, qui est
voisine du sieur Preuost Conseiller, qui estoit le
Chef de cette derniere esmotion du Palais

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Royal, & il y a grande apparence de croire que
celle-là ayant manqué, par le bon ordre que
S. A. R. & Messieurs du Parlement y ont donné,
ils ont hazardé cette derniere, qui ne leur a pas
mieux reussi que la premiere : ce qui fait voir que
la bonté de Sa Majesté est bien surprise, puis qu’il
n’est pas croyable qu’elle voulust entrer dans sa
bonne Ville de Paris, par des voyes si illegitimes,
& que le Roy voulut ensanglanter son entrée
dans cette Ville du sang de ses Sujets, qui se
disposent à le receuoir auec toutes les acclamations
& honneurs, qui sont deus à la Majesté du
plus grand Monarque de l’Europe.

 

Il est aysé à voir que sa bonté est suprise, &
son iugement obsedé par des personnes interssées,
& qui craignent qu’à l’auenir on aille foüiller
dans leurs actions, pour descouurir beaucoup
de maluersations, dont ils ont vsé depuis qu’ils
sont admises dans le Conseil de Sa Majesté, &
dont les interests sont inseparablement vnis auec
ceux qui se pretendent offensez, & qui desirent
se vanger à quelque prix que ce soit.

Il nous mettent en auant, que le C. M. s’est
retiré de France, mais il a ressemblé au Renard,
qui se voyant poursuiuy des chiens, leur laisse
vne fiante qui les angloutit de sa puanteur, & les
desgoute de leur poursuitte. Ainsi quoy qu’il se
soit retiré se voyant si chaudement poursuiuy, il

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a laissé dans le Conseil des personnes à sa poste,
qui infectent toutes les bonnes intentions de
Sa Majesté, & de ses fidelles sujets, & qui sont
gens qui ne doiuent auoir aucun interest au bonheur
de la France, puis que ce sont la pluspart
des Estrangers, comme sont les Milords Germain
& Digby, mal-heureuses reliques d’vn Royaume
dont ils causé la perte, auec la mort tragique
de leur Roy ; & neantmoins ce sont eux qui se
promettent de restablir nos affaires, & de remettre
nostre Roy dans son authorité premiere : le
Chef dudit Conseil est vn prince Thomas, qui
est vn Piémontois, & lequel a tousiours trauersé
cét Estat, & a encore presentement des pratiques
auec l’Espagne, dont il reçoit des pensions considerables :
D’ailleurs ils ne resoudent rien qu’ils
n’ayent prealablement enuoyé vn Courier au
Cardinal Mazarin pour receuoir ses sentimens :
Iugez si nous deuons attendre de telles gens vne
paix qu’il y a si long-temps que l’on nous barboüille,
& si pour vn Estranger que l’on a fait
retirer du Conseil, on y en admet trois, ce n’est
pas bien le moyen de calmer les troubles : bien
nous a pris que le Roy d’Ethiopie est mort, car
s’il estoit encore envie, sans doute nous le verrions
Ministre, où tout au moins du Conseil,
comme les autres, & nous verrions en France

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l’establissement des Mores. Enfin, il faut esperer
que Dieu remediera à tout cela, & que le changement
de ces personnes, changera nos maux en
vne felicité perdurable.

 

FIN.

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Anonyme [1652], RELATION DE CE QVI S’EST PASSÉ AV PARLEMENT LE IEVDY III. OCTOBRE, En presence de Son Altesse Royale & de Messieurs les Princes. Et la Response de la Cour au sieur de Ioyeuse. Auec la prise de trois seditieux Mazarins, & l’accusation de leurs complices & adherans. Et le retour du Duc de Guise. , françaisRéférence RIM : M0_3122. Cote locale : B_8_41.