Anonyme [1651], PROCEZ VERBAVX de ce qui s’est n’aguéres traitté à Stenay en l’abouchement du Député de France & de celui d’Espagne, sur le sujet de la Paix. , françaisRéférence RIM : M0_2894. Cote locale : B_16_62.
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Declaration du sieur Fouquet de Croissy, du 27. Avril 1651.

LE soubs signé Député de Sa Majesté Tres-Chrestienne
à Stenay, est obligé de faire souvenir à Monsieur
Friquet Député de Son Altesse le Seigneur Archiduc
Léopold, que dés le trentiéme du mois de Mars il lui
déclara par escrit que sur les propositions faites par Madame
la Duchesse de Longueville & Monsieur le Mareschal
de Turenne, d’vne suspension d’armes entre les deux
Couronnes, il avoit esté envoyé par le Roy Tres-Chrestien
audit lieu à dessein de la conclure, de convenir
d’vn lieu d’assemblée sur la frontiére des deux Estats ; &
arrester le jour auquel les Ambassadeurs de part & d’autre
s’y trouveroient : Que ledit sieur Député lui avoit donné
sa response par escrit en datte du deuxiéme Avril 1651,
contenant :

Que ledit Seigneur Archiduc feroit difficulté d’entendre
à vne suspension d’armes sans sçavoir la volonté
de Sa Majesté Catholique, & nous auroit asseuré qu’il
en auroit escrit à Sadite Majesté, & lui auroit envoyé les
Lettres de Madame la Duchesse de Longueville, afin
d’estre plus particulierement informé de ses Royales
intentions.

Que Sadite Altesse ne jugeoit pas en son particulier
qu’vne surceance fust necessaire pour parvenir à la paix,
dautant que la saison se trouvant peu avancée, & en faisant
d’elle mesme vne, il y auroit vn temps plus que suffisant
pour la conclure auparavant le commancement de la
campagne, & qu’il estoit bien plus avantageux de l’employer
à terminer les difficultez qui la retardoient, qu’à

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negocier sur celles qui se trouveroient dans ledit traité
de suspension, qui ne seroyent pas moindres, & dont
l’on ne pourroit pas demeurer d’accord avec moins
de temps & de peine.

 

Que ledit Seigneur Archiduc asseuroit que Sa
Majesté Catholique estoit disposée à faire la paix,
mesme avec avantage pour la Couronne de France,
& qu’il estoit prest d’employer tous ses soins & tout
ce qui seroit de son pouvoir pour avancer vn si bon
œuvre.

Que pour ce qui estoit de convenir d’vn lieu d’assamblée,
& de nommer le jour auquel les Ambassadeurs
se trouveroyent, ledit sieur Député de Son Altesse
le Seigneur Archiduc, a déclaré que comme
on n’avoit pas préveu qu’on lui feroit cette proposition,
Sadite Altesse ne lui a donné aucun ordre d’y
respondre, & dist de lui mesme qu’il croid que cette
négociation doit demeurer entre les mains de Messieurs
les Médiateurs, par l’entremise desquels le
Roy Tres-Chrestien & le Roy Catholique, ayans
desja convenu que l’assamblée se fercit du costé des
Pyrenées, il leur appartient d’achever ladite négociation
aussi heureusement qu’ils l’ont commancée.

A quoy le soubs-signé Député de Sa Majesté
Tres-Chrestienne est obligé de repliquer, que Sadite
Majesté a eu beaucoup de satisfaction d’apprendre
les bonnes intentions du Seigneur Archiduc,
& les espérances qu’il donnoit à toute l’Europe
de la conclusion de la paix auparavant l’ouverture
de la campagne : ce qui fit aussi avoüer à Sadite
Majesté qu’vn succez si avantageux seroit préférable
à vne suspension qui n’a jamais esté considérée
que comme vn moyen propre à la faciliter.
Et comme l’envoy que ledit sieur Député du Seigneur
Archiduc proposa vers le Roy Catholique,
afin de lui tesmoigner les intentions de Sa Majesté

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Tres-Chrestienne, ni l’Assamblée des Pyrenées
ne pouvoyent pas procurer si promptement aux deux
Couronnes le repos nécessaire à la Chrestienté, puis
que le peu de temps qui restoit eust esté consommé
dans vn si long voyage, & que le Roy Catholique
n’estoit pas encor convenu du lieu, du jour & du nombre
des Ambassadeurs qui se trouveront à ladite Assamblée,
ledit sous-signé Député creut qu’on ne le
pouvoir espéret que par l’entremise dudit Seigneur
Archiduc & ses soins, qu’il sembloit lui mesme offrir
pour l’avancement d’vn si grand œuvre : ce qui l’obligea,
pour satisfaire à ses ordres & à ses instructions,
de demander audit sieur Député de Sadite Altesse, si
le Seigneur Archiduc avoit pouvoir de traiter la paix
& s’il en vouloit vser : A quoi ledit sieur Député
de Sadite Altesse ayant respondu qu’elle ne le pouvoit
pas faire par voye d’assamblée, d’autant que l’on
estoit demeuré d’accord en France & en Espagne de
celle des Pyrenées qu’on ne pouvoit plus changer
que par le consentement des deux Rois, il pria de lui
dire, si ledit Seigneur Archiduc la traiteroit par voye
d’accommodement ou de conférence en la maniére
qu’il avoit proposé l’Esté dernier : ce que ledit sieur
Député ayant tesmoigné de croire, & ayant confirmé
son opinion par plusieurs raisons fort vray-semblables,
quoi qu’il eust déclaré qu’il n’avoit pas ordre
de l’avancer, l’on résolut de part & d’autre d’en donner
avis à sos Supérieurs, & de sçavoir leur derniére
volonté auparavant que de passer outre dans vne affaire
si importante : Et enfin quelque temps apres
le sieur Député de Sadite Altesse nous auroit dit de
la part du Seigneur Archiduc, qu’il avoit encor le pouvoir
& estoit tout prest de traiter la paix en la maniére
qu’il l’avoit proposée l’Esté dernier, par vn abouchement
avec Son Altesse Royale personne à personne,
sans l’entremise de Médiateurs ny d’Interpositeurs,
dont le sous signé Député ayant rendu compte

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à Sa Majesté Tres-Chrestienne, & de tout ce qui
s’estoit passé à Stenay, il auroit receu l’ordre de proposer
par escrit ce qui s’ensuit.

 

Que Sa Majesté Tres-Chrestienne ayant dessein
d’embrasser tous les moyens qui peuuent plus facilement
& plus promptement faire cesser les maux
dont la Chrestienté est affligée, a eu bien agréable
l’abouchement propose entre Son Altesse Royale &
Son Altesse le Seigneur Archiduc, tesmoignant assez
en cette occasion combien elle désire la paix, puis
que pour l’obtenir & authoriser la negociation qui
s’en doit faire, elle consent volontiers que Monseigneur
le Duc d’Orleans son oncle, qui est la personne
la plus considerable de son Royaume, & qui par sa
naissance & l’employ de sa charge de Lieutenant général,
a le plus de part à la conduite publique, se donne
la peine d’y travailler, & qu’ayant convié Sadite
Altesse Royale de vouloir seconder ses bonnes intentions,
il a trouué toute la disposition & le zéle
qu’on devoit attendre d’vn Prince qui a tousiours
tesmoigné n’avoir autre intérest que le bien de l’Estat,
le repos & le soulagement des peuples, & qui
ayant conceu l’espérance de contribüer à vn succez
si avantageux des-lors que Son Altesse le Seigneur
Archiduc l’invita à vne conférence, a fait paroistre
vne satisfaction toute entiére de ce que la mesme occasion
s’est présentée de faire cesser par son entremise
& celle du Seigneur Archiduc les maux de la
guerre.

Que Son Altesse Royale sera suivie en ce voyage
de Monsieur le Duc de Longueville, de Monsieur
Molé Conseiller du Roy dans tous ses Conseils &
permier Président dans son Parlement, & que le
de Servien l’vn des Ministres de son Estat, & que le
choix que Sa Majesté a fait de leurs personnes en vne
occasion si importante n’empesche pas la liberté que

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reste toute entiére au Seigneur Archiduc de se faire
accompagner d’vn plus grand ou d’vn moindre nombre
de personnes, ainsi qu’il la trouvera plus à propos.

 

Que comme Sa Majesté est persüadée qu’on apportera
toutes les dispositions nécessaires pour establir
la paix entre les deux Couronnes, & que les bonnes
intentions de deux si puissans Princes peuvent
suppléer aux offices & au zéle de Messieurs les Mediateurs
& Interpositeurs, se conformant en cela au
désir du Seigneur Archiduc, elle consent que la conférence
se face comme il l’a tousjours tesmoigné désirer
personne à personne, & sans leur entremise.

Sa Majesté Tres-Chrestienne désirant mesnager
tous les momens qui peuvent avancer vn bien si nécessaire
au repos des peuples, & Son Altesse Royale,
se conformant en cela à son désir, ont resolu qu’elle
partiroit de Paris le cinquiéme du mois de May prochain,
afin de se trouver dans vne ville frontiére, ou,
selon qu’il aura esté convenu, l’entreveuë se fera.

Pour cet effet, le soussigné Député déclare qu’il a
ordre du Roy d’arrester avec le Député de Son Altesse
le Seigneur Archiduc le jour & le lieu, & que
Son Altesse Royale se rendra volontiers à Péronne
ou à Guyse, si l’on trouve que Cambray & Landrecies
qui en sont plus proches du costé de Flandres, soyent
propres à ce dessein.

Son Altesse le Seigneur Archiduc ayant supplié
Sa Majeste Tres-Chrestienne d’accorder vn passeport
pour vn Courier qu’il désire envoyer en Espagne,
afin d’informer le Roy Catholique du susdit
abouchement, le soussigné Député a déclaré qu’il
avoit ordre d’en donner vn pour faire passer celui
que Son Altesse Royale envoyera jusques au lieu où
Leurs Majestez sa trouveront, où on lui en délivrera
vn autre pour aller pour ce mesme sujet à Madrid &
de Madrid revenir en France : & en conséquence il a

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mis le passeport entre les mains du sieur Friquet pour
s’en servir, comme dit est.

 

Et comme le sous signé Député a entiérement accompli
ses ordres & ses instructions sur le sujet de la
suspension par le refus que le Seigneur Archiduc fait
d’en vouloir traiter sans sçavoir la volonté du Roy
Catholique, & qu’il ne se peut rien ajouster à la porposition
& acceptation desja faite par Sa M. Tres-Chrestienne,
de l’abouchement entre Son A. Royale
& le Seigneur Archiduc, que de convenir du jour
& du lieu comme il offre de le faire, il déclare qu’il
n’a plus autre pouvoir que de recevoir vne response
nette & précise sur ces deux points, qu’il attend au
plustost du sieur Friquet, ou qu’on pourra envoyer de
Bruxelles à Paris, s’il fait difficulté de la donner, sans
ordre, afin de gangner le temps si nécessaire dans cette
rencontre. Fait à Stenay ce 27 Avril 1651 : Signé,
A. Fouquet de Croissy.

Le Député du Seigneur Archiduc est convenu de
la vérité de cet escrit en présence de Monsieur le
Mareschal de Turenne & de Monsieur le Marquis de
Sillery : & c’est ce qui a donné lieu au dégagement
demondit sieure le Mareschal d’avec les Espagnols.

A. Fouquet de Croissy.

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