Anonyme [1649], MOYENS FACILES ET NECESSAIRES pour la garde, seureté & Police de la Ville & Faux-bourgs de Paris : La leuée & subsistance de ses Troupes : Et ouuerture de ses passages tant par eaüe que par terre. , françaisRéférence RIM : M0_2516. Cote locale : C_6_30.
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MOYENS FACILES
ET NECESSAIRES
pour la garde, seureté & Police de la
Ville & Faux-bourgs de Paris : La leuée
& subsistance de ses Troupes : Et
ouuerture de ses passages tant par eaüe
que par terre.

A PARIS,
De l’IMPRIMERIE DE LA Veufve
I. GVILLEMOT, ruë des Marmouzets,
deuant la petite Porte de l’Eglise
Sainte Magdeleine.

M. DC. XLIX.

AVEC PERMISSION.

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PROPOSITIONS NECESSAIRES
pour la seureté & garde de cette Ville de Paris.

Les Bourgeois estans en armes depuis plus de deux mois
en ça, sans que la pluspart des Colonels & Capitaines
ayent fait faire l’exercice à leurs Compagnies, pour
n’en auoir eux mesmes la connoissance & pour n’en
auoir iamais fait aucune profession ; Il est absolument
necessaire de créer pour le temps present seulement, &
sans tirer à consequence pour l’auenir, vn Capitaine
Major à chaque Colonnelle, & vn Lieutenant Major à chaque Compagnie,
exercez au faict de la guerre, qui seront choisis, si faire se peur, des
mesmes Colonnelles & Compagnies sinon pris ailleurs, s’il ne s’y en
trouue de capables & soudoyez raisonnablement, lesquels Capitaines &
Lieutenans Majors, feront faire l’exercice deux fois la semaine à diuers
iours, pour euiter la confusion, & dans les places publiques, ausquels
exercices les anciens Officiers assisteront pour s’instruire. Sera pareillement
creé vn Maior general sur toutes les Colonnelle lequel aura l’œil à
tout ce qui s’y sera, & sera de grande experience au faict de la guerre, &
aura auec les Capitaines Majors mesme pouuoir & authorité aux deliberations
qui seront faites en l’Hostel de Ville & ailleurs qu’ont les Colonnels,
l’execution desquelles deliberations sera faite de l’ordre du general
Major, lequel assistera à tous les armemens de la Bourgeoisie, pour les sorties
qui seront faites, & pour les entreprises ausquelles la Bourgeoisie sera
employée.

Et parce qu’il y a des Colonnels & Capitaines qui sont suspects au public,
pour estre interessez au Party contraire, & par plusieurs autres considerations
qui sont connuës, l’estat au vray en sera fait, & auec vne plaine
connoissance de cause, ceux qui seront destituables pour des iustes considerations,
le seront par effet, & les autres qui sont moins suspects seront
priez de ne faire aucunes fonctions de leurs Charges pendant ces troubles,
lesquelles seront cependant exercées par commission par lesdits Capitaines
& Lieutenans Majors, mais à l’esgard de ceux qui seront iustement
destituez, il sera pourueu en leur lieu dés à present de personnes de
probité & de capacité requise.

Outre la garde ordinaire, & l’employ extraordinaire des armes des

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Bourgeois de Paris aux occasions, les Colonnels Capitaines Majors, Capitaines
Lientenans Majors & autres Officiers chacun dans l’estenduë de
sa Compagnie, auec six des principaux & notables Bourgeois de la mesme
Compagnie, feront vne visite tres exacte tous les huict iours, ou du
moins de quinze en quinze iours dans les maisons de leurs quartiers, &
dans tous les lieux & endroits d’icelles, & feront leurs procez verbaux,
contenant les noms, l’âge, & l’employ des particuliers qui s’y trouueront,
& le temps qu’ils y sont, comme aussi les armes & prouisions de
guerre & de bouche qui y peuuent estre, & [illisible] qui seront
trouuez ausdites maisons en trop grande abondance, & au delà de ce qui
leur est necessaire pour subsister auec leurs familles pendant deux mois,
seront portez en vn ou plusieurs Magazins publics, distribuez & employez
aux necessitez publiques, sur le prix qui en sera fait, [illisible]
particuliers seront rembourcez à concurrence du bled & de la [1 mot ill.]
qu’on leur aura tres iustement osté, ce qui sera tres-exactement obserué
en toutes les maisons, & particulierement en celles des gens d’affaires, &
Partisans, & des autres personnes suspectes, dont partie se sont retirées
auec l’ennemy, & les armes & prouisions de guerre qui seront trouuées
aux maisons des Partisans & gens suspects, outre ce qui leur est necessaire
pour la garde, à quoy ils sont obligez, sera porté en vn Magazin public,
pour y estre conserué, ou pour s’en seruir aux occasions, apres que le tout
aura esté estimé.

 

Le mesme sera obserué tres exactement en toutes les maisons des
Monasteres & Communautez, & en celles des gens d’Eglise, afin que sous
pretexte de pieté, le grand nombre d’espions & de factieux soient esloignez,
& que la seureté publique se rencontre toute entiere.

La garde des portes, & autres lieux de cette Ville de Paris, sera doublée
durant quinze iours, & les Officiers en auront vn soing particulier
& tres exact, sans permettre la sortie d’aucunes Armes, Cheuaux, Carosses,
Charettes, ny aucunes hardes, & les Moulins qui sont autour de
cette Ville de Paris, comme importans à la necessité publique, seront
gardez, & plusieurs sentinelles mises au de la desdits Moulins, afin que les
Corps de garde qui y seront puissent estre aduertis des entreprises que les
ennemis pourroient faire sur les Moulins, & par eux, les Corps de garde
des Faux-bourgs & de la Ville les plus prochains, qui auront ordre de les
ayder de certain nombre de Soldats, sans degarnir leurs Corps de garde
afin que les entreprises & violences des ennemis puissent estre plus facilement
repoussées & éludées.

Les Officiers & Soldats qui seront en garde, tant en la Ville qu’au
Faux-bourgs, obserueront ceux qui y entrent, s’informeront de leur qualité
& condition, & du lieu où ils se retirent, se saisiront des armes qu’ils

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portent, & enuoyeront quelque temps apres des Officiers & Soldats en
petit nombre aux maisons qui leur auront esté indiquées, pour sçauoir si
ce que ces particuliers qui sont entrez en la Ville ou Faux bourgs leurs
ont dit est veritable, & en cas de supposition, sera faite vne exacte recherche
en tous les endroits de la Ville & Faux-bourgs, pour les trouuer, &
punir capitalement comme espions, comme aussi ceux qui les auront retirez
& recelez, à ces fins, à l’égard des Hostelleries, Cabarets, & Chambres
locantes, deffenses seront faites à tous Hosteliers, Cabaretiers, &
Chambrelans, de retirer de nouueau en leurs maisons aucun particulier,
s’ils n’en ont le pouuoir, par l’ordre & le billet qui en aura esté donné par
le Capitaine ou Lieutenant Major en garde, deuement signé, qu’ils seront
tenus representer quand ils en seront requis.

 

PROPOSITIONS NECESSAIRES POVR LA
Subsistance de l’Armée, & pour l’abondance des viures dans
la Ville & Faux-bourgs de Paris.

L’Argent estant le nerf de la guerre & de la Subsistance d’vne Armée,
la voye la plus legitime est de se seruir des biens & effets de nos ennemis,
& de ceux qui en sont les Auteurs, qui ne sont autres que les gens
d’affaires, & Partisans, auec leurs complices & adherans, & pour y paruenir,
partie s’estant retirée auec les ennemis, & s’estans rendus complices,
leur procez leur peut estre fait & parfait, & cependant leurs biens
peuuent estre saisis & annotez, & leurs effets mobilieres trouuez en
leurs maisons, employez à la Subsistance de l’Armée, & aux autres necessitez
publiques, ce qui fera vn fonds tres-notable, sans leuer les taxes
faites sur les Bourgeois, qui se trouueront incommodez par la misere du
temps, dont le payement doit estre rendu volontaire, afin que ceux qui en
auront le moyen y satisfassent, & la vente des effets mobilieres peut subsister
dés à present, par le seul deffaut de la taxe en laquelle ils ont esté
cottisez par les Arrests du Parlement.

La seconde voye extraordinaire en laquelle l’on peut auoir recours, a
pour object les biens & effets qui sont à Paris, & qui appartiennent à
ceux lesquels actuellement portent les armes pour nous opprimer in justement,
ou à ceux qui sont les Auteurs du pernicieux Conseil, qui cause
nostre oppression, & qui sont en tres grand nombre, dont la pluspart se
sont retirez de Paris.

En troisiesme lieu, l’on peut faire vne notable somme de deniers en
vendant au Grenier à Sel de Paris, le Sel à vil prix, & à raison de 24. ou
25. liures tournois le minot, pendant certain temps, passé lequel, ceux qu

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en voudroient achepter à si bas prix n’y seroient plus receus, & cela deuroit
estre ordonné & publié, afin qu’vn chacun le sceust.

 

L’on peut encore auoir vn prompt secours de la bource des plus riches
& accommodez par forme de prest & aduance, sous l’obligation des
Preuost des Marchands & Escheuins, attendant vn fonds suffisant pour
leur remboursement.

Enfin la necessité publique, peut obliger les Communautez Ecclesiastiques
Seculieres & Regulieres, les Beneficiers qui sont riches & opulans,
& les Oeuures & Fabriques des Eglises Parochiales, de contribuer
certaines sommes de deniers, par la consideration de l’interest commun,
& de la Iustice de nostre deffense.

Quant à l’abondance des viures, plusieurs choses sont necessaires, car
d’vne part, il faut commencer d’ouurir les passages à main armée, si puissamment,
que les ennemis ne le puissent empescher, & les forces de Paris
sont tres-grandes, si l’on en sçait bien vser.

En second lieu, l’on doit auoir en tous les quartiers de la Ville des greniers
publics, des Conuois que l’on fera, afin que le tout soit bien & deuëment
distribué à iuste prix, sans passer par les mains des Regrattiers &
Reuandeurs, ny se sousmettre à l’auidité des Boulangers, lesquels n’ont
aucune autre reigle que celle de leur interest, & de se preualoir méchamment
de la misere du temps.

En troisiesme lieu, y ayans plusieurs particuliers, lesquels par vn excez
de malice & de complicité auec les ennemis, ont fait en cette Ville des
grands amas de bled, vne visite generale est necessaire, & les bleds qui seront
trouuez entre leurs mains, doiuent estre portez dans les Magazins
publics, & distribuez comme dessus.

En quatriesme lieu, puisque les chefs de plusieurs familles suiuent le
Party ennemy du nombre desquels sont diuers Partisans & gens d’affaires,
il est tres-iuste & necessaire de leur renuoyer toute leur famille, & employer
pour les necessitez publiques toutes les prouisions de bouche
qu’ils ont en leurs maisons, scituées en cette Ville & Faux-bourgs de
Paris.

Enfin l’on doit suiure ce qui s’obserue d’ordinaire dans les Villes populeuses
qui sont assiegées ou inuesties, faire sortir de la Ville tous les faineans
& gẽs sans adueu, & tous les caymans & mandians valides dõt il y a
vn tres-grand nombre, par vn abus intolerable, procedant de ce qu’il n’y
a aucune Police actuelle en cette Ville, & cependant cette sorte de gens
vit d’ordinaire dans toute sorte de vices, ce qui attire sur la Ville l’ire & la
vengeance Diuine, outre les autres crimes qui y abondent, ausquels il
faut aussi pourueoir par vne seuerité toute entiere, afin que Dieu nous
soit propice.

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PROPOSITIONS TRES-VRGENTES ET
necessaires pour le seruice du Roy, & pour esloigner les ennemis des enuirons
de cette Ville de Paris, & en ouurir les passages puissamment &
promptement, mais tres-facilement, & à peu de frais, & pour faire
cesser l’effect des factions & pratiques secrettes que les ennemis font en
cette Ville de Paris.

Les Troupes d’Infanterie & de Caualerie qui sont sur pied, n’estant en
nombre suffisant pour attaquer, non pas mesme pour resister à l’ennemy,
doiuent estre incessamment augmentées.

La leuée de l’Infanterie, peut estre faite à peu de frais, à ces fins, pour
y pouruoir promptement, les Commissaires bien intentionnez qui seront
commis par le Parlement en chaque quartier, assistez de six des plus notables
Bourgeois du mesme quartier, se transporteront en toutes les maisons
de leur quartier, sans aucune exception, feront vn estat au vray des enfans
& des domestiques capables de porter les armes, & apres auoir interpellé &
requis les peres & les Maistres d’assister le public en la necessité pressante
de leurs enfans ou domestiques qui ne leurs seront absolument necessaires,
ceux qui leurs seront indiquez, apres auoir esté reconnus propres pour les
armes, par les Commissaires, seront escrits en vn Roolle particulier, & armez
des armes que les Bourgeois leurs voudront donner, lesquelles leurs
appartiendront, & le sur plus des armes necessaires sera achepté.

Le mesme sera obserué pour la Caualerie, & les Commissaires distingueront
d’entre ceux qui seront nommez les plus propres pour cét effect,
sans que cette nouuelle Caualerie & Infanterie soit tenue seruir ailleurs que
pour les necessitez presentes de cette Ville de Paris, & seulement à quinze
ou vingt lieuës au plus des enuirons de ladite Ville, comme ne pouuant
estre considerez, ny passer que pour Gens d’armes & Soldats volontaires.

Et parce que les frais sont plus grands pour la Caualerie, afin que le secours
en soit prompt, les mesmes Commissaires se transporteront en toutes
les Escuries de la Ville & Faux-bourgs, verront & feront vn estat au vray &
sans fraude, de tous les cheuaux de seruice, feront description du fourage
qu’ils y trouueront pour s’en seruir auec espargne, & en faire des magazins,
& les mesmes Commissaires en la presence de ceux ausquels les cheuaux
appartiennent, ou s’ils sont absents, des principaux de leurs domestiques,
estimeront de bonne foy lesdits cheuaux leur iuste valeur, dont le prix en
sera payé sur le fonds qui sera à ses fins assigné dans vn mois, si les cheuaux
ne leurs sont rendus, en bon & deub estat ; & pour plus grande precaution

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& asseurance, les Preuost des Marchands & Escheuins en feront leur promesse,
comme estant en effet vne debte publique, & vn interest public,
sans qu’aucun particulier Bourgeois, de quelque qualité & condition qu’il
soit, puisse retenir que les cheuaux qui luy sont absolument necessaires, en
consideration du seruice qu’il rend au public, non autrement.

 

Les mesmes Commissaires feront vn estat particulier des cheuaux propres
pour les Chariots, & pour tout l’Attirail de l’Artillerie, & des munitions,
de l’Armée qu’il faut mettre en Campagne, & y procederont pour
la prisée des cheuaux & des Chariots qui se rencontreront és maisons des
particuliers Bourgeois, en la maniere cy-deuant cottée, & les Preuost des
Marchands & Escheuins en seront leurs promesses comme dessus.

Et parce que pour donner des Chefs à ces nouuelles leuées de Caualerie
& Infanterie, les frais en seroient tres-grands, il semble plus à propos d’en
grossir les Regimens qui sont sur pied, à la charge neantmoins que ces nouuelles
Trouppes ne seront tenuës de seruir ailleurs, quand il aura pleu à
Dieu d’appaiser le fleau qui nous afflige.

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