Anonyme [1652], LETTRE DES TROIS ESTATS DE PROVENCE A MONSIEVR LE DVC DE GVISE, Par laquelle il est prié d’accepter le Gouuernement de la Prouince, & les tirer du joug tyrannique sous lequel ils languissent depuis la mort du deffunt Duc de Guise, son Pere. , françaisRéférence RIM : M0_2080. Cote locale : B_8_40.
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LETTRE
DES TROIS ESTATS
DE PROVENCE
A MONSIEVR LE DVC
DE GVISE,
Par laquelle il est prié d’accepter le Gouuernement
de la Prouince, & les tirer du joug tyrannique
sous lequel ils languissent depuis la mort du
deffunt Duc de Guise, son Pere.

A PARIS,
Chez IEAN BRVNET, ruë Sainte Anne.

M. DC. LII.

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Lettre des Estats de Prouence
à Monsieur le Duc de
Guise, par laquelle il est
prié d’accepter le Gouuernement
de la Prouince, &
les tirer du joug tyrannique
sous lequel ils languissent
depuis la mort de feu son
Pere.

MONSEIGNEVR,

Le retour de Vostre Altesse en France, a causé
vne grande ioye parmy nous, outre l’esperance
que nous conceuons de vous voir Gouuerneur
de Prouence, & de ioüir des mesmes felicitez
que nous ioüissions durant que deffunt

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Monseigneur le Duc de Guise vostre Pere,
(dont Dieu ait l’ame) y a demeuré en cette
mesme qualité, & depuis lequel nous auons
souffert de grands troubles, sous la diuersité des
Gouuerneurs que nous auons eus, comme le
Mareschal de Vitry, le Comte d’Alets, & à present
le Duc de Mercœur, tous lesquels ont receu
& executé les ordres que Messieurs les Cardinaux
de Richelieu & Mazarin leur ont enuoyé
en diuers temps, pour y faire diuers establissemens
d’imposts, à quoy la Prouence n’est
guere accoustumée, ayant esté quantité d’années
sous le gouuernement de deffunt Monseigneur
vostre Pere, sans en auoir aucuns, quoy
qu’on ait fait beaucoup de tentations pour les
faire receuoir, & ont esté autant de fois refusez
par vne commune resolution des Estats, protegez
& maintenus par leur Gouuerneur, comme
des Bureaux d’Election en cinq ou six lieux
de la Prouince, contre la franchise & les priuileges
de ses Estats, auec lesquels ils se sont
donnez à la France, peu de temps apres le regne
du Roy Sainct Louys, qui en auoit épousé
l’heritiere. Mais depuis quatre ans ou enuiron,
on a voulu reduire le Parlement d’Aix en
Semestre, dessein qui rencontra de grandes difficultez
& oppositions, & à ce sujet furent enuoyez
à diuerses fois des Deputez en Cour, auec

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de tres-humbles remonstrances au Roy, & autres
au Parlement de Paris, pour faire vne
Vnion auec luy, contre le Cardinal Mazarin :
Mais le Comte d’Alets nostre Gouuerneur,
nous ayant declaré la guerre, à moins que
d’accepter ce Semestre, nous auons esté obligez
de prendre les armes pour nostre deffense,
dans lequel trouble se sont commis plusieurs
grands actes d’hostellité, de voyes, de fait, effusion
de sang, emprisonnemens & autres violences,
à laquelle finallement il a fallu ceder,
& souffrir ce Semestre du Parlement d’Aix,
sans nous plaindre des grandes pertes que la
Prouince a faites durant la guerre contre l’Espagnol,
tant de braues hommes tuez aux combats
de mer, que de quantité de Galeres &
Vaisseaux qui y sont demeurez, outre l’argent
qu’on nous a fait contribuer pour les armemens
de Ville, selon les ordres du General
des Galeres & de nos Gouuerneurs : ce qui a
fait naistre la mauuaise intelligence qui est à
present entre les peuples Prouençaux, ne sçachant
les vns ny les autres à qui obeyr dans
vn tel desordre, sans parler des efforts qu’on
nous a faits, pour ployer le col à la tyrannie,
& les dommages que nous auons receus aux
degasts qu’on a faits de nos Oliuiers, qui sont
le meilleur de nostre commerce, & auons mille

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fois regreté la perte de feu Monseigneur de
Guise vostre Pere, sous lequel le siecle d’or
estoit parmy-nous, point de troubles, nuls
nouueaux imposts, nulle force ny violence, ce
qui rendoit la Prouince heureuse, riche & abondante
en marchandises & commerces de mer,
sans apprehender ny redouter les Pirates & les
Corsaires, comme nous faisons aujourd’huy,
que nous n’auons presque personne pour deffendre
nos pesches & nos costes, chacun ne songeant
qu’a ses interests particuliers, & à se conseruer,
qui est le malheur qui nous accables aujourd’huy,
& ne sçauons à quoy nous resoudre.
Sinon que nous commençons à respirer,
depuis la nouuelle que nous auons receuë de
vostre heureux retour en France, ce qui a fait
que la plus saine & meilleur partie des trois
Estats de Prouence, s’est assemblée en cette Ville
de Toulon, tous d’vne voix conspirans au
desir de voir Vostre Altesse establie au mesme
Gouuernement de deffunt Monseigneur de
Guise vostre Pere, & de reuoir le calme retourner.
Et pour ce sujet, nous auons pris resolution
de vous enuoyer nos Deputez, pour vous
faire entendre nostre resolution, qui est de prier
Vostre Altesse, de consentir que nous enuoyons
en Cour à Son Altesse Royale, & Monseigneur
le Prince nos tres-humbles supplications, de

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nous la donner pour Gouuerneur de Prouence,
sur la confiance que nous auons que vous aurez
nostre resolution agreable, & qu’en cette qualité
nous vous rendrons tous les honneurs, seruices
& deuoirs, semblables à ceux que nous auons
tousiours tesmoignez à feu Monseigneur le Duc
de Guise, vostre Pere & le nostre, & que sous
vostre gouuernement, nos esperances amorties
reuiuront, au tres-grand bien de la Prouince,
s’il plaist à Vostre Altesse auoir agreable les
vœux & les supplications que luy font,

 

MONSEIGNEVR,

Vos tres-humbles & obeïssans
seruiteurs,

Les trois Estats de Prouence.

L’Archeuesque d’Arles.

L’Euesque de Toulon.

Le Comte de Carces.

Le Baron de Montosier.

De Felix & Coulanges, Consuls
d’Arles.

A Toulon le 10.
Iuillet 1652.

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