Anonyme [1652], LETTRE DE NOSTRE S. PERE LE PAPE ENVOYÉE AV ROY D’ESPAGNE. Sur le sujet des Troubles de France. , françaisRéférence RIM : Mx. Cote locale : B_20_40.
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LETTRE DE
NOSTRE SAINCT
PERE LE PAPE
ENVOYÉE
AV ROY D’ESPAGNE.
Sur le sujet des Troubles de France.

Auec la Response du Roy d’Espagne escritte à
sa Saincteté.

INNOCENT Pape X. Seruiteur des seruiteurs
de Dieu. A nostre cher Fils, Salut &
Benediction Apostolique.

Comme nous auons appris que vostre dessein
estoit de faire auancer les forces de l’Estat
de Milan & autres deuant la Ville de Casal, où
il y a garnison de la part du Roy Tres-Chrestien,
pour y mettre le Siege selon les Ordres
exprés enuoyez de vostre part au Marquis de
Carracene vostre Gouuerneur au Milannois,
& partant recommencer la Guerre en Italie,
entre les François & les Espagnols, ce que tous

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les Potentats Italiens apprehẽdent. Et que cela
seroit cause que la Paix seroit rompuë, qui
nous est si chere, ce qu’ils s’efforcẽt à d’estourner
par les supplications qu’ils nous ont faict
faire, d’employer nostre interuention enuers
V. M. Catholique, pour la Supplier de ne point
prendre l’occasion du trouble de la Chrestienté,
qui s’y entretient (tant par la continuation
de la guerre de la Seigneurie de Venise auec
l’ennemy commun & Infidelle, que par
les mouuemẽts ciuils qui augmentẽt en France)
de ietter la guerre dans l’Estat du Duc de Mãtouë,
en faisant assieger Casal, laquelle seroit
sans doute secouruë de la part de sa M. Tres-Chrestienne,
quoy qu’empeschée par le trouble
qui est dans ses Estats, ne manquant pas de
moyens pour empescher la perte d’vne place
qui a tant cousté à la France pour la conserver,
quoy qu’elle appartienne au Duc de Mantouë,
lequel ne l’a pouut garder l’a laissée iusques à
present entre les mains du Roy Tres Chrestien,
en sorte que si vostre Majeste Catholique se resoud
à la prendre ce sera r’allumer la Guerre
en Italie, ce que nous auons sujet de destourner
par nos supplications enuers elle, à ce que chãgeant
de dessein pour entretenir la Paix en Italie,
elle porte ses conseils pacifiques à faire

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quelque forme d’accomodement auec le Duc
de Mantouë à l’amiable, plutost que d’en venir
aux armes & à la rigueur, ce qui seroit vn grãd
bien, & feroit asseurer le repos en Italie apres
de si fascheuses & mauuaises saisons qui l’ont
reduite en vn estat miserable par la mauuaise
intelligence qui s’estoit glissée entre les vns &
les autres, au subject des partys que les Princes
ont voulu prẽdre dans la guerre pour leurs
seuls interests. Et comme nostre charge Pastorale
nous oblige à entretenir la Paix entr’eux,
& de satisfaire aux vœux de toute l’Italie.
Nous supplions vostre Majesté Catholique
d’auoir esgard à nostre interuention, comme
nous auons fait entendre à son Ambassadeur
resident en cest Cour, & sur cette confiance
nous départons à Vostre Majeste la benection
Apostolique. Donné à Rome au Vatican
le deuxiéme des Nones d’Aoust mil six cens
cinquante-deux.

 

RESPONCE DV ROY D’ESPAGNE
à la Lettre de sa Saincteté.

TRES-SAINCT PERE,

Comme en toutes occasions nous
auons tousiours tesmoigné à Vostre Saincteté,

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le deuoir & l’obeïssance felicité, que comme
Fils tres obeïssant, sommes obligez de luy
rendre sans iamais nous en départir, & desirant
continuer en ceste occasion, nous auons
euë agreable le zele & l’amour paternel que
Vostre Saincteté fait cognoistre pour l’entretien
de la paix d’Italie, à laquelle nous employerons
tousiours tous nos soins, & faire
en sorte que les Princes & Estats y soient
maintenus, & n’ayent sujet de se plaindre de
Nous en aucun temps, que nous ayons voulu
entreprendre chose aucune qui tende à troubler
leur tranquillité, dont l’obseruation nous
a esté tousiours tres-chere & precieuse. Pour
donc respondre à Vostre Saincteté à la rende
deuëment informée de ce qu’elle mande au
sujet de la Ville de Cazal ; c’est que nous auons
jugé à propos d’entretenir la paix en Italie, &
laisser chacun Prince & Estat joüir paisiblement
de ce qu’il luy appartient ; & pour cét
effet, auons estimé estre le bien du Duc de
Mantouë, & le faire joüir de ce qui depend
du Duche de Montferrat, comme il estoit porté
& resolu à la paix faite à Ratisbonne l’an
mil six cens trente, que tout ce qu’il luy auoit
esté pris au Duché de Montferrat luy seroit
rendu, mesme Cazal, & qu’il n’y auroit autre

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garnison que de ses sujets, sans y souffrir des
estrangers qui puissent faire naistre de la jalousie
parmy les Princes voisins, & en suitte
allumer la guerre. C’est pourquoy, sans déroger
à cette paix de Ratisbonne, & nourrir
le repos en Italie : Nous sommes resolus de
contraindre auec nos armes la garnison étranger
qui est en ceste place de Cazal d’en sortir,
& d’y en mettre vne autre au gré & du consentemẽt
du Duc de Mantouë, sans en prendre
ny vsurper la possession, dequoy nous asseurons
vostre Saincteté, & que telle est l’intention
& à la volonté

 

De

Vostre tres-obeïssant Fils
PHILIPPES.

De Madrid le 8. Septembre 1652.

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