LETTRE DE MESSIEVRS LES
Preuost des Marchands & Escheuins de la
Ville de Paris, enuoyée aux Villes du Royaume,
suiuant l’Arresté fait en l’Assemblée de ladite
Ville le 29. Iuillet 1652.
MESSIEVRS,
Comme la Ville de Paris a toûjours
eu pour principal objet le repos
de cét Estat, & la correspondance
auec les autres Villes du
Royaume, par le moyen du commerce qui les fait
subsister ; Nous voyons auec regret cette harmonie
interrompuë par les artifices du Cardinal Mazarin
qui a attiré sur luy la haine vniuerselle des peuples :
En sorte que les plus sages de nos Citoyens ne sçauroient
prendre confiance aucune aux choses qui
viennent de sa conduite, s’estant rendu maistre absolu
de la personne du Roy & de son Conseil, au prejudice
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des Declarations verifiées au Parlement, &
confirmées par sa Majesté le premier iour de sa Majorité,
qui decouurent tous ses defauts & le rendent
incapable du Ministere : lors que nous l’estimions
éloigné sans esperance de retour suiuant l’ordre de
sadite Majesté, suiuy des Arrests des Cours Souueraines ;
il est reuenu auec vn esprit qui à l’instant a troublé
& diuisé tout le Royaume ; Dans ce malheur nous
auons esté heureux de trouuer la protection de Monsieur
le Duc d’Orleans, qui a declaré conjoinctement
auec Monsieur le Prince de Condé n’auoir autre
dessein que d’éloigner ledit Cardinal, & nous
procurer la revnion de la maison Royale & ensuite la
Paix generale. Les maladies sont grandes quand
elles commencent par le cœur : La capitale du
Royaume se donne cét auantage de dire que si elle
receuoit atteinte en ce rencontre les autres villes en
sentiroient bien-tost la diminution & la perte. La
fraternité qui doit estre parmy nous, ne permet pas
de dissimuler plus long-temps ce mal commun, mais
veut que vous en soyez informez par nous-mesmes,
afin que par vos bons aduis & vostre secours, nous
soulagions toutes les miseres publiques, qui ne peuuent
cesser que par l’éloignement de cét Estranger.
Nous demandons seulement au Roy auec toutes les
soûmissions que les sujets doiuent à leur Souuerain,
l’execution de sa parole Royale & l’honneur de sa
presence ; & pour rendre nos bonnes intentions publiques
& que vous sçachiez, Messieurs, nostre procedé,
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l’Assemblée generale tenuë en l’Hostel de
cette Ville le 29. Iuillet dernier, composée du Conseil
d’icelle, des Deputez des Cours Souueraines, &
de tous les Ordres & Corps de ladite Ville, Nous a
chargé de vous en escrire, & faire sçauoir le Resultat
de ladite Assemblée que vous apprendrez par la copie
d’iceluy cy-iointe, estant aussi vne occasion de
vous tesmoigner que nous sommes,
MESSIEVRS,
Vos bien humbles & affectionnez seruiteurs,
les Preuost des Marchands & Escheuins
de la Ville de Paris.
A Paris ce 6. Aoust 1652.
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RESVLTAT DE L’ASSEMBLEE
generale de l’Hostel de Ville de Paris,
en consequence de l’Arrest du Parlement
du 24. Iuillet 1652.
Extraict des Registres de l’Hostel de la Ville
de Paris.
Du Lundy 29. Iuillet 1652.
EN l’Assemblée generale ledit iour
tenuë en la grand’Salle de l’Hostel de
la Ville de Paris par Messieurs les Preuost
des Marchands, Escheuins, Conseillers
de ladite Ville, Deputez des
Cours Souueraines, Corps, Colleges,
Communautez, Quartiniers, Curez des Parroisses
& douze mandez de chacun quartier, en execution
de l’Arrest de la Cour du 24. de ce mois & an, pour
aduiser aux moyens les plus prompts & conuenables,
afin d’auoir des deniers pour employer aux necessitez
presentes, libertez des passages & du commerce,
seureté & defense de cette dite Ville, & éloignement
du Cardinal Mazarin, suiuant la Declaration du Roy
& Arrest de la Cour, à laquelle se sont trouuez son
Altesse Royale, Messieurs le Prince de Condé & Duc
de Beaufort.
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A esté conclu & arresté de remercier son Altesse
Royale, de ce qu’il y auoit pleu agreer la qualité de
Lieutenant General du Roy dans l’estenduë du
Royaume, Terres & Seigneuries de son obeïssance,
& des soings qu’il prend pour le bien de cette Ville,
Monsieur le Prince de Condé de ce qu’il auoit bien
voulu se charger sous l’authorité de son Altesse, de la
conduite des Troupes, qui ne pouuoient estre plus
auantageusement confiees, & Monsieur le Duc de
Beaufort de ce qu’il acceptoit le Gouuernement de
cetedite Ville, estant le vœu & desir d’vn chacun ; Qu’il
sera incessamment leué iusqu’à la somme de 800000.
liures pour estre employez à fortifier les Troupes de
sadite Altesse & en faire de nouuelles, à cette fin taxe
faite sur chacune maison payable par les locataires
& habitans d’icelle : sçauoir vingt cinq escus pour
les portes cocheres, de dix escus pour les portes
quarrées & boutiques de Marchands, & de cinq
escus pour les petites portes & boutiques d’Artisans,
que les Communautez Ecclesiastiques seront taxées
au Bureau de la Ville, & les deniers desdites taxes mis
és mains de notables Bourgeois, & en cas que lesdites
taxes ne suffisent pour fournir & composer ladite
somme de 800000. liures, il y sera pourueu par
ladite Ville ; Que restablissement sera fait au plustost
des droicts d’entrée & cinq grosses fermes sur toutes
les marchandises sujettes ausdits droicts, gros, huictiesme
& pied fourché, suiuant & aux termes de la
Declaration du Roy du mois d’Octobre 1648. Et les
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deniers prouenans desdits droicts employez à l’acquit
des rentes & charges, & le surplus à la subsistance
desdites Troupes. Que Lettres au nom de la
Ville seront enuoyées en toutes les Villes du Royaume,
pour leur faire connoistre le sujet du present
Arresté, à l’execution duquel Messieurs du Bureau
& Conseillers de Ville pouruoiront.
FIN.