Anonyme [1649], LES VERITABLES REPROCHES FAITES A IVLES MAZARIN PAR VN MINISTRE D’ESTAT. , françaisRéférence RIM : M0_3978. Cote locale : C_9_64.
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LES
VERITABLES
REPROCHES
FAITES
A IVLES
MAZARIN
PAR VN MINISTRE
D’ESTAT.

A PARIS,
Chez FRANÇOIS NOEL, ruë Sainct Iacques,
aux Colomnes d’Hercules.

M. DC. XLIX.

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LES VERITABLES REPROCHES FAITES
à Iules Mazarin, par vn Ministre d’Estat.

Ivsques à quand (petit compagnon)
vous émanciperez vous de vous eleuer,
où vous ne pouuez vous maintenir
qu’à vostre infamie : Iusques à quand
ternirez-vous la gloire que ie me suis
acquise : Iusques à quand ferez-vous le fol : Quoy
ces Villes alarmées, ces Prouinces bandées, ces
Parlemens tous generalement vnis, ces cris, ces
bruits, ces pleurs, ces animositez de peuple ne
vous font pas peur ? Vous les regardez ; & vous n’en
tremblez pas : vous en tremblez, & vous estes encore
à aduiser ce que vous deuez faire : & vous
estes encore à considerer vos honneurs, à vous
plaire en leurs charmes, à consulter vos appetits,
vos inclinations, vos aises, à vous confier en des
Princes, qui à la premiere connoissance de vostre
malice vous abandonneront ; & à ne sçauoir
pas que la seule confiance d’vn Fauory, c’est de
de ne reconnoistre point de confiance.

Pauure ignorant, ce Chapcau que vous auez
pris au degré où ie l’ay bien pû mettre, & au point
où vous ne l’auez sçeu conseruer : ce Chapeau là n’auoit
pas esté fait pour vous : aussi ne vous l’auois je
pas destiné. Ie sçauois bien que sa forme estant
trop grande à vostre teste, comme elle estoit, il
ne manqueroit pas en vous tombans sur les yeux,

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de vous desrober la lumiere.

 

Vostre esprit a pourtant suiuy vostre ambition :
vostre ambition vous a deçeu, & maintenant il faut
que ma gloire suporte la fole-en here de vostre extreme
hardiesse : Que cette dignité sous le faix de
laquelle i’ay tant sué s’esuanouïssé, qu’elle deuienne
odieuse, & que ce soit vous encore qui la rediez telle.
Insolẽt si ie vous... Mais ie n’ay pas eschapé de la
memoire les seruices que vous auez autrefois en lus
à ma personne : & pour cette consideration ie vous
pardonne aujourd’huy l’offence que vous m’auez
faite. Fuyez cependant, & ne renouuellez pas hardiment
par vostre obstination à demeurer, le iuste
ressentiment de ma colere : vostre fortune est en
vn estat qu’il ne vous faut pas esperer de la restablir.
Ce haut degré de gloire où ie l’auois mise, d’où
vous la faite tomber, & d’où ie me sens tellement
picqué, que ie ne sçay encore que ie ne m’en vange ;
ne vous imaginez pas que ce fust l’industrie
d’vn iour ny l’œuure d’vne année ; plus de trente y
auoient passé ; encore auoit-ce esté auec beaucoup
de peine, & vous voulez à present que vous qui ne
l’auez seulement sçeu retenir, la puissiez remettre
Fuyez (vous dis-je encore vn coup) fuyez, & ne
rendez pas ma gloire plus odieuse par vostre plus
de resistance : Autrement si vous me faites reuenir,
ie vous monstreray ce que ie peux quand l’on m’irrite.
Suffit, que si i’estois au terme où les choses sont,
en vostre place, ie serois bien empesché à ce que
i’aurois à faire. Songez hardiment à ce que ie vous
dis & vous ferez bien, adieu.

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Anonyme [1649], LES VERITABLES REPROCHES FAITES A IVLES MAZARIN PAR VN MINISTRE D’ESTAT. , françaisRéférence RIM : M0_3978. Cote locale : C_9_64.