Saint-Julien,? [?] [1649], LE TROISIESME COVRRIER FRANÇOIS, TRADVIT FIDELLEMENT en Vers Burlesques. , françaisRéférence RIM : M0_2848. Cote locale : C_2_42_03.
LE TROISIESME COVRRIER FRANÇOIS, TRADVIT FIDELLEMENT en Vers Burlesques. A PARIS, M. DC. XLIX.
LE TROISIESME COVRIER FRANCOIS EN VERS BVRLESQVES
EN pleine audiance tenuë Le Ieudy, fut la lettre leuë Vn & vingt du mois & de l’an Escrite à la bonne mamman De nostre tres-honoré SIRE, Où sa Maiesté pouuoit lire Les Raisons que le Parlement Alleguoit de son armement, Le desordre & la tyrannie De son ministre d’Italie, L’insolence de ses suppots Ennemis de nostre repos ; Les ruines inéuitables Sous qui ces monstres detestables Auoient engagé tout l’Estat : Et que leur damnable attentat Contraignoit ce Senat Auguste Comme il est tout Sage & tout Iuste Pour remedier à leurs coups De relancer ces loup-garous De les poursuiure, & les prendre De les condamner, & les pendre.
Ce present iour le reglement Verifié du Parlement Se lit dans la Connestablie Et bien plus, c’est qu’on l’y publie Ce beau reglement & royal Pour tous les hommes de cheual
On deputa ce mesme iour Quelques Conseillers de la Cour, Pour faire executer eux-mesme Vn Arrest rendu le quinziesme Qui portoit que seroient saisis Et dans l’Hostel de Ville mis Les deniers deux par les comptables.
Vendredy contre les notables Et certains Escheuins d’Amiens Arrest fut contre ces Chrestiens Rendu sur la plainte ciuille De l’habitant de cette ville A la teste caude & hardy L’Arrest porte du Vendredy Le vingt & deux de cette année Que sur la requeste donnée Sous l’adueu du grand Duc d’Elbœuf Ce iour-là botté tout de neuf L’vn de nos Chefs illustre Prince Et Gouuerneur de la Prouince, Que le Picard s’assemblera Et d’autres Escheuins fera : Deffend aux presens l’exercice Comme par lettre subreptice Qu’on nomme lettre de Cachet Maintenus : dit qu’on a mal fait De leur donner telles epistres Contre la ville & ses vieils titres L’Arrest estoit fort important Pour conseruer cet habitant En l’obeïssance royale Contre la ligue Cardinalle,
Ce iour mon cœur estoit en ioye Et fit la Cour de la Monnoye Arrest que ses maistres batteurs Monnoyeurs & Fabricateurs Payeront toutes choses faites D’or massif, soit plats, soit assiettes, Bref, tout mare d’or, quatre cent francs Ioints à vingt & huict escus blancs : Pour les cuilliers & les escuelles Et toutes les autres vaisselles Qu’ils trouueront de bon argent, Ils payeront le marc content Vingt & six liures & demies : Entend qu’elles soient conuerties En des especes du païs C’est à dire, de beaux Loüis. Commandement au contre garde De l’escrire & d’y prendre garde Et les Monnoyeurs les rompront Deuant ceux qui les porteront, Sur peine de payer d’amande Cinq cens liures, somme assez grande : Sur mesme peine on leur enioint D’en prendre & n’en refuser point Et de cette taxe susdite Ne rabattre pas vne pite.
De Roüen aduis est venu Aduis qui n’est pas sogrenu Comme tant depuis six sepmaines, Sçauoir que ces Cours Souueraines Et ses principaux Officiers Auoient depesché des Courriers Vers leurs Majestez Tres-Chrestiennes Portans leurs treshumbles antiennes, Et le suiet qu’eut cette Cour
Samedy quelque teste folle Sema par tout vn bruit friuolle Lequel n’en a pas moins couru, Que l’Espagnol auoit paru Sur les asseurances receuës De nos Frontieres dépourueuës Par les ordres du Cardinal Qui veut bien que tout aille mal : Que trouuant le temps fauorable Auec vn corps considerable Leur Archiduc leué matin Rodoit autour de S. Quentin.
Monsieur le Feron quand i’y pense Fit vne tres belle Ordonnance Ce iour vingt & trois de Ianuier Commandant à tout Officier Qui sera de garde à la porte, De faire par ses soins en sorte, Que dans le Louure soit conduit Le bled qui passe & n’est pas cuit, Orge, froment, segle, farine Pour estre durant la famine Deliuré par des Officiers Aux Boulangers & Patissiers Afin qu’incessamment ils cuisent Et que si lesdits grains leur duisent, Ils viennent tous les achepter Au Louure où l’on les fait porter, Et ce que i’y trouue de drolle, Sans auoir credit d’vne obolle ; Car l’Ordonnance dit expres Qu’ils porteront argent tout frais, Outre qu’ils promettront de rendre Autant de pain qu’il s’en doit vendre Dans les ordinaires Marchez : Deffences d’auoir grains cachez,
Le Dimanche ou le vingt-quatre Sortirent tous prests à se battre Sans manteaux, en mignards souliers Les bas de soye & les iartiers (Car ceux qui craignoient plus les crottes, N’auoient que de petites bottes) Gage, Lecteur, que tu m’attends A nommer nos fiers habitans Qui contre la pluye & l’orage N’auoient porté que leur courage, Et qui la pluspart les pieds nuds De Iuuisy sont reuenus.
Oüy, ie veux chanter la iournée La plus celebre de l’Année, Depuis dite de Iuuisy Alors que le Bourgeois choisy Portant la plume sur l’oreille, Iurant Dieu qu’il feroit merueille, A teste frisée, à poil ras Bastons ferrats & non ferrats, Quoy qu’à my-jambe dans la bouë Sur ses terres faisoit la rouë ; Et portant la fierté dans l’œil, Marchoit pour assieger Corbeil
Lundy vingt-cinq on a sçeu Que dans la Bretagne est venu Vn Commis de la Meilleraye Et que c’est vne chose vraye Que sur la demande aux Estats De ce Mareschal fiera bras Et Gouuerneur de la Prouince, Sous le nom de nostre bon Prince De six milliers de fantassins Pour seconder les sots desseins D’vn Cardinal plein de furie, Et quatre de Cauallerie ; Que le Parlement du païs Aux prochains Estats a remis De respondre à cette demande, Et mesme iour on nous mande Qu’il a fait deffence qu’aucun Leue soldats, ne fut ce qu’vn Sous l’ordre de la Meilleraye Contre qui saigne encor la playe Et le trou qu’il fit au ïabot D’vn Crocheteur : veut que Chabot Qui sous main leuoit gens de guerre Ait à denicher de leur terre. Et de plus cette Cour enioint Qu’aux deniers du Roy soit reioint Le droit des billots que l’on nomme D’où l’on dit que le tueur d’homme Meilleraye auoit tous les ans Plus de quatre cents mille frans.
En outre on sçait qu’en bonne forme Leur Cour a fait Arrest conforme Au nostre du huict de Ianuier.
Le Mardy vinrent quelques bandes Tant Polonoises qu’Alemandes Au Bourg la-Reine pres Paris, Dieux quels cruels chariuaris Que de mal de bosse & de playe Faisoient-ils ? lors que la Boullaye Braue Marquis, mit en morceaux Plus de trente de ces pourceaux Outre que ce Chef de courage Ouurit vertement le passage A cent quatre-vingts & dix-neuf Charrettes de bled, sans le bœuf Qu’au nombre de deux cents soixante Ou de trois cents que ie ne mente Il amena par son Conuoy Malgré les Ennemis du Roy.
Ce iour les Officiers de Ville Pour rendre le chemin facile A tous les partis qu’on conduit A cheual le iour & la nuit, Par vne Ordonnance deffendent Aux Bourgeois qui les chaisnes tendent De les tendre sans mandement
Or furent en especes belles Trouuez au Bureau des Gabelles Plus de quatre-vingts mille escus Que les Receueurs ces cocus Auoient escartez par malice Ayant fait serment en Iustice Qu’ils n’auoient pas vn seul denier Ce fut le vingt-six de Ianuier Iour que le nommé la Railliere Fut pris en noüant sa iartiere, Comme espion du Cardinal, Son nom est connu pour le mal Qu’il a fait souffrir à la France, Il est hoc à quelque potence C’est vn Sorcier, c’est vn Deuin, Exacteur des droits sur le Vin, Iadis pillier de Particelle Autheur de la taxe nouuelle Par qui tant de gens sont lesez Dessous vn faux titre d’aisez. Il est Monopoleur en Diable C’est vn Vsurier execrable, Ame damnée, esprit malin, Vn volleur, bref vn Mazarin. Ce trouble repos de la Ville Gist à present dans la Bastille Ou l’on marque des logements Pour d’autres mauuais garnements.
Auiourd’huy la Cour Arrest donne Par lequel Arrest elle ordonne Que les Villes de son ressort Auront à faire vn grand effort Pour amener bled & farine Et tout ce qui chasse famine Hors les murailles de Paris Nonobstant tous autres escrits
Mercredy vingt-sept de Ianuier Nosseigneurs ont fait publier Vn Arrest du vingt-cinquiesme, Qui sur la multitude extreme Des libelles, & qu’aucuns d’eux Sont insolents & scandaleux, Porte, qu’Imprimeurs & Libraires Suiuant leurs Statuts ordinaires Ne feront point d’impression Sans y mettre premier leur nom Et de celuy que l’on imprime Autant en Prose comme en rime : Ce iour icy l’on eut aduis Que Messieurs de Lyon rauis Faisoient des accueils fauorables A tous nos Arrests equitables. Que suiuant eux les Magistrats Qui de loing leurs tendoient les bras Tiennent leur Ville en l’asseurance Le deuoir & l’obeïssance, Que les Trouppes qu’vn Mareschal Amenoit pour le Cardinal, Le grand Schomberg qui prit Tortose Et qui pourroit faire autre chose Que de seruir la passion D’vn prodige d’ambition Ses Trouppes dis-ie estant venues
Ce iour partit de S. Denys Ou les Mazarins font leurs nids, Des Trouppes pour aller surprendre Charenton que pretend deffendre Le braue Marquis de Clanleu Qui fera son paquet dans peu, Et neantmoins s’y fortifie Pour y passer toute sa vie Mais les soins de nos Generaux Qui sont tous autant de Heros, Si bonnes Trouppes y ietterent Que les Mazarins retournerent.
De Roüen il nous est escrit Que fut pris par vn tour d’esprit Qu’a fait le Duc de Longueuille Le vieil Palais de cette Ville, Que dés le vingt & cinq ce Duc Chassa honteusement S. Luc, S. Luc qui s’estoit par adresse Saisy de cette forteresse Au nom du Mazarin party, Mais il en a le démenty. On mande aussi que ce Duc leue Tous les gens de guerre qu’il treuue Et que desia ces Lieutenans Ont enroolé beaucoup de gens En suitte on nous donne asseurance
Ieudy vingt huict le Parlement Assemblé sur le compliment Qu’auoit fait celuy de Prouence Arresta qu’on fit Remonstrance Attendu l’Arrest d’Vnion, Au Roy, sur la creation De ce Semestre mis sans cause Contre les Loix, ce que dire ose La Cour qui iure hautement De ne connoistre nullement Ces Offices fraischement nées Et tient pour personnes priuées Tous ces Messieurs les frais ponus Et ces Iuges nouueaux venus.
Ce iour nous apporta Bethune Nouuelle qui n’est pas commune Sçauoir que son frere Charaut Allé s’en estoit au grand trot A Calais, Ville capitalle Pour la rendre anti-Cardinalle, Ce qu’il pourroit faire aisément Estant de son Gouuernement, C’est ce Charaut des Feüillantines Qui par les fourbes Mazarines Estoit depuis peu debouté Contre le droit & l’equité, Pour ne plaire pas à la Reine,
Icy dans la Royalle place Vn regiment portant cuirasse, Des bottes & non des souliers, C’est à dire de Caualliers, Y fit serment & la reueuë Où son addresse fut connuë : Il est à Monseigneur d’Elbeuf Et non pas à Monsieur Tubeuf. La haute & basse Bourgeoisie Auoit si fort la place emplie Que ce Duc auec ses enfans Qui sont braues & triomphans Suiuy de beaucoup de Noblesse Cuida demeurer dans la presse. Et dés le soir ce Regiment Sortit auec commandement Pour aller du costé de Brie D’où vint à nostre boucherie Le lendemain mouton & bœuf Que ce beau regiment d’Elbeuf Ensemble des bleds & farines, Amena des villes voisines, En aussi grande quantité Que iamais il en ait esté Dans nostre Ville auant le siege.
On ne nous escrit rien de Liege Mais de S. Germain on escrit Que Mazarin meschant esprit Pour rompre la correspondance De Paris auec la France A fait arrester les Courriers A mis en morceaux leurs papiers ; Deffendu de plus s’entremettre De porter ou reporter lettres. Ce qui n’empesche pas pourtant Qu’on en reçoiue presque autant, Qu’on faisoit auant sa deffence Et que ne courrent par la France De tres-bons aduertissements De ses mauuais deportements.
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