Anonyme [1649], LE TE DEVM GENERAL DE TOVTES LES PROVINCES DE FRANCE, SVR L’HEVREVX RETOVR DV ROY LOVIS XIV. EN SA VILLE DE PARIS, le dix-huictiéme iour d’Aoust mil six cens quarante-neuf. , français, latinRéférence RIM : M0_3757. Cote locale : C_10_27.
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LE TE DEVM GENERAL
de toutes les Prouinces de
France.

Sur l’heureux Retour du Roy Louis XIV.
en sa Ville de Paris, le dix-huictiesme
iour d’Aoust mil six cens quarante-neuf.

LE LANGVEDOC.

Te Deum laudamus : te Dominum confitemur.

NOVS vous louons comme Dieu, Adorable
Sanctificateur de nos ames, de
nous auoir fait des graces que nous attendions
auec des impatiences, qui
n’en eurent iamais de pareilles. Les
Israëlites vous loüerent bien de ce que les Rubens &
les Gadiates leurs freres auoient perseueré, & dans
vostre crainte & dans vostre seruice. Anne vous loüa
bien de ne se voir plus sterile. Salomon vous loüa
bien de voir, que vous luy auiez concedé les moyens
de vous dedier vn Temple. Dauid loüa bien vostre
benignité, apres ses tribulations, & apres auoir veu
que la promesse du Messias luy auoit esté faite. Les

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Apostres vous loüerent bien en attendant vostre
S. Esprit. Le peuple vous loüa bien en voyãt les miracles
que vous auiez faits en leur presence : & la France
ne vous loüeroit pas de luy auoir redonné vn Souuerain,
que vous luy auiez desia donné, lors qu’elle
y pensoit le moins, par vn effect incomprehensible à
toute la Nature creée. Oüy Seigneur, nous vous
loüerons eternellement d’auoir ramené nostre Dieudonné
à Paris, afin de nous faire voir, que la Paix,
que sa Majesté venoit de nous donner est asseurée.

 

Ios, 22. 33.

1. Sam. 2. 1.

1. Roys, 8.
15.
2. Samy.
22.

Luc. 24. 53.
28 43.

Oüy, Seigneur, nous vous loüerons à iamais auec
toutes les creatures visibles & inuisibles, raisonnables
& spirituelles, qui sont au Ciel, sur la Terre, &
sous la Terre, autant de fois qu’il y a d’indiuidus en
la nature, de nous auoir rendu le plus digne Souuerain,
que vous ayez iamais pris plaisir de mettre au
monde. Loüez-le, Courtisans celestes, loüez-le
Esprits Angeliques, loüez le toutes ses Puissances,
loüez-le Troupes Astrées, louez-le demeure eternelle,
louez-le peuples terrestres & aquatiques, de
nous auoir remis parfaitement bien dans l’esprit de
celuy à qui nous deuons toute sorte d’obeïssance.
Oüy, Souuerain Principe de tout l’estre creé, nous
vous confessons, comme Sejgneur eternel & independant,
qui peut tout ce qu’il luy plaist en faueur de
ses creatures, de nous auoir rendu ce Dieu-donné,
que nous souhaittions de reuoir auec des passions incroyables.
Nous vous confesserons de tout nostre
cœur ; parce que vous auez ouy-les paroles de nostre
bouche, & parce que nous auons aussi entendu toutes
les vostres : Nous chanterons deuant les Anges,
nous adorerons en vostre sainct Temple, & nous confesserons
vostre nom ; parce que vous auez exaucé les
supplications que nous vous auons faites. Oüy, Seigneur,
nous vous confesserons de tout nostre cœur,
au conseil & en la congregation des iustes : car vous

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auez fait de grandes choses pour vn peuple à qui vous
auez redonné son Prince. Confession & magnificence
se trouueront en ce bien fait, iusques à la fin des
siecles. Aussi estes-vous, contre le sentiment des impies
& des abominables, celuy que les hommes &
les Anges confessent estre sans commencement &
sans fin, & qu’ils ne sçauroient parfaitement bien
comprendre.

 

LA GVYENNE.

Te æternum Patrem : Omnis terra veneratur.

Non seulement toute la France ; mais toute la
terre habitable vous honorera, à cause des graces que
vostre Diuine Bonté nous a communiquées, comme
Pere Eternel de toute la Nature creée. Aussi ne faites
vous rien pour l’homme, que pour en estre honoré :
toutes vos actions visent à nostre profit & à vostre
gloire : mais ce qui est plus à vostre honneur, doit
estre fait le premier, & preferé à toute autre chose.
C’est pourquoy vous auez voulu assuiettir tout ce
qui est à vostre Fils IESVS-CHRIST, afin que tout ce
qui est vous peust honorer en sa personne. Il n’y arien
dans le monde qui ne presche les faueurs qu’il vous
a pleu de faire à chaque estre. Le Ciel dit que vous
l’auez fait tel qu’il est ; le Soleil nous apprend que
vous l’auez mis au monde ; la Lune monstre au silence
de la nuict, qu’elle est vostre creature. Le reste
des Astres font bien voir que vous les auez formez,
les espaces de l’air nous preschent vostre immensité ;
la terre fait bien paroistre que vous estes son Dieu ; la
Mer son principe ; les abysmes leur autheur, & tout
le monde ensemble, marque qu’il est l’ouurage de
vos mains sacrées. Les Cieux, dit Dauid, racontent
vostre gloire pour vous honorer : ces cercles tousjours

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roulans publient incessamment vos merueilles.
De sorte qu’il n’y a rien qui ne vous reuere, ou qui ne
vous doiue reuerer, comme Pere Eternel de toutes
choses : cela estant, il me semble que nous sommes
du nombre, & que nous sommes aussi par consequent
obligez de nous acquiter dignement de l’honneur
qu’il vous a pleu nous faire, en nous redonnant
nostre Prince.

 

LA PROVENCE.

Tibi omnes Angeli, tibi Cœli & vniuersæ potestates.
Tibi Cherubim, & Seraphim, incessabili
voce proclamant. Sanctus, Sanctus, Sanctus, Dominus
Deus Sabaoth.

Oüy, Seigneur, non seulement toutes les Hierarchies
Celestes, qui sont les Anges, Archanges, les
Principautez, les Puissances, les Vertus, les Dominations,
les Thrônes, les Seraphins & les Cherubins
vous doiuent appeller trois fois Sainct. Mais encore
tous les plus incredules habitans de cette Monarchie
Françoise, si cas est, qu’il y en ait quelques vns qui
soient tachez d’vn vice si abominable. Oüy, Seigneur,
vous estes le seul Sainct des Saincts, voulant
estre adoré pour cela, & ne pouuant pas souffrir qu’on
rende ce qui vous appartient, qu’à vous-mesme.
Aussi estes-vous ce Dieu jaloux, qui ne veut pas que
sa gloire soit manifestée qu’à sa propre personne.
Oüy, Seigneur, vous estes ce Dieu, qui contre le
sentiment de quelques impies, nous auez redonné
nostre Dieu-donné, afin d’establir vne paix vniuerselle
entre ses peuples. O saincte, sacrée & indiuisible
Trinité, faites nous la grace de nous le conseruer
encore vn couple de siecles : vous lisez bien dans
nos cœurs Pere, Fils, Sainct Esprit, les vœux que

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nous faisons pour son salut, & la passion auec laquelle
nous taschons de les pousser, iusques dans le sein
de vostre generation eternelle. Oüy, Production infinie,
c’est vne supplication qui part de nos cœurs,
auec vn zele incomparable.

 

Apoe. 15. 4.

Ios. 24. 19.

Exod. 20 5.

LE DAVPHINÉ.

Pleni sunt cœli & terra : maiestatis gloriœ tuœ.

Les Cieux & la terre sont pleins de la Majesté de
vostre gloire, Souuerain Seigneur de toute la Nature
creée. Elle est en la nuée, ainsi que nous l’apprend
Ce digne conducteur des Legions Hebraïques. Elle
est en la Montagne de Sina, comme vn feu tres-ardent :
elle est sur le toict de l’Alliance aux Israëlites :
elle remplit le Temple & le Tabernacle qui vous ont
esté consacrez : & maintenant toute la France s’en
void tellement cõblée par le retour de son Dieu-donné,
qu’il n’est rien au monde de semblable. Vous
nous l’auez redonné, Seigneur, afin que toute la
gloire vous en soit attribuée ; puis qu’il ne se peut
rien faire sans vostre grace : gloire vous en soit donc
renduë, grand Dieu, iusques à la fin des siecles. Les
Cieux, dit Dauid, manifestent la gloire du Seigneur,
& l’estenduë d’enhaut monstre quel est l’ouurage de
cet Ouurier inimitable. Nous pouuons bien dire, à
l’imitation de ce grand Prophete, que le retour du
Roy dans Paris, ne la manifestent pas moins, puis que
c’est vne action d’où dependoit tout le salut de cette
Monarchie. Sus portes de cette grande ville, ne vous
fermez plus, le Roy de gloire est entré chez vous,
pour vous assister de ses benedictions & de ses graces.
Quel est-ce Roy de gloire ? c’est ce Dieu-donné
enuoyé du Ciel, aux feruentes supplications que
toute la France luy en a faites. C’est vn tres-riche &

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tres-illustre present, qu’il nous a gratuitement enuoyé
pour sauuer le peuple & l’Estat, de la tyrannie
estrangere. C’est vn autre Sainct Louis, qui doit porter
ses armes du costé du Leuant, & forcer le Roy des
Tartares, non seulement à luy enuoyer des Ambassadeurs,
mais encore à le reconnoistre. C’est celuy
qui doit enleuer Damiette aux Mamelus, prendre le
grand Caire, assuiettir Biserte, forcer Constantinople,
& reduire tout le pays des Infidelles à son obeïssance.
Enfin c’est celuy qui doit planter la Croix par
toute la terre habitable.

 

Exod. 16.
17. 14. 17.

Nomb. 14.
10.

Psal. 18.

LA BRESSE.

 


Te gloriosus Apostolorum Chorus.
Te Prophetarum, laudabilis numerus.
Te Martyrum candidatus, laudat exercitus.

 

Que la glorieuse compagnie des Apostres vous
louë, Dieu d’vne bonté infinie ; de nous auoir conferé
tant de graces, puis que nostre insuffisance ne
nous permet pas de nous en acquitter dignement,
comme il nous le faudroit faire. Que le loüable nombre
des Prophetes vous en reuere, puis que toute
l’industrie de nostre esprit se trouue incapable d’vn si
digne office. Que tous les resplendissans exercices
des Martyrs vous en glorifient ; puis que nostre entendement
ne sçauroit arriuer à vne reconnoissance
si genereuse, que celle, qu’on vous deuroit faire.
Neantmoins, Seigneur, nos levres ne laisseront pas
de vous loüer de ce digne bien fait, le mieux qu’il
nous sera possible. Le Roy s’esiouïra en vous, grand
Dieu, & tous ceux qui iureront en son nom, se glorifieront
en luy : Car la bouche de ceux qui en parlent
mal sera close : tous les peuples vous en louëront
car vous iugez les gens en equité, & r’adressez les

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Nations de la terre. Loüez cette adorable Bonté, des
graces qu’il luy a pleu de nous faire, Esprits bien-heureux,
qui viuez dãs vne felicité parfaite. Loüez-le Ciel,
Terre, Mer, & tout ce qu’il y a d’estres en la Nature,
de la clemence dont il a vsé enuers ses pauures creatures.
Sa gloire est par dessus le Ciel, & ses graces sont
incomprehensibles. Loüons-le nous autres en ses
saincts lieux, & en l’estenduë de nostre force. Loüons-le
en ses puissances, & selon son extréme grandeur.
Loüons-le en son de trompe, de psalterion, de harpe,
de tambour, de haut-bois, de violles, d’orgues, & de
cymbales de iubilations, de ce qu’il nous a redonné
nostre Prince. Loüons le Seigneur Dieu d’Israël, de
nous auoir de liurez de nos ennemis, & de la main de
tous ceux qui nous vouloient perdre, afin que nous le
seruions d’ores-en auant sans crainte. Loüons le Dieu
de Iacob : car sa misericorde est abondante sur nous,
& sa verité demeurera de sicle en siecle. Depuis le
commencement des temps, iusques à la fin qu’on ne
sçauroit comprendre. Le nom du Seigneur est digne
de loüange, d’auoir exaucé les prieres que son pauure
Peuple luy a faites.

 

Psal. 62.

Psal. 150.

LA NORMANDIE.

Te per orbem terrarum : sancta confitetur Ecclesia.

Ouy, Seigneur, la saincte Eglise vous confesse &
vous confessera par toute la rondeur de la terre, d’auoir
tourné les yeux de vostre misericorde, sur l’estat
déplorable où toute la France se voit maintenant reduitte.
Ouy, Seigneur, ie vous confesseray auec elle
de tout mon cœur, au Conseil & en la Congregation
des Iustes. Ouy, Seigneur, ie vous confesseray de
tout mon cœur : car vous auez ouy les supplications
que ie vous ay faites durant que ie me voyois à la veille

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d’estre reduite en vne extréme misere. Ie chanteray
vos insignes faueurs deuant les Anges : ie vous
adoreray en vostre sainct Temple, & ie confesseray
hautement par tout la grandeur de vostre Misericorde.
En quelque iour que ie vous inuoqueray, exaucez
moy mon Dieu : car i’ay plus besoin de vos graces,
que pas vne de toutes les Prouinces de France. Vous
me viuifierez, Seigneur, si ie chemine dauantage au
milieu de mes tribulations, & vous estendrez vostre
main sur mes ennemis, pour leur monstrer que ie suis
en vostre sauue-garde. Ie croy fermement, Seigneur,
que vous ne laisserez pas de faire pour nous, ce que
vous faites tous les iours pour des Peuples ingrats, &
pour des ames perfides. Vous nous auez desia donné
vostre cher Fils pour nostre Salut, vous nous donnerez
donc bien encore la Paix pour nostre repos, puis
que c’est vne faueur de moindre importance. Vous
auez dit, qu’il ne faloit que croire pour estre bien heureux,
& pour auoir de vostre diuine Majesté tout ce
qu’on sçauroit desirer de vos graces. Sainct Matchieu
nous asseure que toutes choses seront possibles à ceux
qui auront autant de Foy, que peut contenir de grosseur
vn grain de moustarde. Si cela est, comme il n’en
faut point douter, ie veux viure en repos, & croire
fermement que la Paix que le Roy vient de nous donner
sera d’vne longue durée, si quelque furie infernale
ne se met à trauerser nos affaires ; aussi bien veut-on
que nous croyons que la source de nos miseres ne
vient que de la source de toutes nos craintes.

 

Iean 20 29.
Mar. 9. 23.
Matth. 9. 25.
17. 20.

LA PICARDIE.

 


Patrem immensæ maiestatis.
Venerandum tuum verum : & vnicum filium.
Sanctum quoque Paraclitum Spiritum.

 

Pere de Majesté immense, vray, venerable & vnique

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Fils de ce Tout-puissant, & vous Sainct Esprit
Consolateur des bonnes ames, faites nous la grace de
rendre cette Paix aussi stable que la durée des siecles.
Nous auons souffert tant de maux depuis quelque
temps, que ie tremble encore au seul souuenir de ces
pensées. Loüanges infinies vous soient pourtant renduës,
Dieu de Paix & de misericorde, d’auoir mis cet
Estat dans vne tranquillité publique. I’ay esté presque
tousiours le refuge des legions estrangeres & domestiques.
Tout mon Peuple est ruïné, tous mes Autels
sont desmolis, & toutes mes maisons rasées ; si bien
que ie suis aux abois, si vous n’auez pitié de cette pauure
affligée ; mais ie me confie en vostre misericorde,
Seigneur, & en la Paix que vostre bonté vient de nous
donner, & qu’elle va rendre inuiolable. Que vous
sçaurions nous dõner souuerain Sauueur de nos ames,
en reconnoissance d’vn si grand benefice. O Paix qui
templis nos esprits de douceur ; O digne Déesse qui
tiens tout l’Vniuers dans vne parfaite harmonie ; O iuste
effroy des meschans, pour lequel Iesus Christ a versé
tant de larmes ; O venerable fille du Ciel, qui sçauez
si dignement appuyer l’authorité du Prince, faites
nous la grace de ne nous abandonner iamais plus à
la mercy de ces legions inhumaines. Charité increée,
deliurez nous des mains de ces Peuples insolens, & de
la rage de ces races ferrées. Et vous digne Oinct du
du Souuerain Eternel, illustre Puissance, qui ne releuez
que de la sienne, chassez loin de nous ces cœurs
de métail & ces ames de bronze, & nous vous promettons
deuant Dieu & deuant les hommes, de vous
benir eternellement, & de prier tous les iours ce souuerain
Sauueur de nos ames pour vostre santé, & pour
la prosperité de vos armes contre toutes les forces
estrangeres.

 

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LA CHAMPAGNE.

 


Tu Rex gloriæ Christe.
Tu Patris sempiternus es Filius.
Tu ad liberandum suscepturus hominum : non horruisti
virginis vterum.

 

Ouy, Sauueur de nos ames, vous estes ce Roy de
gloire, qui doit iuger les viuants & les morts, & qui
doit rendre à chacun ce qui luy appartient auec iustice.
Ouy, digne Reparateur de toute la Nature humaine,
vous estes le Fils Eternel du Pere, qui de sa seule
volonté a donné l’estre à toutes les choses. Ouy, veritable
Isaac, vous n’auez point eu en horreur de vous
incarner dans le ventre d’vne Vierge, qui sert de refuge
à toutes les ames pecheresses, afin de nous deliurer
de l’esclauage où nous estions sousmis, par la faute de
nostre premier pere. C’est pourquoy nous vous supplions,
adorable Redempteur de tout l’estre mortel &
raisonnable, de maintenir tons les Peuples de France
dans vne parfaite vnion, & dans l’amour qu’ils esperent
auoir continuellement de leur Prince. Comme
Fils du Pere Eternel, & comme Dieu consubstantiel
à ce Souuerain incomprehensible, toutes choses vous
sont aisées, puis que le pouuoir ne sçauroit estre separé
de l’estre independent, & que l’vn & l’autre sont
vne mesme chose en vostre personne. Ne nous déniez
donc pas cette grace, ie vous en supplie. Le desordre
où ie me trouue encore à present m’oblige à vous faire
cette demande du meilleur de mon ame, auec des
empressemens incroyables. Vostre bonté & vostre
misericorde sont d’vne nature infinie. De sorte que la
requeste que ie vous fais, auec vne passion tres-zelée,
ne sçauroit estre qu’elle ne vous soit bien aisée, puis
qu’elle est comprise de celuy qui comprend toutes

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choses. Quoy, Seigneur, ne faites vous pas tout ce
qu’il vous est possible pour vostre gloire ? La grace que
nous demandons en fait vne partie, Sauueur de nos
ames, & c’est à quoy nous visons de tout nostre cœur
pour vous satisfaire. Rendez donc, s’il vous plaist, mon
Dieu, la Paix que le Roy vient de nous donner d’vne
nature inuiolable, afin que tous les Peuples de France
vous loüent continuellement iusques à la fin des
siecles.

 

LA BRIE.

Tu deuicto mortis aculeo : aperuisti credentibus regna
cælorum.

Vous qui auez vaincu l’aiguillon de la mort, & qui
auez ouuert le Royaume des Cieux aux croyans, adorable
Sauueur de nos ames, faites nous la grace de
vaincre les trames & les menées de ces esprits de discorde,
qui ne songent qu’à semer de la zizanie entre le
Prince & le Peuple. Ouurez-nous le sein de vostre
misericorde, afin que la Paix qu’il vous a plû-nous donner
par l’entremise de nostre digne Monarque, soit
d’vne eternelle durée. Chassez de cét Estat toutes ces
furies infernales, qui ne cherchent auec les funestes
flambeaux de leur cruelle ambition, qu’à mettre vne
incendie generalle aux quatre coins de cét Empire.
Punissez ces mal-heureux Alectons du mesme supplice
qu’ils nous ont punis durant ces derniers desordres,
& toute nostre posterité vous loüera iusques à la fin
des siecles. Vous nous auez desia donné la Paix, vous
auez temis nostre Dieu-donné en son throsne, & vous
nous faites asseurer que cette felicité sera de longue
durée : mais si vostre Diuine Maiesté ne bannit ces engeances
Plutoniques de l’oreille de nostre Monarque,
nous courrons risque de rechoir à l’aduenir dans
le mesme precipice, où leur rage nous auoit plongez

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sans aucune esperance de misericorde. En contemplant
vostre estre, Seigneur, vous y voyez comme
dans vn miroir vniuersel toutes leurs intentions, puis
que vous y voyez non seulement ce qui a esté, ce qui
est, & ce qui sera : mais encore tout ce qui pourroit
estre. Vous y voyez leurs souhaits & leurs imaginations,
par vne science enticipée. Or puis que cela est,
Sauueur de nos ames, & que vostre puissance estant
d’vne nature infinie, se peut estendre sur toutes choses,
ne nous refusez donc pas, Seigneur, la grace que
l’on vous demande. Vostre Iustice est si complaisante
à vostre Misericorde, qu’elle fera eternellement vanité
de luy ceder tout ce qu’il luy sera possible. Elle
condescendra tousiours aux sentimens que vous aurez
pour la misere des hommes. Faites donc, s’il vous
plaist, que nostre Prince soit vn Prince de Paix pour
nous, & vn Monarque conquerant sur toutes les autres
Nations de la terre, afin que nous vous puissions
loüer comme Dieu, & vous benir comme vn Pere
plein d’amour & de charité pour ses pauures Creatures.

 

LE BERRY.

Tu ad dexteram Dei sedes, in gloria Patris.
Iudex crederis esse venturus.

Vous estes assis à la dextre de Dieu, en la gloire du
Pere ; & nous croyons que vous estes le Iuge à venir,
à qui chacun sera obligé de rendre conte de toutes ses
actions passées. O Dieu de Maiesté infiniel que ne ferez
vous pas en cette qualité contre ceux qui ne viuent
que du sang du Peuple ? Vous armerez vostre
main vengeresse de carreaux & de foudres, pour punir
ces abominables esprits dedans l’eternité des siecles.
Ce sera alors que vous visiterez les iniquitez de cette
maudite race, iusques à la troisiesme & quatriesme

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generation de leurs familles. Ce sera alors que la terre
& les Cieux fremiront de crainte, deuant vne Iustice
si redoutable que la vostre. Ce sera alors que la terreur
saisira les plus Iustes, de se voir accablez de tant
d’injustices. Ie tremble, Seigneur, quand ie pense à
cette épouuentable voix, qui descendra du Ciel sur
toute la surface de cette fragile demeure, pour commander
aux morts de reprendre la lumiere, & d’aller
promptement ouyr leur Arrest eternel de la bouche
d’vn Iuge, qui épluchera iusques à la moindre de nos
pensées. Mais en attendant vne si funeste execution
sur des ames si reprouuées, faites nous la grace, Seigneur,
de nous conseruer la Paix que nous venons de
receuoir de vos bien-faits, & de la rendre aussi durable
que les siecles. N’oubliez pas aussi, grand Dieu, d’assister
nostre Roy d’vn bon conseil, de le maintenir
cent ou six vingts ans dans vne parfaite santé, & de le
rendre victorieux & triomphant de tous ses ennmis,
& de tout le Peuple infidelle, afin que vos loüanges &
ses conquestes soient d’vne plus grande estenduë. Ce
sera dés lors que toute la terre vous honorera comme
Pere eternel, qu’on confessera vostre Nom par tout,
que toutes les Hierarchies celestes auront vne plus
generale satisfaction, & que l’Eglise Militante sera
plus vniuerselle qu’elle n’est pas, pour vous loüer, &
pour vous offrir vn plus grand nombre de Cantiques
de gloire.

 

LE LIMOSIN.

Te ergo quœsumus famulis tuis subueni : quos prætioso
sanguine redemisti.

C’est à ce coup, Seigneur, que nous vous supplions
de subuenir aux necessitez de vos seruiteurs, lesquels
vous auez rachetez de vostre precieux Sang, quoy que
tres indigne de ces graces. Vostre pouuoir & vostre

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bonté sont d’vne Nature tres-vniuerselle & tres-infinie.
Comme souuerain Seigneur de tout l’estre creé,
toutes choses vous sont possibles. Et comme infiniment
bon, charitable, & misericordieux, vous ne refuserez
pas iamais de nous assister, & de subuenir à
toutes nos necessitez, lors qu’on vous sçaura pieusement
obliger à nous estre propice. Appliquez donc à
nostre profit cette bonté & cette puissance, dont vous
estes si diuinement pourueu, adorable Protecteur des
ames affligées ; d’autant que nous vous en supplions
auec toute l’humilité & toute la ferueur qu’il nous est
possible, afin que le retour du Roy dans sa ville de Paris
ne nous soit pas inutile. Cela se fera si vous l’entreprenez,
puis que vostre seule volonté suffit pour donner
l’estre à toutes choses. Si vostre volonté est infinie,
il faut necessairement aussi que vostre pouuoir le
soit ; veu que ses deux facultez, ou pour mieux dire
ces deux attributs ne sont qu’vne mesme chose en vostre
personne. Vous sçauez les maux que nous auons
soufferts dans ces derniers Toubles, & vous voyez
encore ceux que nous souffrons tous les iours par la
mauuaise intelligence qui s’est glisée entre des mortels,
que Dieu semble auoir peruertis pour la punition
de nos crimes. Ayez donc compassion de nos miseres,
charitable Reparateur de tous nos desordres,
afin que le Roy nous fasse tousiours viure en Paix, &
mesme afin que nous soyons tousiours en estat de
chanter hautement vos graces. Dõnez nous moyen,
Seigneur, de subsister dans vn païs affligé de tous les
mal-heurs du siecle, & vous nous obligerez à benir
vos bontez, sans apprehension quelconque dans la
durée d’vne eternité incomprehensible.

 

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L’AVVERGNE.

Æterna fac cum Sanctis tuis : in gloria numerari.
Saluum fac populum tuum Domine : & benedic
hœreditati tuœ.

Faites, Seigneur, que nous soyons admis auec vos
Saincts, en la gloire eternelle. Sauuez, Seigneur, vostre
Peuple, & benissez vostre heritage. Ne nous abandonnez
pas à la passion de nos Ennemis ; conseruez
nous le Roy, & nous donnez vne Paix de longue
durée. Aprés cela, Seigneur, nous vous loüerons éternellement
comme Dieu, & nous vous honorerons
comme Pere & comme Seigneur de toutes choses. Si
vostre Diuine Maiesté n’eust esté auec nous pendant
ces derniers Troubles, la fureur de nos Aduersaires
nous auroit peut-estre engloutis tous vifs. Ils auroiẽt
peut-estre pillé nos Autels, massacré nos Enfans, &
reduit tout le païs en cendre. Loüé soit le Dieu de Iacob,
qui nous a mis en Paix : & loüé soit sa Diuine
Maiesté, qui ne nous a pas donnez en proye à ce Peuple
barbare. Nostre vie est eschappée des lacs qu’ils
nous tendoient, comme celle des passereaux s’eschappe
quelquefois des mains de ces Oiseleurs, qui ne visent
qu’à leur perte. Loüé soit le Seigneur, qui ne nous
a pas abandonnez à la mercy de ces furieux exterminateur,
& qui nous a sauuez de leurs traits homicides.
Leurs desseins se sont éuanoüis, & leurs conspirations
se sont dissipées par le retour du Roy dans Paris,
& par la Paix dont leurs Maiestez nous ont asseurée.
Nostre aide s’est fait au Nom du Seigneur, qui a fait
le Ciel & la Terre pour l’homme. C’est maintenant,
Souuerain Eternel de nos ames, que vous auez laissé

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vostre seruiteur en paix selon vostre saincte promesse.
Vous auez preparé nostre salut deuant la face de
l’Vniuers, pour donner lumiere aux foruoyez, &
gloire à vostre pauure peuple. Benissez-le race
Troyenne, de vous auoir tirez du malheur, où tout
l’Estat se voyoit plongé, & d’où toute la prudence
humaine ne nous auroit sceu guarantir en façon quelconque.
Benissez vostre heritage, Seigneur, afin
qu’il puisse subsister en paix, selon vostre saincte Misericorde.
Benissez-le, troupe Celeste, benissez-le,
tous les elemens, benissez-le, Vertus de sa toutepuissance ;
vous astres flamboyans, pluye, rosée, bruines,
chaleur & froidure, lumieres & tenebres, montagnes
& colines, lacs & fontaines, animaux terrestres
& aquatiques, & vous ames iustes & raisonnables,
benissez le Seigneur, qui nous a redonné le
Roy & la paix, & qui nous a fait la faueur de nous regarder
de son œil de Misericorde : sa Diuine Bonté
vueille que cela continuë iusques à la fin des siecles.

 

Psal. 23.

Luc. 8.

Dan. 3.

L’ANIOV.

Et rege eos, & extolle illos vsque in œternum.

Gouuernez, Seigneur, vostre peuple, & les esleuez,
en sorte que la guerre ny la tyrannie ne les
puisse jamais atteindre. Quoy que i’aye l’honneur
d’estre l’appanage des fils de France ; ie n’en suis pas
pour cela mieux traitée. L’on me déchire les entrailles,
l’on me pille, l’on me vole, & l’on me traite comme
vne terre conquise par la force des armes. Mais
i’espere que le retour du Roy dans sa ville de Paris,
nous donnera plus de repos, & qu’il nous asseurera
pour long temps d’vne paix tres-desirée. C’est pourquoy,
Seigneur, apres nous auoir fait la grace d’escouter
nos prieres, i’espere que vous nous ferez encore,

-- 19 --

celle d’obliger nostre Prince à nous traitter
comme vn Peuple que vous auez dessein de gouuerner
quelque temps icy bas, & d’éleuer vn iour là haut
dans vne beatitude eternelle. O Dieu d’vne bonté
infinie, nous crions à vous du profond de nostre
cœur, afin que vous prestiez l’oreille à nos demandes.
De puis la garde du matin, iusques à la garde de
l’autre matin, nous esperons continuellement en vostre
misericorde. Escoutez nostre priere, receuez nostre
supplication en vostre verité, & nous exaucez
en vostre iustice. N’entrez point en iugement
auec nous, Seigneur, parce que nul viuant ne sera
iamais iustifié deuant vostre face. L’ennemy nous a
persecutez, & nous a abbatus iusques en terre ; mais
auiourd’huy, Seigneur, à cause des bontez de nostre
Prince, vous retirerez nostre ame de tribulation,
& par vostre grace vous destruirez tous nos aduersaires :
Car nous auons fait vœu d’estre vos seruiteurs,
tant qu’il vous plaira de nous maintenir au nombre
des choses. Vous n’estes pas moins misericordieux,
que vous l’estiez du temps de nos premiers Peres :
C’est pourquoy nous leuons les mains vers vous, afin
d’implorer vostre assistance : & afin que vous nous
conseruiez les graces que vous venez presentement
de nous faire.

 

Psal. 129.

Psal. 142.

LA XAINTONGE.

Per singulos dies, benedicimus te.

Et laudamus nomen tuum in sæculum, & in
sœculum sœculi.

Nous vous benissons tous les iours, Sauueur de
nos ames, & nous loüerons vostre sainct Nom de
siecle en siecle, de nous auoir donné la paix que
nous auions tant desirée. C’est vn miracle, Seigneur,

-- 20 --

que vous auez fait contre toutes nos esperances, en
faueur de vostre pauure peuple. Ce sont des graces
que nous ne sçaurions iamais dignement bien reconnoistre,
quoy que nous puissions faire pour vostre
seruice. O que nous vous sommes redeuables,
adorable Reparateur de toute la nature humaine,
d’vne liberalité si extraordinaire, que celle que nous
venons receuoir de vos graces. Que toutes les substances
materielles & immaterielles vous en loüent,
Iuge vniuersel de toute la nature creée. Que les
Saincts & les Anges vous en benissent, digne Voix
de la toute puissance. Que les Cieux & les Elemens
vous en rendent graces, digne Soleil de Iustice. Que
les animaux terrestres & aquatiques vous en chantent
des cantiques de resiouïssance, Sagesse Eternelle.
Que les vegetaux & les mineraux vous en glorifient,
Archetype tousiours semblable à soy-mesme.
Enfin que cet Isaac veritable, qui s’est immolé pour
le salut de toute la nature humaine vous en remercie
pour nous, de peur que nostre ingratitude ne surmõte
la grace qu’il vous a pleu de nous faire. Loüons
& benissons cet estre incomprehensible ; car il a fait
des choses merueilleuses en faueur de son pauure
peuple. Il s’est acquis le salut du monde par sa dextre
& par sa force : il nous a fait connoistre son salut, &
nous a reuelé sa iustice deuant toute la terre. Il s’est
souuenu de sa bonté, & des calamitez de cette
miserable Prouince. Toute nostre posterité sçaura
les biens qu’il nous a faits, & nos enfans publieront
ses graces iusques à la fin des siecles : car sa
misericorde est abondante sur nous, & sa verité sera
d’vne eternelle durée.

 

Psal. 97.

-- 21 --

LA BRETAGNE.

Dignare Domine die isto : sine peccato nos custodire.

Miserere nostri Domine, miserere nostri.

Seigneur, il vous plaira nous garder en ce iour
sans peché. Ayez mercy de nous, Seigneur, ayez
mercy de nous : car si le retour du Roy dans Paris,
n’asseure pas la paix que l’on vient de nous donner, ie
suis en estat d’estre la proye d’vn nombre infiny de
Legions estrangeres & domestiques : mais qui la
pourroit troubler ; si nous ne sommes pas nous mesmes
nos propres ennemis, & si nous ne trauaillons
pas à nostre perte. A moins que de nous opposer à
nostre bien, & mesme à moins que de nous rendre
volontairement complices de nos malheurs, ie ne
croy pas que nostre felicité puisse estre troublée de
quelque disgrace. Seigneur, vous vous rendrez fauorable
à nos supplications, & vous nous mettrez
tousiours à couuert des traits de l’ambition & des
rages de la tyrannie. Vous appaiserez vostre courroux,
& vous destournerez vostre fureur & vostre ire
de nostre face. O Dieu de nostre salut ! retirez vostre
indignation de nous, & soyez tousiours propice aux
supplications de vostre pauure peuple, le salut de
ceux qui vous craignent sera eternel, & vostre gloire
demeurera dans nostre Prouince. Vostre bonté & vostre
verité sont inseparables : vostre Iustice marchera
deuant nous, & nous irons à vous par ses voyes ;
car ie reconnois mon iniquité, pour profiter d’ores
en-auant de toutes vos graces : rendez moy mon premier
bon-heur, & me rasseurez dans cette tranquillité
publique. O Dieu de mon salut ! deliurez-moy
des conspirations des meschans, & ma langue chantera

-- 22 --

hautemẽt vostre misericorde. Si vous souhaittiez
quelque sorte de sacrifice, Seigneur, ie vous en offrirois :
mais vous ne vous éiouïssez point en holocaustes.
Faites bien par vostre bonté à ces pauures
cœurs contrits, & remettez-les dans leur premier lustre,
afin qu’ils puissent plus facilement annoncer
vos loüanges.

 

Psal. 84.

LE BEARN.

Fiat misericordia tua Domine super nos : quemadmodum
sperauimus in te.

In te Domine speraui, non confundar in æternum.

Vostre misericorde soit faite sur nous, ainsi que
nous l’auons tousiours esperé, Seigneur. Seigneur,
nous ne serons iamais confus, parce que nous auons
tousiours esperé en vostre misericorde. Il y a grande
misere en moy, Seigneur, qui suis exilée si loin, ioignant
les ennemis de cet Estat, & ioignant la plus
insupportable nation de la terre. C’est ce qui fait que
ie leue souuent mes yeux vers le Ciel, pour voir d’où
viendra mon secours, & pour voir si vostre Bonté se
rendra exorable à mes plaintes. Mais vous nous preseruerez,
Seigneur, & vous nous couurirez de vostre
main dextre. Vous ferez si bien, Seigneur, que la
fureur de ces estrangers ne nous offensera pas, & que
la paix de nostre Dieu-dõné ne sera iamais troublée.
Ceux qui se fient en vous, Seigneur, ne seront point
esbranlez, non plus que les Monts qui nous enuironnent,
& vous ne laisserez pas regner la domination
des Tyrans sur l’heritage des iustes : vous ferez grace
aux bons, mais vous punirez ceux qui se portent
à tramer la desolation des peuples ; parce que vous

-- 23 --

estes par dessus toutes les Nations, & parce que vostre
gloire s’y trouue interessée. Vous releuez le pauure
de la terre, & retirez l’indigent de sa misere. La
bouche des enfans qui sont en la mamelle, cõfesseront
vostre sainct Nom, & admireront vostre puissance à la
cõfusion de nos aduersaires, pour destruire l’ennemy
du Prince & du Peuple. Vous estes nostre refuge,
nostre force, & nostre secours, contre les aduersitez
qui nous enuironnent. Que la terre se remuë sous
nos pieds, que les plus hautes montagnes s’esbranlent,
que toute la nature soit en vn estrange desordre,
nous n’auons rien à craindre, si vous prenez le
soin de nous proteger, & de nous tenir en vostre
sauuegarde. Que toutes les nations soient troublées,
que les Royaumes soient en desordre, que les Demons
de la guerre soient en estat d’exercer leurs passions ;
que les vols, les meurtres, les violemens, les
sacrileges & les incendies soient des actions vniuerselles,
nous ne craignons rien de cela, pourueu que
vous soyez nostre Protecteur, souuerain Principe de
tout l’estre creé, & que nostre Dieu-donné soit nostre
Iosué ou nostre Moyse. Le Seigneur des armées
est auec nous, le Dieu de Iacob est nostre haute retraite.
Venez & considerez les œuures du Souuerain
Eternel, car il a fait des choses prodigieuses pour le
peuple de France : il a fait cesser la guerre aux quatre
coins de cette Monarchie : il a brisé les arcs &
rompu les armes de nos ennemis, & il a reduit en
cendre les arguës & les chariots de ceux qui nous
vouloient perdre. Le Seigneur des armées est auec
nous, & le Dieu de Iacob sera eternellement nostre
defense.

 

Psal. 152.

Psal. 45.

-- 24 --

LA VILLE DE PARIS.

Sur le poinct que ceux qui me deuoient conseruer,
minutoient ma perte, & que mes propres Enfans conspiroient
contre moy, ie tournois mes yeux vers le
Ciel pour voir d’où viendroit mon secours : mais ne
voyant chose quelconque qui ne trauaillast à ma ruïne,
i’ay si bien inuoqué le Seigneur qui a fait le Ciel
& la Terre, qu’il s’est ouuertement declaré pour moy,
& qu’il a pris ma defense en main contre les seditieux
& les factiõnaires. Il ne permettra pas d’ores-en-auant
que ie sois plus troublée, ny mesme il ne me refusera
iamais plus sa protection ny sa misericorde. Le Seigneur
me preseruera contre les menées de mes Ennemis,
& le Seigneur me couurira continuellement de
sa dextre. Les reuers de mes Ennemis ne m’offenseront
plus en aucune façon, & l’œil de mon Dieu-donné
ne sommeillera plus pour ma garde. Sauuez-moy,
Seigneur, par vostre Sainct Nom, & me guarantissez
par vostre puissance. O Dieu, escoutez ma priere, &
prestez l’oreille aux paroles qui sortent de ma bouche ;
car tous ceux qui s’estoient esleuez contre moy,
ne vous auoient aucunement deuant les yeux, tant ils
estoient obsedez de rage contre mon innocence. Rejettez
donc de grace le mal sur tous mes Ennemis, &
les destruisez selon la foy que i’ay en vostre parole. Ie
vous sacrifieray apres cela de tout mon cœur ; & ie
loüeray vostre Sainct Nom iusques à la fin des siecles :
Vous m’auez deliurée de leurs lacs, & de leurs prodigieuse
enuie, Seigneur, Dieu de Iacob, lors qu’ils s’imaginoient
me reduire facilement en cendre. C’est
pourquoy ie beniray vostre infinie bonté, ie vous sacrifieray
deuant les Anges, & ie vous adoreray en vostre
sainct Temple Vous m’auez tirée de la tribulation
où i’estois, & vous m’auez exaucée en ma iustice.
La lumiere de vostre visage est maintenant signée sur

-- 25 --

nous, & vous auez donné vne eternelle liesse à nostre
ame. Ie dormiray donc en Paix, Seigneur, puis qu’il
vous plaist, & ie me reposeray sur vostre promesse : car
vous estes ma force & mon refuge, & pour l’amour de
vous mesmes, vous ne me dénierez pas ma subsistãce.
Vous me couurirez de vos espaules, & vous me cacherez
de vos aisles. Vostre verité nous enuironnera
de son bouclier, pour nous faire viure heureusement
dans vostre crainte. Nous ne redouterons plus les
traits des ambitieux, ny la cruauté des sangsuës. Tous
ces Tyrans cherront à vos pieds, & ces Demons incarnez
se trouueront confus prés de vostre Iustice. O
chers Enfans qui m’habitez, loüez le Seigneur, car il
a fortifié les gonds de mes portes, en nous renuoyant
nostre Dieu-donné, pour establir vne Paix vniuerselle
dans toute l’estenduë de son Empire. Il a mis le calme
dans tous ses Estats, & il va combler toute la Patrie
d’vne extreme abondance. Il nous va gratifier de
ses bien-faits, auec vne profusion incroyable. Il nous
va honorer de ses bontez, mille fois plus qu’on ne
sçauroit esperer de ses graces. Il a annoncé la Paix à
tous ses Estats. Il a promis son amour à tous ses Subjets,
& sa Iustice à tous ceux qui trameront quelque
chose contre son seruice.

 

Psal, 120.

Psal. 53.

Psal. 4.

Psal. 90.

Psal. 147.

LA FRANCE.

Loüez Dieu, mes chers Enfans, de vous auoir déliurez
du peril où la malice de mes sangsuës vous auoit
precipitez, sans aucun espoir de misericorde. Ne vous
fiez point aux Princes, ny aux enfans des hommes, ausquels
il n’y a point de Salut pour personne. Leur esprit
se diuisera & retournera en sa terre, & mesme en
ce iour là toutes leurs entreprises se reduiront en fumée.
Bien-heureux sont ceux ausquels le Dieu de Iacob
est pour aide, & desquels l’attente est en l’Eternel,

-- 26 --

qui a fait le Ciel & la Terre : Lesquels gardent verité
eternellement, & lesquels font iugement à ceux à
qui on a fait injure, & qui donnent nourriture à ceux
qui ont faim. le Seigneur délie ceux qui sont liez, &
le Seigneur donne lumiere aux aueugles. Le Seigneur
redresse ceux qui sont froissez, & le Seigneur
ayme les Iustes. Le Seigneur preserue les estrangers,
il prend en main l’orphelin & la veufue, & destruit les
voyes des meschants. Le Seigneur regnera à iamais
de generation en generation, en faueur ne ses Peuples.
C’est pourquoy Souuerain Eternel, source des
plus saincts desirs, origine des plus iustes conseils,
principe de toute sorte de Beatitudes, faites nous la
grace de nous donner la Paix, que nous desirons auec
des passions incroyables, afin que nos cœurs soient
addonnez à l’obseruance de vos commandemens : &
que la crainte des ennemis de l’Estat & de la Patrie
estant ostée, nous puissions passer cette vie auec quelque
espece de tranquilité sous vostre saincte Sauuegarde.

 

Psal. 145.

TOVS LES PEVPLES
ENSEMBLE.

Estant en des extremes calamitez nous auons crié
à vous, Seigneur, du profond de nostre cœur, afin de
de vous supplier tres-humblement d’exaucer nos
plaintes, & afin que vos oreilles fussent attentiues à la
voix de nos prieres. Quand vostre Diuine Maiesté ramena
le Roy dans Paris, nous fusmes tous consolez,
comme si le passé n’eust esté qu’vn songe. Lors nostre
bouche fut remplie de ioye, & nostre langue de liesse.
Lors toutes les Nations de la terre disoient que
vous faisiez de grandes choses pour cet Estat, & pour
vos pauures creatures. Seigneur reduisez nostre captiuité,
comme vous auez reduit les torrens aux pays
des grandes seicheresses. Ceux qui ont autres fois

-- 27 --

semé en pleurs, moissonnent maintenant en liesse :
& cela a esté fait ainsi par vostre misericorde, afin
que ceux qui font toutes choses, comme s’ils ne
croyoient pas en vous, soyent confus, par le moyen
des graces qu’il vous a pleu de nous faire. Les simulachres
sont des ouurages faits des mains des
hommes : Ils ont bouche & ne parlent point, ils ont
veuë & ne voyent point, ils ont oreilles & n’entendent
point, ils ont narines & n’odorent point, ils
ont mains & ne tastent point, ils ont pieds & ne
marchent point, & ils ont gorge & si ne crient point.
Que ceux qui nous viendront persecuter d’ores-en-auant,
soient faits semblables à ces idoles, & tous
ceux qui se confieront en leur vertu & en leur puissance.
Le peuple de France a tousiours esperé au
Seigneur, & sa Diuine Bonté a tousiours aussi esté
leur gloire & leur defense. Le Seigneur Dieu a tousjours
en memoire, & si il a pris soin de nous benir de
sa propre bouche. Nous sommes benits du Seigneur
qui a creé toutes choses, & qui a donné la terre aux
fils des hommes. Seigneur Dieu, les morts ne vous
loüeront pas, & moins encore ceux qui descendront
aux Enfers : mais nous qui viuons, & qui vous auons
tant d’obligations de la Paix que vous nous auez
donnée, nous vous benirons iusques à la fin des
siecles.

 

Psal. 129.

Psal. 125.

Psal 112.

LA REYNE.

Mon ame magnifie le Seigneur, & mon esprit s’éjouyt
au Dieu de mon salut, qui a fait le ciel & la terre :
car il a eu esgard à la bassesse de sa seruante, &
par ce, tous siecles me diront d’oresnauant bien heureuse.
Le Seigneur tout puissant a fait de grandes
choses en moy, & son Nom est sainct, d’vne saincteté
incomprehensible. Sa misericorde se continuera
de lignée en lignée vers ceux qui le craignent & qui

-- 28 --

le reuerent. Il a monstré la force de son bras, & il a
dissipé les pensées & les conseils des orgueilleux &
de mes aduersaires. Il a remis le Roy dans son thrône,
à la confusion des libertins & des impies. Il a
comblé tout l’Estat de benedictions, & il a humilié
ceux qui ne trauailloient qu’à sa perte. Il a pris nostre
Dieu-donné son seruiteur en sa protection, & il
a eu souuenance de ses promesses & de ses misericordes,
ainsi qu’il l’auoit fait esperer à Louys le Iuste,
d’eternelle memoire. Retirez vous donc de moy,
vous tous qui faites estat d’iniquité : car le Seigneur
a exaucé la voix de mes pleurs : le Seigneur a ouy ma
priere, le Seigneur a receu mon oraison. Que tous
mes ennemis ayent honte & soient grandement
troublez, puis qu’il m’a si bien assistée de ses graces.
Le Seigneur regne, que toute la France s’en éjouysse,
& que tous ses peuples en menent liesse. Ses gardes
sont autour de luy ; & la iustice & l’equité sont le
fondement de son trône. Le feu ira deuant sa face,
pour reduire tous ses ennemis en cendre : ses foudres
ont esclairé sur la terre, & le peuple l’a veu, & en a
tremblé. Vous iustes éjouyssez vous au Seigneur, des
merueilles qu’il a faites en faueur du fils aisné de son
Eglise. Oüy, mon Dieu-donné, vous estes le plus
beau entre les hommes, toutes graces son espanduës
en vos levres ; parce que l’Eternel vous a donné
sa faueur, & sa benediction eternelle. Ceignez vostre
espée à vostre costé, cher objet de toutes mes esperances,
& poursuiuez vos entreprises auec toute
prosperité. Regnez heureusement sur vostre peuple,
en paroles de verité, de clemence & de iustice,
& nostre Dieu vous conduira à des choses admirables.
Vos flesches aiguës penetreront iusques au
cœur de vos ennemis, & les peuples s’humilieront
deuant vostre face. Aymez la iustice, & fuyez l’iniquité :
parce que Dieu vous a sacré d’huile de liesse,

-- 29 --

plus excellemment que tout le reste des autres Princes.
Les filles & les femmes des Roys sont és lieux
plus honorables de vostre Palais Royal, & ie suis à
vostre dextre pour veiller au salut de vostre personne.
Dieu vous fera la grace d’auoir vn iour des enfans,
que vous establirez Princes par toute la terre,
& vostre nom sera reconnu de generation en generation,
afin que toutes sortes de peuples vous benissent,
comme vn Monarque chery de Dieu & des
hommes.

 

Luc. 1.

LE ROY.

Ie ne fus iamais plus satisfait, que quand on me
dit que nous irions à Paris. La ioye que cette nouuelle
me donna ne se sçauroit exprimer, tant elle
estoit extreme. Mes sens furent tous rauis de voir
l’accueil que l’on m’y fist, contre l’opinion que quelques
mauuais esprits m’en auoient donnée : i’aimeray
d’oresnauant ces peuples, veu qu’ils me cherissent
auec tant de passion, & qu’ils sont si zelez pour
mon seruice. Ce sera là où i’establiray pour iamais,
les seances de ma Iustice, le thrône de mes descendans,
& la felicité de mon Regne. Priez pour la
tranquillité de Paris, afin que Dieu veüille estendre
ses prosperitez sur tous ceux qui l’aiment. La paix
soit en ses forteresses, & l’abondance en ses Palais.
Et à cause qu’ils me sont fidelles, ie leur souhaite
toute sorte de tranquillité en ce monde cy, & vne
vie eternellement heureuse en l’autre.

FIN.

-- 30 --

L’AVTHEVR A SA PATRIE.

SONNET.

 


Rends graces à Dieu seul, de t’auoir redonné,
Vn Monarque si beau, si bon, si venerable,
La France n’eust esté qu’vn tombeau déplorable,
Si l’Eternel en eust autrement ordonné.

 

 


Il me semble le voir d’Oliuiers couronné,
En faueur des mortels, grandement exorable,
Agir en Roy de paix, d’vn sort si memorable,
Que i’en suis tout rauy, & Mars bien estonné.

 

 


Finissons donc nos cris, ne versons plus de larmes,
Ses insignes vertus, & ses vniques charmes,
Triompheront bien-tost, & du monde & du temps.

 

 


Enfin si quelque Enfant qu’il paroisse sur terre,
Il impose silence aux Demons de la guerre,
Que ne fera-t’il pas à l’âge de vingt ans ?

 

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Anonyme [1649], LE TE DEVM GENERAL DE TOVTES LES PROVINCES DE FRANCE, SVR L’HEVREVX RETOVR DV ROY LOVIS XIV. EN SA VILLE DE PARIS, le dix-huictiéme iour d’Aoust mil six cens quarante-neuf. , français, latinRéférence RIM : M0_3757. Cote locale : C_10_27.