Anonyme [1643], LE PRINCE VENDV, OV CONTRACT DE VENTE DE LA personne du Prince libre & innocent DOM EDOVARD INFANT DE PORTVGAL, passé à Vienne le 25. iour de Iuin 1642. OV FVRENT PRESENTS Le Roy de Hongrie comme Vendeur. Le Roy de Castille comme Acheteur. ET STIPVLANS DANS LE CONTRACT POVR LE ROY DE CASTILLE. Dom Francisco de Mello Gouuerneur de ses armées en Flandres. Dom Emmanuel de Moura Cortereal, son Ambassadeur en Alemagne. Pour le Roy de Hongrie. Frere Diego de Quiroga Moine, son Confesseur. Et le Docteur Nauarre Secretaire de la Reine de Hongrie. Le tres-haut Prince & Infant Dom Edoüard, frere du Serenissime Roy de Portugal Dom Iean IV. a esté vendu au prix de 40000 Richedales. TRADVIT DE L’ESPAGNOL. , françaisRéférence RIM : Mx. Cote locale : C_6_66.
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LE PRINCE VENDV,
OV
CONTRACT DE VENTE DE LA
personne du Prince libre & innocent
DOM EDOVARD
INFANT DE PORTVGAL,
passé à Vienne le 25. iour de Iuin 1642.

OV FVRENT PRESENTS

Le Roy de Hongrie comme Vendeur.

Le Roy de Castille comme Acheteur.

ET STIPVLANS DANS LE CONTRACT POVR
LE ROY DE CASTILLE.

Dom Francisco de Mello Gouuerneur de ses armées en Flandres.

Dom Emmanuel de Moura Cortereal, son Ambassadeur en
Alemagne.

Pour le Roy de Hongrie.

Frere Diego de Quiroga Moine, son Confesseur.

Et le Docteur Nauarre Secretaire de la Reine de Hongrie.

Le tres-haut Prince & Infant Dom Edoüard, frere du
Serenissime Roy de Portugal Dom Iean IV. a esté
vendu au prix de 40000 Richedales.

TRADVIT DE L’ESPAGNOL.

A PARIS,
Chez IEAN PASLÉ, au Palais, à l’entrée de la
Sale Dauphine.

M. DC. XXXXIII.

AVEC PRIVILEGE.

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LE PRINCE
VENDV.

IE veux icy representer à tous les Princes
Chrestiens aussi bien qu’aux Infideles,
vn crime monstrueux de la tyrannie,
vne punition effroyable de
l’innocence, & vne procedure detestable de l’ingratitude
des Austrichiens. Tous les Estats qui
ont des personnes de sang Royal ont interest
dans la cause d’Edoüard, le droit des Gents estant
receu par tout le monde, tous sont obligez de
haïr ceux qui le violent auecque tant d’insolence ;
enfin tous les cœurs qui ayment la liberté doiuent
auoir en horreur vn esclauage qui nous fait
voir que ceux qui s’estiment les plus grands Catholiques
du monde, ont plus d’inhumanité que
tous les Barbares. Voicy donc l’image d’vn Infant
de Portugal, qui estant né dans vne maison
Royale, est maintenant enfermé dans vne étroite

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prison, & dont la vertu souffre les peines que meriteroient
les crimes des Tyrans qui le persecutent.
Il n’est malheureux que pource que c’est vn
Heros, il est esclaue pource que son frere n’est
pas du nombre des subjets, enfin il ne reçoit
beaucoup de mal que pour auoir fait de grands
biens, mesme à ses ennemis. Mais pource qu’vn
tableau qui est tousiours illustre dans ses ombrages,
ne peut estre consideré dans son iour que
par plusieurs veuës retirées : Ie veux icy montrer
vne partie de sa gloire deuant que de vous découurir
sa misere & sa constance.

 

LES HAVTS MERITES
de Dom Edoüard.

CE Prince dont l’air maiestueux vous
donne de l’admiration en vous donnant
de la pitié, c’est Dom Edoüard
de Bragance, qui descend en droite
ligne & en trois façons, de trois Rois
de Portugal, & qui est né dans la Principauté
d’vn pere dont la maison estoit abondante en
toute sorte d’honneurs aussi bien que de delices.
Dans vne extraction si haute qui luy donna d’abord
toutes les faueurs de la nature, il fut encor
éleué de la main des Graces qui cultiuerent son

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ame & son corps, à mesme que les Muses mettoient
leurs soins & leur gloire à polir auantageusement
son esprit. Or bien qu’estant heureux
chez soy, il n’eut pas besoin de faire vn voyage
pour trouuer du bon-heur chez les Estrangers,
neantmoins sa generosité égale à celle d’vn Mars,
ou pour mieux parler, ce grand courage qui nous
faisoit paroistre en sa personne vn Mars visible,
au lieu que l’Antiquité n’en a eu que de fabuleux,
l’obligea de quitter ses plaisirs & ses auantages
domestiques, pour se signaler par ses exploits
hors du Portugal. En quoy il ne ressembla
pas à ces Princes voluptueux, qui se contentant
de la gloire de leurs ancestres negligent la leur,
& qui ne prennent pas garde qu’en loüant les
belles actions de leurs deuanciers, ils estiment ce
qui n’appartient pas à leur personne. Suiuant
donc vn dessein si glorieux, il quitta sa patrie
pource que l’amour de la guerre luy fit oublier
la paix où elle viuoit ; il se priua mesme de la
presence du Duc de Bragance son frere, à present
Roy de Portugal, quoy que le respect qu’il
luy portoit fut recompensé d’vne affection reciproque
d’vn si grand Prince Enfin n’ayant point
voulu s’arrester dans la Castille, qu’il ne regardoit
que comme vn escueil dangereux & fatal à
la seureté de sa personne comme de sa maison, il
s’en alla dans l’Empire Romain, sur la creance
qu’il auoit que son courage Heroïque ne se pouuoit

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dignement produire que sous les successeurs
des Césars. Mais que ses esperances furent trompées !
il alloit vers Vienne comme Liberateur, &
elle luy preparoit des fers ; il croyoit trouuer des
Princes dignes des Constantins & des Charlemagnes,
& il ne trouua que des imitateurs des Nerons
& des Federics.

 

Estant arriue dans les terres de l’Empire, il ne
voulut pas aller à la Cour de Ferdinand sans estre
asseuré d’y receuoir l’accueil qu’on deuoit à sa
naissance aussi bien qu’à son merite. Il y enuoya
donc vn Gentilhomme pour auertir l’Empereur
de son arriuée. Là dessus Ferdinand tint conseil,
où il proposa l’estime qu’il faisoit & qu’on deuoit
faire de l’illustré maison de Bragance ; mais l’Ambassadeur
du Roy de Castille resista d’abord à ses
sentimens, comme les Espagnols ne prennent
l’Empereur que pour le Cadet & le Vassal de
leur Monarque. Neantmoins la iustice & la verité
l’emporterent sur l’arrogance, & l’on fit vne
entrée à Dom Edoüard pareille à celle qu’on faisoit
aux Princes libres. L’Empereur mesme le receut
auec de grandes demonstrations de respect
& de ioye, quoy que les solennitez qu’on fit en
cette occasion, ne fusset que des allumettes pour
échauffer dauantage l’enuie & la rage des Castillans.
En suite d’vn accueil si iuste & si fauorable,
Dom Edoüard s’engagea volontairement au seruice
de l’Empire, & bien loin de demander des

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appointemens, il s’offrit à combattre à ses despens,
& à prodiguer ses biens auecque sa vie. Les
hazards de la guerre seconderent si heureusement
sa generosité, qu’il passa bien-tost pour
l’appuy des Imperiaux, & pour la terreur de leurs
ennemis ; en vn mot, tout le monde admiroit les
hautes qualitez d’vn Prince qui ioignoit tousjours
les effets d’vn grand iugement auec ceux
d’vn courage extraordinaire. C’estoit la gloire &
l’ame de toute l’armée. Estant general de l’Artillerie,
il fit merueilleusement fleurir les armes
de Ferdinand. Depuis ayant esté fait Major de
l’Empire, il se montra tousiours infatigable au
trauail & ennemy du repos, soit qu’il fallut marcher
en campagne, soit qu’il fallut retrancher
l’armée. Dans les sieges qu’on desseignoit, ou
qu’on entreprenoit de faire leuer ; il estoit tousjours
le premier à se ietter dans les perils, & le
dernier à s’en retirer. Apres tout, les Suedois &
les François mesme qui sont à present freres des
Portugais, au lieu que l’interest des Castillans les
leur rendoit autrefois ennemis, peuuent témoigner
qu’on voyoit presque tousiours la victoire
où Dom Edoüard combattoit, & que si son party
estoit vaincu, c’est que les autres ne secondoient
pas ny les ordres ny la valeur de ce Heros.

 

Tous confessent qu’il n’y auoit que luy parmy
les Chefs de l’armée Imperiale, qu’on reconnût
pour Prince ou pour parfait Capitaine, lors

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que par le sort de la guerre, ou par vn caprice de
la fortune, quelque prisonnier du party contraire
tomboit entre ses mains ; car il trouuoit en
luy vne liberalité égale à sa force, & vne prudence
qui répondoit noblement à sa courtoisie. Il
n’y auoit point de soldat dans toute l’Allemagne
qui ayant recours à luy dans quelque necessité,
n’emportât d’abord la liberté s’il l’auoit perduë,
ou de l’argent s’il estoit incommodé. Sa table
aussi bien que sa bourse estoit ouuerte à toutes
sortes de personnes, & bien souuent quand ses
gens n’estoient pas payez, il leur faisoit faire
montre de ses deniers. Les Marchands de Hambourg,
de Venise & de plusieurs autres endroits,
qui luy ont souuent fait tenir du Portugal par
lettres de change plusieurs millions de Richedales,
peuuent témoigner des despences extraordinaires
qu’il a faites pour la conseruation d’vn
Empire, qui ne s’est seruy de son or que pour
luy donner des chaisnes de fer. C’estoit le pere
des soldats, il n’en vouloit pas estre traité de Prince
ny de General, mais d’amy & de compagnon.
Au reste il ne laissoit passer aucune occasion où il
pût auancer les affaires de Ferdinand qu’il n’embrassât
auec vne fidelité égale à la grandeur de
son courage. Et parmy les impietez necessaires
que la guerre introduit dans le monde, il fut
tousiours fort zelé pour la Religion Catholique,
& pour les interests de la pieté. Diray-ie icy qu’il

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possedoit la belle Eloquence de six langues, de la
Latine, de la Françoise, de l’Italiene, de l’Alemande,
de la Castillane, & de la Portugaise qui
luy estoit naturelle, qu’en fin il auoit vne si haute
mine, & vn corps si bien proportionné, que
l’Empereur Ferdinand, pere du Roy de Hongrie,
dit la premiere fois qu’il le vit, qu’il auoit vne
presence digne de l’Empire, & que par la blancheur
de son visage accompagnée d’vn vermillon
extremement vif, il tenoit plus de l’Alemand
que du Portugais.

 

Mais ces Eloges ne font qu’augmenter la douleur
que nous auons de la captiuité de Dom
Edoüard. Ie les finiray donc en adioustant seulement
que c’est celuy qui a seruy neuf ans l’Empire
à ses propres frais, qui a tousiours combattu auec
autant de bon-heur, que de hardiesse & de dexterité,
qui pour defendre le Roy de Hongrie & les
Estats de la maison d’Austriche, a expose mille fois
sa vie dans les dangers, apres auoir abandonné sa
patrie. Il n’est pas besoin de descendre icy au particulier
de ses actions, ny au détail de ses grands
seruices, pource que ce seroit vouloir renfermer
vn sujet infiny dans vn espace limité ; & puis ses
exploits Heroïques estant connus de toute l’Europe,
il n’est pas de la biẽseance de parler icy plus
long-temps de ce qu’on publie de tous costez ;
Il suffit d’auoir donné en ce lieu vne image quoy
qu’imparfaite, des merites & des perfections incomparables

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de Dom Edoüard, & d’auoir declaré
que iusques à l’an mil six cens quarante, ce
Prince auoit tousiours employé, & son bien &
son sang en faueur de ceux qui veulent répandre
le reste, & qui ont mis en prison cét Hercule Portugais,
apres qu’il a remis l’Empire en sa liberté.

 

DOM EDOVARD
en prison.

CE Prince continuant dans le seruice de
l’Empire, comme les grands cœurs sont
aussi constans qu’ils sont genereux, prit
vne fois la route de Ratisbonne pour entretenir
le Roy de Hongrie sur le sujet de quelques Regimens
de Caualerie. Là il assistoit à la diete qui s’y
tenoit, lors qu’vn iour il rencontra vn Capitaine
qui dissimulant sa fourberie, luy dit qu’il auoit
esté enuoyé vers luy, pour le prier de venir trouuer
l’Empereur pour vne affaire pressante. Dom
Edoüard se mit d’abord en chemin, & comme
vne bonne conscience ne craint rien, il auoit entrepris
ce voyage auec vne ioye pareille à la fidelité
qu’il auoit tousiours témoignée à la maison
d’Austriche. Estant arriué à vne prochaine ville,
& ayant veu qu’il s’assembloit beaucoup de gardes
& de soldats autour de luy, il demanda d’où

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venoit cette épouuante, & quel sujet on auoit de
se défier du passage d’vn Prince qui n’auoit iamais
manqué de foy enuers l’Empereur. On ne
luy répond rien là dessus. Pour sçauoir la cause
de cette nouueauté il depéche vn homme vers
Dom Francisco de Melo, qu’on peut appeller legitimement
indigne du nom de Portugais, & digne
Ministre de la Tyrannie de Castille. En effet,
au lieu de donner quelque satisfaction au Prince,
il fait mettre ce Message en prison. N’est-ce
pas vne perfidie qui ne pouuoit tomber que
dans vn esprit traistre à sa patrie, & idolatre des
Espagnols ? Enfin Dom Edoüard arriue à Ratisbonne,
il veut parler au Roy de Hongrie, mais il
se voit arresté ; en vn mot, il se trouue seul dans
vne prison sans sçauoir s’il est criminel. Il s’examine
soy-mesme, & il se iuge innocent ; il veut
apprendre les motifs de sa détention, & on les
luy dissimule, il demande iustice, on la luy refuse,
il est gardé dans vn Chasteau par des hommes de
neant, quoy que les Palais soient à peine dignes
de le loger. Apres tout, on ne le traite plus de
Prince, mais d’esclaue. Quelle indignité, de voir
vn homme de sang Royal, libre & exempt de
crime, qui sans aucun égard à ses merites passez,
est pris durant la diete de Ratisbonne contre les
immunitez de l’Empire aussi bien que contre la
foy publique ? C’est en vain que les Alemands
vantent tant leur franchise ; la violence de la

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maison d’Austriche ne leur sçauroit conseruer la
liberté Germanique, veu qu’elle l’oste mesme
à des Princes Estrangers. De Ratisbonne Dom
Edoüard fut conduit à Grats sous bonne escorte,
& celuy qui auoit tousiours marché comme
Conquerant, se vit mené comme prisonnier.
Voilà le premier degré de la cruauté mesme, qui
a d’abord pris vn innocent pour coupable, qui a
opprimé dans l’Empire le defenseur de l’Empire,
qui a traité vn Prince en valet, & reduit vne personne
libre à vne honteuse seruitude.

 

DOM EDOVARD
dans les fers.

LA cruauté se fortifie maintenant du
secours de quelques mauuaises qualitez
qui l’accompagnent, suiuant
l’obseruation du sage Romain : l’on
voit d’vn costé vne lâcheté molle, & de l’autre
vne arrogance furieuse, à l’abord desquelles il
faut que l’innocence ne songe plus qu’à perir,
puis que tous les sentimens de pitié estant estouffez,
il n’y a que la ferocité qui reste embrasée.
On presente à Dom Edoüard deux grosses chaines
de fer, afin qu’il choisisse d’estre attaché par le
bras ou par le pied ; Que cette proposition est

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barbare ? N’est-ce pas assez de rendre le mal necessaire
à vn Prince, sans le luy rendre encore volontaire
par cette fatale élection ! Dom Edoüard
ayme mieux estre attaché par le bras, ce qui est
aussi-tost executé, & la chaine qu’on luy donne,
outre sa pesanteur enorme, est si longue qu’elle
le suit tousiours, mesme lors que par vn trou il
sort de sa chambre pour entrer dans celle des
gardes. Or bien que cét estat soit bien bas pour
vn grand Prince, ses ennemis neantmoins attribuent
à vanité le choix qu’il a fait d’estre lié par
le bras. Mais c’est à bon droit que ce membre illustre
est si rudement attaché ; Dom Edoüard le
doit punir pour auoir agy si puissamment & gaigné
tant de victoires, pour vn Empire méconnoissant,
pour vn Roy ingrat, & pour vn païs ennemy
du sien. Il doit tenir à faueur la perfidie &
la cruauté dont on le persecute, puis que c’est peché
de seruir ceux qui ne le meritent pas.

 

Apres cela Dom Edoüard peut-il auoir quelque
soulagement dans son oppression ? La cruauté
ayant resvé là dessus, trouue enfin que la rigueur
de sa prison & de ses chaines, peut estre
adoucie par la presence des Portugais, & par l’assiduité
de ses seruiteurs, qui contre la nature des
creatures interessées ou mercenaires, redoublent
leur fidelité en voyant redoubler les maux de
leur Maistre. La lâcheté donc les menace, l’orgueil
les poursuit, enfin ils se voyent separez du

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corps d’vn Prince qu’ils accompagnent toûjours
de cœur. La cruauté n’est pas encore satisfaite
de ces excés, elle veut que les seruiteurs de Dom
Edoüard soient mis en prison, pource qu’il n’est
pas en liberté, & qu’on leur donne la question,
non pas pource qu’ils sont préuenus, mais pource
qu’ils sont trop fideles. On oste encore au
Prince l’ancre & les liures, afin qu’il ne puisse ny
écrire ny vacquer à quelque lecture, ou agreable
ou soulageante : On luy interdit la correspondance
de ses amis, en luy empeschant le commerce
des lettres reciproques ; on ne luy permet
pas mesme de leur demander du secours, enfin
toutes les ouuertures de iustice sont bouchées
pour luy aussi bien que celles de la puissance. Il y
auoit quelques Marchands, qui de l’argent qu’ils
luy deuoient, vouloient luy fournir dequoy viure
& s’habiller dans la prison, mais la cruauté ne
se déguisant plus, au contraire produisant au dehors
toute sa fureur, ne permet à ce Prince de
prendre que ce qui pourroit à peine suffire à
l’entretien d’vn seruiteur : On luy oste ses habits
precieux, son casque & sa picque, pour luy donner
vn habit d’esclaue. Au reste Dom Edoüard
auoit encore vn cuisinier Portugais, que le Docteur
Nauarre luy fit oster, disant que tout cuisinier
pouuoit suffire à faire la sausse d’vn peu de
bœuf qu’on seruoit à ce Prince ; il luy en donna
pourtant vn autre, qui suiuant les auis qu’il

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receuroit, luy deuoit aprester à manger, non pas
à son goust, mais à celuy de Castille. Le serpent
n’est pas icy caché dessous l’herbe, il y paroist
sous vne douceur déguisée, qui n’est au fonds
qu’vn venin plein de rage.

 

Le corps du Prince est si affligé, qu’on peut
l’appeller à bon droit vn Martyr de iustice, son
honneur souffre beaucoup d’assauts, mais l’iniquité
ne se contentant pas de cela, passe des
choses mortelles au desir de destruire celles qui
tiennent de l’immortalité ; en vn mot, ayant perdu
le corps elle veut perdre l’ame. Le Prince
auoit encore vne consolation, à sçauoir la compagnie
de son Confesseur, qu’on ne luy auoit pas
encore osté ; mais enfin les Ministres de la tyrannie
le chassent pour substituer vn Castillan
en sa place. Quelle barbarie, ou plustost quelle
impieté, qui s’en prend au Lieutenant de Dieu
mesme ? Iesus-Christ dit qu’il ne faut pas craindre
ceux qui peuuent tuer le corps, & non pas
l’ame. Cependant la cruauté veut icy outrepasser
les bornes de son pouuoir, & gesner l’esprit aussi
bien que le corps. Elle esloigne d’Edoüard le
Medecin naturel de son ame, pour luy en donner
vn Estranger : En vn mot, on contraint ce
Prince à dire les secrets de son interieur à vn
Espagnol aussi franchement qu’à vn Portugais ?
A quoy sert cette innouation. Il ne faut pas couurir
la malice sous l’apparence d’vn Sacrement.

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On donne vn espion à Dom Edoüard, & non pas
vn Pere spirituel ; on establit vn ressort sur le tribunal
de Dieu : on presente vn Confesseur à
ce Prince, non pas pour entendre ses pechez,
mais pour publier ses desseins ; on le met en danger
de se desesperer, mais Dom Edoüard esperant
en Dieu, est autant esloigné du desespoir
qu’il est proche de la vraye confiance. Cependant
que d’aduersitez attaquent à la fois le
cœur de ce Prince inuincible ? Apres tout, neantmoins
il est tousiours le mesme ; sa modestie paroist
aussi bien dans ses souffrances que dans son
bon-heur, les fatigues & les afflictions, bien loin
de l’accabler sous leur poids, ne font que luy esleuer
le cœur, comme vne palme qui se hausse
estant affaissée ; enfin plus l’orgueil de ses ennemis
s’efforce de l’abysmer, plus la bonté de Dieu
le met dans l’esleuation.

 

DOM EDOVARD VENDV.

APRES tant de suplices, il ne restoit au
Prince qu’à voir le dernier acte de la
Tragedie de sa liberté perduë par vne
si indigne seruitude. Le commencement
luy auoit assez fait iuger de la fin, & l’accroissement
de la tyrannie luy seruit d’vn presage
asseuré de son excés. Sur cette pensée il

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auoit souuent fait representer son droit au Roy
de Hongrie ; Qu’il ne mit pas entre les mains des
Castillans, ennemis des Portugais, vn Prince qui
auoit tousiours esté amy de l’Empire : « Qu’il considerât
que Dom Edoüard l’auoit tousiours seruy
dans vne fidelité sans reproche ; Qu’il estoit
innocent aussi bien que libre, & qu’il n’estoit
point subjet à l’Empire, ny par naissance, ny pour
raison de crime : Que lors du changement du
Portugal il s’estoit trouué combattant dans l’Alemagne,
& qu’il n’auoit esté ny dans le premier
dessein, ny dans la connoissance de l’eslection du
nouueau Roy ; Que si le Roy de Castille auoit
quelque sujet de s’offenser, ou de se vanger sur ce
poinct, que sa querelle ne touchoit aucunement
les interests de l’Empereur. » Il fit quatre fois de
pareilles protestations, appellant à témoin Dieu
& les hommes. Le Roy de Hongrie répondit qu’il
l’auoit tousiours reconnu pour Prince libre, aussi
bien que pour hõme irreprochable : Qu’il sçauoit
que Dom Edoüard auoit tousiours seruy l’Empire
auec autant de fidelité que de courage : Que
les raisons d’Estat ne luy permettoient pas de le
deliurer encore, mais qu’il s’assurât qu’il ne tomberoit
iamais entre les mains des Castillans :
Qu’enfin il luy en donnoit assurance, sur sa parole
d’Empereur. L’effet montra neantmoins,
que la foy des Grecs a passé dans l’Alemagne, depuis
que la maison d’Austriche y est souueraine,

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Dom Francisco de Mello, & Dom Emanuel de
Moura Cortereal, demandoient de la part du Roy
de Castille, qu’on leur liurast Dom Edoüard ;
Frere Diego de Quiroga, l’vn des douze Apostres ;
mais le seul traistre, & Confesseur du Roy
de Hongrie, & le Docteur Nauarre Castillan &
Secretaire de la Reyne de Hongrie auançoient ce
marché fatal. On dit beaucoup de choses des
deux costez contre le Prince enchainé, mais pource
que de le liurer gratuitement, c’eust esté s’oublier
de la Passion de Iesus-Christ ; on en vint
aux termes d’vne conuention. « Que me donnerez-vous
& ie vous le liureray, dirent Quiroga
& Nauarre ; pour le faire passer pour esclaue il
faut qu’il soit vendu & non pas donné » Les Ministres
de Castille leur offrent d’abord quarante
mille Richedales. Qui eût iamais creu que la
monnoye d’vn Empire Chrestien, se fût changée
en monnoye de Tibere, ou des Iuifs ? qu’elle fut
prise pour le prix de l’innocent, & pour vne marque
de la perte de la liberté Imperiale ? Le marché
estant conclu, Dom Edoüard est tiré du
Chasteau de Grats pour estre mis dans la maison
du Docteur Nauarre, où il est sous la puissance
de sa femme, & sous la garde du plus grand de
ses ennemis. La femme de Pilate estoit beaucoup
plus innocente que celle de ce Docteur d’iniquité ;
l’vne auoit des songes en faueur de la verité ;
l’autre ne veille que pour la fausseté, & pour

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inuenter des iniures & de nouueaux opprobres
contre vn Prince pour qui la gloire mesme semble
auoir trop peu dauantage pour recompenser
ses merites. Elle donne ordre à ses seruiteurs, que
si Dom Edoüard les appelle, ils ne luy respondent
que par des outrages indignes, mesmes des
personnes de neant. Certes si son mary & elle
pouuoient faire crucifier des hommes, suiuant
la coustume de leurs peres, ie ne doute point
que ce Prince innocent ne fut des-ja crucifié. On
fait assembler de tous costez des soldats auec des
glaiues & des bastons, ils viennent garder vn
Prince enchainé comme s’ils venoient enuironner
vn voleur ; enfin ils se disposent à le mener
dans la Duché de Milan, pour estre iugé de son
ennemy. C’est ainsi que la liberté est venduë &
captiuée contre les loix, c’est ainsi que les merites
sont chastiez, & l’innocence declarée criminelle.
Enfin c’est ainsi que le droit des gens est
violé par vn scandale si manifeste, & que la franchise
de l’Empire passe plustost pour vn coupegorge
que pour vn azyle.

 

Le bruit de cette haute iniustice ayant couru à
Vienne, vn Prestre de cette Compagnie, qui sous
vn Chef diuin imite son zele & son equité, poussé
du desir de seruir Dieu & la iustice dans la cause
d’vn Prince innocent, alla trouuer le Roy de
Hongrie, protesta contre ce crime scandaleux
qui offensoit Dieu & les hommes ; enfin il luy fit

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reconnoistre que la liberté Germanique estoit
destruite par cét attentat, qui estoit trop grand
pour ne pas passer en exemple. Mais les Ministres de
la tyrãnie de Castille s’opposerent à ses remontrances
aussi bien qu’à celles de quelques autres hommes
Apostoliques, qui ne pouuoient souffrir qu’on
vendit encore le sang innocent dans le Christianisme.
On disputa fortement sur ce sujet, & la verité
triomfant tousiours par ses argumens démonstratifs,
l’iniquité pourtant fuyant les éuidences triomfa
de la iustice, & s’opiniâtra dans l’erreur. Plusieurs
Potentats d’Allemagne s’entremirent pour la cause
de Dom Edoüard, se representant bien que la maison
d’Austriche destruiroit les Princes domestiques
apres auoir destruit les estrangers : ils auoient en
horreur ce préiugé, qui dans Edoüard menaçoit
leur ancienne liberté, mais tous leurs soins furent
inutiles, & leur iuste compassion ne pût rien où la
cruauté pouuoit tout. Ainsi l’equité estant foible,
& l’iniquité regnant dans vne authorité absoluë,
on defendit à Dom Edoüard de receuoir aucune
sorte d’argent ; & comme il demanda d’en prendre
pour le moins certaine somme pour s’acquitter de
quelques debtes, on luy permit seulement de payer
ses creanciers, en leur faisant prendre leur argent
d’vne main tierce. l’appelle icy la terre & le Ciel,
les creatures sensibles & insensibles, pour voir l’insolence
barbare du Roy de Hongrie : L’iniustice
est tousiours craintiue dans sa plus grande asseurance,

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& la conscience reprend tousiours celuy qui
peche. Comme les partisans de la maison d’Austriche
craignoient auecque raison, que Dom
Edoüard ne fut enleué sur le chemin, par la force
de ceux qui poussez d’vn zele veritablement Germanique,
& d’vne pitié genereuse, pourroient
prendre les armes pour la deliurance d’vn Prince
iniustement détenu ; le Roy de Hongrie donna
ordre & commandement exprés au Capitaine des
gardes qui conduisoit Dom Edoüard, qu’en cas
qu’il rencotrât quelque partie qui fit mine de combattre
pour ce Prince, il enuironnât d’abord la litiere
où il seroit mené, pour le tuer, ou d’vn coup
de pistolet, ou d’vn coup de poignard. C’est ainsi
que ce Tyran met son plaisir dans la peine de l’innocent,
& boit par auance le sang de Dom
Edoüard. Les siecles à venir auront bien de la
peine à croire vn attentât si horrible, s’ils ne considerent
que ceux qui en ont fait le dessein, sont les
successeurs des Mores & des Vandales. Cependant
il faut que les Princes d’Allemagne ouurent icy
les yeux, & qu’ils considerent que la maison d’Austriche
voulant estre seule, ne songe qu’à engloutir
toutes les autres maisons, elle ne desire pas voir les
autres Princes seruiteurs de l’Empire, mais esclaues
des Austrichiens ; elle ne les veut pas traiter, ny
d’Imperiaux, ny de Palatins, mais de ses Ministres
particuliers. Les villes Anseatiques encore, si elles
ont quelque zele pour leur liberté, doiuent reconnoistre

-- 22 --

que les Aigles du Roy de Hongrie ne sont
ny Romaines ny Imperiales, mais seulement auides
de la liberté & de l’or des peuples, elles n’étendent
pas leurs aisles pour les proteger, mais
leurs ongles de harpie pour les déchirer effroyablement.

 

Mais il est temps de voir le voyage de Dom
Edoüard apres auoir veu sa vente. Il sort donc de
Vienne dans vne litiere de loüage, accompagné du
Comte de Fustemberg, & d’vn Commissaire du
Roy de Hongrie, & de peur qu’il ne manque vn
Notaire ou vn Scribe à cette action si celebre, Nauarre
s’y trouue present. Au reste on voit plusieurs
soldats à costé de la litiere, les enfans & les femmes
d’Allemagne déplorent la condition de ce Prince
Estranger, dont le mal-heur donne de la pitié mesme
aux cœurs les plus insensibles. Mais il ne faut
pas que les Allemands pleurent sur cét Infant de
Portugal, mais sur leurs enfans, & sur le crime de
leur Roy. En effet, s’il consomme ainsi le bois verd,
que deuiendra le sec ? Si vous auez souffert tant de
guerres, tant de dangers, tant d’affronts, tant de
saccagemens, depuis qu’au lieu de seruir vn maistre
legitime, vous vous voyez subjets d’vn Tyran ; que
ne souffrirez vous point quand la iustice de Dieu
vous aura reduit à la derniere extremité, & qu’en
voyant le sang de l’innocent répandu sur vos testes,
in prendra vengeance sur vous aussi bien que sur
l’iniustice de vostre Roy ?

-- 23 --

Pour vous, Heros inuincible, illustre tige du
sang Royal de Portugal, vous n’auez qu’à vous
resiouyr dans vos afflictions ; en effet, ceux qui
pensent vous persecuter, ne font que vous rendre
semblable à Iesus-Christ ; Quoy que vous soyez innocent,
vous parroissez enchainé comme criminel ;
on écarte vos gens, on vous despoüille de vos habits,
tout Prince que vous estes vous ne parroissez
qu’esclaue, vous estes trahy & vendu : Il ne vous
restoit que des iniures à souffrir, mais Nauarre a
pris sur soy la charge de ne vous en point laisser
manquer, car ses seruiteurs, & tous les Castillans
qui vous approchent, ne font que vous dire tous
les iours ; A quoy songez-vous, Infant pretendu, “
vostre frere est desia mort Heretique, tout le Portugal “
est Lutherien, ne songez pas à estre pris pour “
Prince, mais pour le dernier de tous les hommes. “
Ces médisants s’addressent souuent à vous, & ne
trouuant point de cause legitime pour vous tourmenter,
ils en cherchent vne imaginaire. Ils vous
commandent mesme d’écrire de vostre propre
main des libelles diffamatoires contre le Roy Dom
Iean IV. vostre cher frere, & pensent affoiblir ses
droits en vous contraignant iniustement de desaduoüer
leur iustice. Que vous souffrez d’opprobres
& de supplices, resistant à vn ordre qui choque
aussi bien la nature que la religion & la liberté ?
Ils s’efforcent de vous ietter dans vne espouuante
capable d’esbranler l’homme du monde le plus

-- 24 --

constant, mais eux seuls restent espouuantez. En
fin Herode entendant parler du nom de l’Empereur,
vous renuoye à Pilate apres s’estre mocqué de
vostre illustre condition ; de sa Cour vous estes conduit
dans la maison de Nauarre ; & quoy qu’on
vous accuse par tout, vous estes par tout iugé innocent.
Neantmoins dans cette trahison on ne
voit point lauer de mains, pource que Iudas est Iuge,
& qu’il n’a garde de laisser eschapper les deniers
qu’il a pris. Maintenant i’entens les ennemis
qui crient, qu’il soit mis en croix quelque irreprochable
qu’il puisse estre ! Et certes, auguste Infant,
vous ne manquez point de croix ; en effet, vous
l’auez portée du Portugal dans l’Allemagne ; Les
Rois vos predecesseurs ont pris pour enseigne la
Croix de l’Ordre de Christ, qu’ils ont portee aussi
bien que leurs Cheualiers de Portugal, sur l’espaule
& sur la poictrine, comme vn signe fatal contre les
Mores & les Barbares. Mais s’ils se sont appropriez
vne Croix qui represente Iesus Christ triomfant ;
la vostre ne laisse pas d’estre la mesme, quoy que
vous la portiez parmy les Alemands & les Espagnols,
& qu’elle represente en vostre personne Iesus
souffrant mille morts deuant la fin de sa vie.

 

-- 25 --

DV VENDEVR.

MA plume a horreur de mettre icy le nom
du vendeur d’vn commerce si honteux
& si inhumain, mais la verité a desia
publié deuant moy que c’est le Roy
de Hongrie. Mais qu’il me soit permis de luy demander
quel sujet il peut auoir eu de conceuoir
vne fureur si estrange, contre vn Prince qui n’auoit
eu que de bons sentimens pour luy ? Dom Edoüard
a-t’il offensé l’Empire ? est-il deserteur de milice,
ou perturbateur du repos public ; ses ennemis mesmes
confessent que non, & que tout au contraire,
il a tousiours seruy fidelement l’Empire, & fait la
guerre en sa faueur. Ces choses n’ont pas besoin de
preuue estant toutes euidentes, & le Roy de Hongrie
mesme les a confirmées, tant de viue voix que
par ses actions. Et puis si ce Prince auoit offencé
l’Empire, il est certain que l’Empire à ses Iuges, &
qu’il n’estoit pas necessaire de mettre vn criminel
de cette importance, entre les mains des Ministres
de Castille. Il s’ensuit donc qu’il est innocent dans
l’Empire, & neantmoins il a esté pris durant la Diete,
& sur les terres de l’Empire. Surquoy ie demande ;
ou l’Allemagne est libre, ou elle est subjete de
la maison d’Austriche ; si elle est libre, d’où vient
que le Roy de Hongrie a violé sa franchise ; si elle

-- 26 --

luy est subjete, c’est à tort qu’on l’appelle Imperiale ?
Enfin comment peut-elle accorder sa liberté
auecque la violence ? On dira icy que l’Infant Dom
Edoüard est frere du Serenissime Roy Dom Iean
IV. qui a détaché les Estats de Portugal de ceux de
Castille, & osté vne si belle couronne à Dom Philippe.
Voilà l’vnique response de ses aduersaires,
mais qui se destruit d’elle-mesme, n’estant fondée
que sur la tyrannie aussi bien que sur vne fausseté
manifeste. Le Roy de Portugal n’a pas pris vne
Couronne sur autruy, il n’a fait que rentrer en possession
d’vn Estat qui luy appartenoit legitimement,
& qu’on auoit vsurpé sur luy : Enfin il a osté
aux Castillans le moyen de nuire aux Portugais,
mais il ne leur a rien rauy de leurs droits. Mais
quand bien il auroit enuahy vn Royaume sur la
Castille, ie demande au Pere Quiroga si c’est vn
cas de conscience de sa Theologie, qu’il y ait vn
second peché originel qui passant d’vn frere à l’autre
frere, face prendre vn innocent au lieu de celuy
qu’on iuge coupable. Les liures mesmes des Heretiques
ne sçauroient establir vne opinion si ruineuse.
Il n’y a que l’exemple des enfans de Iacob
qui puisse persuader aux Allemands, qu’vn Prince
innocent, leur frere & leur compagnon durant
la guerre, peut estre vendu aux Ismaëlites, ie veux
dire aux Castillans. Il est certain que lors que Dom
Edoüard se trouua à la Diete de Ratisbonne, il
n’auoit nulle connoissance du soûleuement du Portugal,

-- 27 --

car s’il en eût eu auis, il eut pû se retirer pour
la seureté de sa personne, ou se mettre en estat de
tout perdre plustost que de se laisser prendre.

 

Mais quand bien il eût sceu tout ce qui se passoit
à Lisbonne, l’Empire & l’Allemagne qu’ont
ils de commun auec les droits pretendus de Castille,
ou auec le Domaine du Portugal ? Si le Roy de
Hongrie tient la place de l’Empereur, sa charge est
seulement de defendre l’Empire & la liberté Germanique,
de maintenir la foy publique & le droit
des gens, & non pas de perdre vn General d’armée
libre, fidele, genereux & innocent, & cela durant
l’immunité de la Diete. Que si le fils de l’Empereur
Ferdinand ne porte, comme il est vray, que le simple
nom de Roy de Hongrie, par quel tiltre Dom
Edoüard luy est-il subjet ? Dans quelle guerre iuste
l’a-t’il fait prisonnier ? Et quand il l’auroit trouué
dans l’Austriche, ie ne dy pas seulement comme
Prince, mais comme personne priuée, ie ne diray
pas comme innocent, mais comme banny pour ses
crimes ; n’estoit-il pas de la pieté & de la generosité
d’vn Roy, de le secourir dans son affliction, & de
le deliurer des mains de ses ennemis, bien loin de se
declarer son ennemy ? Ne falloit-il pas qu’il conseruât
l’immunité de ses païs hereditaires, & qu’il
obseruast le droit des gens, qui n’est pas viole mesme
des barbares ? C’est ce qu’il falloit faire, & c’est
ce qu’il n’a pas fait. Mais ie veux icy luy representer
son crime & son insolence dans l’exemple d’vne

-- 28 --

personne priuée. Voilà vn homme qui en ayant par
hazard tué vn autre dans la ruë, s’est sauué dans
vne maison prochaine, où il a esté receu fauorablement
d’vn ieune garçon, dont le pere est mort
quelque temps apres dans la chaleur d’vne querelle.
De telle sorte qu’on voit dans vn mesme logis
vn pere tué, & vn homicide caché par imprudence
plustost que par malice. Que fera là dessus
ce ieune homme, à qui le regret de la mort de son
pere, peut persuader de tuer celuy qui l’a tue ? Quoy
qu’il en pust vser de la sorte, sa generosité l’emporta
sur sa cholere, & de peur qu’vne maison que
l’autre auoit choisie pour se sauuer, ne fut prise pour
vn sejour dangereux, & qu’ainsi l’azyle de l’homicide
ne passât pour vn coupegorge : non seulement
il laissa le criminel en sa liberté, mais encore
il le guarentit des mains de la iustice. Le Roy de
Hongrie au contraire, ne fait point difficulté d’emprisonner
pour les querelles d’autruy vn Prince, non
pas coupable, mais innocent, non personne priuée,
mais frere d’vn souuerain, non subjet, mais libre,
non infidele à l’Empire, mais fort affectionné au
party Imperial, & cela contre la liberté & la foy publique
de l’Allemagne De Ratisbonne il l’a fait
conduire en Austriche & dans sa propre maison il
a vendu son hoste à son ennemy. C’est icy proprement
qu’on peut bien dire suiuant l’Histoire, ce qui
se lit dans les fables, à sçauoir qu’on vit de rapine,
& que l’hoste n’est pas asseuré des mains de son

-- 29 --

hoste. Vous me direz que le Roy Catholique l’a
ainsi voulu, & qu’il a fallu immoler ce Prince au
plaisir & à l’argent de la maison d’Austriche. Voilà
des paroles de sang, & non des termes de iustice,
& i’ay horreur de penser seulement à ce que
les Austrichiens n’ont pas eu horreur de faire Ie
demande maintenant au Roy de Hongrie, en suite
d’vne si belle response, si à l’exemple de cét autre
Tyran, il n’a point esté vn peu affligé d’auoir liuré
vn innocent entre les mains d’vn Iuge coupable !
Au contraire, tout le monde sçait qu’apres auoir
passé le contract de cette vente fatale, non seulement
il se defit de sa pompe Royale, mais encore
de ses vestemens d’homme, pour danser vn ballet
en habit de femme deuant l’Ambassadeur d’Espagne,
& en presence des confidens de sa Cour.
Ce Prince genereux voulut sans doute changer de
sexe pour faire le personnage d’Herodias ; il tiroit
de la complaisance de son crime, & se resioüissoit
d’auoir vendu l’innocent. Ne faut-il pas auoüer
apres cela, que c’est vn homme indigne du sang
des Princes, le deshonneur de la maison d’Austriche,
& vn Empereur de balet & de Comedie, & non
pas d’effet. Les Empereurs sont couronnez de trois
diadêmes, l’vn de fer, l’autre d’argent, & le dernier
d’or ; Le Roy de Hongrie laissant celuy de fer,
pource qu’il ne songe qu’a fuir la peine, les dangers
& les ennemis, veut seulement estre couronné
d’or & d’argent ; c’est au prix de ces metaux qu’il a

-- 30 --

acheté & qu’il vend son Diadême, & la liberté de
l’Empire ; enfin on dit qu’à mesme prix il vend encore
la Chrestienté. Il n’a pas deux Aigles Imperia
les pour conter les rais du Soleil en les regardant
sans s’esbloüir ; il n’en a qu’vne, à sçauoir la maison
d’Austriche ; mais le Signe monstrueux de la
trahison porte deux faces, à sçauoir celle d’Austriche,
& celle de Castille, non pour conter les rais
du Soleil, mais pour conter de l’argent ; enfin on
voit quatre ongles qui vont prendre, ou par effet,
ou par desir, tout l’or des quatre parties du monde.
Maintenant il faut que Iustinian cherche dans
le Droict cette sacrée & Imperiale Majesté, qui
doit estre embellie des armes, & armée des loix ;
car dans l’Empire d’auiourd’huy, il ne trouuera
qu’vne Majesté sans Droict, sans armes & sans
loix ; Il verra vn Empereur baladin, esclaue des interests
de Castille, qui baye apres l’argent du Mexique,
& qui appauurit toute l’Allemagne pour
s’enrichir.

 

DE L’ACHETEVR.

PERSONNE n’ignore que ç’a esté le
Roy de Castille, qui ayant tousiours
esté ennemy de la Royale maison de
Bragance, s’est depuis comme plus particulierement
declaré son aduersaire, & qui ne s’est

-- 31 --

pas comporté en Prince Catholique, mais en enragé,
contre ce Prince innocent. Certes cét ouurage
d’iniquité luy doit estre reproché, mais
la haine qu’il portoit à Dom Edoüard aussi bien
qu’à Dom Iean IV. son frere, le rend bien plus
excusable que n’est celuy qui par crainte & par
auarice, a vendu la liberté, diray-ie, de nostre
Prince ou de l’Empire ? Il me semble pourtant,
que puis que le Castillan, comme vn taureau
furieux, attaque le Portugal pour rauir derechef
vne des plus belles parties de l’Europe,
& qu’il haït si fort la franchise & la seureté
qu’il voit dans vn païs qu’il voudroit ietter derechef
dans les dangers & dans l’esclauage ;
il deuroit songer à prendre Dom Iean IV. qui
l’attaque de tous costez, & qui fortifié par son
sacre aussi bien que par son heureuse eslection,
ne porte les armes qu’à dessein de prouoquer
celles de Dom Philippe IV. C’est luy qui dit aux
Castillans ; c’est moy qui vous ay osté le Portugal,
tournez donc vostre fer contre moy, & non
pas contre mon frere, qui a tousiours combattu
pour vous conseruer vos Estats. Vous voyez nos
armes triomfantes dans vos terres, ie suis entré
à main armée dans vostre Domaine, i’y ay pris
quantité de villes, bruslé plusieurs villages, défait
force regiments, apres quoy que ne songez-vous
à me declarer la guerre ? Mais ie voy bien
que vostre Roy est vn Roy peint, & comme il a

-- 32 --

peur des lances & des espées, il se iette sur vn
manteau abandonné, à sçauoir sur l’innocent
Dom Edoüard, que l’iniustice luy a liuré dans
les chaines, & que la malice de la fortune aussi
bien que celle des hommes, luy a vendu dans
vn marché d’Allemagne. Vous auez beau esleuer
de la poussiere deuant luy, elle vous retombera
dans les yeux, ou plustost vous tomberez dessus
elle. Ce qui est desia arriué, vous menace de ce
qui est à venir. Qu’est deuenu le Marquis Dos-Velez
vostre Ambassadeur à Rome & à quoy ont
seruy ses armes & ses menaces, qu’à le faire battre
auec plus d’esclat. Il auoit long temps cherché
l’occasion de nuire à l’Euesque de Lamego
mon Ambassadeur, & aposté pour cét effet quantité
de soldats & de bandis outre ses gardes ordinaires.
Enfin luy estant allé au deuant à dessein
de l’attaquer, il tomba dans le piege qu’il auoit
dressé à l’autre. En effet, comme il eut fait dire
auec son arrogance naturelle, au cocher de cét
Euesque de s’arrester, pensant prendre ainsi mon
Ambassadeur qui venoit du Palais de celuy de
France, accompagné seulement de ses domestiques,
& de ceux du Marquis de Fontenay Maroüil ;
non seulement il ne pust vaincre ce Prelat,
mais il eut bien de la peine à se sauuer, laissant
beaucoup de ses gens sur la place. Enfin ce
Phaëton de Castille vit renuerser son carrosse sur
luy apres qu’on luy eust tué ses cheuaux, & cét

-- 33 --

orgueil qui croyoit escalader le Ciel, rampa contre
terre. La crainte neantmoins luy donna des
aisles pour se sauuer, mais son carrosse, ses cheuaux,
& treize Castillans tuez sur la place, outre
vingt qui furent blessez, demeurerent sur la rüe
iusques au lendemain ; de telle sorte que les
corps morts, & les despoüilles des ennemis empescherent
lors l’Euesque de Lamego de passer
outre dans son carrosse. Ha ! Phaëton, Phaëton,
quelle manie t’auoit pris en cette occasion, pour
t’abaisser ainsi par ton propre orgueil ? Tu te retires
trop tard vers la ville d’Aquila, les aisles de
l’Aigle ne te peuuent guere seruir, veu que les
seuls rayons de Portugal t’ont à demy bruslé.
L’apprehension te fait fuïr apres auoir offencé
le Sainct Pere, dont tu as profané le Sanctuaire,
mesprisé la Cour, violé l’Azyle, & choqué l’Authorité
aussi bien que l’Immunité de tous les
Romains, qui ont esté tesmoins de ta honte
de mesme que de ton crime. Ce sont des stratagemes
ordinaires de vos Ministres, ô Roy Catholique,
voyez ce qu’on fait en la personne de
Dom Edoüard, & sçachez qu’ainsi que l’Orateur
Romain a remarqué, rien de ce qui est cruel ne
peut estre vtile.

 

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LES PROCVREVRS DV ROY
de Castille.

MA plume s’arreste icy aussi bien que
ma langue, d’horreur qu’elle a de publier
que les traistres ont esté Portugais.
L’vn c’est Dom Francisco de
Mello, qui estant né fort pauure, fut nourry premierement
dans la maison de Bragance, & qui
ayant long-temps seruy d’Agent à Madrid, pour
cette maison Royale, fut depuis en faueur parmy
les Castillans. Là s’estant conformé aux mœurs
aussi bien qu’à l’arrogance des Espagnols, il degenera
de sa premiere gloire, & quitta le party de
Portugal pour suiure celuy de Dom Philippe.
Enquoy certes Dom Iean IV. n’a point de sujet
de porter enuie au Roy Catholique. C’est ce Ministre
qui acheta & qui liura l’innocent ; luy, disje,
qui est vn renard en apparence, mais qui a
vn cœur de loup, & vne ame d’ours. L’autre c’est
sa vraye image aussi bien que son Collegue, à
sçauoir Dom Emanuel de Moura Cortereal, de
qui les ancestres auoient long-temps seruy les
Ducs de Bragance, & qui ont eu ce deshonneur
de voir Dom Edoüard trahy par vn de leurs descendans.
Celuy dont ie parle offrit de l’argent

-- 35 --

pour le sang & pour la liberté de l’innocent. Ils ont
beau se vanter tous deux d’estre nez d’vne extraction
illustre, veu qu’en degenerant de la vertu de
leurs deuanciers, s’ils en ont eu de considerables,
ils ont renoncé à leur noblesse, ou plustost la noblesse
a renoncé à des sujets si vicieux. Ils sont armez
contre leur patrie, ils brauent leur Roy naturel,
& leur Seigneur legitime, pour adorer les oignons
d’Egypte ; enfin ces partisans de Babylone
mesprisent Sion. Mais ces idolatres du veau d’or de
Castille, ne pouuoient-ils pas seruir Dom Philippe,
dont le nom est aboly dans le Portugal, sans faire
souffrir plusieurs martyres à Dom Edoüard ? Ne
pouuoient-ils pas suiure le party des ennemis de
leur païs, suiuant leur mauuaise conscience, sans
persecuter ainsi l’innocent. Mais ie voy bien qu’vn
abysme les pousse dans vn autre, & que leur trahison
temporelle les menace d’vn supplice eternel.
Des criminels de cette nature ne peuuent estre
bien punis qu’en l’autre monde.

 

DES PROCVREVRS DV ROY
de Hongrie.

FRERE Diego de Quiroga Confesseur
lu Roy de Hongrie, a esté l’vn de ses
Procureurs en ce contract, & la reuerence
de la Religion aussi ; bien que la modestie

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me permettra de ne l’espargner pas tout à fait, puis
qu’il n’a point espargné du tout, ny la modestie ny
la Religion Dieu immortel ! ie parle d’vn Moine,
qui bien loin d’interceder pour la liberté de Dom
Edoüard, comme pour vne œuure pleine de pieté,
& de prendre le party de la iustice en cette belle occasion,
fut le premier à moyenner son emprisonnement,
& à mettre l’innocence à prix d’argent.
En vn mot, c’est luy qui fit vn esclaue d’vn Prince.
Mais faut-il s’estonner de cét attentat, si l’on
considere que ce Religieux a bien commis d’autres
fautes dans la maison du Roy de Hongrie,
comme tout le monde le sçait, bien que tout le
monde s’efforce de le cacher. Enfin ce n’est pas
l’amour de Dieu qui gouuerne le cœur de ce Confesseur
conscientieux, c’est vn Cupidon profane
dont il a fait son idole. L’autre qui a stipulé dans
ce marché prodigieux dans le Christianisme, c’est
le Docteur Nauarre Secretaire de la Reine de Hongrie,
homme de neant, & issu d’vn costé de la lie
du Christianisme, & de l’autre de la derniere. Tribu
du peuple Iuif. Sa femme tient de son humeur aussi
bien que de sa condition, & ils sont tous deux en
reputation d’adorer des Dieux d’argent, n’ayant
point de foy que pour la fausser, ny d’autre Religion
que l’impieté.

 

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DV PRIX DE LA VENTE.

PVIS QVE le Roy de Hongrie vouloit
vendre la iustice, il pouuoit la vendre au
Prince vendu mesme. Dom Edoüard
luy pouuoit donner plusieurs millions
d’or pour le prix de sa liberté, au lieu que l’auarice
aueugle de ce Roy, n’a receu que trente mille Richedales
en argent content, & dix mille en obligation.
Il a égalé la malice de Iudas pour le son de
l’argent conté, mais il l’a surpassée pour la quantité
aussi bien que pour le credit qu’il a fait. Au reste, il
n’est pas licite de mettre ces deniers dans la bourse,
pource que c’est vn prix de sang, il faut donc acheter
vn champ pour la sepulture des Pelerins, ie veux
dire des Princes, qui venant en Allemagne pour y
combattre, y trouueront plustost la mort chez leur
hoste que chez l’ennemy. Ce champ prendra son
nom du sang, il est vray que les crimes du Roy de
Hongrie n’ont fait de toute l’Allemagne, qu’vn
lieu de sang & de carnage.

Mais enfin, où est-ce que nos tyrans ont mené
Dom Edoüard : Ils me diront que c’est dans la Duché
de Milan, pour estre là sous la iurisdiction du
Roy de Castille. Si l’Italie & Milan sont esloignez
de Lisbonne, qu’ils se souuiennent que la Castille
est voisine du Portugal, & que Iean I. du nom,

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s’estant ietté sur les Castillans pour auoir emprisonné
vn autre Infant, & ayant donné la chasse à
leur Roy, apres auoir entierement defait son armée,
Dom Iean IV. n’est pas moins puissant, ny moins
genereux, ny moins offencé. Allubarrotta subsiste
encore aussi bien que cette fameuse pesle du four.

 

Dom Iean IV. vit dans vne santé esgale à son
bon heur, & à sa gloire ; le Portugal reuit depuis
trois ans, & pour deliurer l’Infant enchainé, il n’y
a point d’homme dans tout le Portugal qui ne deuienne
vn vray Mars, ny de femme qui ne veüille
estre vne Bellonne.

Mais à present que les Castillans tiennent ce
Prince à Milan, & qu’ils l’ont à leur discretion, ie
les prie de me respondre, & de me dire de quelle
mort est decedé leur Prince Dom Carlos, fils de Philippe
Il surnommé le Prudent ; il est certain qu’il
est mort de poison. Dom Iean d’Austriche frere du
mesme Roy, ne mourut-il pas par mesme voye : Ce
ne fut pas vne infirmité affectée qui fit mourir Dom
Carlos, frere de Dom Philippe IV. mais vne meschanceté
couuerte ; Et le bruit n’est-il pas que l’Infant
Cardinal n’a pery dans la Flandre que pource
que les Castillans l’y ont aydé à mourir Plusieurs
Rois de France, plusieurs Princes d’Allemagne sont
ainsi morts par les secrettes intelligences, & par les
pieges ruineux de la maison d’Austriche, qui ne
pouuant se défendre par la force ny par la gloire, se
defend par la foiblesse & par la malice. Les Chroniques

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de l’Antiquité aussi bien que la memoire
des viuans, seruiront de monument eternel à ces
veritez funestes. La mort de Dom Federic de
Tolede, & de plusieurs autres grands Capitaines,
iointe au témoignage d’Antonio Perés Secretaire
d’Estat du Roy de Castille, fait voir les
mysteres de l’Art Chymique que le Conseil d’Espagne
a inuenté, non pas pour guerir les hommes,
mais pour les tuer. Or puis que les Castillans
n’ont pas espargné leurs Infants, leurs Princes ny
leurs Generaux d’armée, que doit attendre vn Prince
Estranger qu’ils regardent comme ennemy ? Ce
n’est donc pas sans raison que Dom Edoüard de
Portugal, proteste icy deuant Dieu & deuant tous
les Princes fideles & infideles, & deuant tous les
Estats ciuilisez & barbares ; en vn mot, deuant le
Ciel & la terre, de tous les dangers que sa vie peut
courir entre les mains du Roy Catholique, & de
ses Ministres.

 

FIN.

Les curieux le trouueront en langue Espagnole chez
le mesme Libraire.

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Section précédent(e)


Anonyme [1643], LE PRINCE VENDV, OV CONTRACT DE VENTE DE LA personne du Prince libre & innocent DOM EDOVARD INFANT DE PORTVGAL, passé à Vienne le 25. iour de Iuin 1642. OV FVRENT PRESENTS Le Roy de Hongrie comme Vendeur. Le Roy de Castille comme Acheteur. ET STIPVLANS DANS LE CONTRACT POVR LE ROY DE CASTILLE. Dom Francisco de Mello Gouuerneur de ses armées en Flandres. Dom Emmanuel de Moura Cortereal, son Ambassadeur en Alemagne. Pour le Roy de Hongrie. Frere Diego de Quiroga Moine, son Confesseur. Et le Docteur Nauarre Secretaire de la Reine de Hongrie. Le tres-haut Prince & Infant Dom Edoüard, frere du Serenissime Roy de Portugal Dom Iean IV. a esté vendu au prix de 40000 Richedales. TRADVIT DE L’ESPAGNOL. , françaisRéférence RIM : Mx. Cote locale : C_6_66.