Anonyme [1652], HISTOIRE DE MAGDELAINE BAVENT, Religieuse du Monastere de Saint Loüis de Louviers. Avec sa Confession generale & testamentaire, où elle declare les abominations, impietez, & sacrileges qu’elle a pratiqué & veu pratiquer, tant dans ledit Monastere, qu’au Sabat, & les personnes qu’elle y a remarquées. Ensemble l’Arrest donné contre Mathurin Picard, Thomas Boullé & ladite Bavent, tous conuaincus du crime de magie. DEDIÉE A MADAME LA DVCHESSE d’Orleans. , françaisRéférence RIM : M0_1640. Cote locale : B_5_56.
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du S. Sacrement, quoy que je ne les aye jamais veu
marquer ; & Anne Barré, bien que tres-peu de fois, dans le temps
de mes derniers enlevemens : Et je ne m’estonne pas si apres que
ma chambre fut fermée à la clef, elle ne laissa pas de m’y venir lire
le papier dans ma chambre, lors que je n’allois plus au Sabat, parce
qu’on ne me venoit plus appeller ; vn nommé Des-hayes Chirurgien,
qui me toucha vne fois sur la teste avec vn petit fer chaud,
ce qui me fit promptement retirer de luy, crainte qu’il ne me
marquast, comme pour le mesme sujet je me retiray vne fois de
Picard, qui me touchoit de la main sur les reins au côté droit pretendant,
à mon avis, me marquer : si bien que je ne pense pas avoir
esté marquée.

 

I’ignore les noms de tous les autres que j’y ay pû voir, & ne les
connois que de visage. Ie ne parleray que de deux en particulier,
de ceux-cy, parce que j’ay remarqué qu’ils avoient vn grand pouvoir
dans l’assemblée : L’vn est vn certain hõme vestu de violet,
âgé de cinquante ou soixante ans, de poil noir meslé de gris, de
moyenne taille, assez fourny de corps, mais fort incommodé des
jambes : L’autre est certaine fille ou femme, de laquelle on m’a
toûjours obligée à dire tout ce que j’en sçavois, à cause que les
Religieuses dans les exorcismes ont dit, & publié, que c’estoit la
petite Mere Françoise ou Simonette de Paris. Ie ne le sçay
point, puis que jamais on ne me l’a nommée au Sabat, & que je
ne l’ay point veuë en ce Monastere qu’elle a fondé. Il faudroit
que je la visse entre plusieurs autres, afin d’éprouver si je la reconnoîtrois.
Quant à celle dont je fay mention maintenant, elle
estoit vestuë d’vne tunique blanche, paroissoit plus petite, plus
brune, plus âgée que moy, & marchoit avec incommodité, &
comme boiteuse. On la consideroit & honnoroit beaucoup, & je
croy qu’on luy demandoit avis de tout : au moins la faisoit-on
venir prés de l’Autel, où on luy parloit assez long-temps, & fort
bas. Ie ne croy pas l’avoir veuë en mon premier enlevement,
mais seulement aux autres qui ont suivi. Le Vicaire Boullé étoit
son amy, la recevoit, la tenoit par la main, la conduisoit, & ils se
faisoient de grandes carresses. Il y a plusieurs années que Boullé
ayant esté marqué avec vn petit fer chaud au Sabat par vn Prestre,
à l’endroit où les Chirurgiens ont rencontré la marque, il le
dit auparavant à celle-cy ; & ajoûta, qu’il falloit qu’elle se fist



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