Anonyme [1649 [?]], FACTVM, SERVANT AV PROCEZ CRIMINEL FAIT AV CARDINAL MAZARIN. touchant ses intelligences auec les Estrangers ennemis de l’Estat. , françaisRéférence RIM : M0_1368. Cote locale : D_1_33.
page précédent(e)

page suivant(e)

-- 3 --

Clanleu ne fut pas mis en prison, mais bien à couuert dans la Citadelle
d’Amiens, afin que les cris & les reproches que luy faisoiẽt
desia vne infinité de personnes de tous sexes & conditions, pour la
honteuse playe qui venoit d’estre faite dans Dixmude à l’Estat &
à la reputation des armes du Roy, ne luy fissent perdre patience, &
declarer pour sa descharge les ordres qu’il auoit eus de faire ce
qu’il auoit fait, il fut bien traitté dans la Citadelle d’Amiens, en
sortit comme il y estoit entré, braue Caualier & bon François.

Ces mauuaises intelligences des Mareschaux de Gassion & de
Ranzau estant si publiques, que non seulement les Officiers, mais
tous les soldats de leur armée les en blasmoient, le Mareschal de
Gassion declara plusieurs fois & follement, que le Cardinal Mazarin
non seulement les fomentoit, mais les ordonnoit pour destruire
toutes les bonnes dispositions qu’il y auoit pour les prosperitez
de la France, laquelle il vendoit à l’Espagne : le Mareschal
de Ranzau qui suiuoit les ordres de ce grand Ministre, se laissa
quelquefois entendre en cette conformité, pestant contre soyme
d’estre forcé à faire la guerre tout autrement qu’il n’auoit appris,
& qu’il ne se deuoit faire.

Pendant cette campagne de 1647. le Prince de Condé fut enuoyé
en Catalogne, pour y conquerir toute l’Espagne, non selon
l’apparence, mais selon l’esperance que le Cardinal Mazarin luy
en donnoit, lequel aussi fin & meschant, que le Prince est genereux
& vaillant, luy ayant persuadé cet employ, luy fit accroite que la
porte de toutes les conquestes souhaitables, & de la gloire à laquelle
ce Prince a tousiours visé, estoit Lerida ; Qu’il falloit aller
droit à cette place, sans s’amuser ailleurs quelques bonnes dispositions
& apparences de meilleurs succez qu’il y peût auoir.

Cela resolu entre le Prince & le Cardinal, afin que ce secret de
deux le fust parfaitement, & ne pût estre descouuert que par l’vn
d’eux. Il se trouua pourtant dans Lerida vne armée presque aussi
forte que celle de ce Prince, sans qu’il y eust de trouppes dans aucune
des autres places que le Roy Catholique a dans la Catalogne,
qui les peusses deffendre si elles eussent esté attaquées, parce
qu’on sçauoit bien en Espagne qu’elles ne le seroient pas, & qu’on
ne deuoit s’attacher qu’à Lerida, que ce Prince assiegea vaillamment,
la considera prudemment ; & l’ayant bien reconnuë, & plusieurs
autres choses, ensemble qu’il pourroit dire, s’en retira heureusement,
sans tomber dans le piege qu’on luy auoit tendu.

Toutes les choses que le Cardinal luy auoit d’ailleurs promises,



page précédent(e)

page suivant(e)