Davenne, François [?] [1650], LETTRE PARTICVLIERE DE CACHET envoyée par la REYNE REGENTE A MESSIEVRS DV PARLEMENT. Ensemble vne response à plusieurs choses, couchées en la Lettre envoyée au Mareschal de Turennes, & aux avis donnez aux Flamans. , françaisRéférence RIM : M0_2250. Cote locale : C_3_9.
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de leur ancienne pauureté apres s’estre injustement esleuées iusques
aux nuës, comme des pyramides d’Egypte, auec le vol des
materiaux de celles de tous les peuples, qu’elles ont rẽuersé dans
son pourpris ? cela estonne tout l’Vniuers, le Soleil en deuroit
faire vne Esclypse, & les pierres s’en fendre de compassion. Pour
moy quand ie considere que le Roy est contraint de mandier de
Prouince en Prouince, auec vne spitte qui semble la Tragicomedie
funebre de quelque débris, & que les Gardinaux & leurs parents
menent dans le Royaume vn train de Souuerains ; i’aduouë
que cela me rauit. Ie voy reuiure les Fables d’Ouide és maisons
de leurs niepces, & de leurs nepueux, le superbe heroïque desquelles,
afin d’auoir les Deesses Pour riualles, s’estend iusques
aux Temples de malediction, lesquels leurs oncles ont fait bastir
du sang des pauures, pour y benir, Dieu. On y adore leurs
Idoles langées en les admirant, & de toute mon ame ie les y deteste,
auec vne religieuse horreur.

 

Remarquez vn peu, MESSIEVRS, en que l’estat sont ceux que
vous tenez pour Roys, & les Princes du Sang ! ie vous le representeray
cy-apres avec des termes simples & communs, car toute
l’eloquence du monde, quand elle seroit plus mouuante que
les vagues d’vne mer agitée, ne sçauroit suffisamment exagerer
le peril où tout est reduit, si vous n’y remediez tost. Prothée,
qui auoit tant d’adresse à contrefaire mille diuers personnages,
pour donner des mouuemens aux esprits, seroit au bout de son
roület, & ne sçauroit plus qu’elle posture tenir sur vn theatre où
la lascheté & l’aueuglement vont du païr. Ie vous laisse de bon
cœur perdre, si, apres auoir surpassé mon ame afin de vous monstrer
les voyes du salut, vous surmontez vous esprits afin de rejetter
les moyens de vous sauuer. Ie ne m’oblige pas à vn impossible
pour forcer vostre volonté malgré vous, cét à vous de faciliter
vn repos au public qui vous redondera, sans lequel, Dieu vous
abandonne à la mercy de vos ennemis.

Voila la seuerité en laquelle la Iustice est maintenant obligée
enuers l’estat. Elle vous a suscité mille bouches pour vous instruire
auec leurs paroles, & vous illuminer de ses brillans ; mais
voyant qu’elle n’auance rien afin de vous faire releuer ses sentiers,
parce que vous rendez tous ses soins inutiles ; elle est contrainte
de dire, cõsiderant que l’Arche de cette Monarchie se dépece,



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