Anonyme [1649], L’ESTROITE ALLIANCE ou la ionction du Parlement de Bretaigne & des trois Estats de la Prouince auec le Parlement de Paris. , français, latinRéférence RIM : M0_1309. Cote locale : A_3_25.
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Tout le monde sçait, que sa Maiesté s’est laissée conduire par
des esprits de cette trempe, qui des tenebres de leur aueuglement
ont obscurcis les beaux rayons de zele & de fidelité
qui auoient tousiours parus sur son visage : si elle à violé sa parole,
voulant anneantir la derniere Declaration, c’est que ces
chiens imperieux (c’est ainsi que Diogenes appelloit Aristippus
homme de cette engeance du regne de Dyonisius) ont
peruertis son bon naturel, & si les tesmoignages d’amitié & de
bien veillance qu’elle auoit donnée publiquement pour la
ville de Paris sont maintenant conuerties en pure perfidie,
c’est que ses mauuais Conseillers abusent de son authorité &
de sa volonté.

 

Sa Maiesté estoit trop éclairée pour ignorer que l’integrité
de sa foy & de sa parole fut le plus ferme soustien de son
Sceptre, elle sçauoit bien le peu d’estime qu’on fait d’vne
personne, dont la parole est aussi inconstante que le vent, &
qui a tousiours de belles paroles en la bouche, sans en venir
iamais à l’execution : la fidelité, dit le Prince de l’eloquence
Latine en ses offices, n’est appellée de ce nom que pour nous
monstrer que ce qui a esté arresté doit estre executé sans delay.
Dicta quidem est fides, quoniam fiat quod dictum est, Marcus
Attelius a donné vn bel exemple de cette verité, qui a appris à
toute la posterité qu’il faut garder la foy mesme aux ennemis,
combien donc plus raisonnablement à nos amis.

Iosué & les Princes d’Israël ayans fait alliance auec les Gabaonites,
qui les auoient trompez, & inuestis par fraude ; ayant
appris la verité du fait ne voulut iamais violer son traité, ny
exercer sur, les Gabaonites aucun acte d’hostilité, quoy que
tout le peuple les voulut assommer. Voila combien a esté sainte
& inuiolable la foy donnée parmy les Anciens ; C’est pourquoy
le Roy Ezechias est accusé d’auoir violé ses promesses,
car apres auoir protesté de son seruice au Roy de Babylone, &
de luy payer tous les ans vn tribut, il ne garda pas sa foy ; &
pour punition de son infidelité, il treuua en sa propre ruine celle
de tout son Royaume.

Personne ne pretend que les Princes soient dans l’impuissance
de retracter leur parole. Ils le doiuent faire, quand ils l’ont
engagée pour des causes iniustes, & contraires aux Loix diuines



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