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« L’exploration des mazarinades », le livre physique & numérique

L’équipe des Recherches Internationales sur les Mazarinades (RIM) a publié en décembre 2021 en version papier et en février 2022 en deux versions digitales les actes du colloque L’exploration des mazarinades qui s’était tenu en novembre 2016 à l’Université de Tokyo.
Il s’agit d’une édition bilingue procurée par Tadako Ichimaru, avec des textes français revus par les auteurs et édités par Patrick Rebollar (voir sommaire ci-dessous), précédés des versions traduites en japonais par Yuko Nakatsumi (voir sommaire en ligne). L’édition originale est constituée de 100 exemplaires couleur sur papier glacé, format 21 × 29,7, avec illustrations, non disponible en librairie ; l’édition numérique disponible sur les plateformes de vente depuis le 11 février se présente en deux versions : l’une dite « fixe » (フィックス版) reproduit le livre physique pour une expérience de lecture classique, l’autre dite « reflow » (リフロー版) propose une expérience de lecture adaptée au type d’appareil et aux choix de l’utilisateur, permettant également d’utiliser les liens hypertextes contenus dans le livre. Dans leur version originale française, ces textes étaient déjà disponibles en ligne sur ce site depuis 2017 (voir notre page édition).

Fondée en 2008 par Tadako Ichimaru (Univ. Gakushuin) et Patrick Rebollar (Univ. Nanzan), l’équipe RIM avait d’abord numérisé, transcrit et mis en ligne dans le présent site du Projet Mazarinades (PM) l’intégralité des quelque 2700 pièces qui constituent la collection que l’Université de Tokyo avait acquise dans les années 1980. Par la suite, elle a coorganisé en 2015 le premier colloque de Paris sur les mazarinades, en collaboration avec la Bibliothèque Mazarine et la Bibliothèque de l’Arsenal, intitulé Mazarinades, nouvelles approches (voir publication chez Droz), puis celui de Tokyo dont il est ici question, recentré sur l’utilisation du corpus en ligne du PM. Un nouveau colloque, Mazarinades et territoires, est en préparation pour septembre 2022 à l’Université de Rouen, autre grande place de l’édition au XVIIe siècle…

Car si le temps de la Fronde ne ressemble pas à notre début du XXIe siècle, ces deux époques s’inscrivent fortement dans l’histoire de l’édition comme dans celle de la contestation, liées toutes deux à de profonds changements de nos sociétés.
Dans le contexte complexe d’une Guerre de Trente Ans finissante, de querelles religieuses, de velléités parlementaires et de fragile légitimité d’un trop jeune roi que secondaient une régente et un principal ministre étrangers, l’édition de libelles de toutes sortes devint un phénomène socio-culturel qui dura cinq ou six ans et dont l’importance est aujourd’hui clairement reconnue — après avoir été invisibilisée par le Roi Soleil, raillée par Voltaire et méprisée par des historiens légitimistes qui la réduisaient aux seules pièces obscènes, et avant que l’importante Bibliographie des Mazarinades de Célestin Moreau de 1850-51 n’ouvre l’ère moderne de l’étude des mazarinades (voir définition de H. Carrier). Ces documents, qui sont aujourd’hui dans nos bibliothèques et sur nos écrans d’ordinateur, ont donc été fabriqués et distribués il y a plus de trois siècles dans des conditions rocambolesques, si l’on permet cet anachronisme, et en s’affranchissant pour la plupart des lois en vigueur. Ces fascicules bon marché ont alors été acquis, lus et conservés par des contemporains lettrés, qu’ils aient été d’accord ou pas avec leurs contenus. Certains de ces propriétaires les ont bellement fait relier tandis que d’autres les ont gardés dans des boîtes protectrices ; c’est ce qui nous a permis d’en conserver une grande partie jusqu’à aujourd’hui. Pourquoi avoir fait cela si ces libelles étaient sans valeur ? Précisément parce qu’ils n’étaient pas « sans valeur » pour eux, qu’il s’agisse de valeur littéraire, historique, sociologique ou médiologique ; raison pour laquelle ils ne sont pas non plus « sans valeur » pour nous.

Cette histoire de la production et de la conservation des écrits dans des conditions socio-politiques difficiles résonne pour nous étrangement avec la situation actuelle de l’édition et de la diffusion des textes. Les temps ne sont pas comparables, nous l’avons dit, mais la profusion de la production et des moyens de diffusion, l’invention de nouvelles méthodes d’édition et de distribution ainsi que la diversité des façons de lire font écho aux expériences des contemporains de la Fronde. Des contextes politiques tendus créent, avec des moyens différents, une semblable inventivité éditoriale et cette toujours forte volonté de certains d’informer, de désinformer, de railler, de prétendre comprendre et de vouloir le faire savoir.

Patrick Rebollar, février 2022.

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Sommaire des articles en français :

  • « Le mot du bibliothécaire », par Yann SORDET (dir. Bibliothèque Mazarine)
  • « Au lecteur », par Patrick REBOLLAR (Université Nanzan, Nagoya)
  • « Les mazarinades et leur étude aujourd’hui : la place du Japon », par Tadako ICHIMARU (Université Gakushuin, Tokyo)
  • « Sérendipité des millions dans le corpus du Projet Mazarinades », par Patrick REBOLLAR (Université Nanzan, Nagoya)
  • « Sur quelques dérivés du nom Mazarin », par Takeshi MATSUMURA (Université de Tokyo)
  • « Mazarinades et presse périodique à l’époque de la Fronde : pour une réévaluation », par Jean-Dominique MELLOT (Conservateur général à la Bibliothèque nationale de France, service de l’Inventaire rétrospectif)
  • « Le langage de l’information dans les libelles du Projet Mazarinades », par Stéphane HAFFEMAYER (Université de Caen)
  • « Gondi, le cardinal de Retz, le coadjuteur ou le Mazarin corinthien : de quelques représentations d’un acteur de la Fronde », par Myriam TSIMBIDY (Université de Bordeaux Montaigne)
  • « Exploration des emplois du mot « société » dans les mazarinades. Affleurement d’un nouveau nom du tout politique ? », par Morvan PERRONCEL (Université Chūkyō, Nagoya)
  • « Un topos à revisiter dans les mazarinades : la question des régimes politiques », par Éric AVOCAT (Université d’Osaka)
  • « Passages de la violence dans le corpus du Projet Mazarinades », Melaine FOLLIARD (Aix-Marseille Université)

Notice bibliographique :

L’EXPLORATION DES MAZARINADES / マザリナード探求 » [Mazarinādo tankyū], édité par Tadako ICHIMARU, textes établis par Patrick REBOLLAR et traduits en japonais par Yuko NAKATSUMI [actes du colloque éponyme du 3 nov. 2016 à l’Université de Tokyo], Tokyo : Projet Mazarinades, déc. 2021, 193 p., ill. coul. et n. & b.
En japonais : p. 2-126 + p. 188-193 ; en français : p. 127-187.
Les illustrations en couleur sont issues de l’exposition consacrée à la collection de mazarinades de l’Université de Tokyo tenue au Musée Komaba de l’Université de Tokyo du 15 octobre au 4 décembre 2016.

Nota Bene :
Pour référencer une éventuelle citation de ce livre à partir de l’édition numérique, il est recommandé de préférer l’édition dite « fixe » (dont la pagination est fixe, donc, et pérenne) plutôt que celle dite « reflow », dont les chiffres de pagination dépendent de la largeur d’écran et de la taille de caractères choisies par l’utilisateur.

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